Elle entendait les rumeurs des conversations dans les rues. Elle sentait l'odeur des épices du marché tout près. Elle vit Kakashi Hatake s'asseoir en face d'elle, dans ce petit salon de thé alors qu'il détestait le thé. Il ne prit pas la peine de la saluer, posa les coudes sur ses genoux et se pencha vers elle.

Elle avait appris que le silence n'était pas quelque chose que Kakashi Hatake fuyait. Il la considéra quelques instants avant de soupirer et se massa le front.

Ses gants étaient usés et se décoloraient par endroits. Les plaques en métal en revanche étaient brillantes. Kakashi Hatake ne prenait soin que de ce qui était important. Ces plaques, qui, parfois, pouvait vous sauver la vie.

-C'est tranquille en ce moment, non ? Finit-il par demander.

-Si vous voulez dire que le remue-ménage post-guerre est calme, alors oui, on peut dire ça.

Le village était en effervescence. Toute la journée, les ouvriers valsaient avec les charrettes à travers les rues pour reconstruire tous les bâtiments détruits. L'hôpital était sur le qui-vive, tout le monde attendait le début d'une épidémie. L'administration était en état de névrose constante pour tenter d'endiguer tous les problèmes, toutes les protestations et tous les événements nécessaires à la reconstruction de Konoha. Et les ninjas démunis erraient, comme eux, dans un salon de thé par exemple.

Kakashi Hatake ignora l'ironie et soupira. Sakura ne prêtait que peu d'attention à ces respirations appuyées. Depuis le temps qu'elle connaissait son professeur, celui-ci semblait principalement respirer par soupirs.

-J'ai une mission à te proposer, précisa-t-il

-Vous distribuez les missions, maintenant ?

-Seulement celle-ci.

Kakashi Hatake s'accommodait bien du silence. Il aimait donner des demi-réponses et obliger son interlocuteur à poser les questions qu'il avait en tête. Sakura, bien qu'elle le savait, ne pouvait s'empêcher de trouver cette manie particulièrement agaçante.

-Parce que ? Demanda-t-elle en se retenant de lever les yeux au ciel.

-C'est une mission proposée par le Conseil. Tsunade trouve qu'elle est inutilement dangereuse, elle refuse d'y envoyer ses ninjas, et particulièrement son élève.

-Vous aimez poser problème, Kakashi-sensei, sourit Sakura. En quoi consiste la mission ?

-C'est en rapport avec des événements particuliers au pays de la foudre.

Sakura haussa les sourcils.

-Tu sais bien que je ne peux pas t'en dire plus tant que tu n'acceptes pas la mission. Et j'insiste, Tsunade pense que c'est une mauvaise idée. Et elle a raison.

C'était inhabituel de la part de son professeur de proposer quelque chose qu'il considérait comme trop risqué. Kakashi Hatake, plus que quiconque, savait ce que signifiait être envoyé sur une mission où l'issue probable était la mort. Aussi négligeant qu'il puisse paraître, jamais il n'avait envoyé un de ses protégés sur une mission qu'il estimait être du suicide.

-Si c'est « dangereusement inutile » comme vous dites, pourquoi est-ce que vous me la proposez ? Finit-elle par demander.

-Parce que ce sera une dernière mission.

La gorge de Sakura se serra. La guerre était finie. Tsunade avait émis le souhait de partir, Kakashi avait été désigné pour prendre sa place – l'annonce était tombée il y a quelques jours. Il allait devoir s'enfermer dans la tour de l'Hokage pour traiter de questions qui ne l'intéressaient pas et prendre en main la reconstruction d'un village qui, pour lui, abritait plus de morts que de vivants. On lui demanderait de prévoir le futur alors qu'il était enchaîné à son passé, avec ses fantômes. Elle sentit les larmes affluer ; Kakashi ne méritait pas ça. Tout comme, elle en était certaine, elle ne méritait pas ce qui se profilait pour sa propre vie future.

Après la confrontation finale, Sasuke était revenu. Quelle avait été sa joie lorsqu'elle l'avait retrouvé ! Mais Sasuke, après ses années d'exil et les épreuves traversées, n'était qu'une coquille vide, incapable de créer aucun lien. En revanche, le village souhaitait le retour de la lignée Uchiha et de son puissant Sharingan. Sakura étant l'ancienne coéquipière du dernier Uchiha et issue d'un des rares clans qui ne disposaient pas d'habilité particulière, elle avait été choisie pour épouser Sasuke et concevoir les futurs Uchiha. C'était une victoire bien trop amère. Toutes ces années de souffrances, d'entraînements et d'abnégations pour finir comme « épouse de », liée à un homme qu'elle croyait aimer mais qui n'était pas capable de recevoir un tel sentiment.

Avec cette mission, Kakashi s'était débrouillé pour trouver une dernière échappatoire et il la lui offrait sur un plateau.

-Quand est-ce qu'on part ? Demanda-t-elle.

*

Kakashi sentait la chaleur de Sakura dans son dos. Quelle drôle d'idée que de partager ce lit de fortune avec elle. Ils avaient perdu leur sac de couchage pendant leur dernier combat. Ils avaient d'ailleurs à peu près tout perdu, hormis le nécessaire de Sakura qui contenait sa trousse de secours et ses herbes.

Trousse qui avait été extrêmement utile puisqu'ils avaient chacun souffert d'un certain nombre de blessures pour parvenir à s'échapper du guet-à-pent dans lequel ils s'étaient malencontreusement fourrés. Sakura était trop épuisée pour utiliser son chakra et les soigner. Elle avait même abdiqué lorsque Kakashi avait proposé de lui suturer une vilaine plaie qu'elle avait dans le dos, à hauteur des reins.

