Le prince de glace

Je te dédie ce texte Newmoon301208 en retard pour ton anniversaire. J'espère qu'il te plaira... (Je le repost ici afin qu'il soit rangé dans le bon recueil)

Il était une fois, une contrée lointaine et des temps oubliés de mémoire d'Homme, un peuple qui murmurait aux forêts, qui chantait aux ruisseaux et qui dansait pour les cieux et la terre. Ce peuple, aimé de Mère Nature leur confit le secret de la magie et leur offrit l'immortalité.

Les Hommes, émerveillés, les vénéraient et les respectaient pendant de longues années qui se transformèrent en des siècles. Leur deux peuples cohabitaient en paix et en partage. Ils apprirent aux Hommes à écouter le vent qui murmure son chant à leurs oreilles, à apprivoiser l'eau tumultueuse en un calme cours d'eau pour s'y abreuver et cultiver leur champs. Et alors que les Hommes apprenaient, ils leurs offrirent en échange le language. Car le peuple doté de magie n'émettait que des sons indistincts mais aux tonalités douces et enchanteresses aux oreilles humaines.

Pendant de long siècles leur deux peuples s'aidèrent et s'aimèrent. Puis l'humanité évolua, la magie, impossible pour les Hommes devint sujet de jalousie tout comme l'immortalité dont été doté le peuple aimé de Mère Nature. L'Homme se tourna vers la science, avide et s'enlaidissant de rancoeur infondée. La guerre naquit entre les Hommes et les langues et coutumes divergèrent. La religion sortit des entrailles des Hommes pour faire tomber dans l'oubli la magie et le peuple qui les avait tant aidé et aimé.

Mais un Homme n'avait pu oublier cette rancoeur tenace qui noircissait chaque jour un peu plus son cœur malade de briller plus que n'importe quel Homme plus fort qu'aucun autre. Alors cet humain rassembla des fidèles encore et encore. Son travail était méticuleux et il distillait la peur aux Hommes face à ces êtres éthérés et trop inhumains pour lui. Cela lui prit dix ans. Dix longues années à vilipender, à mentir, à fomenter une vengeance aveugle et injuste. Quand enfin sa troupe fut assez conséquente, ils marchèrent jusqu'aux bois où se trouvait le peuple qui vivait de rosée du matin, respirait l'humus de la mousse et se réchauffait des chatoyaments du soleil sur les rivières.

Ce qu'il s'y passa ne fut ni beau, ni noble, ni juste. Les armes pourfendèrent les corps gorgés de soleil et allanguis de sommeil, le miel de leur sang innonda la terre chérie du peuple magique. Le peuple fut décimé pour l'avidité d'un Homme et la peur instillée sournoisement en leur cœur pour les autres. Seuls des larmes bordaient les yeux du peuple éteint, trahi et tué pour un seul et unique Homme. Mère Nature folle de douleur à la perte de ceux qu'elle considérait comme ses enfants, fit naître la maladie, les tremblements de terres, les volcans, les tsunamis. Elle créa des monstres assoiffés de sang qui rôdent la nuit, empêchant les Hommes d'y circuler en toute sécurité, des êtres géants au nombreuses tentacules en mer coulant tout navire voulant aller sur ses flots.

Mais l'histoire qui nous intéresse n'est point leur survit mais l'histoire d'un prince. Un prince seul et timide. Un prince avide de curiosité et désireux d'apprendre. Un prince qui rêvait de magie et d'êtres éthérés. Dans la cité d'Idrissia, notre bon prince y grandit entouré du couple royal et sa jeune sœur aussi extraverti qu'il était discret, aussi lumineuse qu'il était sombre. Il les aimait plus que tout mais son bonheur fût arraché par un homme vil et manipulateur. Car dans tout conte, il y a toujours un évènement terrible et triste. Ce fut au jour de ses quinze printemps qu'il perdit ses repères et sa joie de vivre.

