— Arrêtons-nous ici pour la nuit.
Haran déposa son sac sur le muret usé d'une ancienne bâtisse. Des constructions semblables et à moitié détruites s'étendaient sur plusieurs lieux, la plupart recouvertes d'une végétation verdâtre. Les bois avoisinants paraissaient tout de même moins desséchés que les jours précédents, sûrement grâce à l'humidité des marécages toujours présents. La chaleur avec les moustiques était sans doute la pire plaie de ce pays sans parler des chemins que la troupe devait se frayer lamentablement dans la boue, les ronces ou les lianes. De plus, la santé d'Intiak empirait. Chacun craignait intérieurement une contamination mais personne n'osait encore émettre cette hypothèse. Un brancard avait été construit et on se relayait pour le porter, excepté Morgal, bien sûr. Quant au prisonnier, il restait muet, refusant toute coopération avec le groupe malgré les menaces.
Anarrima s'éloigna, alors que la nuit tombait, et partit à la découverte des alentours. Les bâtisses en ruine lui portaient un grand intérêt du fait de leur histoire ancienne. Anarrima pénétra dans un vieux manoir ou du moins ce qu'il en restait. Le froid du soir commençait à mordre et elle ne fut pas mécontente de trouver un abri contre la pluie et le vent. L'humidité était malheureusement toujours présente ; des arbres avaient poussé un peu partout et l'escalier était recouvert de verdure. Le fond du couloir principal était inondé par une eau sale et verdâtre. Anarrima monta les marches qui menaient à un étage tapissé de feuilles mortes. De grandes fenêtres de pierre autrefois garnies de vitres laissaient la lumière chaude du soir passer dans le corridor. Un frottement derrière une grosse tenture mitée attira son attention : deux yeux luisants semblables à deux saphirs jaunes apparurent de l'obscurité. Anarrima s'avança lentement vers l'animal, dégainant lentement et silencieusement le sabre qu'elle avait récupéré avant de s'enfuir de la demeure du Culte.
Brusquement la créature sortit de sa cachette et commença à s'échapper tout en rampant sur le plafond avec une rapidité étonnante. Anarrima la pulvérisa d'un sortilège et lorsqu'elle rejoignit le corps, elle contempla l'être le plus singulier qu'elle n'avait jamais vu : elle n'aurait su dire s'il s'agissait d'une personne ou d'une bête. La peau était couverte d'écailles vertes-jaunes sauf sur le ventre et sous les bras. Une longue queue de lézard sortait d'un pagne de cuir, une veste décousue par endroit et des bottes trouées formaient la seule tenue d'un personnage au visage ayant pour nez deux simples petits trous sur une face plate. Le plus impressionnant restait ses yeux, aussi gros que deux poings. Son crâne était chauve et hérissé de pics. Anarrima pensa qu'il devait s'agir d'une mutation causée par la radioactivité et qu'elle avait devant elle un homme-reptile probablement locataire du manoir.
Comme la créature ne réagissait pas, Anarrima continua d'explorer la bâtisse ; elle contourna la tenture et s'aventura dans la pénombre. Elle tomba directement dans une cage d'escalier dans lequel pendait un engin métallique et cubique. De longs rails longeaient sa structure verticalement. La jeune femme ignorait l'utilité de l'ascenseur et descendit des marches qui menaient à une salle éclairée, quelques mètres plus bas. Elle se plaqua contre le mur : elle pouvait entendre des conversations mais la pièce lui restait encore cachée, ses portes étant fermées, mais laissant filtrer une lumière chaleureuse.
— Hâtez-vous ! Nous devons avoir fini le chargement avant la tombée de la nuit. Le Gouverneur voudra la marchandise avant le départ des assassins d'Onyx.
Anarrima se raidit : qu'est-ce que tout cela voulait dire ? La voix repartit, guttural et sifflante, accompagnée d'un remue-ménage de tôles et de ferrailles :
— La ville d'Atalantë sera encombrée toute la journée par l'arrivée des astres de Carnil, alors magnez-vous !
Anarrima s'approcha des battants de la porte et regarda dans l'embrasure. Elle tressaillit à la vue de créatures semblables à l'homme-reptile qu'elle venait d'assommer à l'étage. La plupart portait des tabliers de cuir ainsi que des gants et des lunettes pour se protéger des étincelles venant de machines métalliques. Elles exerçaient leurs rouages sur des plateformes où passaient des matériaux.
— De quelle ville parlent-ils ? pensa-t-elle, apparemment, les elfes d'Onyx ont un rapport avec tout ce mystère et Morgal aussi.
