Chapitre 50
Ce matin-là, Vincent m'attendait déjà devant chez moi. Évidemment, j'avais un peu traîné pour faire en sorte d'arriver sur le fil au lycée, ce qui n'avait pas échappé à mon meilleur ami. Il ne cessait de regarder sa montre, lui trouvant un intérêt particulier. Pourtant, il ne fit aucune remarque et se contenta de patienter. J'aurais aimé que le trajet s'éternise malheureusement en quinze minutes, nous y étions. Pile à l'heure et il était là, il était adossé contre un mur, les yeux rivés sur l'entrée. J'aurais voulu ne pas m'attarder sur lui, seulement je ne pouvais détacher mon regard. Le monde semblait s'être abattu sur lui. Cependant à son attitude, je compris qu'il me cherchait. Je profitai donc de mon petit gabarit pour me mêler à la foule et passer inaperçue. Je ne voulais pas croiser ses émeraudes au risque d'y percevoir ce détail qui pourrait changer la donne. Il m'avait menti, il avait brisé ma confiance alors je tirais un trait et j'avançais. Machinalement, je m'étais faufilée dans les couloirs et j'avais été en cours de maths en espérant ne pas le voir. Les filles m'adressèrent un grand sourire, je ne savais pas ce que Vincent avait pu leur dire sur notre week-end, mais je décidais de jouer à la politique de l'autruche et faire comme si rien ne s'était passé. Je suivais assidûment les explications de mon professeur, si bien que je ne vis pas l'heure passer. Ramassant mes affaires, je me hâtai de sortir afin de rejoindre ma classe suivante. Mais à peine avais-je fait un pas en dehors, qu'on m'attrapa par le bras.
– Lou, je t'en supplie, écoute-mo —
– Ne me touche pas, s'il te plaît, claquai-je le plus sereinement possible en m'extirpant de son contact. J'aimerais que tu me laisses tranquille.
Je le dépassai et me dirigeai vers mon pilier. Je ne voulais pas craquer, je ne voulais pas trahir ce serment que je m'étais fait à moi-même. Seulement, lorsque je croisai le regard noir de mon meilleur ami, je compris rapidement que celui que j'évitais me suivait.
– Lou, attends, je t'en prie, cria-t-il dans les couloirs attirant toute l'attention.
Je refusai de céder et accélérai le pas. Il pourrait bien hurler, me supplier, se mettre à genoux, je ne voulais pas accepter le moindre échange. Me faufilant parmi les lycéens, j'arrivai enfin à hauteur de mon blond.
– Fais-moi confiance, chuchota-t-il en posant ses doigts sur mes joues.
Soudainement, ses lèvres se pressèrent contre les miennes avec une certaine brutalité. De ses mains habiles, il approcha nos corps et tenta d'approfondir ce baiser. Cependant ce n'était pas de cette façon que j'envisageais d'échapper à mes problèmes. Je m'écartai délicatement afin d'y mettre un terme. Rouvrant les yeux, je vis Vincent observer derrière moi.
– La vengeance est un plat qui se mange glaciale. J'espère qu'il est prêt, souffla-t-il en me serrant dans ses bras.
Je ne voulais pas me venger, ni le blesser pourtant une part de moi fut soulagée, comme si ce geste avait le pouvoir de lui faire comprendre la douleur provoquée par son mensonge. Comme s'il pouvait frôler ma souffrance, comme s'il pouvait effleurer ma perte...
– Et toi, tu es un véritable petit idiot qui profite de la situation ! répondis-je tout doucement.
– Et c'est pour ça que tu m'aimes !
Il se détacha et glissa sa paume dans la mienne pour le guider vers mon prochain cours. Je ne pus m'empêcher de jeter un coup d'œil en arrière et je n'aurais jamais dû. Ses iris verts s'embuèrent immédiatement avant de baisser la tête. Je l'aperçus remettre son bonnet et fuir bien trop rapidement.
Un violent picotement prit place dans la poitrine. Je n'aimais pas ce que je venais de faire, ce n'était pas moi. Je n'eus le temps de m'apitoyer davantage sur ce que je venais de faire subir à Axel que Vincent me tira vers lui. Malheureusement pour moi, cela ne fut pas suffisant pour apaiser cette pointe logée en moi. J'avais alors remis un masque, celui que j'avais gardé des mois durant, avant que je n'accepte de me relever...
La matinée s'était finalement déroulée sans encombre. J'avais été attentive aux différents enseignements, chassant bien profondément tout ce qui pouvait me déconcentrer. Ramassant mes affaires, les filles me rejoignirent pour aller à la cantine. Évidemment, je savais que j'allais devoir passer un interrogatoire en bonne et due forme et Leïla fut la première à se lancer.
– Lilou, comment vas-tu ? Vincent nous a expliqué que ça avait été très dur. Je suis tellement désolée, on aurait dû être avec vous pour vider sa chambre...
