Essai
Il est où le bonheur? Il est là!
Sommes-nous plus heureux en 2019 qu'il y a 1 siècle? À l'ère où nous sommes, voguant entre une période de grands troubles et d'indéfinissables affects humains, la question du bonheur devient essentielle pour la survivance d'un bon nombre d'individus, car pourquoi poursuit-on ce bonheur si ce n'est dans l'espoir de toujours mieux aller. L'on dit souvent qu'il est difficile de définir le bonheur puisqu'il est propre à chacun. Dans le dictionnaire français, le sens qu'on lui donne est multiple et il l'est tout autant pour chaque individu. Le bonheur qui naît ou du moins qui coïncide avec l'apparition de la philosophie en Grèce antique est en quelque sorte un éveil. L'être dit rationnel prend conscience de la notion de bonheur intrinsèquement liée à une heureuse et bonne vie. À l'an 341-270 av. J.-C, le philosophe grec Épicure affirmait que la pratique de la philosophie rendait heureux puisqu'on y acquiert de la sagesse. La philosophie étant faite pour connaître l'homme et pour qu'il se connaisse lui-même, c'est de lui donner les moyens pour qu'il trouve un bonheur qui lui convient. De 470 à 399 av. J.-C, une nouvelle manière de penser le bonheur est mise de l'avant par Socrate qui prône la vie vertueuse, sans trop d'égarement dans le plaisir pour trouver le bonheur. Quant au philosophe allemand, Emmanuel Kant, 1724-1804, sa notion du bonheur se rapproche de ce l'on en connaît aujourd'hui.
2. « Il affirmait que renoncer au bonheur, c'était comme renoncer à être homme. Comment définir le bonheur, selon lui, si on ne parvient pas à exprimer ce que l'on désire? Ainsi, nous pouvons énumérer des petits bonheurs, comme contempler un beau paysage, rencontrer des amis, lire un bon livre, etc. Ce n'est qu'en faisant l'expérience du bonheur que nous pouvons dire ce qu'il est. Aussi, sommes-nous incapables de dire avec certitude ce qui nous rend heureux ou de fixer une règle au bonheur.
Pour certains, le bonheur sera dans une vie de famille, tandis que pour d'autres, le bonheur sera dans une vie de solitude. Tous les bonheurs sont dans la nature et on ne peut faire de distinction entre le bonheur des uns et le bonheur des autres. Le bonheur est un idéal qui ne se prescrit pas comme un remède. »
Dans la période moderne qui couvre 70 ans de l'histoire, la notion de bonheur fut collective. C'est-à-dire qu'il y avait cette idée que la science et la politique devaient servir à l'avancement, au progrès de la civilisation occidentale et ainsi permettre à la population d'entrer en osmose avec le bonheur. C'est bien un revers douteux et amer qui surprend, quand l'on comprend qu'il n'en était rien d'espérer grandir ensemble dans une idéologie politique ou une conception scientifique pour atteindre le bonheur. Ainsi, on le constate avec les deux Grandes Guerres mondiales, la bombe atomique, les génocides pour ne nommer que ceux-là. L'échec de la modernité est cuisant dans un virage quand la postmodernité braque ses phares sur la société, les zones plus sombres s'entrevoient peu à peu, faisant ressortir les gorgones nocturnes et suceuses d'espoirs. On s'est perdu véritablement dans les dédales de la technologie. C'est devenu le « moi » avant tout.
Je veux qu'on me regarde, je veux réussir là où l'autre a échoué, je veux la plus belle maison, la voiture la plus performante, voire luxueuse, pour m'étaler devant les autres. Les plus beaux souliers Adidas, le dernier modèle sortit qui coûte 300$, je veux le montrer à tout le monde pour qu'ils sachent que j'en ai un. Je veux et j'obtiens. Je désire et je me comble. Après tout, si cela me rend heureux, à quoi bon. C'est mon bien être qui compte par-dessus tout.
Kant nous dit : le bonheur peut se trouver dans tout, il suffit de savoir exprimer ces désirs pour combler « son » bonheur puisque c'est un idéal.
Sophie nous dit : moi, je trouve mon bonheur dans les boîtes de nuit, à draguer et à boire toute la nuit. Je suis jeune, célibataire et en pleine forme, alors qu'est-ce qui devrait m'arrêter. Je baise par-ci par-là tout en me protégeant et je suis comblée. J'ai des amis formidables qui comprennent mon mode de vie. C'est ma vie, j'ai choisi de la vivre comme ça et je ne désire en aucun cas y changer quoique ce soit, pour le moment.
