[JiKook]

« C'est pas de l'amour, ça. Tu te sens coupable, voilà tout. »

Est-ce qu'il se sentait coupable ? Évidemment.

Est-ce qu'il l'aimait ? Hier, il aurait répondu que oui. Sans la moindre hésitation. Ce soir, pourtant, il n'était plus sûr de rien.

_ On devrait commander, souffla t-il sans le regarder. Ça commence à me gonfler de l'attendre.
   
Et s'il débarque je vais devoir me retenir de lui foutre mon poing dans la gueule.

Jimin ne trouva rien à redire.

De son côté, il n'osait même pas relever le regard vers lui. Ce serait de trop. Cette déception sur son visage, l'humidité quasi certaine de ses yeux noisettes. Tout ça, bordel, il n'arrivait plus à le supporter. Et sa culpabilité, grandissante, bouffant la totalité de ses entrailles comme une bête insatiable n'attendait que ça : qu'il lève la tête vers son ami. Juste histoire de le faire souffrir encore un peu. Juste pour que sa culpabilité grandisse encore, et encore, jusqu'à ce que le peu de raison qui lui restait encore se fasse la malle pour de bon.

_ Kook...
_ Regarde cette carte, putain, Jimin. Il ne viendra pas.

Il se retint de lui hurler dessus. Il se retint de se lever, de l'attraper par ses épaules qu'il devinait en train de trembler et de lui crier « Putain, merde, réveille-toi ! Taehyung est un connard et il ne viendra pas ! Quitte-le, Jimin, nom de Dieu ! »

Une envie de rire lui gratta soudainement le fond de la gorge. Cette situation était ridicule. Il n'était qu'un idiot et le pire, c'était sans doute qu'il se complaisait là-dedans. Il était là, dans ce restaurant de merde, le préféré de TaeHyung, son enfoiré de meilleur ami, à tenir compagnie au mec dont il était amoureux mais dont il n'obtiendra jamais rien d'autre qu'une amitié chelou. Et cette espèce de mélodrame à la con, digne d'un grand drama de merde, c'était lui qui l'avait crée. Tout seul, comme un grand.

Que la foule se lève et applaudissent.

Du grand délire.

_ Je n'ai pas très faim, tu sais.
   
Cette petite faiblesse. Non, merde. Cette énorme part de faiblesse, celle-ci même qui lui hurlait « putain, gros con, bien sûr que tu l'aimes, cet idiot et pour sûr que ça va finir par te tuer », l'obligea à relever les yeux vers son ami. Et c'était horrible, vous savez, de constater combien il était malheureux. Et à chaque fois, il se disait que tout était de sa faute. Que tout ça, cette situation merdique, aurait clairement put être évité.
   
Oh, si seulement je ne t'avais pas présenté Kim TaeHyung.

_ Chim, c'est ton anniversaire, souffla t-il d'une voix si basse qu'il se demanda si le blondinet l'avait seulement entendu. Alors, par pitié, commande un truc, je suis épuisé.
   
Oh, épuisé il l'était. Et ça durait, ça durait. C'était horrible. Il avait l'impression que ce n'était plus seulement de la fatigue, c'était comme s'il était sur le point de crever à l'intérieur. Son cerveau était en constant dysfonctionnement. Et y avait cet espèce de film dans son crâne, qui tournait en boucle, avec Jimin et TaeHyung pour personnages principaux. Il finirait peut-être par les détester tous les deux. Peut-être bien qu'un jour il se sentirait prêt à les envoyer boulet. Pour survivre. Juste pour préserver cette minuscule, infime part de lui qu'il avait réussi à garder intact.

Et j'emmerderai ma culpabilité, bordel.

_ On devrait attendre encore un peu, non ?

Il y avait ce ton qu'il connaissait si bien dans sa voix. S'il traduisait, ça donnait « Oh, je t'en prie, JungKook, laisse-moi espérer encore un peu. ». Oh, de l'espoir, il était prêt à lui en donner tout un stock. Pour lui, il était prêt à rester dans ce restaurant pour le restant de ces jours, à attendre son connard de meilleur ami.

Oui, mais alors seulement si ce dernier ne se pointait jamais, justement. Ils resteraient là à attendre un fantôme. Et il aurait tout le loisir de sentir sa culpabilité lui ronger le reste de ses entrailles tout en observant Jimin espérer à l'infini.
   
Vraiment parfait.

_ Si on commande pas, je me casse, Chim. Je sature, là.

Alors il capitula. De ses petites mains, il attrapa sa carte et pile en cet instant, se fut comme le mur de trop. Ce genre de mur qu'on en peux plus de se prendre dans la face. Cette carte, placée entre eux, comme si Jimin lui signifiait encore une fois que son existence n'avait de toute façon pas grande importance, le glaça sur place. Ça représentait toute l'étendue de leur pseudo relation. Jimin était là, mais trop loin. Toujours trop loin. Et ce petit blond, à l'allure angélique, ne cessait de lui prouver que rien n'était possible. Que rien ne le serait jamais. Et c'était horrible.

Chaque petit instant qu'il passait avec Jimin était comme une mauvaise caresse qu'il se faisait.

Oh, sur le moment, c'était merveilleux. C'était subtile, léger. Un mot, un regard lui faisait du bien. Mais l'instant d'après, ça devenait douloureux. Parce que ce n'était que du vent. Ce n'était rien. Et ce rien, ce grand truc qui n'existait même pas, représentait l'énorme tout qui le bouffait.
   
