OS n°3 - Laisse-toi tomber - MHA
Univers : My Hero Academia - Univers Alternatif ↬ Sans Alter
Personnage-s : Hitoshi Shinsō & Denki Kaminari
Présence de ship-s : Shinkami
Longueur : environ 6600 mots
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Lundi
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Shinsō Hitoshi, seize ans et déjà de lourdes cernes sous les yeux, s'ennuyait terriblement. C'était l'heure de la pause déjeuner et, n'ayant pas faim, il n'avait rien d'autre à faire que de se balancer sur sa chaise en regardant les nuages. Ses pensées divaguaient, et il ne prêtait même plus attention à comment ses pieds poussaient sa chaise ; c'était devenu automatique. Tellement irréfléchi que ça finit inévitablement par détraquer : Hitoshi sentit soudainement ses pieds se décoller du sol, et son corps entier bascula vers l'arrière.
La plupart des gens lors de cette situation paniqueraient et battraient des bras dans l'espoir de se rattraper. Mais Shinsō ne fit rien de tout cela. Surpris les premiers centièmes de secondes, il ouvrit un peu les yeux, sourcils relevés, puis lorsqu'il comprit la situation, abaissa ses paupières, comme s'il ne se passait plus rien et qu'il allait simplement s'endormir. Il attendait la chute, sans aucune panique.
Cependant, il n'y eu ni fracas, ni chaise renversée, ni corps étendu sur le sol. Hitoshi sentait qu'il était retenu par quelque chose, et ouvrit les yeux, étonné.
- Eh bah t'as eu chaud, Shinsō !
Des cheveux blonds – avec une sorte d'éclair noir teint sur une mèche à gauche -, des yeux or et un visage rieur.
- Ah, Kaminari, constata-t-il.
- Tu tombes, et tout ce que tu trouves à dire c'est ça ? T'es vraiment à part. Ah, et puis je t'ai déjà dit de m'appeler Denki !
- Merci... Je suppose ?
- Mais non, je parlais pas de ça – et puis, pas besoin de remercier. Au fait, je t'ai pas vu au réfectoire, t'as mangé ici ? demanda-t-il en remettant la chaise en place.
- Non, j'avais pas faim.
- C'est dingue ça, comment est-ce que tu fais pour ne pas avoir faim presque chaque midi...
- Hmm... Sinon, tu as conscience que le contrôle d'Histoire, c'est dans une heure ?
- Quoâââ ?! s'exclama le blond, totalement paniqué. Mais je croyais que c'était la semaine prochaine, et que...
Il commença à déblatérer une multitude de mots – parfois incompréhensibles -, faisant sourire son ami. Hitoshi sortit son livre d'Histoire, tira un bureau pour le coller au sien et rapprocha la chaise de Denki – toujours perdu dans ses lamentations.
- Une heure, ça nous laisse le temps de te rentrer quelques cours dans le crane.
- Tu vas me faire réviser ? Vraiment ?
- Comme toujours, non ?
- Shinsō, tu es génial ! affirma Denki, un large sourire sur le visage.
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Mercredi
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- Aujourd'hui, tu viens manger, Shinsō !
- Je n'ai...
- Nope, pas d'objections, ordonna Kaminari, les bras en croix devant lui pour souligner ses propos. T'as rien mangé à midi ces deux derniers jours, alors aujourd'hui, tu manges !
- Mais...
- Non.
- Je veux j-
- Non.
- Laisse-moi par- !
- Non.
Hitoshi comprit qu'il n'arriverait jamais à dire une phrase. Son ami était plus coriace que n'importe qui ; lorsqu'il avait une chose en tête, il faisait tout pour y arriver. Et, au plus grand damne de Shinsō, aujourd'hui il voulait le nourrir. Il soupira et enfoui sa tête dans ses bras.
- D'accord, grommela-t-il. Mais si je le vomis, ce sera sur toi.
- Tu ne peux pas vomir avec un tout petit repas de rien du tout. Ah, et puis je pense que les toilettes, c'est mieux, hein... ? ajouta-t-il, inquiet.
Même si Hitoshi avait cédé face à Denki, il n'en restait pas moins que ce dernier était obligé de le tirer par le bras pour le relever, et le pousser jusqu'au seuil de la porte avant qu'il ne se décide à marcher seul.
- Je suppose que tu n'as pas de bento... ? demanda Kaminari une fois dehors.
- Tu supposes bien.
- Hum... Attends-moi deux minutes, je reviens !
Denki partit en courant, laissant Shinsō seul avec ses interrogations. Il s'assit sur un banc et enfouis de nouveau sa tête dans ses bras.
- Et mince... Comment je vais faire ?
Trois options s'offraient à lui : manger, au risque de vomir ou se sentir mal ; cacher les trois-quarts de son repas et simuler qu'il avait tout avalé - ça nourrirait les pigeons - ; supplier Kaminari.
« D'abord tester la troisième. Ensuite, on verra »
Il releva le buste et jeta sa tête en arrière.
- Merde, merde, merde... !
- Shinsō ! Regarde !
Hitoshi se redressa précipitamment, se tordant un muscle au passage, et sursauta en voyant que Denki était juste devant lui.