Dans l'immense cave de pierre, aménagée en usine, elle aperçut une multitude de papiers éparpillés sur un établi à quelques pas d'elle. La jeune fille retint sa respiration et ouvrit doucement la lourde porte. L'affairement était tel dans la salle qu'ils ne la virent pas et elle se glissa silencieusement vers les feuilles pour en ramasser une poignée avant de s'éclipser à nouveau. Elle remonta quelques marches et jeta un coup d'œil sur sa trouvaille : il s'agissait de plans et de cartes.
— Intéressant, murmura-t-elle.
Anarrima s'élança dans l'escalier et rejoignit le pallier, excitée par sa découverte. Mais arrivée dans le couloir, elle trouva l'homme-reptile égorgé, le sang se mêlant aux flaques causées par les intempéries. Elle se demanda qui avait fait ça et regardant par la fenêtre elle remarqua la présence de Morgal au pied d'un arbre, debout, la tête levée dans sa direction. Il la transperça du regard puis disparut dans la forêt. Anarrima se précipita vers la sortie pour le rejoindre. Il regagnait calmement le campement et la jeune magicienne l'arrêta avant qu'il ne l'atteigne.
— C'est vous qui avez tué cette créature ? demanda-t-elle ahurie en lui attrapant le bras, vous avez complètement perdu la tête ! Mais après tout ce n'est pas la première fois que vous égorgez quelqu'un de la sorte !
Pour toute réponse, Morgal haussa les épaules et se dégagea de l'emprise de la jeune fille :
— Ce ne sera pas non plus la dernière fois, sourit-il sarcastiquement, il va falloir vous habituer à mon attitude, très chère.
Anarrima ouvrit la bouche mais se trouva incapable de sortir le moindre mot : elle était choquée, pas étonnée mais choquée. Comme l'elfe continuait d'avancer à grande enjambées, elle s'élança derrière lui, ne voulant pas le perdre d'une semelle.
Des haussements de voix leur firent hâter le pas et une fois parvenus au camp, ils trouvèrent Haran et ses hommes autour d'Intiak.
— Son état empire, expliqua Nirmor aux deux arrivants.
En effet, Intiak était victime de violentes convulsions et crachait des caillots de sang de plus en plus gros. Quant à sa blessure, elle suppurait toujours d'un liquide gluant propre à la contamination.
— Il faut l'achever, proposa tout simplement Morgal, il ne va pas tarder à devenir comme les zombies qui arpentent ces terres de malheurs.
— Vous avez complètement perdu l'esprit ! s'emporta Hecilan, de quel droit jugez-vous la vie de mon frère utile ou pas ?
Anarrima regarda le blessé qui gémissait et déjà ses yeux commençaient à blanchir, sa pupille à se dilater.
— Et vous Féathor ? demanda-t-elle en se tournant vers lui, ne pouvez-vous pas utiliser votre magie pour le sauver ?
— Il est déjà trop tard pour ça... Mais je sais qui peut l'aider.
Féathor posa son regard sur Morgal.
— Recule-toi immédiatement, lui lança celui-ci, je ne donnerai pas une goutte de mon sang pour un humain mourant !
— Qu'est-ce que cela veut dire ? interrogea Anarrima perplexe.
— Les elfes des Hautes Lignées possèdent un sang capable de guérir les blessures les plus mortelles, affirma l'astre en craignant la réponse du roi déchu.
— Je n'en ferai rien.
— Vous pouvez sauver Intiak et vous le condamnez par votre refus !
Féathor était scandalisé et Hecilan, voyant la vie de son frère s'envoler ne voulut pas attendre davantage. Il dégaina son poignard et se jeta sur Morgal.
L'elfe esquiva l'attaque et sortit l'épée qui pendait dans son dos. Huaurë et Taran n'hésitèrent pas une seconde pour aider Hecilan, ne trouvant pas d'autre moyen pour sauver son petit frère. Bientôt la lame de Morgal rencontra celles des hommes et il dut reculer de plusieurs pas. Mais le roi déchu était maître dans l'art des armes et prit rapidement le dessus dans la lutte malgré son infériorité numérique. Nirmor et Haran s'aperçurent des capacités de Morgal et rallièrent leurs hommes. Féathor et Anarrima étaient restés à l'écart et regardaient la scène :
— Envoyez encore un de vos hommes, avertit l'elfe en se retirant vers le cœur de la forêt, et je lui tranche la tête sans hésitation !
Sur ce, il disparut dans l'épaisse végétation qui entourait les ruines.
— Ce n'est pas vrai... murmura Hecilan, il préfère condamner Intiak !
