OS n°2
C'était la première fois qu'il entrait dans ce bâtiment. Il l'avait souvent aperçu, écrasant, imposant, il préférait ne pas passer à proximité.
Personne n'aimait passer à côté. Et absolument personne ne voulait y entrer. La Prison Z.E.R.O.
Pourtant, Einamu se dirigeait vers ce lieu. Il frissonnait de peur et regardait de tous côtés, comme si on allait l'attraper et l'enfermer.
Les visites étaient autorisées, même si elles étaient très rares. Personne n'avait le courage de s'approcher de cet enfer sur Terre.
De plus, les horaires de visite étaient restrictifs : de six heures à six heures trente le matin et de vingt-deux heures à vingt-trois heures.
Einamu avait choisi le matin, il redoutait encore plus de visiter la bâtisse sous une obscurité quasi-parfaite.
Le soleil teintait le bâtiment de rouge et d'orange lumineux, sans réussir à l'embellir. Il sentait la sueur dégouliner le long de son dos, et il avait l'impression qu'il allait faire un malaise tant cet endroit le rendait nerveux.
Il respira plusieurs fois profondément et pensa à son capitaine. Il le faisait pour le voir, il était dans son droit, tout allait bien. Il finit par se mettre devant la porte et poser sa main sur le détecteur d'empreintes.
La porte coulissa avec un grincement qui prouvait qu'elle n'était pas souvent utilisée. Une fois franchie, il se retrouva dans un accueil entièrement bâti en métal foncé et éclairé par des lumières rouges. La réceptionniste n'était pas un androïde, comme c'était courant maintenant.
- Bonjour, je... Je viens rendre visite à quelqu'un.
La femme leva un sourcil hautain.
- Son nom ?
- Alpha, capitaine de Protocol Omega.
Elle entra les données avec un clavier holographique.
- Et votre nom ?
- Einamu, membre du Protocol Omega.
- Cellule 1B4. L'ascenseur est juste derrière moi.
Elle lui tendit un pass qu'il récupéra et il se dirigea vers l'ascenseur. Il inséra le pass dans la fente et entra dans l'ascenseur. Le 1 correspondait à l'étage, mais en insérant le pass on n'avait pas besoin de rentrer la destination. Il arriva au premier étage et il inséra le pass dans le couloir B. La cellule de son ami était la quatrième.
Son ami... C'était ainsi qu'il considérait Alpha, comme son meilleur ami, son soutien, à qui il vouait une loyauté sans faille. Il irait jusqu'au bout du monde pour son capitaine. Cependant, depuis qu'il ne le voyait plus, depuis qu'il ne le côtoyait plus chaque jour, il avait l'impression qu'il lui manquait la moitié de son âme.
Il ne souriait plus, ne riait plus, même avec ses autres meilleurs amis, Reiza, Kuosu et Zanou. C'était à ce moment-là qu'il s'était rendu compte qu'Alpha était peut-être plus que son meilleur ami ou son capitaine.
C'est pour cela qu'il se trouvait là, qu'il avait vaincu une de ses plus grandes peurs. Pour trouver une réponse, savoir si il aimait Alpha ou si il souffrait juste de l'absence de son meilleur ami. Mais au fond de lui, il était déjà sur de la réponse, il l'aimait, rien que le fait de penser à son capitaine remplissait le cœur du brun d'une chaleur qui lui donnait des ailes.
Cependant il lui restait une question fondamentale : que ressentait Alpha pour lui ? Était-il un ami, un coéquipier, un meilleur ami ou plus ?
Il voulait savoir.
Il était si stupide de s'en être rendu compte seulement maintenant... C'est pour ça qu'il ne voulait pas reculer, il voulait savoir ce que ressentait Alpha pour lui. C'était devenu sa seule raison de vivre.
Il franchit l'espace qui le séparait de la quatrième cellule. Alpha y était assis. Il mangeait le petit-déjeuner réglementaire. Un cookie et un verre de lait, l'antique repas du Père Noël. Les prisonniers avaient une demi-heure pour manger, se doucher et s'habiller avant de commencer l'entraînement.
Ils n'étaient pas réellement prisonniers, ils avaient le droit d'aller et venir dans le bâtiment, mais ils ne pouvaient en sortir, et ils avaient quotidiennement un entraînement très éprouvant.
Une paroi bleue légèrement translucide séparait les deux adolescents, un obstacle pas vraiment infranchissable puisque les deux pouvaient l'ouvrir. Cependant pour Einamu, il représentait ses doutes et ses hésitations. Alpha ne l'avait pas encore vu, il pouvait encore faire demi-tour et comme si rien ne s'était passé.