Sans le vouloir, Jimin était devenu l'élément nocif de sa vie. Petit-à-petit, il le bouffait tout cru. Et bientôt, il deviendrait ce rien qui n'existait pas.

Et Yoongi avait peut-être raison. Peut-être que ce n'était pas de l'amour, tout ça. Ou alors de l'amour dégueulasse, qui pourris à l'intérieur.

Ils finirent par commander. La lueur dans les yeux de Jimin, tandis qu'il surveillait la porte d'entrée du restaurant, lui retournait l'estomac. C'était terrible, ça prenait toute la place. Oui, bordel, Jimin prenait toute la foutue place. Il était comme un espèce de cinglé dont la vie se limitait à une seule personne. Et il aurait pu, là, dans l'instant, dresser le portrait du blond. Ses habitudes, ses tics, sa façon de marcher, de chanter, de rire, de pleurer. Et surtout, cette façon qu'il avait d'attendre, d'être sur la défensive, d'être prêt à l'éventualité folle que Kim TaeHyung allait finir par franchir le pas de cette putain de porte, oh, il la connaissait par cœur.

Quel talent. Mais quel talent !

_ Arrête de l'attendre, par pitié.

Le regard qu'il lui adressa s'apparentait à un coup de poing dans le ventre. Il avait envie de se jeter à ses pieds et de s'excuser. Il resterait plier là, à attendre qu'il le pardonne jusqu'à s'en faire saigner les genoux, jusqu'à crever de faim. Et sans doute que l'enfer serait plus confortable que de rester le cul vissé sur cette chaise, contraint de regarder la douleur dans les yeux de son ami.

_ Je t'ai même pas acheté de cadeau.

Le petit blond haussa les épaules.

Mais oui, après tout, il s'en fichait de son cadeau. Ce n'était pas ça qu'il attendait. Il avait bien fait de laisser le petit porte clé acheté sur un coup de tête chez lui, bien à l'abri de Jimin et de son désintérêt.

Son horrible désintérêt.

_ T'es malheureux, Jimin.

Il secoua le menton en murmurant que non, il ne l'était pas. Et il mentait. Il mentait si souvent. Ou alors était-ce un espèce de déni. Ça n'avait aucun sens, putain.

_ Moi je crois que tu te rends pas compte.

Son ami fronça les sourcils. Il l'aimait, ce petit froncement, ces petits plis que ça formaient. C'était comme son sourire. Tout ce que ça entraînait, la palette d'expressions que ça pouvait créer. Ça le rendait si beau.

_ Tu te rends pas compte de ce truc dans le fond de tes yeux. Tout le temps. Quand tu me regardes, surtout, comme si t'essayais de me faire comprendre un truc important. Et moi j'sais que t'es triste. Et ça me rend dingue. J'aimerais que tu sois heureux.

_ Je le suis, JungKook.

Il secoua le menton. Il avait été heureux, oui. Il s'en souvenait parfaitement. Mais ça ne lui était pas arrivé depuis longtemps. Plus depuis sa rencontre avec TaeHyung. Rencontre qu'il avait lui-même organisé, il y avait déjà deux ans de ça.

Allez, chère amie, bouffe-moi entièrement, qu'on en finisse.

_ Si je pouvais retourner en arrière, je ne te présenterai pas TaeHyung.

Son froncement de sourcils s'intensifia.

_ Raconte pas de bêtise, j'aime TaeHyung.

Voilà. Le fond du problème, c'était là qu'il résidait. Il se prenait un nouveau mur, encore tout frais, bien fait, en plein dans la tronche. Il aimait TaeHyung. Oui, évidemment. Il le savait. Et Jimin, pleins de bonté, le lui rappelait souvent. TaeHyung était partout, tout le temps, même s'il brillait par ses absences, ses rejets, ses trahisons. Et lui aussi, il aimait TaeHyung. C'était son meilleur ami, après tout.

Mais oui, aimons ce gros connard, putain. Je suis bien au fond et c'est là que je devrais crever. Bien, bien au fond.

_ Et c'est avec lui que je veux être, Kook.

Oui, voilà. Après le contour, voici le noyau du problème. Jimin voulait être avec TaeHyung. Et c'était ça l'important. Il se fichait pas mal que lui était sur le point d'en crever. JungKook n'était pas un personne principale de l'histoire de Jimin. C'est juste ce type, là, qu'il a rencontré à la fac et qui lui a un jour présenté son meilleur pote. Puis ça s'arrête là. Oh, bien sûr, ce type est souvent là, parce que meilleur pote oblige. Mais en vrai, c'est qui, dans l'histoire ?

Personne.

Et le pire, dans tout ça, c'était qu'il était prêt à le rester, ce personne dans la vie de Jimin. Ce truc qu'on aime bien, mais malgré tout un peu inutile. Il pouvait bien devenir tout ce qu'il souhaitait.

C'était sa place. Sa petite, minuscule, insignifiante petite place. Et que la culpabilité se régale, il n'en bougerait pas d'un millimètre.

Et l'histoire allait continuer ainsi. Pas de changement. On reprend.

Lumière, action.

Et quel joli, joli petit film.

[...]

J'ai pas grand chose à dire.
Je n'écris plus beaucoup en ce moment. Cette idée devait être un long OS. Voir un truc en plusieurs parties.
Au final, ça donne ce petit truc. Sans grand intérêt, donc.
Comprenez ce que vous pouvez. Y a rien de profond.
Câlins.

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