L'homme disparu après son méfait, satisfait d'avoir causé la douleur et fait couler le sang d'êtres innocents. Le prince s'emmura dans le silence froid qu'était devenue sa demeure autrefois si chaleureuse et joyeuse. Quatre longues années passèrent où le prince ne conçu à dire mot, pleurant les siens et dirigeant son peuple d'une main de fer. Son cœur s'était asséché de la joie et glacé de l'amour. Ses gens se mirent à le craindre et le respecter car il n'était pas prince malfaisant ou avide, juste un cœur esseulé dans sa solitude forcée. Il fut alors nommé, dans la plus grande des discrétion, le prince de glace.

Mais les contes ont aussi le don d'être fait pour le triomphe de l'amour et du bonheur. Au printemps de ses vingt ans, le prince perdu dans sa douleur fit une rencontre qui le bouleversa jusque dans les fibres de son âme meurtrie au détour d'un lac. Épuisé par la constante surveillance de ses ministres, il avait prit son fidèle destrier et était parti aux abords de son royaume pour se ressourcer au calme au pied du lac.

Allongé et observant le ciel, il s'amusait à donner des images aux nuages, s'inventant des êtres magiques aux pouvoirs majestueux ou terrifiants. Il y passa un long moment, retrouvant une sérénité qui lui était devenue rare quand le bruit d'un corps se déplaçant dans l'eau attira son attention. Son regard aussi bleu qu'un ciel d'été se figea lorsqu'il vit la forme vivante se mouvoir avec une grâce plus fluide qu'une naïade et plus belle qu'une dryade. L'être vivant l'aperçu à son tour et le temps d'un battement de cil, sembla se figer. L'or du regard l'observait avec une curiosité dévorante teintée d'une appréhension timide. Le prince ne put dégager son regard de ce visage à la peau hâlée et de ces yeux à la couleur irréelle mais envoûtante.

- Qui es-tu souffla le prince à qui la voix était rauque, éraillée par le manque d'élocution de ces dernières années.

L'être pencha la tête sur le côté, silencieux. Était-il muet ? Parlait-il une autre langue ? Malgré ses nombreuses heures d'études, les langues ne furent jamais sa grande spécialité et il s'en voulu à cet instant de ne pas avoir été plus assidu. Alors il pointa un doigt vers lui-même et se présenta.

- Je m'appelle Alexander Gideon Lightwood.

Il pointa du doigt l'être sortit tout droit d'une histoire qu'il aurait pu se créer et attendit. L'apparition sembla saisir ce qu'il cherchait à faire et donna des sons aux tonalités étrangères et imprononçable à l'humain. Le prince se laissa porter par ces sonorités si différentes mais non moins envoûtantes.

- Je ne comprends pas malheureusement. Je suis désolé soupira le prince.

L'être enchanteur s'approcha du rebord et se redressa, ses yeux si atypique fixés sur lui. Le prince rougit jusqu'à la racine de ses cheveux aussi noir que l'ébène face à la nudité inattendue de son vis à vis. Il releva immédiatement les yeux vers le visage hâlé et fut saisi d'émerveillement malgré sa gêne évidente. Ses yeux étaient en amandes douces et au lieu de pupilles rondes comme les siennes elle étaient fendue comme le vieux chat de son château Church. Un vieux chat aigri et pas amical pour un sous mais il faisait comme parti des meubles alors Alexander s'en accommodait malgré les multiples traces de griffes qu'arborrait ses chevilles pâles. Ce regard était le plus beau qu'il n'ait jamais vu de sa vie, et, subjugué, perdit ses mots dans le souffle du vent.

La créature, car il était certain qu'il ne s'agissait là d'un Homme, s'accroupit devant lui, le détaillant avec une curiosité non feinte. Une curiosité douce et qui lui fit ressentir une drôle de sensation dans son ventre. L'odeur des fleurs des bois et de la mûre sauvage emplit ses narines et le prince sut que cette fragrance deviendra sa favorite pour le reste de son existence. Il s'observèrent un long moment en silence, seulement entrecoupé par le bruissement des arbres et le chant des oiseaux. L'instant suspendu entre deux mondes, deux univers diamétralement opposés mais nécessaire aux deux, ils s'apprivoisèrent du regard sous l'hésitation de Mère Nature.