– Ne t'inquiète pas, il fallait qu'on le fasse. C'était important pour Juliette... Et vous, dites moi qu'avez-vous fait ?
Elles acquiescèrent pourtant je sentais bien que quelque chose planait, comme un non-dit. Malheureusement, je n'avais pas particulièrement envie de lancer le sujet. Finalement Leïla prit les devants et nous parla de ses moments avec Arthur, dont elle semblait de plus en plus amoureuse. Mais alors que Chloé commença à raconter son week-end, elle s'arrêta brusquement. Elle semblait chercher ses mots.
– Qu'est-ce qu'il y a ? l'interrogea ma brune.
– Axel est passé à la maison, samedi, vers vingt heures. Il est resté toute la soirée.
Je tentai de faire bonne figure et d'assimiler un à un les coups de poignard provoqués par ses révélations. Tandis que je pleurais sur mon sort, il avait trouvé refuge auprès de son ex...
– Il s'inquiétait de ne pas avoir de tes nouvelles et se demandait si tu n'étais pas chez moi. Comme je ne savais rien, il a attendu avec moi toute la soi —
– Il est passé chez Clo, car il n'arrivait pas à te joindre et rassure-toi il est parti vers vingt et une heure, c'est à ce moment-là qu'elle m'a appelée, la coupa Leïla.
Je ne comprenais rien. Je n'aimais pas le petit jeu auquel jouait ma meilleure amie, j'avais la sensation qu'elle essayait de me rendre jalouse et cela fonctionnait. Ma Marocaine attrapa ma main et me fixa.
– Lilou, Vincent nous a appelées et Axel est passé chez Chloé, car il n'avait pas de message ou d'appel. On a promis aux garçons de ne pas te questionner dessus, mais qu'est-ce qui s'est passé ?
– Axel et moi, c'est fini avant même d'avoir réellement commencé. Il n'y a rien de plus à dire, lâchai-je calmement.
Mais lorsque je vis ma blonde hausser les sourcils et croiser les bras pour me montrer son mécontentement, je ne pus m'empêcher de dire ce que j'avais sur le cœur.
– Si vous voulez plus de détails, Chloé n'aura qu'à aller le voir, car de toute façon c'est ce que tu fais sans arrêt. Depuis que c'est terminé, vous continuez à vous voir. Vous faites la paire tous les deux avec vos secrets.
La bombe était lâchée. Je fermai les yeux et comptai jusqu'à cinq. C'était ma façon de me calmer et ne pas envoyer mon plateau valser en plein milieu de la cafèt.
– Désolée, je ne sais pas ce qu'il m'a pris, avouai-je en baissant le visage. Je dois vous laisser, je dois aller chercher un livre pour le cours d'éco.
Je ne leur laissai pas le temps de répondre et débarrassai mon repas. Saisissant ma pomme, je sortis rapidement du réfectoire. J'avais beau essayer de garder la tête haute, mes anciens démons restaient tapis dans l'ombre, prêts à ressurgir. Alors pour ne pas replonger, j'envoyai un SMS à l'unique personne qui savait tout.
* Besoin de toi. Suis au CDI *
Je me faufilai parmi les étagères et m'installai par terre contre le mur avec un vieil ouvrage saisi à la va-vite. Au bout de quelques minutes, je vis une touffe blonde apparaître devant mes yeux. Je n'avais pas besoin de parler, mon regard trahissait lamentablement mon désarroi.
– Elles t'ont posé des questions ?
J'acquiesçai doucement. Ses traits se durcirent en un éclair de seconde avant de reprendre consistance. Je savais qu'il prenait sur lui pour ne pas éclater et aller les voir. Il s'installa à mes côtés et déposa son bras sur mes épaules. Je cachais mon visage dans son cou, cherchant un réconfort nécessaire pour cette situation. Silencieusement, nous étions restés ainsi durant de longues minutes.
– Tu te sens mieux ? osa-t-il me demander.
– Oui...
C'était un fait, sa présence avait suffi à me détendre. Pourquoi ne m'étais-je pas attachée à lui ? Pourquoi ne ressentais-je rien d'autre pour lui que de l'amitié ? Et si le temps faisait ses preuves et que je finissais pas tomber amoureuse ? Tant de questions, tant d'incertitudes auxquelles je ne voulais pas laisser de place. Tout cela appartenait au passé. Je me refocalisai sur mes objectifs : sourire, profiter, aimer et vivre à nouveau.
Soudainement il saisit mon livre des mains et regarda la couverture avant de se mettre à ricaner.
– Reproduction animale ? Sérieusement Lilou ? Excuse-moi, mais on sait tous les deux que hormis la reproduction humaine, je suis quasi sûr que la biologie animalière ne t'intéresse pas !
Pour toute réponse, je lui balançais un coup de coude dans les côtes. Avec ses bêtises, nous allions nous faire virer de la bibliothèque.