- J'ai demandé à Sero et Kirishima s'ils n'avaient pas un petit truc à nous donner, et ils ont été grave sympas ! Ah, et j'ai acheté des boissons, aussi. Maintenant, on a de quoi se faire un super repas !
Les paroles de Kaminari et la vue de la nourriture donnèrent un haut le cœur à Shinso. Pendant que son ami s'installait à côté de lui, il appuya le plus discrètement possible sur son ventre pour essayer de calmer ses nausées.
- Bon, alors si on partage mon bento plus ce que j'ai grappillé...
- Ne fais pas moitié-moitié, je n'ai pas faim.
Il avait abandonné l'idée de supplier Denki. Il ne pouvait pas, après le mal qu'il s'était donné et la "participation" d'autres personnes. Il ne lui restait plus qu'à négocier pour ne pas trop en avoir.
- D'accord, disons deux quarts.
- Kaminari, je suis mauvais en maths, mais pas à ce point là.
- C'est bon... Un tiers alors.
- C'est beaucoup un tiers... non ?
- C'est le minimum.
- Mais tu vas avoir faim.
- Shinsō, dit Denki en le fixant dans les yeux, regarde-toi. Ça fait des semaines que tu ne manges rien à midi, tu es devenu maigre. Et, là, tu oses me dire que c'est moi qui vais avoir faim ?
- Tu... Tu ne comprends pas. Je n'ai pas faim, c'est tout.
« Je n'ai plus faim... »
Kaminari soupira doucement et leva les yeux vers le ciel, restant ainsi quelques secondes. Puis il reprit la préparation de leur repas, sans rien dire d'autre. Lorsqu'il eut finit, il tendit sa part à Hitoshi.
- Tu manges, juste aujourd'hui.
- Juste aujourd'hui ?
- Ouais, une fois par semaine. Le jour que tu veux, mais au moins une fois.
Shinsō ouvrit la bouche, mais reçut l'index de Denki pour le faire taire.
- Non. Sois déjà heureux que je ne demande pas plus.
Hitoshi commença à manger, sous le regard attentif de son ami. Il se retint de vomir ce qu'il venait d'avaler et continua en simulant que tout allait bien. Rassuré, Kaminari entama à son tour son repas, tout en en le surveillant du coin de l'œil.
« Merde, je peux rien cacher s'il me fixe comme ça »
- Alors, tu vois que tu avais faim ! s'exclama le blond quand ils eurent terminé.
- Faim, non. Disons que j'ai réussi à avaler ça.
- C'est ça, ouais. Au fait, je t'ai pas dit : j'ai eu une super note au contrôle d'Histoire, lundi ! Et ça, c'est grâce à toi.
- Content de le savoir. Ça veut dire que tu as un peu d'intelligence tout de même.
- Eh, ça c'était méchant !
- Mais non, je rigole... ! Vraiment, je suis content pour tu aies eu une bonne note. Par contre, les cours vont bientôt reprendre, alors on ferait mieux de retourner en classe.
- Ouais, allons-y.
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Hitoshi se sentait mal. Très mal. À vrai dire, ça n'allait pas du tout. Il n'arrivait plus à suivre le cours, suait et respirait difficilement. Il avait l'impression qu'une pince de fer lui tordait l'estomac.
Denki, assis à sa droite, se pencha vers lui et lui chuchota s'il allait bien. Son ami secoua légèrement la tête, de plus en plus mal.
- Madame ! appela le blond.
- Kaminari, j'espère que ce n'est pas encore pour me demander si je n'ai pas une calculatrice. Si tu oublies la tienne, débrouille-toi.
- Non, c'est Shinsō ! Je crois qu'il va faire un malaise, enfin, il n'est pas bien du tout.
- Shinsō ? Ça ne va pas ? demanda un peu inquiète la professeure.
La réponse presque inaudible d'Hitoshi convainquit la femme que Denki ne mentait pas.
- Kaminari, emmène-le à l'infirmerie.
Une fois sortis de la salle de classe, Shinsō prit la direction opposée à l'infirmerie, sous le regard surpris de Denki.
- Eh, c'est par là.
- Non, pas besoin d'y aller. Juste les toilettes.
- Me dis pas que t'as la gastro ! s'inquiéta-t-il en reculant.
- Non, c'est bon, t'inquiète, je sais ce que j'ai, pas besoin d'aller voir l'infirmier.
- Hmm... Si tu le dis. Je t'attends devant, alors.
- Vas-y, profite-en pour sécher, sourit-il - c'était plus une grimace, à vrai dire.
- Hein ? Eh, non ! Je jure que je n'avais pas pensé à ça. Mais puisque tu le dis...
- Retourne en cours, je vais avoir besoin que quelqu'un me prenne des notes. Tu peux faire ça ?
- No problèmes, je m'en occupe.
Il garda un petit sourire jusqu'à ce que Denki soit hors de vue. À ce moment, il cessa de porter le masque se voulant rassurant qu'il avait jusqu'alors, et failli s'écrouler au sol.
- Bordel...
En s'appuyant du mieux qu'il le pouvait contre le mur, il le longea jusqu'aux sanitaires. Une fois enfermé dans l'une des cabines, il se pencha au dessus de la cuvette, genoux au sol.
