Lettre à toi
DAEL
Haute-Montagne
MerasEck
À l'attention de OMER
Objet : Ça faisait si longtemps
Ça fait combien de temps qu'on ne s'est pas vu mon vieil ami. Sans que cela soit durant cette fête annuelle, évidemment. Une éternité ? En tout cas, c'est l'impression que j'en ai...
Je t'écris cette lettre pour te dire que tu me manques, que malgré ton absence, je ne t'ai pas oublié.
Je sais pertinemment que c'est une absence forcée.
Je sais que tu ne peux pas vraiment venir avant cette date.
Mais, tu me manques vraiment, tu nous manques vraiment.
Tu es un de mes plus vieux amis et une des rares personnes à qui je peux dire "je tiens énormément à toi" ou "tu es quelqu'un de précieux pour moi", sans aucun problème ni embarras.
Te rappelles-tu au début de nos vies, quand on s'est rencontrés tous ensemble ? Nous étions tous des loups solitaires qui pensions être uniques. Et nous l'étions, chacun à notre manière.
Toi, tu étais le plus rêveur d'entre nous. Tu voyais le meilleur en chacun de nous, nous tirais vers le haut pour que nous devenions à la hauteur de ce que tu voyais, de ce que tu savais que nous pouvions devenir.
Mais, nous n'avons pas réussi à devenir comme ça, hein ? Et nos héritiers ont fait de même...
Les tiens étaient extraordinaires. On les aurait dits sortis d'un rêve.
Ils étaient comme toi, merveilleux, compatissants, généreux, peut-être plus faibles que d'autres, mais leur noblesse d'esprit et leur grandeur d'âme compensait cela de très très loin. Et les nôtres... bon, je suis un peu à part vu que je n'ai pas eu de petits louveteaux à protéger. Mais, je suis bien évidemment aussi fautif de notre éloignement que les autres, peut-être même plus à vrai dire...
Après tout, je vous ai abandonnés, pendant une durée bien plus longue que ce que je n'avais imaginé. Et quand je suis revenu, notre meute soudée s'était divisée en treize...
Je ne comprenais pas ce qu'il s'était passé, une guerre avait éclaté entre nous ? Pourquoi en était-on arrivé là ?
Pour presque rien, c'est bien ça le pire. Pour un simple titre. Pour un titre qui ne peut même pas être réellement conquis en plus...
Et pendant que les autres se cloîtraient dans leur espèce de forteresse mentale avec leurs enfants, tout en tuant pour atteindre leur but, toi, tu n'as pas changé...
Tu n'as pas combattu, alors que tu avais de grandes chances de gagner.
Tu as voulu aider tout le monde et calmer cette guerre, même si tu es celui qui en souffrait le plus.
Tu as choisi la voie du pacifisme et de la gentillesse, pendant que ton cœur saignait, pendant que les tiens mourraient.
Et moi, je n'étais même pas là... Je suis désolé... si désolé...
Désolé d'être parti. Désolé de ne pas avoir été là plus tôt. Désolé de ne pas t'avoir empêché d'aller là-bas. Désolé de ne pas avoir pu venir te voir, même en rêve...
Et je sais pertinemment que si tu étais là, tu répondrais quelque chose comme :
"Tu devrais arrêter de te concentrer sur le passé. Si on a nommé le temps présent "présent", c'est parce que c'est un cadeau qui permet à tous ceux qui rêvent d'avancer vers leurs objectifs. Donc, oublie tes fautes, je te pardonne. Et concentre-toi sur le présent."
Tu es bien trop gentil après tout. Trop gentil pour ce monde ou pour n'importe quel autre.
Tu as failli disparaître, avec toute ta lignée, à cause de la peur de ta force mêlée à une espèce de cupidité.
Et pourtant, tu continues à sourire. Tu continues à nous aider et à nous bénir.
Tu nous as pardonnés et continue à nous pardonner sans regret, comme si c'était naturel pour toi.
Tu es bien trop bon pour nous et c'est pourtant toi et les tiens qui sont bloqués là-bas, sans que nous puissions rien y faire...
Parmi ceux qui assistent à cette fête, nombreux sont ceux qui, le lendemain, nous demandent si tout cela était bien réel. Ils vous prennent pour des rêves ou des cauchemars, des fantômes ou des souvenirs.
Alors, on leur raconte. On leur raconte ce que vous êtes vraiment. Où est-ce que vous êtes et pourquoi. Et lorsque tes arrières-arrière-petits-enfants viendront rendre visite aux nôtres, l'histoire sera sûrement devenue légende.
Mais, les petits loups continueront à venir en ce jour si spécial. Ils continueront à vous attendre les yeux brillants de joie et d'excitation. Et eux aussi croiront, à leur tour, avoir rêvé.
Et ne t'inquiète pas mon cher et vieil ami, tant que j'existe, je serai là.
Chaque année, j'attendrai que l'astre lunaire se lève et que tu arrives. J'aurai à mes côtés nos douze amis, accompagnés de leurs familles. Peut-être un jour, à mon tour, j'en aurai une à te montrer. Et un jour ou l'autre, on finira par être de moins en moins nombreux... Quoique, vu le nombre sans cesse croissant de nos familles, j'ai bien peur qu'on soit facilement remplacés par d'autres.
J'espère juste que nos familles, que dis-je, notre race, n'oubliera jamais ton nom et cette fête. Qu'importe qu'ils oublient les noms et les quelques "exploits" de douze vieux loups solitaires un peu trop bagarreurs, ils doivent se souvenir du meilleur d'entre nous et de sa famille de rêve.
Signé : DAEL
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