— Ne le laissons pas s'enfuir ! s'exclama Haran en pénétrant dans la broussaille humide, la vie d'Intiak en dépend ! Taran et Huaurë, gardez le campement !
Anarrima s'élança à la suite de l'astre et des trois changeurs de peau restant. Mais les déplacements étaient difficiles à cause des lianes qui entravaient le passage, des racines dissimulées sous l'eau et des troncs abattus. De plus, les arbres formaient des rangs très serrés et empêchaient une vision de perspective de plus de six mètres.
Féathor commença à distancer le groupe du fait d'une étonnante rapidité et ne tarda pas à s'éclipser.
Quant aux humains et à Anarrima, ils s'arrêtèrent après plusieurs minutes.
— Cela ne sert à rien de continuer, affirma Nirmor en soufflant, nous ne sommes pas adaptés à ce genre d'environnement ; le prince et le gnome sont loin.
— Tu as raison, ajouta le meneur, rentrons au camp, ils ont peut-être besoin de nous là-bas. Vous n'êtes pas fatiguée, Anarrima ?
La femme resta, quelques instants, déstabilisée : son endurance remarquable soulignait son côté inhumain.
— Rentrons, dit-elle simplement en reprenant le chemin de l'aller.
Le jour allait se lever lorsqu'ils arrivèrent aux ruines. Il avait dû s'agir d'une bourgade autrefois, mais peu de murs de calcaire ou de granite ne tenaient encore debout. Des tentes de grosses toiles, prises dans la navette, composaient un abri de fortune sur un rocher sec à l'abri du vent. Le blessé, désormais inconscient, avait été étendu sur un matelas de fougères et le prisonnier, attaché à un arbre. Celui-ci gardait un hématome du coup de Morgal mais ne s'était jamais plaint. Il n'avait d'ailleurs pas prononcé un mot depuis le début du voyage. À croire qu'il était muet. Anarrima attarda son regard sur lui. Cet homme paraissait issu d'un haut rang : ses traits étaient fins et ses yeux noirs donnaient une impression de noblesse et peut-être aussi de douleur car ce visage ténébreux respirait la haine et l'orgueil.
— C'est de sa faute, maugréa Taran en le frappant, si Féathor ne revient pas avant la tombée de la nuit, dans une dizaine d'heures, Intiak mutera en contaminé.
— Cela n'arrivera pas, se persuada Huaurë.
Mais chacun savait que la vie du gamin ne tenait qu'à un fil.
— J'ignore qui est cet elfe, dit Haran, mais il m'intrigue énormément. D'où vient-il, Anarrima ?
— Peu importe.... Mais où est Siril ?
Effectivement, depuis la veille, l'enfant n'avait pas été aperçu.
— Enfin, pensa-t-elle en s'allongeant sous une des deux tentes, ce mioche ne manque pas de ressources dans son Vala. Qu'il meure ou non, ça ne sera pas une grande perte.
Ces paroles peu attentionnées ne parvinrent pas aux oreilles des changeurs de peau, assis dans l'autre tente, aux côtés d'Intiak. Seuls Haran et Nirmor restaient debout près du feu à parler.
— Que penses-tu de la magicienne ? demanda Nirmor à son chef, tu crois que nous pouvons lui faire confiance ?
— Oui, je crois. Cette fille est célèbre en Lercemen, mais elle devrait mettre son Vala au service de la compagnie durant le voyage. Elle reste aussi très mystérieuse sur son identité et sur celle de ce maudit Morgal. Je ne comprends pas comment elle a pu lui prêter allégeance...
— Tu es jaloux ? Ne me dis pas que tu t'es attaché à elle !
— Il faut admettre, admit Haran en souriant, qu'elle ne manque pas de charme. Sans parler de ses formes plutôt alléchantes et désirables.
— Moi, ce que je vois, c'est surtout une allumeuse. Elle en joue pour déstabiliser les hommes du groupe. Ils ne peuvent pas s'empêcher de la déshabiller du regard. En tout cas ne compte pas sur elle pour passer une petite romance ; elle n'a pas l'air de te surestimer et n'hésiterait pas à te rembarrer pour montrer sa supériorité.
— Ce genre de caractère me plait.
— Peut-être attrayante, mais inaccessible.
— J'avoue qu'elle m'impressionne : elle porte un Vestige noir au cou. Elle a dû tuer des dizaines d'Assassins d'Onyx et son pendentif représente l'âme d'un haut capitaine. Elle est peut-être fière mais je parviendrai à l'avoir.
