[12] Différence

Je sortis de l'usine et commençai à marcher dans la noirceur. La route n'était pas éclairée, mais d'après l'emplacement de la Lune, je savais quelle direction prendre. Je sortis mon téléphone portable et appelai la police.

« -Allô, ici Dipper Pines de Gravity Falls. J'ai le cambrioleur de la vieille dame de ce soir, il a aussi kidnappé Bi-...-Ben. C'est Gideon. Il est à la papèterie Mfeuill. » Je leur donnai l'adresse qu'affichait le GPS de mon portable, et attendis que quelqu'un vienne me chercher.

Mercredi, 3h12, papèterie Mfeuill.

Bien que les agents aient fouillées l'usine de fond en comble, aucune trace de mon démon dans le bâtiment.

•☆•☆•☆•

"C'est de l'identité qu'est née la différence."

-Heinz Pagels

•☆•☆•☆•

« -Tu étais une fille pleine de vie qui souriais de bonheur, qui voyais le bon côté des choses, qui aimais porter du vernis jaune paillette aux orteils pas parce que ça te plaisait, mais parce que tu étais d'humeur à en porter.

Tu pouvais passer des nuits entières à confectionner des pulls, des bijoux, des cartes de vœux, des fêtes, des mariages... Tu le faisais avec passion.

Tu étais celle qui étais, une fois, allée dans un bar pour se souler avec moi, voulant fêter comme il se le devait mon admission à l'université de Gravity Falls. Qui n'as jamais eu le courage de se teindre entièrement les cheveux en noirs lors de ta période EMO à seize ans. Qui as remué ciel et terre pour chercher la femme de ma vie. Tu n'as jamais baissé les bras, tu étais une combattante, Mabel. Déterminée, courageuse, brave, extravertie, belle, intelligente. La vie ne t'a rien appris, c'est toi qui as appris à la vie et à chacun de nous à être ce que nous sommes ; un ami, un parent, un oncle, un petit-ami, un... Un frère. » Ma respiration était difficile. Tout devient flou devant moi. Je posai ma main sur ma poitrine, puis baissai la tête.

Finalement, je me réveillai en sursaut, le cœur battant à toute allure. « Un rêve. Ce n'était qu'un rêve. » Je soupirai de soulagement. Rêver de l'enterrement de ma sœur jumelle... La pire chose qui puisse m'arriver pour commencer une journée. Ça, en plus de la perte de Bill. « Bill... » J'étais chez Candy. Mes souvenirs étaient vagues, mais comme il était bientôt cinq heures du matin lorsque j'étais revenu de la papèterie, mon corps s'était déplacé tout seul jusqu'à chez elle. J'étais sur son canapé, le regard vide jusqu'au moment où la noiraude montra le bout de son nez.

« -Bonjour Dipper, enfin réveillé !

-Hm... B'jour Candy... Il est quelle heure ?

-Bientôt treize heures. Je me suis permise de ne pas aller au travail vu que tu... Comment tu te sens ?

-Je ne sais pas... » Elle esquissa un sourire compatissant alors qu'elle prenait place à côté de moi, toujours couché, les jambes pendant dans le vide en passant par-dessus l'accoudoir trop dur du sofa bordeaux.

« -Je me suis fait kidnapper par Gideon.

-Quoi ? Non... Impossible !

-Il est sorti de prison, mais quelque chose me dit qu'il va y retourner.

-Et pour Ben ?

-Ben ? Ben... A-ah oui ! Ben... » Mon cerveau tournait au ralentit ; Bill était Ben.

« -Introuvable.

-Il s'était passé quelque chose entre vous deux ?

-R-rien, juste moi qui... Je me suis énervé.

-Tu as refait une crise à cause de ce qu'il s'était passé avec Mabel ? » Je hochai lentement la tête pour acquiescer.

« -Il a juste voulu m'aider, il s'est inquiété ! Je ne l'en pensais pas capable d'ailleurs. Et comme c'est moi le méchant dans l'histoire, je me suis enfermé dans mon laboratoire et il est parti entre-temps.

-Comment ça 'Tu ne l'en pensais pas capable' ?