« - Vomir. Il faut tu vomisses. Tu ne peux pas garder de la nourriture dans ton ventre plus d'une fois par jour, tu le sais. Tu savais que tu aurais dû te faire vomir juste après avoir mangé. Mais tu as trop attendu, et voilà le résultat. Ah la la, tu es vraiment idiot
- Ferme-la »
Il n'en pouvait plus, et son corps n'était pas décidé à rejeter seul ce que son estomac contenait - et cette voix agaçante n'arrangeait rien. Hitoshi prit alors deux de ses doigts et les enfonça le plus loin possible dans sa gorge. Il avait beau l'avoir fait une quinzaine de fois, dès qu'il recommençait c'était toujours aussi difficile et répugnant que la première. Il sut qu'il avait fini par y arriver lorsqu'il fut pris de spasmes, et quelques secondes plus tard, tout ce qu'il avait ingurgité à midi était dans les toilettes.
« Je déteste vomir... »
Le plus gros de son mal de ventre était parti avec son vomi, mais le goût acide dans sa bouche et sa gorge lui faisait presque regretter son action. Il alla se rincer la bouche, buvant par la même occasion, puis s'assit contre un mur, les genoux remontés au niveau de son front. Il lâcha un gros soupir, appuya sa tête contre ses jambes et passa ses doigts à travers ses étranges cheveux mauves. Lorsqu'il sentit des larmes couler le long de ses joues, il ne sut plus si c'était à cause des spasmes qui le parcouraient encore ou du profond vide qu'il ressentait.
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Jeudi
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Les cours venaient de se terminer, les élèves soupiraient de soulagement. Très vite, on put entendre des raclements de chaise contre le sol, des paroles enjouées et des pas pressés. Hitoshi fut l'un des derniers à quitter sa salle de classe, rangeant calmement ses affaires. Denki l'attendait sur le seuil de la porte, trépignant d'impatience.
- Shinsōōō, allez, accélère !
- Tout le monde n'est pas aussi hyperactif que toi, Kaminari.
- Denki, le corrigea-t-il en levant les yeux au ciel. Et en plus, je suis certain que toi aussi tu as un problème : c'est pas normal d'être aussi lent. Sérieusement, même ma grand-mère marche plus vite que toi !
- C'est une ancienne coureuse ?
- Très drôle... Bon, en attendant, les cours sont finis et tu es toujours le cul sur ta chaise !
Hitoshi attrapa son sac, rejoignit le blond et reçu un léger coup dans les côtes, histoire de lui montrer qu'il fallait accélérer.
- Iida va encore nous crier qu'il faut arriver à l'heure aux activités de club... gémit Kaminari.
- Il fait ça même à ceux qui arrivent ne serait-ce qu'une minute en retard.
- Pas faux.
- Alors arrête de faire ta chochotte et allons-y.
Ils se dirigèrent vers leur salle, Denki avançant presque en sautillant, suivit par un Shinsō beaucoup plus posé.
- Attention, écartez-vous ! prévint une voix.
Trois adolescents poussaient une caisse à roulettes et semblaient avoir du mal à l'empêcher de zigzaguer. Les étudiants sur le passage se pressaient sur les côtés, peu désireux de se faire percuter. Seulement Hitoshi, un peu trop perdu dans ses pensées, avait saisi trop tard ce dont l'avertissement parlait. Il tourna la tête et eut à peine le temps de voir la caisse arriver sur lui qu'il sentit une douleur dans son flanc droit.
Déséquilibré et étourdi par la collision, il bascula vers l'arrière. Mais, cette fois là aussi, il ne fit rien pour arrêter sa chute.
« Est-ce que je vais toucher le mur, ou juste le sol ? » était sa seule pensée.
Il ferma les yeux et attendit. Puis il les rouvrit en sentant deux choses étranges. La première, que le col de son uniforme lui faisait mal à la nuque. La seconde, qu'il mettait beaucoup de temps à tomber, tout de même.
Cependant, il ne s'attendait pas à voir Kaminari le retenir d'une main, en équilibre sur une seule jambe, la mâchoire crispée sous l'effort. Il menaçait de tomber avec lui, son autre main battant l'air pour y trouver un appui.
- Shin... sō ! réussit-il à articuler malgré sa grimace.
L'un des étudiants qui poussaient la caisse arriva heureusement à leur secours et tira vers l'arrière le blond, redressant par la même occasion Hitoshi. Avant même que ceux-ci n'aient le temps de comprendre quoi que ce soit, l'adolescent s'était excusé trois fois et avait déjà disparu.
- Wah... murmura Denki. Tu l'as vu, toi ?
- Tu... m'as rattrapé, constata Hitoshi, ignorant sa question.
Kaminari lui jeta un regard d'incompréhension.
- On dirait que t'es déçu.
- Hein ? Ah non, c'est juste que je suis surpris que tu aies réussi à m'attraper à temps, expliqua-t-il avec un léger sourire.
- Mouais, j'avoue que c'était pas mal, se vanta-t-il les doigts sur le menton.
- Idiot. Allez, on va tuer Iida si on le fait trop attendre.
- Je le vois tellement bien en faire un malaise ! rit-il. Par contre, tu passes devant, je veux pouvoir te rattraper plus facilement si tu tombes encore.