Ils ne virent pas le soleil décliner doucement, apportant lentement la pâleur de la lune et ses êtres effroyables qui l'accompagnaient. Quand les rayons parsemèrent ses teintes de rose et d'oranger, le prince dû se résigner à se lever pour partir rejoindre son domaine. Le cœur lourd, il sourit à l'être irréel.

- Je reviendrais. Seras-tu encore là demain ?

Son organe vital s'accéléra à sa demande et se suspendit à l'attente de la réponse. Il reprit une course folle lorsque la créature semblant comprendre sa demande, hocha de la tête et lui fit un sourire si éblouissant qu'il ne rêvait plus que de le faire sourire à nouveau. Il récupéra sa monture, le cœur un peu plus léger de savoir qu'il le reverrai le lendemain et d'un petit signe hésitant de la main lui fit un au revoir.

Tout au long de son trajet retour, son regard se fit rêveur, ses pensées douces et depuis ce qu'il lui semblait, une éternité, une sérénité et un fol espoir qu'il n'avait plus connue.

Les mois qui suivirent leur première rencontre fut ponctuée de nombreux autres rendez-vous. Petit à petit, le prince apprit à la belle et douce créature des mots humains, le fait de devoir se vêtir pour son pauvre cœur éprouvé par un désir qu'il ne connaissait pas, tandis que l'être vivant lui fit découvrir la magie, lui apprit le murmure des arbres et le chant de l'eau.

- Alexander !

Le prince sourit à la joie transparaissant dans l'intonation chantante de sa douce créature magique. Il descendit de sa monture, le laissant paître à sa guise pendant qu'il réceptionnait le rire musical et le corps svelte de son ami dans ses bras.

- Je sais comment je m'appel en langue humaine !
- Et comment t'appelle-tu douce vision de mon cœur.
- Magnus !
- Magnus...

Il laissa le prénom de son ami rouler sur sa langue, appréciant la texture qu'elle y laissait et le son qu'il chantait.

- Il est aussi doux que ton âme et ta magie mon être enchanteur.

Le rire cristallin et envoûtant réchauffa le cœur gelé du prince. Qu'il aimait ce rire, qu'il aimait la joie qui se peignait sur ce visage fin et innocent de tout maux. Qu'il l'aimait. Mais il n'en avait ni le droit ni la possibilité. Il était prince, enchaîné à ses responsabilités, un humain alors que son tendre fardeaux dans les bras était libre, magique, ignorant de la cruauté des Hommes et sa perfidie. Avec l'élan de son cœur amoureux il déposa un baiser tendre sur la tempe de son ami et le redéposa au sol. Une petite moue attendrissante prit place sur les lèvres fines et rosées de Magnus tel un bouton de rose.

- J'aime tes bras, ils sont fort.

Son cœur fit une embardée avant de galoper aussi vite qu'un étalon fougueux dans les prairies sauvages. Son visage opalin prit la teinte d'une groseille mûre alors que son souffle se perdit dans le chuchotement de la brise estivale. La spontanéité et l'innocence de sa douce créature le torturait délicieusement régulièrement.

- Mais je n'aurai pu t'offrir le présent que je t'ai porté dit avec douceur le prince.
- Un présent ? Qu'est-ce ?

Les yeux dorés brillèrent de curiosité et d'impatience, lui faisant oublier un instant comment respirer. Quand il reprit contenance, le regard candide le fixait avec fébrilité qui lui réchauffa une fois de plus son âme torturée.

- Un cadeau. Quelque chose que j'aimerai que tu gardes et je l'espère, te plaira.

Il sortit de sa sacoche accrochée à sa selle, un morceau de bois taillé.

- Ceci est une flûte de Pan. Quand une caravane de marchand est passé la veille, certains d'entre eux en jouaient et la mélodie m'a rappelé les sons de ta langue, mélange entre le souffle du vent, la caresse de l'eau et le chant ingénu de la vie.