-Tu connais Bill et ses airs supérieurs de je-m'en-foutiste... S'inquiéter pour quelqu'un devrait être le dernier de ses soucis.

-Bill ? Pourquoi parles-tu de lui ? » Je me tais, sentant avoir faire la bêtise que je redoutais tant.

« -Dipper Pines, pourrai-je savoir ce que tu me caches ?

-Iiiiil se pourrait que... J'ai réinvoqué Bill Cipher et que je le garde chez moi et... Que je le cache en l'appelant Ben... ?

-Dipper, tu n'as pas fait ça quand même !!

-I-il peut sauver Mabel ! » Candy porta sa main à son visage en soupirant.

« -Qui d'autre ?

-Qui de quoi ? » Elle resoupira.

« -Qui d'autre est au courant pour lui ?

-Gideon.

-D'accord... » Ses onyx se perdirent dans le vague, comme si elle réfléchissait.

« -Tu as faim ?

-Non, pas tellement... » Elle me posa un baiser sur la joue et quitta son salon. Je frissonnai au contact doux de ses lèvres, cependant, je me sentis soulagé lorsque j'essuyai mon visage avec le manche de mon pull afin d'enlever toute trace de son ADN. Je me mis assis. Il faisait froid dans cette maison. Soudain, le téléphone dans la poche de ma veste se mit à bourdonner dans l'air. Je me levai et atteignis avec lenteur mon manteau posé sur une chaise, me saisis du combiné et décrochai.

« -Allô... ?

-Bonjour M. Pines, nous avons une bonne nouvelle pour vous. »

[...]

L'air était sec. Ce n'était pas plus mal, cela contrastait parfaitement avec la température nordique de la maison de Candy, qui elle, dû partir au Mystery Shack pour prévenir Soos et Théo la raison de mon absence. J'arrivais en furie au poste de police, colérique et soulagé. Finalement, je l'aperçus. Le démon était assis sur une chaise à côté d'un autre policier, l'air crispé et énervé. Lorsqu'il releva la tête, il se leva et se planta devant moi.

« -Je déteste les humains. » Me souffla-t-il avant de m'empoigner l'avant-bras pour me tirer dehors.

« -Attendez, il faut que je fasse signer le rapport à M. Pines avant de vous laisser partir. » Bill s'arrêta dans son mouvement et les foudroya du regard.

« -Alors faites-le vite. » Tout le monde accueillit son ordre avec surprise et peur, alors comme il l'avait menacé, le rapport fut rapidement classé. Bill et moi quittâmes le poste de police et nous nous mîmes à arpenter le trottoir jusqu'à l'arrêt de bus.

« -Tu veux m'en parler... ?

-Non. » Me coupa-t-il aussi sèchement que possible. Alors, je n'insistai pas.

« -C'est bon de te retrouver Bill. » Il ne répondit pas. Lorsque la carcasse cracheuse de diesel s'arrêta devant nous, les quelques passagers descendirent et d'autres entrèrent. Nous fûmes les derniers à monter dans le véhicule qui démarra avant même qu'on ait pu s'assoir. Tandis que je rangeai mon portefeuille, m'éloignant du conducteur qui nous avait vendu deux allers simples, je voyais déjà Bill se diriger plus à l'arrière et prendre place côté fenêtre, rangée droite. Je m'installai à côté de lui, ignorant les deux filles derrière nous qui s'échangeaient des mess-basses tout en nous regardant de la manière la moins discrète que j'aie pu voir. Le visage du blond était tourné vers le paysage forestier qui défilait devant ses yeux saphir.

Finalement, nous arrivâmes au Mystery Shack. Nous entrâmes par la porte de devant, étant sûr d'y rencontrer tout le monde. Et comme je l'avais prédit, Soos, Théo, Candy et Wendy étaient là pour nous accueillir. Je sentais les quatre paires d'yeux se poser avec insistance sur Bill, et il devait être tellement mal à l'aise qu'il s'enfuyait dans ma chambre. Faisant comme si tout allait bien, je viens rencontrer Wendy, finalement heureux de la revoir après ses deux ans d'absence.

[...]