Shinsō sourit de l'image que se faisait Denki et, obéissant, prit la tête de la marche. Kaminari quant à lui avait perdu son sourire dès que son ami s'était retourné.
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Samedi
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Hitoshi grommela en éteignant son réveil, puis enfonça son visage dans son oreiller en soufflant.
- Fichus cours du samedi...
Effectivement, ce samedi là était l'un des deux du mois où il y avait cours, pour le plus grand malheur de l'adolescent. Les seuls points positifs cependant étaient que ça ne durait que le matin et qu'il allait revoir Denki.
Kaminari Denki. Ce nom et ce prénom étaient sûrement ceux qui revenaient le plus souvent dans l'esprit de Shinsō. Depuis quelques temps, les deux garçons s'étaient beaucoup rapprochés, et ça commençait à se faire questionner Hitoshi.
Il se savait pansexuel depuis longtemps, l'idée d'être attiré par un garçon ne le dérangeait donc pas le moins du monde, mais la question qu'il se posait était : « est-ce possible ? ».
- Est-ce que j'ai une chance avec lui ? Est-ce qu'il est lui aussi attiré par les hommes ? Mais surtout, est-ce que c'est possible de tomber amoureux quand on est vide... ?
Cette dernière question était celle qui le tourmentait le plus. Lorsqu'il y pensait, la première réponse qui lui venait à l'esprit était non. Mais... l'image de Denki arrivant ensuite semblait le contredire d'un puissant « oui ». Dès qu'il pensait à son sourire, à sa lumineuse positivité - son total contraire -, ses petites mimiques et gestes à lui... Il avait l'impression de retrouver une part des sentiments qu'il croyait avoir perdus.
- Allez, faut se lever... ! tenta-t-il de se motiver - sans franc succès.
Il rejeta sa couverture sur le côté et s'assit en tailleurs en soupirant. S'il n'y avait pas Kaminari, il aurait séché, prétextant une grippe. De toute manière il n'y aurait aucun de ses parents pour le contredire : sa mère était à l'autre bout du Japon en voyage d'affaires, et son père ne rentrait que tard le soir. Autant dire que le temps passé à trois se comptait plus en minutes qu'en heures.
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Hitoshi avait terminé de se préparer ; il ne lui restait plus qu'à manger. Le petit-déjeuner était généralement le seul repas qu'il arrivait à ingérer - parfois échangé avec le dîner -, mais l'idée de le manger lui donnait parfois la nausée et son ventre se crispait. Aujourd'hui, comme presque chaque matin depuis deux semaines, c'était le cas. Heureusement, après quelques bouchées, cette sensation disparaissait.
- Plus que deux œufs... Faudra que j'en rachète.
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Shinsō sortit de chez lui et ferma la porte à clé, pois enfourcha son vélo pour se rendre au lycée. Il n'avait pas parcouru dix mètres qu'il entendit une voix le héler.
« Sa voix »
Il freina sec et fut rejoint par Denki en quelques secondes.
- Salut Shinsō ! le salua-t-il, essoufflé. Je t'ai vu de loin, alors j'ai couru pour te rejoindre.
- Salut, Kaminari.
- Denki, le reprit-t-il. Combien de fois faudra-t-il que je te le répète ?
- Probablement un millier.
- Très drôle.
- Sinon, qu'est-ce que tu attends pour monter ?
Kaminari le regarda, interloqué.
- Tu ne vas pas me suivre en courant pendant dix minutes, si ? Alors dépêche-toi de monter, sinon on va arriver en retard.
Le regard de Denki s'illumina quand il saisi le sens des paroles de son ami. Sautant presque sur le porte-bagage, il pointa du doigt la direction à prendre.
- Allez, go ! Shinsō, mets la gomme !
- Tu veux vraiment aller vite ? demanda Hitoshi avec un sourire en coin.
- Et comment !
- Alors accroche-toi, on y va.
Il poussa sur les pédales et démarra en trombes. Le vélo gagnait en vitesse à chaque coin de rue, la ville étant légèrement en pente. Heureusement pour les deux adolescents, il n'y avait que peu de voitures.
- Wouhou ! Le vent en pleine face comme ça, c'est le pied !
Kaminari se tenait aux épaules de Shinsō, et rejetait sa tête en arrière en riant. Pour Hitoshi, cet instant était sûrement l'un des meilleurs depuis des mois. Pédaler à toute vitesse, sentir le vent sur son visage et écouter le si joli rire de Denki... que demander de plus ?
« Je suis amoureux », se dit-il alors.
Son sourire se mua progressivement en gloussement, puis il finit par rire franchement, rejoignant Kaminari.
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Le dernier cours de la journée venait de se terminer. Hitoshi et Denki étaient tous deux chargés du ménage avec quatre autres élèves.
- Kaminari, tu peux ranger ces papiers dans leur salle ? s'enquit une jeune fille. Tu sais, au troisième.
- D'accord ! Shinsō, tu peux venir avec moi ?
- Oui, si tu veux.
Il finit de passer le balai et prit la moitié de la pile de papiers, Denki ayant déjà fait de même quelques instants plus tôt. Ils montèrent les escaliers et déposèrent leur charge dans la pièce spécifique. Lorsqu'ils en sortirent, Kaminari se dirigea vers l'escalier menant au quatrième te dernier étage.