Magnus effleura du bout de ses doigts l'instrument avec une telle délicatesse et de révérence que le prince sentit sa gorge se serrer de vives émotions.

- Elle est magnifique murmura-t-il.

Ils passèrent le reste de l'après-midi à apprendre à s'en servir pour Magnus et l'écouter pour Alexander. Malheureusement, le soleil déclina, annonçant la fin de leur rencontre encore une fois. Chaque fois qu'ils se rencontraient, il était plus difficile de se séparer. Leurs yeux parlaient d'amour et d'affection impossible et le prince finissait toujours par retourner dans son château vide et effroyablement seul.

Le temps défila lentement, apportant les premières neiges aux portes de la cité et de mauvaises nouvelles. Ses escapades auprès de Magnus n'étaient pas passées inaperçue ni les mots de retour dans bouche. Alors que le givre recouvrait dès l'aurore l'herbe tendre et les robustes arbres, la rumeur d'un sorcier naquit au détour des couloirs, dans la lumière tamisée des tavernes et dans les récits des troubadours en itinérance. La peur enfla dans le cœur des Hommes comme la gangrène rampe sur un corps, rapide et vicieusement. Le prince dû espacer ses rencontres avec son cher et tendre Magnus et son cœur attendris par sa présence redevint lentement de glace.

Il lui arrivait par moment penser entendre la douce mélopée d'une flûte de Pan, réchauffant son cœur éconduit.

- Prince. Une réserve de grain a brûlée cette nuit.
- Il est fait état de disparition de jeunes filles et hommes vierges depuis une semaine.
- Père Andrew a dû donner une messe urgente alors que les choses auraient été vues en plein jour.
- La rumeur du Sorcier non loin ne fait qu'enfler.

Le prince écouta chaque doléances et rapports que lui faisait ses ministres avec une peur insidieuse. Et si Magnus n'était pas à l'abris. S'il lui arrivait quelque chose ? Il était presque certain que sa douce créature n'a jamais connu les plaisirs de la chair. Il avait peur qu'il devienne la cible de ces enlèvements étranges. Magnus si beau, si doux, si naïf, si enchanteur. Son visage ingénu, ses courbes légèrement plus rondes qu'un homme bâti, sa voix ensorcelante, ses yeux pétillants, son rire enchanteur. Ciel, que Dieu et Mère Nature le protège.

Notre bon prince se fit un devoir de le protéger. Il disperça ses espions aux quatres coins de sa cité, envoya ses soldats interroger les familles des victimes, raffermi son autorité dure mais juste. Il ferma ses portes aux étrangers, ne laissant entrer que les marchands et troupes d'artistes connus.

Le manteau d'hivers recouvrait à présent chaque parcelle de terre, le roulis de l'eau se fit plus ténu, le chant des oiseaux plus rare. Voilà trois mois que le prince ne put rencontrer Magnus et la morosité le gagnait peu à peu en plus de son vague à l'âme et son cœur meurtri et froid. Ses sujets s'inquiétèrent de retrouver leur prince aussi fermé qu'avant ses escapades, mais ne dirent mots. Le regard bleu froid qu'il posait sur eux quand ils ouvraient la bouche les en empêchèrent.

Enfin une piste sérieuse éclaira la journée du prince. Après des semaines ils avaient finit par avoir une description. La première fut par une mère de famille où son enfant, jouvenceau, était en train de parler à un beau damoiseau portant une longue cape de velours bleue nuit, les cheveux clairs. Un voisin d'une jeune disparue avait décrit la même personne, un homme aux riches habits sombre, des cheveux blonds raides au teint pâle et au regard aussi sombre qu'une nuit sans étoile. Très vite le prince en fit faire un portrait par son meilleur peintre et avait fait présenter celui-ci aux familles, amis, voisins des disparus. Aucun doute ne fut plus permit. Il s'agissait bien de l'homme qui avait été vu avec chacune des victimes avant qu'elle ne disparaissent. Rongé par l'inquiétude, Alexander avait fait battre la cité puis les alentours pour débusquer cet homme mais aucun signe de sa présence nulle part. L'inquiétude laissa place à la colère de ne pas arriver à mettre la main sur cet individu au fil des jours jusqu'à ce jour.