Le soir arriva plus lentement que ce que je ne l'aurais souhaité. Avec incertitude et peur, je me frayais un chemin à travers la nébulosité de ma maison jusqu'à ma chambre à coucher, soucieux de retrouver le démon sur mon lit. « Pourquoi ne dormions-nous pas séparément ? Nous commençons à peine à nous apprécier... » La porte grinça lorsque je l'ouvris. Bill dormait, un coussin contre lui et sur la couverture. Il avait gardé son gros pull ainsi que le jeans qu'il portait ; il devait s'être endormi tellement il était énervé.

« -Bill.

-Hmm...

-Bill, mets quelque chose de plus confortable si tu veux dormir. » Il se redressa péniblement, lâchant le pauvre coussin qu'il étreignait peu avant encore. Je cherchais dans mon armoire de quoi le vêtir, le lui donnai, et allai moi-même me changer dans la salle de bain pour profiter de me brosser les dents. « Il faudrait que je pense sérieusement à me raser, cette barbe de trois jours est ignoble... » Plus à l'aise dans un short et un tee-shirt bleu, je reviens dans ma chambre. Mon pseudo-colocataire avait vêtis les mêmes vêtements que moi, mais le haut en jaune. Il semblait m'attendre pour se rendormir, alors, ne voulant le faire patienter plus longtemps, je me glissai sous la couette près de lui. « Comment faisions-nous pour dormir si proche sans même le réaliser ? » Bill avait les bras croisés.

« -Raconte-moi.

-Je déteste les humains.

-Ce ne semble pas être une grande nouveauté. Tu peux justifier ?

-Je commençais tout juste à apprécier la chose inutile que vous êtes. ...Tout gâché...

-Gideon est différent.

-Il n'est pas différent des autres humains, c'est juste toi qui l'es. » Long silence. Il continua.

« -Comme tu semblais être énervé contre moi, je suis parti prendre l'air. Puis il y a eu la forêt, cette vieille statue de moi en triangle avec un bout de doigt manquant... » Oups, je devrais le recoller à sa place.

« -...Puis la ville. Et comme je ne savais pas où j'allais, je suis entré dans le premier truc que j'ai vu. Un bar ou je ne sais pas quoi. Et y'avait ce type qui me plaisait bien, il faisait peur, alors que je lui ai parlé pour savoir s'il y avait moyen qu'il me donne du fric pour me payer un truc à manger. Il m'a invité à boire et... Je ne me souviens de rien. Juste que je me suis réveillé à l'arrière d'une voiture de police et que ces crétins n'ont pas voulu me laisser sortir avant que tu n'arrives. J'étais en colère parce que j'avais raison ; On ne peut faire confiance à personne. Ni à moi, ni à vous. » Je l'écoutais en silence, les yeux rivés devant moi. Finalement, je tournai la tête sur ma gauche – donc sur lui – et lui offris un sourire.

« -Donc je suis différent ?

-...Non. Oublie ce que j'ai dit. Et arrête de sourire comme ça, Pinetree, on dirait un con. » Il plongea en vitesse sous le duvet et me fit dos. Je le laissais faire, amusé.

« -Bonne nuit Bill... » Lui soufflai-je avant de suivre son mouvement et de fermer les yeux pour m'endormir.

Il me trouvait différent. Et j'adorais ça.

[...]

Jeudi rimait avec beaucoup de choses ; Lundi, lit, biscuit, pissenlit, Mystery, Candy ou encore Bill-vient-encore-de-casser-une-tasse-de-café-i. Le laissant nettoyer seul sa bêtise, je préférais m'attarder sur l'appelle de Mabel. Comme chaque jour, je lui racontai nos périples et espérant qu'elle l'entende, avant de raccrocher, le cœur allégé. A présent, je me fichais de savoir si Bill m'écoutait ou non lorsque j'étais au téléphone, parce que finalement, c'était un peu ses affaires aussi depuis le moment où nous avons sceller notre pacte. Je déposai le cellulaire sur le coin de la table à manger, sirotai distrètement ma boisson amère et attendis que le blondinet eût terminé de ranger les débris.

« -Quel maladroit tu fais. » Bill me fusilla du regard dans une grimace, n'aimant définitivement pas que je me moque de lui ainsi.

