Chapitre 5 : Calme avant la tempête
- Maman ? Je crois que je n'ai plus besoin d'aller voir la psychologue, je suis guérie.
Près d'un mois et demi se sont écoulés depuis mon réveil si étrange. Depuis j'ai bien évolué et j'ai accepté d'avoir été victime d'une hallucination sommative dû à des troubles de sommeil, point final. L'affaire est close.
- Tu es sûre ? Ce n'est pas une décision qu'on prend à la légère Lisa...
J'écarte les bras.
- Regarde-moi maman ! Je suis en pleine forme, j'ai des amis, je vais bien, je n'en vois plus grand intérêt.
- Alors cette histoire de mort, tout ça, c'est enterré ?
- Enterré.
- Promis ?
- Promis.
Elle me serre contre elle.
- Je suis très fière de toi. Mais j'en discuterai avec ton père...
J'acquiesce. Qu'est-ce qu'ils ont les parents à toujours vouloir faire ce genre de discussion ?
Les grandes vacances se dessinent au loin incluant, la plage, les barbecues, la liberté, et tout un univers estival. Mais il ne faut pas s'emballer nous sommes simplement en mai, et les profs ne nous épargnent pas.
- Je vais aller aider mon oncle dans une pâtisserie, m'annonce Jade.
- Ah bon ? Quand ça ?
- Trois jours par semaine, dès maintenant, sa pâtisserie n'est pas très loin et je pourrai quand même être à l'heure au lycée avec seulement un quart d'heure de transport.
- Le matin ? Mais tu es folle ma parole !
- De toute façon à chaque fois, j'ai du mal à dormir le matin, ça lui fait plaisir, moi ça me fait plaisir, et puis trois jours par semaine c'est presque rien !
Je hausse les épaules, après tout, c'est comme elle veut.
- Je ne pourrai pas t'accompagner sur le trajet les matins, mais ton père pourra t'emmener non ? enchaîne-t-elle.
Je me crispe légèrement tandis qu'on marche sur le chemin comme tous les matins.
- Oui bien-sûr.
- En plus, ça me permettra de voir si j'aime vraiment la cuisine et si je me lance dans des études de restauration ! J'ai peur de me faire des films...Rassure-toi ce n'est que pour deux semaines...
Quand elle me dit ça, j'ai comme un pressentiment... Je secoue la tête comme si ça allait suffire pour chasser mes pensées.
- On va encore être en retard si on ne se dépêche pas, commente Jade en accélérant l'allure.
En plus, on commence par maths, l'horreur. Non pas que je déteste la discipline, mais je déteste la salle tout en haut, la prof et ses réflexions qui frôlent parfois le racisme et l'ambiance avec mon voisin de table : Mathis. Autant vous dire que j'ai mes raisons de haïr ces interminables heures de cours.
La journée défile, j'endure de longues de heures d'EPS, un contrôle d'SVT et une rédaction de français. À la sortie, je rentre avec Jade et Julien.
Les jours s'écoulent un à un et je les regarde tomber, comme des gouttes d'eau au bout des doigts, la vie a tout simplement repris son cours. Je dois revoir la psy dans un mois pour un « suivi » mais sinon, tout va pour le mieux.
Ce matin, j'ouvre les yeux avant mon réveil, étrange, mais pas désagréable. Je peux reposer ma tête contre mon oreiller et profiter des quinze minutes restantes. Étrangement, je n'arrive pas à me rendormir, j'ai comme une sensation de stress au creux de la poitrine. Pourtant, je n'ai absolument aucune raison d'être stressée, si ? On est le 14 mai, rien de particulier ne s'annonce aujourd'hui. Je soupire en repoussant mes draps.
Papa n'est pas là quand j'entre dans la cuisine, il est sûrement déjà au commissariat. Maman par contre, m'accueille avec un sourire.
Je n'attends pas ma meilleure amie au moment de partir, je sais qu'elle est encore chez le pâtissier. De ce qu'elle me raconte, c'est génial, il m'arrive d'être un peu jalouse d'elle contre mon gré, elle sait déjà ce qu'elle veut faire plus tard, elle est brillante et déterminée. Moi, je n'en ai aucune idée, mon futur est loin devant.
Marcher seule me fait plutôt du bien finalement, je visse mes écouteurs dans mes oreilles et je balance ma tête au rythme soutenu de la musique. Le trajet passe mille fois plus vite en musique. Alors que mes pensées s'envolent, je manque presque de rentrer dans Julien qui débouche de la rue devant.
Ses lèvres s'activent mais je n'entends rien. D'un geste sec, il me retire mes écouteurs.
- Lisa ? Tu m'écoutes ?
J'entortille mes écouteurs et je les range dans mon sac.
- Tu avais l'air préoccupée en marchant, une raison ? me demande-t-il.
- Non pas vraiment, je me suis réveillée avec une sensation étrange c'est tout.
Il me regarde, interloqué.
- Une nouvelle hallucination ?
- Non ! Bien-sûr que non, le rassuré-je. Ce n'est probablement rien.
- Si tu le dis.
Lorsque la sonnerie retentit, Jade n'est toujours pas devant le portail, nous n'avons d'autres choix que de rentrer et je me dirige vers la salle de français étonnée, elle a sûrement raté son bus.
