Minuit. L'heure où la campagne s'endort. L'heure où la  ville se réveille. L'heure où les ombres sortent de leurs cachettes. L'heure où le monde retient son souffle. 

Un petit garçon vient de se réveiller. Il est minuit. Une force étrange le tire de la douce chaleur de son lit. Il foule de ses pieds nus la moquette puis le carrelage glacé. Il met ses chaussures et sort de chez lui. Ses parents dorment sûrement. Ils ont toujours dormi. Il ne les a jamais vu. Dans le ciel ou sous Terre. Il ne sait pas. On lui a dit les deux. Quelque fois des bribes de souvenir le traversent. La chaleur d'un sourire, d'un éclat de voix. Puis cette petite étincelle d'espoir disparaît comme elle est venue. Où va-t-elle ? Il ne sait pas. La force le tire vers la forêt. Il fait noir. Les hautes silhouettes des arbres ressemblent à des mains squelettiques tendues vers le ciel. 

Le petit garçon n'est pas effrayé. Son visage est serein. Presque dénué d'expression. Les feuilles bruissent doucement. Une légère brise les agite. Deux petites lueurs apparaissent au beau milieu du sentier. Elles scintillent et répandent une douce lumière argentée. La force mystérieuse le tire vers elles. Les lueurs grandissent. Elles grandissent jusqu'à l'aveugler. Presque. Elles prennent peu à peu forme humaine. Le garçon voit l'ébauche de deux sourires familiers. Lentement, il s'approche jusqu'à se fondre dans le halo argenté. Puis, il s'évapore dans la nuit, les ombres l'enveloppent et les deux lumières disparaissent. 

Il était minuit.