« -Si j'utilisais mes pouvoirs pour la faire léviter je serais aussi agile que Dieu. Peut-être même plus. » Bougonna-t-il en refermant la porte de la poubelle, sous l'évier. Ce à quoi je répondis par un rire sarcastique, ce qui n'arrangea pas son humeur, décidemment. « Pourquoi m'attirait-il ? Il n'avait pourtant rien d'extraordinaire, et de plus, il n'était même pas un être humain ! Je devenais vraiment fou... » Bill tira sa chaise et s'assoit en face de moi, d'humeur hargneuse, afin de terminer ses Pinescakes au sirop d'érable. Ou le sirop d'érable aux Pinescakes, encore à voir.

« -Tu vas retourner dans ton labo ? » Me demanda-t-il pour briser le silence que je n'avais même pas remarqué.

« -Sauf si tu as une envie particulière.

-Comme... ?

-Sortir, faire un jeu de société, discuter du beau temps.

-J'ai envie de m'amuser.

-Faire un jeu de société ?

-Torturer quelqu'un qui ne le mérite pas et entendre ses supplices étouffés derrière ses larmes. M'amuser quoi. » Je sentis mon sang ne faire qu'un tour. Je ne m'attendais tellement pas à une demande aussi... Précise ? Mes yeux devaient ressembler à deux soucoupes et mon teint devait être aussi blanc que des murs en crépis. Puis je l'entendis exploser de rire. Il riait tellement qu'il dû se tenir le ventre, mais cela ne l'empêcha pas de tomber de sa chaise. Je le fixai, incrédule.

« -Bill, tu as vraiment essayé de me faire faire une crise cardiaque ?

-Bah, au pire je serais allé repécher ton âme au royaume des morts. Tu aurais dû voir ta tête ! » Il essuya une larme avant de reprendre une respiration plus calme. « Je pense qu'il s'est vengé de toutes mes taquineries... » Je laissai reprendre place sur la chaise avec un sourire forcé comme si j'acceptais d'avaler aussi facilement sa blague.

« -Plus sérieusement, Pinetree. Si tu as des choses à faire, fais-le. J'ai l'habitude de passer des journées sans toi maintenant. » Était-ce une manière de me reprocher d'être trop souvent occupé dans mes recherches ? Ou s'en fichait-il réellement ? Le seul moyen de le savoir était de lui demander, mais quelque chose me bloquait. La honte peut-être...
Silencieusement, je terminai de boire mon café mais n'arrivai pas à inciter mon corps à quitter la pièce, une fois fini. Il nous suffisait de croiser nos regard une seule fois pour ne plus esquisser un seul geste, comme si nos yeux étaient des caméras de surveillance prêts à sonner l'alarme au moindre mouvement. Mon cœur battait la chamade. « La clairière semblait si calme, si paisible, seul le son mélodieux des pins allégeait l'atmosphère si asphyxiante. » Je sentais mes joues brûler. « Pourquoi souris-tu comme ça... ? » Bill restait de marbre, comme s'il regardait un mauvais documentaire animalier sur les écureuils. Le démon finit par claquer des doigts pour me faire sortir de ma transe.

« -Pinetree ? Tu vas bien ? Tu es aussi rouge que le chapeau d'un gnome et pourtant tu as l'air de vouloir vomir. » Je secouai légèrement la tête pour redescendre sur terre.

« -Excuse-moi, j'étais dans la lune.

-Tu pensais à moi ~ ?

-... Quoi ? B-bien sûr que non ! Tu es le dernier de mes soucis, Cipher. » Je sortis de la pièce en vitesse, brisant notre contact visuel. « Je deviens fou, littéralement. »

.
.
.
.
.
•☆•☆•☆• BONUS BÉTISIER •☆•☆•☆•

(R.v.F!Dipper) -Bill, tu as vraiment essayé de me faire une crise cardiaque ?

(R.v.F!Bill) -Bah, au pire je serais allé repécher ton âme au royaume des morts. Tu aurais dû voir ta tête !

(R.v.F!Dipper) -Pourquoi on ne laisserait pas mourir Mabel pour ramener son âme du royaume des morts ?

(R.v.F!Bill) -... Ça ne marche pas comme ça. *pense* Tiens j'y avais pas pensé. •-•

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top