- Ça te dit de monter sur le toit ?
- On n'a pas terminé le ménage, si ?
- C'est bon, il ne restait plus qu'à nettoyer les tables, et c'est Midoriya qui s'y colle ? Alors, tu viens ?
Hitoshi accepta en passant devant.
- Dis, Shinsō... commença Denki.
- Hmm ?
- Pourquoi est-ce que tu ne manges plus ?
- Je crois que je te l'ai dé-
Il arrêta net sa phrase lorsqu'il sentit son pied rater la marche sur laquelle il devait prendre appui.
« Ah. Je tombe. Est-ce qu'il y a assez de hauteur pour me casser un os, ou je m'en sortirai indemne ? On verra bien. Je me demande aussi si je vais me prendre beaucoup de marches. Ça doit faire sacrément mal. Il y en a environ trente, je pense que je vais en toucher une dizaine. Peut-être un peu moins »
Il ferma les yeux, prêt à chuter. Seulement, la première et seule chose qu'il percuta ne fut pas une marche en béton comme il le pensait, mais un corps, plus précisément deux mains qui le retenaient. Lorsque, surpris, il ouvrit les yeux, il vit le visage de Denki au dessus du sien, qui semblait essayer de lire dans ses pensées, découvrir tout ce qu'il lui cachait.
- Tu m'as encore rattrapé, hein.
- Faut croire que j'ai un instinct qui pousse à courir, même dans les escaliers, pour retenir un gars qui ne fait que tomber. C'est la troisième fois cette semaine, tu sais ?
- Ouais. Mais aujourd'hui, je crois bien que je me serais fait vraiment mal.
- Possible, ouais.
- Tu sais que tu avais des chances d'être emporté par mon poids ?
- Je n'y avais pas pensé. Mais tu pèses pas lourd.
- On a de la chance, alors.
- Yep. Mais dis-moi, Shinsō : pourquoi te laisses-tu tomber ?
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Dimanche
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Lorsqu'Hitoshi se réveilla ce matin là, il n'allait pas bien. Il n'était pas malade, il se sentait moins bien que d'habitude. Peut-être était-ce en partie dû à la question que Kaminari lui avait posée hier, et à laquelle il n'avait pas répondu ? Peut-être était-ce simplement le cours des choses...
Cela faisait des mois qu'il s'était progressivement perdu. Il sentait que, peu à peu, il avait du mal à être simplement heureux au quotidien ; il oubliait presque ce que cela faisait. Les choses autours de lui avaient l'air plus fades, comme décolorées - à l'exception de Denki, qui semblait être un rayon de Soleil à lui seul.
Il avait perdu l'envie de manger, aussi. Il avait d'abord oublié de dîner, puis il avait fini par ne plus du tout avoir faim le soir. Ça s'était étendu au midi et, depuis presque deux mois, il ne pouvait simplement plus. La vue de la nourriture le dégoûtait, il était obligé de se faire vomir s'il mangeait, sous peine d'avoir des maux d'estomac.
Et par-dessus tout, il ne savait pas pourquoi. Pourquoi était-il devenu comme ça ? Pourquoi ne souriait-il presque plus ? Pourquoi ses parents ne voyaient-ils rien ? Pourquoi se faire vomir était-il si douloureux, pas pour le corps mais pour l'esprit ? Pourquoi passait-il plus de temps éveillé la nuit qu'à dormir ? Pourquoi aimait-il Denki ? Pourquoi se surprenait-il parfois à pleurer sans aucune raison apparente ? Pourquoi la nourriture le dégoûtait-elle ? Pourquoi était-il si vide ? Et pourquoi se laissait-il tomber, sans jamais essayer de se retenir ?
Il ne savait rien et, au fond, c'était ça qui le rendait si triste.
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Après avoir passé une heure dans son lit, le regard vaguement sur le plafond, Shinsō avait fini par descendre et s'était rendu à la cuisine. Après avoir mangé, il appela son chat en secouant son paquet de croquettes. Le félin n'arrivant étrangement pas, il se mit à le chercher dans la maison.
« À coup sûr, il est enfermé dans les toilettes ou la salle de bain. Papa ne fait jamais attention quand il est crevé... »
Il espérait qu'il soit dans les W-C, car c'était là où se trouvait sa litière. S'il était dans la salle de bain... il n'y aurait plus qu'à nettoyer s'il y avait des dégâts. Cependant, après avoir ouvert et vérifié les deux pièces, le chat n'était pas là.
- Pas normal, ça... Pixel ! Oh, Pixel ! Ou est-ce que t'es ? appela-t-il, assez doucement pour ne pas réveiller son père.
Il remonta dans sa chambre, vérifia sans bruit dans celle de ses parents, chercha dans le bureau de sa mère, mais redescendit bredouille. Il alla alors dans le salon, scruta du regard la pièce, jusqu'à trouver une boule de fourrure blanche et noire au coin du canapé.
« Trouvé... ! »
Il soupira en s'asseyant à côté de l'animal et passa sa main dans les poils bicolores. Puis il fronça les sourcils : bizarrement, Pixel n'avait pas réagi en s'étirant et en le saluant d'un miaulement tirant vers le roucoulement, comme à son habitude. Suite à cette réflexion, il se tourna vers son chat pour mieux l'observer. Il retira soudainement sa main lorsqu'il se rendit compte que le corps qu'il caressait était froid.