C'est après leur séance de soins qu'ils avaient réalisé qu'ils n'avaient pas de quoi dormir. Bien évidemment, Sakura étant Sakura, elle l'avait abreuvé d'arguments et d'études pour lui assurer que dormir ensemble était le meilleur moyen de conserver leur chaleur corporelle. Excédé, Kakashi avait accepté de s'allonger aux côtés de la jeune fille. Il était trop fatigué pour la contredire, il avait besoin de se reposer, surtout qu'ils n'étaient pas encore en territoire sûr. Il convoqua sa meute pour qu'elle montât la garde afin qu'ils puissent dormir tous les deux et repartir plus vite.

Mais maintenant, allongé non loin d'elle, il trouvait que c'était une mauvaise idée. Et il savait qu'elle pensait la même chose. Son dos était raide et sa respiration n'était pas celle paisible des dormeurs.

-Merci.

Perplexe, il finit par se tourner vers elle. Malgré l'obscurité, il voyait des traces sombres sur la nuque de Sakura et certains de ses cheveux collaient à sa peau. Il sentait le sang ; le leur et celui de ceux qu'ils avaient tués. Ils puaient la fatigue aussi.

-De quoi ? Demanda-t-il, agacé.

Il détestait comme elle arrivait à le faire parler. Elle manœuvra elle aussi pour se retourner. Ses yeux verts brillaient dans la nuit et il se sentit bête de penser quelque chose d'aussi cliché.

-Pour cette dernière mission.

Kakashi ne se savait plus capable d'une telle émotion mais il sentit son cœur se serrer. Il voyait dans les yeux de Sakura qu'elle aurait peut-être souhaité qu'ils ne reviennent pas. Que ses derniers jours auraient été vécus librement, dans les combats et dans le sang. Mais ils étaient des ninjas, et ils mettaient tout en œuvre pour revenir vivants, toujours.

Il était fatigué, alors sans réfléchir, il leva la main et la posa sur sa joue. Elle était si jeune. Pourtant, lui, il avait été envoyé sur de pareilles missions bien plutôt qu'elle. La joue de Sakura était lisse, sa peau avait la douceur de l'innocence mais les yeux verts étaient déjà vieux. Leur éclat ne dissimulait pas le vécu. Ce n'étaient pas des yeux d'une fille de seize ans. C'étaient des yeux de médecin, de ninja, de femme, d'endeuillée. C'était les yeux de Sakura maintenant.

Il ressentit plus qu'il n'entendit l'accro dans la respiration de son ancienne élève et il saisit sa nuque, fort pour l'attirer vers lui. Il posa son front contre le sien. Juste ça. Juste un contact avec cette femme qu'il avait tellement l'impression de connaître. Il refusait de faire un mouvement de plus. Il ne voulait pas prendre cette responsabilité. Elle le fit pour lui. Ses doigts s'accrochèrent au bord de son masque et tirèrent doucement dessus. Il lui masqua les yeux ; il ne voulait pas qu'elle le voit. Elle accepta cette condition et il sentit ses paupières se fermer sous sa paume.

Il avait peur de l'abîmer encore plus. Mais est-ce que ce n'était pas prétentieux de penser qu'il avait ce pouvoir sur elle ? C'était peut-être même bien l'inverse. Elle se rapprocha de lui, colla son corps au sien. Il pencha son visage vers ses lèvres. Cette fois, il entendit pour de bon l'accroc dans sa respiration lorsque sa bouche effleura la sienne.

Sans prévenir, il plaqua ses lèvres contre les siennes. Tout aussi brusquement, elle lui rendit son baiser. Désir et précipitation. Il se débarrassa de son tee-shirt alors qu'elle lui retirait son pantalon. Il ne fallut que quelques instants pour qu'ils se retrouvent nus, enlacés. Kakashi roula sur elle, pour la dominer. Un bref sourire étira les lèvres de Sakura et elle balança ses hanches pour se retrouver, elle, au-dessus. Pendant un bref instant, ils restèrent immobiles, les yeux dans les yeux. Kakahi ne se demanda pas comment ils en étaient arrivés là ; il était simplement fasciné par la femme qui le dominait et par la chaleur qui émanait d'entre ses cuisses.

Sakura roula des hanches la première, frottant son intimité contre son érection avant de bouger pour lui permettre de la pénétrer. Tout comme le baiser, les coups de reins se révélèrent brusques et frénétiques. Pour l'aider Kakashi agrippa ses hanches. Il voyait ses seins bouger et son propre sexe disparaître dans le sien. Un gémissement sortit de la bouche de Sakura, il planta ses doigts plus fort dans sa chaire, ses ongles griffant la peau. En représailles, elle se pencha pour lui mordre l'épaule, fort, ça lui faisait mal. Il demanda dans un soupir qu'elle continue. Il la sentit sourire, les dents encore enfoncées dans sa peau. Elle desserra sa mâchoire et laissa échapper un « Viens sur moi ».

C'était la première fois qu'elle le tutoyait.

Kakashi roula sur elle et continua à la pénétrer. Sakura laissait échapper des gémissements de plus en plus sonores. Dans un souci de discrétion, Kakashi plaqua sa paume sur la bouche de la jeune fille. Celle-ci ajusta la position de son bassin pour que le sexe de Kakashi frappe, à chaque fois, l'endroit qui lui convienne. Leurs yeux se croisèrent une dernière fois avant qu'elle ne laissât sa tête rouler en arrière, la gorge exposée et un cri rendu silencieux par sa main. Essoufflée, elle enroula ses jambes autour de sa taille et il retira sa main.

Lorsqu'il crut voir son nom se dessiner sur les lèvres carmin, il sentit une décharge de plaisir primal éclater dans son bas-ventre.

Ça aussi, ce serait pour toutes les prochaines fois ratées.