🟢🍽️ Lost
(décembre 2020)
Cela fait une semaine que l'on m'a dit que la guerre était terminée. Une semaine que j'attends ton retour, alors que je sais que tu ne reviendras pas. Tu ne reçois pas mes lettres, de là où tu es... mais ça me fait du bien de t'écrire, tu sais ?
Je ne cuisine plus. Je ne mange plus et je ne dors plus. Je n'y crois pas. Je ne veux pas y croire... Ma tête est remplie de questions, elle me fait mal.
As-tu souffert ? Est-ce qu'on a retrouvé ton corps ? Quand vais-je pouvoir faire mon deuil ?
Tu me manques, Zoro...
Te perdre, c'est tout qui s'envole.
Je perd l'océan de ton regard, la finesse de ta bouche, le ballet de tes cils chaque fois que tes paupières se ferment. Je perd la douceur de tes cheveux, le toucher de tes doigts sur mon visage, tes lèvres sur les miennes. Je perd cette virgule que formait ta bouche, lorsqu'elle me disais : "je t'aime".
Quand te reverrai-je ? Dans beaucoup trop longtemps à mon goût...
Sur cette table, j'observe ce liquide cristallin, comme de l'eau, qui me permettra de te rejoindre.
Les mains comme des feuilles mortes au vent, je touche du bout du doigt le verre transparent. En le prenant, je laisse s'échapper un soupir peu rassuré de ma bouche. Le portant à mes lèvres, je ferme les yeux un instant. La tête penchée, le regard rivé au plafond, les larmes glissant sur mes joues, j'attends. Comme si les secondes duraient des heures. J'attends que cette sensation froide dans ma bouche arrive, désespéré.
C'est à ce moment-là que la porte s'ouvrit.
"Sanji..."
Le verre vole en éclats, le liquide se répand sur le sol, alors que je me tourne vers l'entrée.
Il n'y a rien...
J'ai rêvé.
À ce moment-là, mon corps tout entier tombe lourdement. Et je fond en larmes.
Tous les mots que tu ne me diras plus jamais, toutes les choses que tu n'auras jamais vues, tous ces moments que tu n'auras pas vécu...
Couché sur le côté, sur le carrelage froid, je ramène mes genoux contre mon torse, et m'endors.
_________
Sanji...
Le bruit des balles qui s'écrasent sur le sol me rappellent la pluie de ce jour.
Tu te souviens ? Nous nous étions abrités sous un arbre.
C'est ici... Que toi et moi nous sommes embrassés pour la première fois.
Pour la toute... la toute première fois.
Tu me manques.
Je ne reçois pas toujours tes lettres, je crois.
Tu n'as pas l'air de recevoir les miennes non plus, d'après ce qu'il y a écrit dans celles qui parviennent à moi.
Je commence à désespérer, Sanji.
Il y a deux semaines seulement, le camarade avec lequel j'étais le plus proche est décédé.
Ses intestins se répandaient sur le sol, mais il continuait d'essayer d'avancer...
C'était si dur.
On nous a dit que la guerre était terminée il y a une semaine.
Je n'y crois pas.
Pourquoi s'arrêter maintenant, après tant de pertes ?
Et puis, à ce que je saches, je suis toujours sur place.
Je ne sais même plus pourquoi nous nous battons.
J'en ai assez, Sanji... Je veux rentrer à la maison. Je veux te serrer dans mes bras, t'embrasser, te traiter d'imbécile, m'excuser, rire avec toi, pleurer, parfois...
Je veux que tout redevienne normal...
On nous a dit de rester ici pour quelques jours encore. Tu m'attendras, pas vrai ?
Je t'aime, le cuistot...
_________
Deux semaines que la guerre est terminée...
Tu n'es toujours pas rentré.
Je ne veux pas croire que tu...
Non... C'est impossible.
Zoro, il faut que tu reviennes... Je ne supporte plus de t'attendre en sachant que tu ne reviendras pas...
Si tu es en vie, reviens... Je t'en supplie...
Je ne sais même pas pourquoi je garde l'espoir que tu sois en vie.
J'en ai assez... Cette fois j'arrête.
Je ne peux pas. Je ne peux pas vivre sans toi.
Ma dernière cigarette, la dernière fois que je ferme les yeux, mon dernier jour, mon dernier silence.
Mon premier et dernier coup de feu.
Le canon contre mon front, je souffle la brume blanche hors de mes poumons.
Le doigt sur la détente, je ferme les yeux.
Soudain, j'entend la porte grincer.
Je ne me retourne pas.
"Sanji...
_T'es pas réel. Je ne me ferai pas avoir deux fois.
_....Poses ce flingue."
Mon imagination me fait entendre des pas s'approcher de moi.
"Poses le."
Ça a l'air tellement réel...
Je me retourne.
"Zoro..."
Le pistolet tombe sur le carrelage blanc.
"Je suis rentré... Désolé de t'avoir fait attendre."
Il pose ses lèvres sur les miennes.
Je met main main sur sa joue.
"Tu es là... C'est toi..."
Il sourit.
Je me jette dans ses bras.
"Zoro... Je suis perdu, sans toi... Ne pars plus jamais.
_Jamais. Plus jamais, Sanji."
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