Alors que le meneur et son second conversaient près des flammes, Anarrima ferma ses yeux et s'endormit pendant que le soleil continuait sa montée dans le ciel.
La poursuite continuait toujours sous les arbres et Féathor finit par s'arrêter, ne trouvant plus les traces de Morgal.
— Qu'est-ce qui a bien pu lui traverser la tête ? se demanda-t-il tout fort.
— Tu veux le savoir ?
Le roi déchu venait d'apparaitre sur la branche élevée d'un arbre. Ses yeux semblaient presque fluorescents et sa position sur la ramure rappelait celle d'une panthère.
— Tu sais combien de créatures ai-je tuées ? continua-t-il en descendant lestement, vois-tu, j'ai arrêté de compter. L'arme de Lombal a glacé mon Vala et en a pris les ressources magiques. Mais les conséquences de ce drame ne sont pas négligeables. Je suis malade, Féathor. C'est un mal qui me ronge et qui me pousse sans cesse à tuer, je ne peux plus me retenir. Je n'ai cessé de vouloir égorger ce garçon dès le moment où j'ai vu son sang couler.
— Vous n'êtes qu'un monstre ! cria l'astre en se rapprochant de l'elfe, je devrais vous achever sur le champ ! C'est tout ce que vous méritez !
Morgal éclata d'un rire sinistre :
— Personne n'a jamais réussi à me vaincre ! rappelle-toi. N'est-ce pas moi qui t'ai appris à te battre ?
— Eh bien, ce matin, l'élève fera mieux que son maître ! Et je jure devant les dieux de ne pas avoir recourt à ma magie. Vous allez regretter vos actes !
À peine avait-il fini de parler qu'ils dégainèrent tous deux leur épée. Le moindre geste était calculé, la moindre erreur serait cause de chute. D'un seul élan, ils se jetèrent l'un contre l'autre et s'affrontèrent dans un combat sans merci. Les mouvements s'enchainèrent de plus en plus rapidement, de plus en plus agressivement. Morgal prit rapidement le dessus et trouvant une faille, poussa Féathor dans un fossé profond. Le prince se rattrapa de justesse à la branche d'un arbre qui poussait plus bas. Son adversaire le rejoignit et s'avança dangereusement vers lui. Féathor se releva et dut combattre sur les ramifications glissantes des arbres qui s'avéraient étroites par endroit. La forêt amplifiait le son métalliques et lugubre des lames. Les combattants semblaient effectuer un étrange ballet sous les branches obscures des arbres morts.
Féathor se rendait bien compte que le duel n'était pas égal : il n'allait pas tarder, malgré son habilité unique, à flancher. En face, Morgal semblait contrôler la situation, prévoyant les gestes de son adversaire. Le prince, comme tous les autres, était un pantin. Il fallait juste savoir quelle ficelle tirer pour en venir à bout.
Bientôt, le fils de la reine fut taillé par la lame meurtrière et laissa tomber son arme quelques mètres plus bas sous l'effet de la douleur. Le sang inondait sa tunique et il se sentit perdu.
— N'as-tu pas grandi dans des forêts semblables, petit ? nargua Morgal qui paraissait dans tout son élément, je m'attendais à plus de résistance et à une meilleure connaissance de ta part.
Un léger sourire frôla le visage de Féathor : Morgal avait oublié qui était son adversaire. Oui, l'astre différait de la masse pour la simple raison de sa véritable identité ; il ne se laisserait pas abattre si aisément. Il ne laisserait pas cet homme s'en sortir impunément après ce qu'il avait fait à sa mère.
Il jeta un bref regard autour de lui ; la branche sur laquelle l'elfe se tenait, était ployée sous une autre branche, plus importante. De ses mains métalliques, le prince brisa le bois et provoqua un redressement brutal qui éjecta Morgal dans les airs. Celui-ci heurta violemment un tronc avant de retomber et de s'emmêler dans les lianes, juste au-dessus du sol. D'un sort précis, Féathor resserra les liens naturels sur sa cible afin d'éviter toute résistance.
Il sauta ensuite à terre et se dirigea vers le vaincu. Il récupéra son épée et coupa quelques lianes de manière à ce que le roi déchu se retrouve nez-à-nez avec lui, restant empêtré comme un insecte dans une toile d'araignée. Morgal força sur les lianes, ses yeux glacials animés autant par la surprise que par la haine.
— Vous me pardonnerez, commença Féathor en ouvrant la main de son ancien maître, mais je tiens à sauver une vie contrairement à vous.
Il ouvrit sa gourde sous le ruisseau sanglant et la remplie de cet antidote.