L'idéal de 3. Sophie se trouve dans les plaisirs nocturnes où les gorgones rôdent. C'est cela donc le bonheur pour elle et pour une bonne partie de la jeunesse dorée. Sauf qu'il peut sembler vide de sens et se heurte très rapidement à une réalité bien plus fracassante. Des auteurs ayant écrit sur le sujet, montrent pour la plupart un individu qui finit toujours par être en perte de repères puisque la plénitude d'une vie faite seulement de plaisir, de l'instant, de liberté absolue, finit toujours par arracher l'être du soi, le laissant dépérir aux creux de ses racines. Le roman du journaliste Nicolas Langelier réussir son hypermodernité et sauver le reste de sa vie en 25 étapes faciles est l'œuvre qui illustre au mieux cette idée de décadence postmoderne qui influe sur la vie d'un homme en fuite depuis toujours dans le plaisir, mais qui finit par se réveiller de sa torpeur pour rechercher le bonheur et le bien être spirituel dans le sens où il cherche à se retrouver en tant qu'individu, à se reconnecter à lui.
L'idée de l'individu est encore là. C'est lui qui décide de partir à la quête de sens de la vie, c'est aussi l'individu qui s'oublie dans un trou béant de bornitude. C'est à croire qu'il est aussi complexe qu'une formule mathématique délimitée. Au final, qu'on veuille le résoudre, le décomposer à l'infini, il aura toujours sa fin. Tout ne tourne qu'autour de l'individu dans une période de grande consommation, de grands enjeux. Le bonheur dans tout ça s'acquiert véritablement de quelle façon? Il ne sera pas pareil pour le jeune adolescent et le père de famille en fin de vie. Le bonheur nous la voulons tous, mais mon bonheur ne sera peut-être pas le bonheur de mon voisin. Si comme Wikipédia le décrit dans ces premières lignes : « Le bonheur est un état émotionnel agréable, équilibré et durable dans lequel se trouve quelqu'un qui estime être parvenu à la satisfaction des aspirations et désirs qu'il juge importants », il ne reste plus qu'à l'intégrer dans le DSM pour qu'il soit identifiable et attribuable le plus facilement possible. Comme cela, plus personne ne se questionnera à savoir s'il est propre à chaque individu, mais seulement en observant l'état dans lequel se trouve une personne, on peut dire qu'il est atteint du bonheur. Mais plus sérieusement, si on y réfléchit, le bonheur peut durer sur une période, mais avec tout le foisonnement dans cette société hypermoderne, il est difficile de le préserver plus longtemps que... À vrai dire, pour faire plus simple, moins philosophique et plus contemporaine, le bonheur c'est de prendre une bonne bière autour d'un feu de camp ou encore de passer une soirée entre copines à parler des dernières trouvailles en matière d'homme. Encore bien plus, c'est de profiter de sa vie tout simplement et non de laisser la vie profiter de nous.
Une fois, l'on m'a demandé si j'étais heureuse parce que je semblais toujours recluse et dans ma bulle contrairement à mon entourage qui vibrait en tout temps. J'ai acquiescé à mon interlocuteur, mais je le faisais pour moi-même sans le savoir. Il m'a regardé avec dédain et s'en est allé. Alors, je me suis dit et répété que j'étais heureuse dans ma solitude, peu importe ce que les gens pouvaient penser. J'ai ainsi conditionné mon cerveau à cet état qui me procurait un grand bien. Un état dans lequel j'ai besoin de me plonger parfois pour me retrouver.
En fait, je ne crois pas que le bonheur on l'atteint. Si aujourd'hui, il est devenu une quête de vie pour certains, c'est qu'il le leur échappe au quotidien. Pourtant, il doit être là au quotidien. Il doit nous accompagner toute notre vie. À force de vivre dans cette époque d'excès, on s'y perd de trop à vouloir toujours plus et donner moins. C'est alors dans un potentiel « éveil spirituel » qu'on finit par se dire que le bonheur n'est pas dans le factice des désirs, de nos relations, mais profondément en soi. Sois heureux et nous serons heureux ensemble. C'est à force de vivre décalé de la réalité qu'on cherche toujours à atteindre le bonheur.
Notes
1.Christophe Maé – « Il est où le bonheur », chanson, YouTube.
2.Eric. « Le bonheur selon les philosophes »[en ligne] (publié le 10 février 2013)
3.Individu fictif, vivant aux temps des milléniaux.
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