- Merde, c'est pas...
Il écarta la patte qui recouvrait le visage de Pixel, et sentit un long frisson courir dans son dos en voyant la gueule entrouverte dans un dernier souffle et les yeux à peine fermés.
Il ramena sa main, tint son poignet comme si elle était paralysée, et se laissa glisser contre le sol, l'air abasourdi. Il resta presque une minute ainsi, puis il se leva et marcha à grands pas vers le hall de la maison. Il prit le panier en osier rond dans lequel on rangeait écharpes et gants, le vida au sol puis parti dans sa chambre. Toujours sans un mot, le visage tellement fixe que ça en devenait effrayant, il tapissa la boîte avec les draps qu'il venait d'enlever de son lit. Une fois ceci fait, il redescendit dans le salon. Il prit délicatement le corps froid et rigide de son chat, le regarda quelques secondes puis le déposa dans le panier. Il mit le couvercle, souleva la boîte et sortit dans le jardin.
Le vent tiède de la fin de l'été vint soulever dans tous les sens les cheveux d'Hitoshi, l'obligeant à tenir le panier d'une main, l'autre lui dégageant les yeux.
L'adolescent posa sa charge au sol et partit dans le garage. Il revint avec une pelle et une planche de bois. Il se dirigea au fond du jardin, dans le coin le moins utilisé, puis commença à creuser.
« Creuse, creuse, creuse... »
Shinsō ne se focalisait que sur cette pensée, s'empêchant ainsi de perdre pied. Il continuait inlassablement de creuser, jusqu'à ce que sa pelle lui échappe des mains, lui permettant de constater que le trou était bien assez profond – voire trop. Il s'agenouilla alors, souleva le couvercle du panier puis, tout en laissant son regard dériver vers le ciel, se mit à parler.
- Je sais pas si tu m'entends, Pixel, mais je ferai comme de toute façon. Tu sais, ça faisait deux ou trois ans que je m'étais un peu préparé à ce jour, mais je me rends compte aujourd'hui que j'étais tout sauf prêt. T'étais vieux, je devais m'y attendre, mais c'est plus fort que moi, je n'arrive pas à me raisonner. Au moins, tu as l'air d'être parti en dormant, c'est cool... je suppose ? Bref. Je sais pas trop comment ça marche de l'autre côté, s'il y a un paradis ou non... Alors, s'il y en a un, j'espère qu'il accepte les chats ; si la réincarnation existe, j'aimerais que tu viennes me faire un petit signe, enfin, si tu peux, et puis, s'il n'y a rien... Alors j'espère que tu auras bien profité de ta vie.
Il marqua une pause, fit glisser son regard vers Pixel puits reprit.
- Tu sais, à chaque fois que je voyais de nouveaux poils blancs sur ton museau, je m'empêchais de penser « c'est bientôt la fin ». Parce que tu vois, on a le même âge, toi et moi, et se dire que tu vas bientôt partir, c'est comme se le dire à soi-même. Enfin, c'est mon impression, ça doit être sacrément con en vrai. Mais là, tu vois... Je me dis que... Non, rien en fait.
Il secoua la tête.
- Bon, je crois que j'ai dit pas mal de trucs. Surtout, saches que je t'aime. T'étais mon chat, on a grandi ensemble et... T'étais beaucoup pour moi. Vraiment beaucoup.
Hitoshi caressa du bout du doigt le museau de son chat en soupirant légèrement.
- Je t'aime, Pixel, finit-il en remettant le couvercle.
Il déposa la boîte au fond du trou, puis la recouvrit avec la terre qu'il avait ôtée un peu plus tôt. Lorsqu'il eut terminé, il planta la planche de bois au milieu du monticule.
Shinsō resta un moment assis devant, puis se leva et retourna vers la maison. Plus il avançait, plus il titubait, et il finit par arriver dans la cuisine complètement déséquilibré. Sans vraiment réfléchir, il se rendit dans les toilettes, se mit à genoux et pencha sa tête en avant.
Ce jour là, Pixel était mort. Et il avait le même âge qu'Hitoshi.
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Après avoir rendu tout ce que son estomac contenait et pleuré toutes ses larmes, Shinsō avait pris son vélo et avait commencé à pédaler à travers la ville. Cela faisait à présent près de deux heures qu'il roulait, et il ne savait pas vraiment où il allait. La seule chose dont il était sûr, c'est que le Soleil lui prenait toute son énergie. Lorsqu'il eut trop chaud, Hitoshi s'arrêta sur un pont. C'était le plus haut et long de la ville, et l'adolescent se demandait s'il n'avait pas tourné en rond : il l'avait déjà vu trois fois ces deux dernières heures.
- 'Fait chaud... soupira-t-il en descendant de son vélo.
Il s'appuya contre la rambarde en pierres du pont, et regarda le fleuve qui s'écoulait. Puis il se mit dos à la vue et se jeta en arrière, de sorte à ce que le haut de son dos et ses épaules soient contre la rambarde, et que sa tête se retrouve à l'envers.
