J'aimerais être dépossédé de tous mes biens, jetés dans une misère surhumaine quelque part entre le pacifique et l'Asie, pour me rendre compte que le peu est une richesse.

J'aimerais être enfermé dans un cachot inaudible et éternel où la vue me sera arrachée par la noirceur des lieux et où la solitude rongera ma peau desséchée, meurtrie, pour me rendre compte de la nécessité de l'autre.

J'aimerais être orpheline, enfants vagabonds des terres hostiles avec pour seul lot, la diatribe d'étrangers, éphémères dans leur émotion, pour me rendre compte de l'importance d'avoir des parents.

J'aimerais sentir la mort me tordre jusqu'à mon dernier souffle, qu'il me prenne toutes mes aspirations et fasse de moi l'incarnation même du désespoir pour me rendre compte qu'il est urgent de vivre voracement.

J'aimerais aussi ne plus croire en rien, ni en moi, ni à l'autre et encore moins à des êtres supérieurs, ni aux règles, aux lois, à la justice pour me rendre compte qu'une société structurée à ces bénéfices. 

J'aimerais par-dessus tout ne plus connaître l'étreinte de l'autre, me laisser aller dans l'illusion d'un célibat durement mérité, d'un rejet, d'un refus catégorique de vouloir être désiré, de fermer l'oeil sur l'effort d'un partenaire, d'être le carcan, la calamité et Pandore pour me rendre compte du pouvoir de l'amour.

...