Cependant il ne voulait pas, il allait faire face et savoir.
Il prit une grande inspiration avant de poser le pass contre le lecteur. La porte coulissa avec un léger bruit qui fit réagir Alpha.
- Einamu ? Qu'est-ce que tu fais là ?
- Je... Je suis venu te voir.
- C'est gentil, je ne reçoit jamais de visites ici, répondit le capitaine avec un sourire ironique. Alors comme ça tu as osé rentrer ici ?
- Il faut croire que j'ai un peu de cran.
Le même sourire ironique se plaqua sur les lèvres d'Einamu.
- Comment va l'équipe ? demanda l'ex-capitaine en tapotant le lit à côté de lui, invitant le brun à s'asseoir, ce qu'il fit.
- Plutôt bien. Certains ont été assez... choqués, et ont eu du mal à s'adapter à Beta. Mais bon, ils n'ont pas vraiment eu le choix...
- Je les comprends, ça ne doit pas être facile pour eux, ils ont toujours travaillé sous mes ordres.
Einamu était un peu déçu, son capitaine de préoccupait essentiellement de son équipe. Il s'y attendait, certes, mais il espérait un peu plus de considération.
- Et toi, comment vas-tu ?
Les prunelles grises de son capitaine le scrutaient, et il sentit son rythme cardiaque s'accélérer.
- Je... Je vais bien.
- Ne mens pas, je le vois très bien. Tu es triste que je sois parti. D'habitude, tu es toujours souriant, et là j'ai l'impression d'avoir affaire à une tombe. Tu m'aurais raconté en souriant la relation entre Reiza et Kuosu, ou la dernière maladresse de Gaura.
- Capitaine... a-t-il chuchoté.
Il ne pensait pas que son capitaine aurait remarqué ce changement. D'ailleurs, il ne savait pas du comment allait se passer cette conversation, il était un peu perdu. Il savait juste qu'il avait un objectif : déclarer ses sentiments.
- Je suis triste que tu sois parti. Si j'ai toujours fait de mon mieux, c'était pour ne pas te décevoir, et maintenant, je suis un peu... déboussolé.
Déboussolé, c'était le mot juste. Il regardait fixement ses genoux en disant cette phrase.
- Ne le sois pas.
Le brun releva vivement la tête, et rencontra le regard neutre de son capitaine.
- Travaille pour Beta comme tu l'as fait pour moi. Un chef en vaut un autre. Je ne suis pas irremplaçable, tu sais. Oublie-moi.
En entendant ces mots, Einamu se releva vivement, sautant sur ses pieds Pit se mettre face à Alpha, comme si une guêpe l'avait piqué.
- T'oublier ? Mais je ne peux pas ! hurla-t-il. Tu es irremplaçable, personne ne t'égalera jamais pour moi ! Tu es plus qu'un meilleur ami, qu'un chef, tu es... Tu es... Je t'aime !
Ça y est, il l'avait fait, il avait trouvé au fond de lui le courage nécessaire, le même qu'il avait trouvé pour rentrer dans cette bâtisse.
Il ne savait pas ce qu'était Alpha pour lui, il était bien plus qu'un ami, il était une parti de son âme, son repère, sa boussole.
Alpha semblait avoir compris que ce n'était pas des paroles en l'air et que les sentiments d'Einamu étaient profonds. Il se contentait de regarder ce dernier fixement, la bouche entrouverte.
Les larmes montaient aux yeux d'Einamu. Il se détourna pour sortir de la cellule. Son capitaine ne s'attendait visiblement pas à de tels aveux. Il était stupide d'avoir pensé que son capitaine pouvait être attiré par lui...
Il s'apprêtait à quitter la cellule lorsqu'il sentit une main sur son bras, qui l'obligea à pivoter. Et avant même qu'il ne puisse penser, les lèvres d'Alpha se posèrent sur les siennes.
Ce baiser dura peut-être une quinzaine de secondes avant que le violet ne se détache pour contempler le visage de son ami.
- J'en ai tellement rêvé, Einamu...
Il n'avait pas rêvé, c'était bien son capitaine qui venait de dire ça ? Il avait l'impression de flotter dans une bulle de joie, que son cœur allait exploser.
- Je t'aime, Alpha, bredouilla-t-il, je t'aime tellement...
- Moi aussi, Einamu...
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