Traque Nocturne

Moi, c'est Merlin. Je vis dans un petit quartier tranquille depuis toujours. Je connais tous les voisins du coin, ils sont sympathiques. On prend souvent le temps de discuter, d'échanger des nouvelles ou encore jouer. Et malgré ma confiance en eux, il y a un secret que je garde. Un secret que je n'ai jamais avoué, et qui n'a pourtant rien d'inhabituel.

Toutes les nuits, je me transforme. Je ne suis pas fou, loin de là, mais dès que la lune s'élève, je me découvre une cruauté qui ne s'éveille que lorsque vient le soir. Dès lors que la nuit inonde notre quartier, alors à mon tour je ne suis plus qu'une ombre. Mouvante et agile, je me fonds dans les ténèbres. Mon esprit se métamorphose, et je ne suis plus moi-même. Mon corps tout entier me démange, dans l'unique but de satisfaire une soif de sang. Et lorsque le soleil reprend ses droits, mon esprit s'apaise. C'est un phénomène étrange qui se produit depuis que je suis né. Tous ceux qui sont comme moi subissent ce phénomène qui fait de nous des monstres. Elle n'est pas un danger pour nous, mais pour les autres, si. Et pourtant, on continue de raconter que certains ne sont plus frappés par cette malédiction.

De ce que je sais, une rumeur s'est répandue au sujet des monstres que nous incarnons. Ainsi, on raconte qu'à la nuit tombée, si on était attentif on pouvait voir des ombres solitaires se déplacer dans la nuit. Il semblerait que ces ombres chassent, quoi ? Nul ne le savait, ou personne n'osait l'avouer. Les yeux ambrés de ces créatures brillaient de mille feux, concentrant dans leur regard toute la lumière environnante. Ces bêtes possédaient une fourrure sombre, de longues griffes tranchantes luisant dans les rayons lunaires, et elles traquaient inlassablement leurs proies. Personne ne s'en inquiétait vraiment, après tout ce n'était qu'une rumeur.

Justement, alors que je regarde par la fenêtre en rêvant, le soleil se couche. La chose en moi se réveille, et me mène jusque dehors. Je m'assois sur l'une des marches d'escalier juste devant la porte de la maison, et attends de voir la lune montée dans le ciel. Je ne la quitte pas du regard, elle est déjà visible vers l'horizon, et juste en la voyant, je sens la soif de sang monter. Je me relève, n'en pouvant plus d'attendre, et fais un tour dans le jardin. Je commence par faire les cent pas, tout en surveillant ce qu'il se passe chez mes voisins. Je préférais qu'ils ne me voient pas dans ces moments-là. Je n'allais pas tarder à chasser, et je n'avais pas besoin de témoins.

La lune était haute, et les ténèbres s'étaient installées. A partir de maintenant, j'étais un chasseur. Ma fourrure m'empêchait de ressentir la fraîcheur de la nuit. Mes griffes aiguisées étaient mes armes. Et je devais satisfaire ma faim grandissante. Tapis dans les ombres, je cherchais la proie idéale. L'obscurité ne me dérangeait nullement, je voyais aussi bien qu'en plein jour. Je réfléchissais au meilleur endroit pour me nourrir, mais un cri résonna jusqu'à moi, me sortant de mes pensées. Je me crispais, attentif à ce qui se passait autour de moi. Était-ce l'un de mes voisins ? M'avait-il repéré ? J'étais prêt à parier que non, mais je ne voulais pas prendre le risque d'être découvert. Alors tapi dans l'herbe, et espérant que les herbes hautes me cachent suffisamment, j'attendais patiemment. Mon cœur battait la chamade, mes griffes me démangeaient mais je ne devais pas bouger. Elles étaient tout de même sorties, prêtes à être utilisées s'il le fallait. Au loin une chouette hululait, pas assez fort pour m'empêcher d'entendre des pas se rapprocher dangereusement. Je ne savait pas d'où ces sons venaient, si je me trompais de direction j'allais me faire avoir ! Il ne fallait pas, je ne devais pas être découvert.

Le cri se répéta, plus distinct cette fois, et surtout reconnaissable entre mille. Un enfant, pensais-je. Mon instinct de chasseur prit le dessus, et je me remis en chasse, toute crainte envolée. Je rampais jusqu'à la source sonore, tout en restant prudent.

Il fallait que je mange, un enfant ne suffirait pas, mais j'allais certainement devoir m'en contenter. Si mes sens ne me trahissaient pas, il devait être seul, dehors. Le crime parfait. Les herbes me chatouillaient alors que j'avançais, j'y étais presque, je pouvais sentir son odeur alléchante jusqu'à moi. Je le voyais enfin, jouant dans l'herbe, il était effectivement seul. Si petit et innocent, j'en avais l'eau à la bouche.

Sans attendre, et dans un élan de confiance, je bondis sur l'enfant. Mes griffes le bloquaient alors qu'il poussait un gémissement à fendre le cœur. Ce cri attira quelqu'un. Je ne devais pas être vu, mais c'était trop tard pour faire marche arrière. Félix surgit derrière moi, ses yeux ambrés arrondis par la surprise. Il regardait l'enfant sous mes griffes, et sans en détacher son regard surpris, il me félicita.

« Belle prise ! ronronna-t-il. Alors tu es de ceux qui aiment chasser le soir ?»

Je l'ignorais et reportais mon regard sur la souris qui avait cessé de se débattre. J'avais de la chance qu'il ne soit arrivé que maintenant, il ne pouvait plus me voler ma proie. C'était ma seule crainte, être devancé, et voir la bête que je traquais manger par un autre.

La plupart des chats se mettent en chasse à la nuit tombée, et de tous je suis le plus doué !

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