En effet, l'un de ses espions assure avoir trouvé signe de vie en contrebas de la forêt, non loin du lac où la présence d'Homme par un reste de feu mouillé et un espace dégagé pour dormir fut trouvé. Sans attendre, craignant pour son bel amour, il mit sur pied un corps d'expédition où il prit place sans laisser qui que ce soit remettre en parole sa participation.

Ils partirent à une dizaines de soldat dont son capitaine de la garde royale et de robustes hommes. Le trajet fut court, mais l'angoisse tenaillant le prince le rendit excessivement long et pénible. Arrivés sur place, ils trouvèrent effectivement le reste d'un foyer mouillé par la neige fondue et un espace dégagé pour un corps endormi. Il sépara ses hommes en plusieurs groupe pendant qu'il fila ventre à terre sur sa monture vers le lac, priant toute déité d'épargner son souffle de vie, son rayon de soleil.

La peur lovée en son sein lui tordit les entrailles et le regard fou il balaya les environs.

- Magnus ! Magnus, où es-tu. Je t'en prie, parle-moi. Parle-moi lumière de mes jours.

Le murmure pressant du vent le fit craindre le pire. Il suivit l'écho d'une réponse, faible et douloureuse.

- Tiens tiens tiens. Si ce n'est pas ce charmant prince.

À ces mots, le cœur affolé du prince se figea dans sa cage. Tenant contre lui la silouhette tant aimée où un liquide de la couleur du miel s'écoulait de sa lèvre, un homme qu'il pensait ne jamais revoir enserrait de sa main le cou gracile de Magnus. Ses beaux yeux dorés étaient terrifiés et des perles cristallines s'en échappaient. Une rage sourde enveloppa son cœur, son sang pulsa, criant vengeance pour sa famille et son ami tant aimé.

- Vous. Vous vile créature, engeance de la perfidie et du mal.
- Oui moi. Je pensais les avoir tous erratiqué mais j'ai eu la bonne idée de vous laisser vivre. Vous m'avez mené droit à cette... Chose. Elle me permettra de vivre encore quelques siècles. Mais je serais plus prudent cette fois. Je ne l'occirais point. Savez-vous, cher prince d'Idrissia, que leur sang donne longévité et que leur cœur offre la magie ?

Alexander le regarda horrifié des mots prononcés. L'homme qui avait détruit le peuple magique était l'assassin de sa famille ? Que Dieu et Mère Nature les gardes.

- Ah, oui je l'avoue. L'avidité m'a fait commettre l'une de mes pires erreurs. Je n'aurai point dû les passer au fil de l'épée mais les garder prisonniers. Ainsi je serais devenu immortel et bien plus puissant. J'ai dû enlever et boire le sang de vierge pour survivre mais cela ne permet de gagner que quelques miséreux mois. Regarde donc petit prince de glace. Regarde comme ces êtres faibles peuvent apporter grandeur et jeunesse.

L'homme passa du vouvoiement au tutoiement, se moquant de son statut, de sa fierté. Il passa un doigt répugnant à la commissure des lèvres tremblante de son prisonnier et l'apporta aux siennes, léchant une goutte du liquide doré.

- Une seule goutte de leur précieux liquide et cela offre une dizaine de printemps. N'est-ce pas égoïste ? Pourquoi eux ? L'Homme a toujours était supérieur. Plus fort, plus ingénieux, plus méritant que ces créatures qui se vautre dans les bois à danser et chanter nu.
- Alors pour plus de pouvoir et de gloire vous avez décimé tout un peuple pacifique, rendu Mère Nature en colère, pour votre propre et unique désir ?
- Ah, je l'avoue, je ne pensais pas que cette chère Mère Nature serait tant en colère. Une petite erreur de calcul j'en conviens.

