Chapitre 13 : Remettre ça sur le tapis

Quand j'atteins le banc, je me laisse lourdement tomber dessus. Attendre seule ne me dérange finalement absolument plus, au contraire. Comme on dit, il vaut mieux être seul que mal accompagné.

Reparler à Romane de son moment de faiblesse n'a fait que remuer le couteau dans la plaie, je n'aurais pas dû. Mais est-ce une raison pour me dire ça ? Je ne pense pas. Ma question n'avait rien d'agressif et surt...

- Salut !

Je tourne aussitôt ma tête vers Ambre qui se tient devant moi.

- Ça-va ? Tu faisais une sale tête, commente-t-elle.

- Oui !

Peut-être que ma réponse était trop brusque et trop pleine d'entrain pour être crédible mais mon amie ne relève pas.

- On ne s'est pas reparlé depuis l'épreuve écrite du bac de français, tu as eu combien ? me demande-t-elle.

- Onze à l'écrit et douze à l'oral ! m'exclamé-je avec un sourire. Maman était tellement contente...

On continue à discuter de ça un moment. Ce genre de sujet est tellement plus facile à aborder que... l'autre.

- Tu sais Ambre, j'ai découvert quelques trucs, lâché-je.

Son sourire se dissipe et ses sourcils se froncent.

- Quel genre de trucs ?

- Le genre important.

Elle s'assoit à côté de moi, soudain plus sérieuse.

- Je t'écoute.

- Pendant que j'étais chez mes grands-parents, je me suis posée une question toute simple : sur quoi papa enquêtait tout ce temps ?

Elle acquiesce.

- D'après ce que j'ai pu comprendre, il enquêtait sur une soirée entre dealers qui aurait dégénéré.

Ambre pâlit aussitôt.

- Mon père y était, c'est ça ?

C'est à mon tour d'hocher la tête. Et cette fois, elle ne me demande pas si je suis sûre, elle ne réclame pas des preuves, elle baisse simplement la tête, comme perdue dans ses pensées

- Apparemment, un homme aurait été retrouvé le lendemain inconscient et il est...

- ...mort deux jours plus tard, je sais, termine Ambre.

- Comment ça tu sais ? m'exclamé-je surprise.

- J'en ai déjà entendu en parler.

Je crois que toute cette histoire nous dépasse, je voulais seulement avoir une confirmation que c'était bien Laurent Viallon. Et je me sens à présent totalement sous l'eau et incapable d'y voir clair.

- Mais Lisa, je sais ce que tu penses, c'est lui le responsable... non Fais confiance au jugement de la police. Ils sont là pour ça ! Ils n'auraient pas désigné Viallon s'ils n'en étaient pas surs.

- Une erreur est si vite arrivée, contré-je.

Elle secoue la tête.

- Il faut que tu leur fasses confiance. Vraiment. Cette soirée date d'il y a un an et demi maintenant, ce n'est pas le moment de remettre ça sur le tapis.

Je suis étonnée de tout ce qu'elle connait, visiblement, je n'étais pas la seule à cacher des choses.

- Et ça ne t'étonne pas que mon père ne se soit penché dessus que si tard ? Qu'il soit assassiné quelques jours après que j'ai vu ton père poser une bombe ? m'énervé-je. Je ne peux pas faire confiance aveuglement sans comprendre. Je...

- Eh bien, va les voir dans ce cas.

Ma bouche se referme.

- Va les voir, va voir les collègues de ton père et demande-leur.

Tout à coup, je ne sais plus quoi dire. Aller les voir ?

- En attendant, ça te dit de te balader un peu ?

J'acquiesce, sonnée par son calme et son sang-froid. Elle était au courant de tout ça et elle ne se pose pas plus de questions.

- Tu fais quoi d'autres ces vacances ? questionne-t-elle pour relancer la conversation.

Je sursaute légèrement et dis d'une voix légèrement trop pressée :

- Je vais une semaine au camping avec maman.

- Ça te dirait un week-end entre amis ? propose-t-elle d'une voix enjouée.

Un demi-sourire se dessine immédiatement sur mes lèvres.

- Oui ! Mais quand tu dis amis tu ne comptes pas inviter...

J'arrête brusquement de parler.

- Inviter Julien ? Pourquoi ? Ça ne va pas entre vous en ce moment ?

Mon haussement d'épaules veut tout dire.

- Tu ne m'as d'ailleurs pas raconté ce qu'il s'était passé !

Je ferme mes yeux deux secondes. Il fallait forcément que ça arrive ! Je pousse un long soupir mental en me maudissant de tous les noms. S'il fallait éviter un sujet, c'est bien celui-là !

- Alors, relance-t-elle.