« Ça fait mal à la tête. Un peu. C'est supportable »
Il regardait le paysage inversé et se demandait si le sang n'allait pas lui monter à la tête ; et puis, qu'à cette hauteur-ci, il devait y avoir pas mal de distance entre le pont et l'eau, et que le canal n'était pas très profond.
- Tu vas sauter ?
Hitoshi se redressa en sursaut, et fut surpris de voir quelqu'un à côté de lui, accoudé à la rambarde. Et lorsqu'il le reconnu, sa surprise fut encore plus grande.
- Kaminari ?
- Avant que tu ne poses la question, ma tante habite dans ce quartier, et j'étais censé lui rendre visite aujourd'hui. Sinon, tu vas sauter ?
Shinsō le fixa un instant, déstabilisé par l'étrange calme dont faisait preuve Denki, lui qui était si agité d'habitude.
- Alors ?
- Non. Mais... Je crois que si je glissais, je ne ferais rien pour me retenir.
- Je vois.
- Pixel est mort ce matin, lâcha-t-il.
Kaminari laissa passer un « oh » presque inaudible et ferma les yeux.
- Comment est-il mort ?
- Dans son sommeil.
- Il était vieux ?
- Il est né moins d'un mois après moi. C'était presque comme mon frère.
- Tu l'aimais beaucoup. Vraiment beaucoup. Quand tu parlais de lui, je voyais... un truc dans ton regard.
Les deux garçons restèrent silencieux quelques secondes puis Denki rouvrit les yeux.
- Tu ne m'as pas répondu, hier : pourquoi te laisses-tu tomber ?
- Pour tout. Pour rien. Pour un million de choses qui ne valent rien, pour un rien qui vaut un million.
- Ça n'a aucun sens.
- Je sais.
- Mais je comprends.
- Je ne pense pas, non.
- Les yeux parlent beaucoup. Surtout les tiens, Hitoshi.
Il l'avait appelé par son prénom. Shinsō avait alors sentit une sorte de frisson courir en lui.
- Et que disent mes yeux, Denki ? rétorqua-t-il sur le même ton.
- Ils disent que tu souffres. Que tu ne manges plus. Que si jamais une occasion de mourir se présentait, tu ne l'éviterais pas.
Hitoshi laissa son regard dériver au loin, et Kaminari continua.
- Tu sais, je suis loin d'être aveugle. Je te vois plus maigre. Je t'ai aussi entendu mercredi. Je connaissais un peu le cours, alors j'ai d'abord voulu savoir si tu allais mieux avant d'y retourner.
- Donc tu as finalement séché.
- Je ne rate jamais une occasion. Mais cette fois-là, j'ai bien fait.
- Entendre quelqu'un vomir, c'est loin d'être bien.
- C'est sûr que c'est grave dégeu comme bruit. Mais quand ça t'apprend que ton meilleur ami va mal, c'est tout de suite moins répugnant.
Shinso expira profondément, puis regarda leur reflet dans le fleuve.
- Que sais-tu exactement ?
- Tout. Rien. Un million de choses qui ne valent rien, un rien qui vaut un million, répondit-il en reprenant ses mots.
- Ça n'a aucun sens, tu l'as toi-même dit.
- Oui, mais tu me comprends.
Il s'arrêtèrent une minute, et cette fois c'est Hitoshi qui recommença à parler.
- Je ne sais pas vraiment ce qui m'arrive. Je vais de plus en plus mal et je ne sais pas pourquoi. J'ai l'impression que le monde est mort, qu'il perd toutes ses couleurs. Moi, je suis déjà en noir et blanc. Je n'arrive plus souvent à sourire, je suis triste. Je ne peux plus manger autre chose qu'un petit-déjeuner, sinon je dois me faire vomir. Je ne supporte plus la nourriture. Et puis il y a Pixel qui est mort ce matin, la maison toujours silencieuse, mes insomnies, mon cerveau qui pense trop... Et, dans tout ça, je n'arrive pas à répondre à un seul pourquoi.
Denki laissa passer une dizaine de secondes avant de répondre, assimilant ce que Shinsō venait de dire.
- Quels sont ces pourquoi ?
- Tu veux la liste complète ou l'aperçu ?
- Ce que tu veux me dire.
Hitoshi avala sa salive, inspira puis se lança.
- Pourquoi suis-je comme ça ? Pourquoi je n'arrive plus à être heureux ? Pour quoi les larmes, c'est intarissable ? Pourquoi suis-je tombé amoureux de toi ? Pourquoi, alors que je suis vide ? Pourquoi je ne vois jamais mes parents ? Pourquoi est-ce que ma mère ne m'appelle jamais lorsqu'elle part deux semaines à l'autre bout du pays ? Pourquoi Pixel est-il mort sans prévenir ? Pourquoi vomir c'est si douloureux ? Pourquoi lorsque je suis avec toi, j'oublie presque tout ça ? Pourquoi es-tu si lumineux, si... si toi ? Pourquoi continues-tu de rester près de moi alors que tu vaux bien mieux ? Pourquoi t'inquiètes-tu pour moi ? Pourquoi est-ce que, toi, tu me vois ? Pourquoi... Pourquoi tout ça ? termina-t-il en écartant les bras, désignant le monde.