Le prince serra les dents, les yeux étincelant d'ire contenue. Il devait se concentrer sur Magnus, son doux et tendre être magique. Il devait trouver un moyen de défaire cet homme de la Terre, apaiser Mère Nature en lui offrant sa vie et sauver celle de son ami. Il réfléchit tout au long du monologue de l'être malfaisant, ce Sorcier, indigne de la magie qu'il a volé, méprisable du sang qu'il a versé. Une idée folle lui vient, si folle et stupide qu'il ne croyait guère en ses chances de survie face à un être vieux de centaines d'années et pourvu de pouvoirs qu'il a point. Mais il devait d'essayer. La mort ne lui faisait pas peur, celle de celui qu'il aimait bien plus. Il adressa une prière à Mère Nature, priant qu'elle sauve Magnus, priant que l'être vil paye ses crimes de sa vie.

Inspirant fortement, il hulula. Appel à ses hommes s'il ne parvenait à défaire le Sorcier. Quand il se tut, un étrange silence plana dans la forêt figée par le givre et la neige avant que bravement, il n'annonce ses desseins.

- Je te passerai au fil de mon épée, afin de faire la paix avec Mère Nature et sauver la vie innocente de cette créature magique. Ton nom fieffé Sorcier.

Un sourire cruel étira lentement le visage paraissant jeune mais où les yeux dévoilaient toute l'horreur qu'il avait perpétré et sa vieillesse.

- Jonathan Sébastien Morgenstern. Fils de Valentin et Jocelyne Morgenstern, frère de Clarissa Morgenstern. J'accepte ce duel prince de glace.

Il ne se laissa pas distraire alors qu'il le vit assommer Magnus qui s'écroula sans un bruit dans la neige fraîche. Il canalisa ses émotions pour ne voir que la silouhette malingre. Il comprenait à présent pourquoi il ne l'avait point reconnu sur le portrait retranscrit. Son visage était plus décharné aujourd'hui qu'à l'époque malgré des traits paraissant jeunes, sa silouhette plus frêle que dans le passé. À moins que ses yeux d'enfants ne l'avait fait paraître plus grand, plus fort, plus... Terrifiant. Il tira alors son épée au clair, déterminé à ce que les horreurs de cet homme cesse.

Mère Nature encouragea la vaillance du prince à travers le sifflement du vent, elle l'aida des arbres où les racines cachées par le manteau nival devinrent les alliées du courageux et téméraire prince de glace en réduisant les mouvements du Sorcier, l'air devint plus rare autour du vil personnage mais plus pur au contact d'Alexander, la lumière aveuglante par le réfléchissement sur la poudre blanche alors qu'elle était douce et éclairante pour le prince. Il ne laissa aucun souffle d'air à son ennemi, l'assaillant encore et encore de coup d'épée, esquivant avec souplesse celle de son belligérant. La fureur voila le regard obsidien du Sorcier, rendant les coups du prince plus précis, entaillant un flanc, éraflant une joue.

Puis le combat bascula soudainement en sa défaveur, une odeur putrescente le fit hoqueter de dégoût et reculer. Il avait déjà vu la magie de Magnus, belle, douce et chatoyante. De souples volutes bleues, vertes, dorées habillaient sa magie et le parfum de la vie sauvage l'enveloppe mais celle-ci... Celle-ci avait l'odeur de la mort et les couleurs de la cendre des disparus et du néant de son âme. Sa bouche s'emplit de cette cendre écoeurante alors que son cœur se glaça d'effroi. La magie maléfique enserra son corps et son âme, l'emplissant de désespoir et de peur. Il le sentait, sa fin était là, sans avoir pu avouer à son merveilleux ami toute l'affection qui ennivrait son être pour lui. Il pria seulement Mère Nature de sauver son si tendre aimé. Il délivra ses dernières forces pour cette prière qui consuma et enflamma de passion et d'amour son cœur.

- 不ɬرမɣতৃঔ万 !

