Chapitre 24 (3)

Anarrima s'arrêta devant les imposantes grilles. Ici commençait le domaine de Wendu.

Féathor sortit un curieux appareil de son sac et démantela le système de garde.

— Ils vont le remettre immédiatement : nous avons très peu de temps pour passer les grilles.

Anarrima entendit un léger grésillement. Ils s'élancèrent vers les portes, les ouvrirent par leur magie et pénétrèrent dans l'enceinte. Ils avancèrent silencieusement vers le centre, évitant les quelques gardes et leurs appareils de détection. Cette surveillance laissait à désirer par le simple fait que la plupart des astres étaient au palais.

— Nous devons parvenir jusqu'à la tour de verre, chuchota le prince.

— Les plans sont cachés là-haut ?

— Non, juste en-dessous, dans des sous-sols blindés.

Anarrima se tut devant le savoir du fils de la reine. Sans trop de soucis ils parvinrent à l'escalier qui menait vers les profondeurs de la base informatique. Les deux intrus descendirent un bon nombre de marches avant de parvenir devant une porte, dans un immense hall blanc. Comme dans le reste de l'enceinte, tous les murs étaient utilisés pour des performances technologiques. À part des tableaux et des tables tactiles, il n'y avait aucun meuble.

Féathor déverrouilla la porte. Alors que les deux battants s'ouvraient mécaniquement, des gardes les repérèrent dans la salle et s'affolèrent de leur présence. Anarrima en pulvérisa un d'un sort et poignarda un second de sa lame. Lorsqu'elle releva la tête, Féathor avait éliminé toute autre menace.

— Ils sont dépourvus de magie, dit-t-elle, comme à Lombal.

— Wendu leur a retiré leur Vala afin de développer chez eux une intelligence hors du commun.

Cela étant dit, Féathor se tint devant l'écran principal et commença à chercher les informations nécessaires.

— Faites la garde, ajouta-t-il à la magicienne, je n'en ai pas pour longtemps.

Anarrima se posta près de la porte.

Comme les minutes s'égrenaient lentement et que le prince restait plongé dans son piratage, la jeune fille remarqua un étrange engin à sa gauche et décida de s'en approcher. L'appareil comportait un générateur puissant, projetant dans l'air un globe. Devant le disque, un masque fixé à un mètre du sol attira tout particulièrement son attention. Anarrima s'assit sur ses genoux et posa son visage dans le masque. Aussitôt elle entendit une voix virtuelle qui l'invita à sélectionner ses recherches sur le globe. Elle remarqua dans les choix de recherche un titre : « Scanner par les yeux. » Elle se rappela son séjour dans la salle d'opération de Wendu. On l'avait scannée mais les résultats avaient été supprimés par Morgal.

Elle sélectionna cette recherche par la simple action de sa pensée. Une page avec son visage tel qu'il était perçu par le masque, s'afficha. Des informations apparurent telles que son âge, sa date de naissance, son pays d'origine, ses capacités, sa famille et son groupe sanguin.

Anarrima trembla : le nom de ses parents était présent et comme sa race n'avait pas été précisée, elle s'attarda sur ceux qui l'avaient vu naitre avant de l'abandonner.

Leurs noms ne lui disaient rien : Urin et Vaita. Mais une note indiquait qu'ils étaient morts vingt ans plus tôt. Ils étaient apparemment décédés à Mussirin après une lourde épidémie de peste. Ils étaient restés pour soigner les malades mais l'épidémie avait eu raison d'eux...

La jeune fille se sentit brusquement tirée à l'arrière.

— À quoi jouez-vous ? s'emporta le prince, on quitte la base immédiatement !

La jeune fille sursauta, totalement bouleversée par sa découverte : elle sentait au fond d'elle-même que quelque chose clochait...

Aussitôt, ils disparurent de l'enceinte, regagnant au plus vite l'hôtel.



Les feux d'artifices éclataient de plus belle. Luinil observait du haut d'une tribune le déroulement des évènements. Elle sentit les mains de Morgal glisser sur ses épaules nues. Se retournant, elle enlaça son cou et l'embrassa langoureusement.

— Si tu ne savais pas aussi bien le faire, lui dit-elle, je me permettrais d'ajouter que tu empestes le sang.

Morgal haussa un sourcil d'étonnement, gardant un air innocent.

— Arrête de faire cette tête, veux-tu ? continua Luinil, tu n'étais pas obligé de la tuer ; elle n'avait pas l'air bien méchante !

— Je préfère être en ta compagnie, lui souffla-t-il en la caressant.

La reine d'Arminassë adorait se retrouver dans les bras de son amant diabolique et le fait qu'il soit aussi vulnérable ne la repoussait pas plus : après tout, Morgal avait toujours su tourner les choses à son avantage. Même sans pouvoir, il gardait son charisme naturel. Il la couva d'un regard allumé par le désir, lui faisant clairement comprendre ce qu'il attendait d'elle pour le reste de la nuit.

— Enlevez vos sales mains de ma femme, intervint sévèrement Carnil, vous devriez plutôt suivre ce qui se passe. Sanar a assassiné le banquier Quacet. Il est dans le salon principal à s'entretenir avec ses sujets. Son frère, Arata, n'a apparemment pas osé venir à ses devants ou même le faire arrêter.

Morgal haussa les épaules d'indifférence sans lâcher la taille de la reine.

— C'est un coup d'état ? demanda Luinil.

— C'est tout comme : il fait pression sur le gouvernement ; les menaçant de stopper la production.

— Je crois que nous devrions mieux nous éclipser, insinua Morgal, nous n'avons plus rien à faire ici à part finir les banquets.

— Attendez-nous dehors, ajouta Carnil, je dois m'entretenir avec la reine.

Le roi d'Onyx laissa les deux souverains et gagna la sortie. Assis sur les marches de l'escalier gigantesque, Malgal fumait machinalement son cigare.

— Ah, tu es toujours là toi ?

Morgal s'assit à ses côtés sans attendre une réponse de son jumeau.

— Tu sais que ça m'a déchiré le cœur quand tu es mort, il y a des milliers d'années de cela ?

— Je sais.

Morgal resta frappé par la voix de son frère. Après tout ce temps...

— Il y a des moments où je retrouve le contrôle de ma pensée, murmura-t-il.

— Qu'est-ce que Carnil t'a fait pour te manipuler ainsi ?

— Il m'a ressuscité par une magie de nécromancien. Il m'a ensuite torturé pour posséder une larme de pouvoir. Il a fini par m'arracher l'œil... mais ne pouvant utiliser le Vala par le simple fait qu'il ne soit pas Réceptacle, il a trouvé le moyen de me contrôler pour que j'agisse à sa place.

Morgal se tut sans cesser de regarder avec pitié son frère ; avec un amour fraternel qu'il ne se serait lui-même pas doutée d'éprouver à nouveau.

— Tu sais, conclut Malgal, je suis medium comme toi. Nous connaissons tous deux comment cette histoire va finir. La question est : es-tu sûr d'agir ainsi ?

— J'en paierai le prix, Malgal, aussi tragique que cela puisse être.

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