La prof entre et commence son cours parfaitement normalement. Enfin, tout serait normal si la place n'était pas vide à côté de moi. Les premières cinquante minutes s'écoulent lentement, nous avons deux heures de suite de français, alors on ne bouge pas. Discrètement sous la table, je contemple mon téléphone : rien. C'est étrange, même si elle avait raté son bus elle aurait trouvé un autre moyen et elle serait là à l'heure qu'il est. Et si elle était absente volontairement, elle m'aurait prévenue.
- Toujours aucune nouvelle ? me chuchote Julien derrière moi.
Je secoue la tête. Tout ça est très étrange, et plus qu'inquiétant.
Mme Essy, continue ses explications sur le poème que nous étudions et je tente de me reconcentrer dessus. Mais rapidement la prof est interrompue dans ses tirades, on toque à la porte.
- Bonjour, excusez-moi de vous déranger, susurre une surveillante. Je dois parler à quelques élèves, Lisa, Julien, Mathis, Romane et Ganaël, venez avec moi.
Mme Essy acquiesce en remontant ses lunettes et je sens comme un grand frisson qui me parcourt.
La panique me gagne, sans que je veuille l'accepter je me doute de ce qui se trame.
- Venez avec moi à la vie scolaire j'ai quelque chose à vous annoncer.
À partir de cet instant, mes jambes refusent obtempérer.
Même quand Mathis passe son bras autour de mes épaules pour me faire avancer, même quand Julien me fixe avec ses yeux intrigués, même quand Ganaël passe nerveusement sa main dans ses cheveux et même quand Romane pousse un profond soupir.
- Qu'avez-vous à nous dire ? demandé-je d'une voix blanche à la surveillante.
Cette dernière passe sa main parfaitement manucurée dans ses cheveux décolorés en blond.
- Je préfèrerais vous l'annoncer plus calmement là-bas, quand vous serez assis...
- Rien de grave ? s'enquiert Julien. On a fait une connerie c'est ça ?
- Euh... allons à la vie scolaire, insiste la surveillante visiblement mal à l'aise.
- Non.
Je comprends que c'est moi qui ai parlé en voyant les regards se diriger vers moi. Des larmes menacent de couler à tout moment, je suis si stressée que j'en ai du mal à respirer.
- Finissez-en que se passe-t-il ? questionne Ganaël.
Moi je sais.
Mon esprit est empli de flashs. De flashs de ma soi-disant hallucination. Beaucoup trop de détails en commun. Beaucoup trop de coïncidences pour que je me trompe.
- Bon très bien, c'est au sujet de votre amie... Jade.
Tout d'un coup mes jambes se réveillent et je m'éloigne dans le couloir, un bourdonnement dans mes oreilles.
- Elle, elle est dé...
Je plaque mes mains contre mes oreilles pour ne pas entendre et je me mets à courir. Courir. Courir.
Je tourne au hasard dans les couloirs, je monte des escaliers, j'ai besoin de mettre de la distance. Une fois tout en haut, à l'étage des langues, je m'enferme dans les toilettes, essoufflée. Je ne m'étais même pas rendue compte que je pleurais.
J'allume mon téléphone et j'ouvre la dernière conversation. Fébrilement je tape sur le clavier tactile.
Jade ! Cocotte !
Jade répond-moi s'il te plaît.
J'ai besoin de toi, dis quelque chose !
Non, ce n'est pas possible. Pourquoi ?
Ma belle ? Ne me laisse pas je t'en supplie...
Mais au fond, je sais, je sais que plus jamais son icone ne s'éclairera vert, signe qu'elle est en ligne, plus jamais je ne recevrai de notifications venant d'elle.
Je dois te dire Jade, c'est ma faute, tout est ma faute ! Pardonne moi...
Soudain, la porte s'ouvre.
- Ah ! Lisa, tu es là !
Je n'ai même pas réellement conscience de ce qu'il se passe. Je suis forcée de redescendre, mes parents sont appelés, je retourne en français pour récupérer mes affaires, les élèves braquent leur regard sur nous, sur mes yeux rouges, sur la mine déconfite de Ganaël, les sanglots de Romane, les pleurs silencieux de Julien et l'incompréhension de Mathis.
Ma mère vient me chercher et me serre dans ses bras en murmurant.
- Oh ma chérie, oh mon dieu ! Viens, on va rentrer.
Je ne l'écoute pas. Je suis perdue loin dans mes pensées. Je ne veux plus jamais en sortir, je veux rester perdue pour toujours.
Maman a le bon sens de rien dire du trajet, ou alors je ne l'entends pas. Une fois à la maison, je m'enferme dans ma chambre et je m'assois en tailleur au milieu de la pièce, la tête dans mes mains.
Je reste quelques minutes, peut-être plus, peut-être même des heures, je ne vois pas la différence dans cette position. Comme si on avait tout mis sur pause.
Je n'ai pas faim, je n'ai pas sommeil, je ne suis qu'une coquille vide. Vide et seule.
Mon téléphone s'éclaire, pendant un instant, je crois que c'est Jade qui me dit que tout va bien et qu'elle arrive pour une journée shopping...mais non. C'est Julien.
Tu tiens le coup ? Si tu as besoin de moi, je suis là...
Je ne réponds pas. À la place je me lève, mes jambes sont engourdies. Comme un zombie je m'installe à mon bureau et j'ouvre les tiroirs un à un. Mes doigts se referment dessus. D'une main tremblante je l'ouvre, je l'ouvre lui, le carnet...
Je parcours rapidement les première lignes avec la certitude, que tout recommence.
On attaque maintenant les choses sérieuses...😊
Par là 👇🏻👇🏻👇🏻
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