La terre se mit à trembler alors que l'eau gronda. Les yeux écarquillés de surprise du Sorcier firent revenir l'espoir en son être alors qu'un cri échappa à son ennemi. Magnus, le regard brillant de détermination éleva de nouveau la voix. Toujours aussi belle et envoûtante que sont les tonalités sortant de sa bouche mais le ton est sec, implacable. Le prince se retrouve relâché de l'étreinte magique malfaisante alors que l'être magique prononce avec colère quelques sons qui firent allonger les branches des arbres pour enlacer tel un baiser de la mort le corps rachitique du Sorcier, la terre devenir meuble, le laissant se fondre dans ses fondements. Un ultime cri de désespoir résonna dans l'air avant que le Sorcier ne finisse englouti par Mère Nature.

Son regard se perdit dans le visage fermé de Magnus. Une mélancolie effrayante y demeurait, pinçant douloureusement son cœur. Avec douceur il s'approcha de son ami, de peur de le faire fuir. Avec la plus grande des délicatesse il posa le revers de sa main sur la joue hâlée.

- C'est terminé Magnus, mon doux, pardonne moi de l'avoir mené à toi.

Les yeux de félins papillonnèrent un instant, cherchant sans doute à revenir parmis eux. Ils finirent par se fixer sur le prince et soudain, ils s'écarquillèrent de stupeur, tel un faon prit dans la lumière d'une torche.

- Al... Alexander ?
- Eh bien oui, qui veux-tu que je sois fit-il avec humour.
- Mais il... Je... Tu étais sans le souffle, les yeux ouverts sans voir, le corps immobile.
- Oh mon tendre ami, je suis pourtant là, bien vivant. Le Sorcier a dû se jouer de ton esprit. J'ai bien failli passé l'arme à gauche cela dit si tu ne t'étais point éveillé à temps. Je te dois la vie.

L'être magique sembla enfin se rendre compte que son beau prince était bel et bien en vie et lui sauta dans les bras, balbutiant adorablement entre sa langue aux sonorités chantantes et la langue humaine. Il l'enserra dans une étreinte rassurante et protectrice, passant ses doigts dans la chevelure courte, effleurant cette gracile nuque du bout des doigts, murmurant des mots rassurants.

- J'ai eu si peur fini par dire Magnus.
- Et moi donc. J'ai eu peur de te perdre. Je dois t'avouer quelque chose, douce créature ensorcelante.

Le regard miroitant de perles salées le fixèrent avec une telle intensité qu'il en perdit son souffle et ses mots moururent sur ses lèvres. Pourtant décidé à lui ouvrir son cœur, il laissa son âme s'exprimer en laissant ses chairs pleines trouver leurs jumelles. Le baiser, chaste instant, eut le goût du sel et de la mûre sauvage. Il plongea son regard dans celui surprit de son ami.

- Je t'aime Magnus. Mon tendre aimé.
- Oh. Oh ! Tu... Moi ?

Le prince eut un sourire d'amusement. Chaque mimique, chaque rire, chaque discussion le faisait l'aimer un peu plus.

- Oui toi, créature de mon cœur.
- Oh ! Par Mère Nature, je suis si heureux. Je pensais ne jamais te revoir. Mon prince, je vous aime. Je vous aime aussi fort que les cours d'eau. Tellement !

Le rire cristallin de son compagnon résonna longtemps, porteur de bonheur et d'amour. Ils en oublièrent le temps, à moins que Mère Nature ne leur ait offert une accalmie pour laisser leur deux coeurs danser jusqu'aux abords du paradis, leur corps s'aimer jusqu'à la fin des temps. Ils s'aimèrent encore et encore.

Mère Nature défit certains maux ou les rendit plus rares. Les monstres de nuit disparurent, la terre vengée repartit dans un long sommeil.

Et ils vécurent heureux et eurent deux beaux garçons où pouvaient apparaîtrent des pupilles fendues si l'on y faisait attention. Personne ne sut ce qu'advint le royaume réellement, le royaume disparaissant petit à petit aux yeux des Hommes pour n'être plus que légendes, mais il était possible, si l'on tendait l'oreille d'entendre une flûte de Pan chanter l'amour certaines nuit de pleine lune...

Et voilà mon premier conte. J'ai adoré l'écrire et espère qu'il vous aura plu.

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