- On est obligées d'en parler ? marmonné-je en rougissant légèrement.

- Évidemment !

Je retrouve bien mon amie ici, avec son petit sourire malicieux.

- Bon, je te raconte les grands traits et après tu me laisses tranquille, d'accord ?

- Ça dépendra de ces grands traits en question, objecte Ambre sans perdre son sourire.

Je me laisse quelques enjambées pour chercher mes mots. Je finis par m'assoir dans l'herbe au bord d'un chemin. Ambre se place immédiatement à côté de moi.

- On a discuté, il m'a demandé de tout lui dire. Et c'est ce que j'ai fait.

- Lui dire quoi ? demande-t-elle.

D'un geste nerveux, j'arrache distraitement un brin d'herbe et je t'entortille dans mes doigts.

Est-ce qu'un jour elle saura toute la vérité de mon histoire ? Sur mon retour en arrière et le carnet ?

- Tout, lui dire tout, dis-je d'une voix évasive. Et après, après... oh et puis pourquoi tu veux savoir ?

Elle éclate de rire en me voyant si mal-à-l'aise. Ce qui ne fait que me frustrer d'avantage.

- Tu l'aimes ? lâche-t-elle soudainement.

Je casse le pauvre brin d'herbe que je torturais et j'en attrape un nouveau.

- Moi je connais la réponse, dit-elle gentiment. Mais le jour où toi tu l'accepteras, on aura fait un grand pas en avant.

Oui un grand pas en avant. En attendant, il faut que je trouve d'urgence un nouveau sujet de conversation.

- Tu as parlé à Romane ces derniers temps ?

Elle hausse les épaules avec un regard qui signifie qu'elle voit très clair dans mon petit jeu.

- Non pourquoi ?

- Elle était... pas très aimable, comme d'habitude, terminé-je.

- Tu devrais être moins dure avec elle, recommande Ambre. Toi qui veux toujours comprendre. Il y a sûrement quelque chose à comprendre chez elle aussi.

Je me tais, légèrement vexée.

Non ce n'était visiblement pas le sujet à aborder. Un autre ?

Je continue à torturer les pauvres brins d'herbes qui tombent sous mes doigts en réfléchissant. Je l'aime ? C'est fort comme sentiment. Non, ça ne sert à rien que je me pose la question je ne peux plus aimer.

Les yeux de Ambre me scrutent et je tente de dissimuler toute émotion derrière un masque impassible.

- Je vais y aller, dit-elle. Je dois faire quelques courses avant de rentrer.

Je hoche la tête et d'un même mouvement, on se lève et on prend le chemin du retour. Je n'ai pas vu l'heure passer, mais le soleil est déjà bien descendu dans le ciel.

Une fois seule sur le trottoir, je réalise qu'en quelques phrases mon père a disparu de mon esprit. Quelques phrases et voilà que je ne pense plus du tout aux paroles de Ambre concernant l'enquête. Ce n'est qu'une fois allongée dans mon lit, le soir, qu'elles reviennent à la charge.

Il faut que tu leur fasses confiance.

Va les voir, va voir les collègues de ton père et demande-leur.

Selon elle, tout est simple, tout est évident. Pour moi, le moins qu'on puisse dire c'est que c'est l'opposé. Parfois entendre ce genre de raisonnement rassure, à d'autre, il frustre.

Va les voir, va voir les collègues de ton père et demande-leur.

Moi, je doute pour tout. Je doute pour Julien, pour l'enquête, pour Viallon, pour le père de Ambre. Je doute pour moi-même.

Va les voir, va voir les collègues de ton père et demande-leur.

Peut-être que la solution est juste sous mon nez et que je l'évite. Peut-être que je fais exprès de l'éviter. Peut-être que j'ai tout simplement peur.

Va les voir, va voir les collègues de ton père et demande-leur.

Oui.

Oui je vais aller les voir.

Je me lève le lendemain avec cette certitude, j'ai besoin d'en apprendre plus et pour ça il faut que je contacte des collègues de papa.

Une fois ma mère partie, c'est ce que je fais. Je regarde sur le frigo et je compose le même numéro que j'avais appelé il y a quelques mois, peu avant la mort de papa. J'ai tout de même une petite hésitation avant de presser mon doigt sur le bouton vert. Suis-je vraiment prête à l'entendre ? À entendre la vérité ?

Oui ! Oui tu es forte et tu peux le faire.

J'appuie avec détermination sur le bouton vert et je plaque le téléphone avec force contre mon oreille.

Hum, hum 😅 je suis désolée 😙 oui parce que je vous laisse pas au meilleur moment 😏😂...
Mais je publie les vingts chapitres suivants, tous d'un coup, dans quelques jours !

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top