Durant son monologue, ses larmes s'étaient remises à couler – sans qu'il ne s'en rende compte -, et tombaient une à une pour rejoindre l'étendue d'eau qui coulait en dessous.
- Je n'ai pas toutes les réponses à ces pourquoi. Surtout pas à la dernière. Mais il y en a certaines auxquelles je peux répondre.
Denki leva son visage vers le ciel, ferma les yeux à cause du Soleil, puis dodelina légèrement de la tête.
- Si les larmes sont une réserve infinie, c'est pour te permettre de te soulager en pleurant dès que tu en as besoin. Pixel ne t'as pas fait de signe, car les adieux, c'est trop dur. Et pour toutes les questions sur moi et sur le fait que je devrais te laisser...
Il se tourna vers lui, l'obligea à orienter son visage vers le sien, puis lui donna une claque magistrale, qui résonna longtemps.
- Shinsō Hitoshi, si tu redis une seule fois que tu ne vaux rien et que je devrais te laisser tomber parce que tu vas mal, je t'assure que c'est moi qui vais te pousser de ce pont.
- Que... ? murmura Shinsō, encore sous le choc de la claque, la main sur la joue.
- Tu vaux autant que chaque être humain, tu saisis ça ? Et je ne te laisserai jamais, surtout si tu as une mauvaise passe.
Le plus effrayant chez Kaminari à ce moment là était son étrange calme. Hitoshi lui aurait presque demandé d'être plus en colère, de gesticuler comme il le faisait d'habitude.
- Cette semaine, tu as failli tomber un bon paquet de fois. La première fois, sur ta chaise, j'ai remarqué un truc... bizarre. Il y avait quelque chose d'anormal. Jeudi, tu avais presque l'air déçu quand je t'ai rattrapé. Et puis hier, en te voyant tomber du début jusqu'à la fin, j'ai compris ce qui clochait : tu te laissais tomber. Tu ne cherchais pas à te faire tomber exprès, mais si jamais ça arrivait, alors tu l'acceptais et ne changeais rien. Tu voulais te laisser tomber.
- Si je tombais, j'avais des chances de mourir. Surtout la fois des escaliers. Il suffit que je me torde le cou, et c'est fini.
- Tu veux te suicider ? demanda-t-il franchement.
- Tout comme je ne vais pas sauter, je ne ferai rien. Mais, si jamais la Mort venait me chercher, je ne m'enfuirais pas.
- Alors vas-y, laisse-toi tomber.
Shinsō le regarda avec des yeux ronds. Il ne comprenait plus ce que son ami voulait.
- Laisse-toi tomber, Hitoshi. Maintenant, demain, dans un mois ou dans un an. Laisse-toi tomber quand tu veux. Mais tant que je serai là, je te rattraperai. Peu importe s'il faut que je me penche de ce pont ou que j'aille te chercher au fond de ton lit. Je te rattraperai.
- Et si jamais je t'emporte dans ma chute ?
- Alors on tombera ensemble. Et je pourrai toujours amortir le choc.
- Mais toi, tu n'as pas envie de tomber.
- Si ça peut te sauver, alors je n'hésiterais pas à chuter du quinzième étage de cet immeuble, là devant.
- Mais si tu mourrais, je serais obligé de te suivre.
- Alors tu sais qu'il en est de même pour moi.
Ils marquèrent une pause, durant laquelle Hitoshi fixa l'horizon, en quête d'explications.
- Mais comment peux-tu être sûr que tu arriveras à temps ?
- Tes yeux sont incroyablement bavards. Ils sauront me prévenir.
- Et si...
- Non, ne dis plus rien. Arrête de douter. SI tu as trop de doutes, c'est leur poids qui va te faire basculer.
- Mais comment est-ce que je peux arrêter ?
- Fais-moi confiance.
Le sourire doux qui ornait le visage de Denki fit lâcher le cœur d'Hitoshi le temps d'un instant, surtout lorsqu'il se rendit compte que de toute leur discussion, il n'avait pas une seule fois souri.
- Au fait, je n'ai pas voulu te le dire à ce moment là parce qu'une claque convenait mieux, mais...
Il se pencha vers Shinsō, lui attrapa le menton pour aligner leur visage, puis posa ses lèvres sur celles d'Hitoshi.
- Je... Que... balbutia-t-il lorsque quelques secondes plus tard Kaminari s'éloignait de lui.
- C'est aussi un peu pour ça que je ne pourrais jamais te laisser tomber, avoua-t-il, les joues un peu rosées.
Il commença à marcher vers le vélo de Shinsō, presque en sautillant, puis se tourna vers lui en souriant.
- On va faire un tour ?
- - - F I N - - -
Un OS assez triste, comparé à ceux qui vont suivre, mais qui me plaît beaucoup
Cet OS est l'un de mes préférés, parce qu'il me tient à coeur. En fait, beaucoup des sentiments d'Hitoshi ont été miens il y a encore environ un an, et je m'identifie donc énormément à lui dans cet OS...
En tout cas, j'espère qu'il vous a plu ; et sachez que, si vous aimez le Shinkami, beaucoup d'OS seront publiés dessus ! (Il y a le n°8, pour l'instant)
Voilà voilà, je n'ai pas grand-chose à dire de plus ici, donc... À plus !
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