— Tu ne vas pas me laisser ici ! s'exclama l'elfe humilié en tirant sur ses cordes.
— Ne vous inquiétez pas : avec le sang qui coule de votre main, les contaminés ne tarderont pas à rappliquer et vous ne serez plus qu'un lambeau de chair. Adieu !
Et Féathor s'éloigna du condamné. Celui-ci ne parvenait toujours pas à digérer sa défaite et fulminait de rage.
— Tu n'es qu'un sale bâtard ! insulta le roi déchu, Luinil était sensée te tuer ! Tu n'es qu'une erreur, tu n'aurais jamais dû exister !
L'astre stoppa quelques secondes et serra ses poings de fer : Morgal avait touché son point sensible mais il fit semblant de l'ignorer et se remit en route, laissant l'elfe derrière lui. Bientôt, il disparut derrière les troncs mousseux.
Morgal continuait à pester, maudissant le fils de la reine. Il arrêta soudainement de respirer : des cris stridents retentirent au loin mais il savait estimer la distance qui les séparait. Et cette étendue se rapetissait toujours plus.
— Je ne vais tout de même pas mourir dans ce vieux bourbier, pensa-t-il en forçant une nouvelle fois ses liens, ces zombies ne vont pas tarder à se manifester.
En effet une silhouette furtive apparut suivie de ses congénères. Les contaminés reflétaient la souffrance et la misère dans toute leur splendeur : leurs vêtements partaient en lambeaux, leur peau décharnée s'effritait comme si elle muait et leurs yeux, d'un blanc opaque, suppuraient un liquide à la fois gluant et compacte.
Ils s'approchèrent avec méfiance de la future victime comme si elle pouvait au dernier moment les anéantir. Cette horde ne différait guère d'une bande de possédés et tout en eux était bestial. Morgal se figea, regardant ces créatures dégénérées s'avancer toujours plus près de lui. Il retint un haut le cœur : les contaminés traînaient avec eux des effluves putrides.
Soudain, les yeux de toute cette bande virèrent au noir ; les monstres poussèrent des hurlements effroyables de douleur et un instant après, leurs cervelles éclatèrent d'un coup, se répandant sur le sol humide de la forêt. Morgal s'en reçut même sur l'épaule, lui arrachant une grimace de dégoût. Parmi les cadavres, se rapprocha une silhouette féminine encapuchonnée, portant une tenue de voyage :
— On dirait que vous aviez besoin de moi, commença-t-elle en s'arrêtant devant Morgal, apparemment Féathor ne vous a pas pardonné...
L'elfe poussa un long soupir de soulagement alors que sa sauveuse coupait les lianes :
— Il y a une ville cachée un peu plus au Nord, vous devriez vous y rendre si vous voulez survivre, tous.
— Merci Indil, répondit le roi déchu en se dégageant, que fais-tu sur ces terres ? J'ai vu ton vaisseau sur les écrans de la navette ; je croyais que tu étais en sécurité à la cité d'Onyx.
— Ce n'est plus le cas, Morel s'est rebellée contre votre autorité. C'est pour ça que vos assassins parcourent anarchiquement les dimensions : ce n'est pas un problème pour eux de construire des portails et de parvenir sur d'autres terres. Morel ravage Lercemen comme vous ne l'aviez jamais fait. Vous devez plus que jamais reprendre vos pouvoirs et mettre fin à tout ce chaos. Et vous devez faire vite : le Réceptacle de Carnil a échappé à son emprise mais plus pour longtemps.
— Et toi que fais-tu ici ?
— J'ai vu que des contaminés allaient vous tuer alors j'ai posé mon vaisseau et je suis intervenue. Je me rends au portail de l'Ouest pour traverser la Mer d'Encre et atteindre les cités de Calca. Mais partez pour cette ville : une tempête va s'abattre sur toutes les terres de Narraca et ce n'est que là que vous serez à l'abri des radiations.
Morgal passa sa main sur le cou de la femme et la serra dans ses bras.
— Je réussirai Indil, aucune maladie, aucune personne, ne m'empêchera de parvenir à mon but. Va-t-en maintenant et laisse-moi continuer ma route.
L'inconnue se sépara de l'elfe et avant de disparaitre :
— Faites attention à Anarrima ; elle échafaude un plan pour vous anéantir tout en sauvegardant ses fins.
— Je sais.
À peine avait-il fini ces mots que la sorcière s'était volatilisée. Morgal reprit alors le chemin du campement sans se soucier de l'accueil qu'il recevrait.
Voici un portrait de Morgal comme je me l'imagine.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top