– C'est toi l'expert en manque, je te signale ! chuchotai-je.
– Oh, mais tu as l'air bien renseigné ! Intéressée ?
Ce type allait avoir ma peau. Le sourire aux lèvres, il aimait me pousser dans mes retranchements et j'appréhendais d'entrer dans son jeu, mais il était hors de question que je le laisse gagner.
– Absolument pas ! Vu ce que je sais, je ne veux pas perdre mon temps, aussi court soit-il !
Il fit semblant d'être offusqué par ma remarque. Pourtant lorsque je le vis se pencher à mon oreille, je sus que je venais de perdre.
– Essaie et tu verras.
Échec et mat, le fou venait de tuer la reine. Je le repoussai avant de me relever et de reposer ce fichu livre. Je lui tendis la main afin qu'il se joigne à moi. Toutes les bonnes choses avaient une fin et je devais vraiment retourner en classe. Au bout du compte, le reste de la journée se passa sans encombre. Les filles avaient fait comme si rien ne s'était passé, Vincent était revenu à la charge plusieurs fois avec sa proposition mal placée, Baptiste était venu me voir lors de mon dernier cours et je n'avais pas revu Axel.
Ce soir-là, Vincent m'avait raccompagnée jusque chez moi. Seulement en arrivant sur le pas de la porte, je sus que la conversation qui allait suivre allait être compliquée pour tous les deux. J'avais beau avoir rangé ce détail dans un coin de ma tête, je n'avais pas oublié quel jour nous étions. Alors quand sa requête franchit la barrière de ses lèvres, je ne pus refuser. Là encore, j'avais repoussé ce moment or je devais le faire, si ce n'était pour moi, je devais le faire pour eux. Je venais donc d'accepter d'aller au cimetière avec Baptiste et lui. Cette idée me tracassa une bonne partie de la soirée. Même si j'essayais quotidiennement de faire un grand travail sur moi-même, cela restait difficile à envisager...
– Lilou ?
Je relevai le regard et observai mon interlocuteur. Il semblait préoccupé, ce qui ne me surprenait pas. Il m'avait confié que tout allait bien entre lui et Andréa, mais je savais que ce que nous allions devoir faire ensemble tous les trois lui coûtait.
– Tu penses qu'il nous voit ? Qu'il est fier de nous ?
Les éternelles questions de ceux qui étaient sur la voie de la guérison. On acceptait son départ, mais pas son absence auprès de nous. L'acceptation était une des phases les plus longues avec celle du pardon. Nous franchissions tous les étapes petit à petit. Baptiste avait franchi celle du pardon, il y a déjà bien quelques mois, mais tout comme moi, il restait bloqué dans cette phase. Mais comme me l'avait dit Axel, il faut du temps... Au fond de moi, je gardais espoir que Zac veillait sur nous de là-haut.
– J'en suis sûre. Ne doute jamais Baptiste. Tu es un garçon bien alors ne t'inquiète pas, je suis certaine qu'il est heureux de voir qu'aujourd'hui tu te reconstruis.
Il acquiesça avant de se remettre au travail. Malheureusement pour moi aborder ce sujet suffit à me déconcentrer pour le reste de l'après-midi. J'avais donc suivi mes amis tel un pantin de classe en classe, jusqu'à ce que sonne le glas.
Mes pas foulaient le sol comme une vieille habitude, mais contrairement à la fois précédente, je n'étais pas seule. Entourée de chaque côté par Vincent et Baptiste, je me laissais porter. Relevant le regard, je perçus ce portail qui symbolisait auparavant ma terrible chute en enfer, pourtant avec eux et après tout le chemin parcouru, il me semblait moins imposant, moins effrayant. Le son des graviers sous mes pieds ne me terrifiait plus, ils étaient juste une marque de mon passage. Les tombes alignées ne me brisaient plus le cœur, elles reflétaient simplement une réalité, un fait que chaque être humain affronte un jour. Nous avancions doucement comme si nous avions peur de faire trop de bruits. Machinalement, nous nous serions les uns contre les autres, comme se rassembler pour ne faire qu'un. Plus nous nous rapprochions, plus mon corps réagissait. J'avais beau lutter et repousser mon angoisse, seulement je ne pouvais pas oublier tout ce que ce lieu représentait. Naturellement, alors que nous faisions face à la dernière demeure de mon grand amour, les garçons nouèrent leurs doigts aux miens. Je n'osai bouger, donc j'attendais sagement qu'un de mes amis prenne le relais. Discrètement, j'observai Vincent, quand je le vis enfin s'approcher.
– Salut mon pote ! Cette fois, on est venu en force pour te faire un petit coucou, lâcha-t-il avant de se baisser et de chuchoter. Mec, franchement je t'admire, elle a un caractère de merde, je te jure, je sais pas comment t'as fait. Elle râle, elle me rembarre, elle se met en colère, l'attirail parfait de la chieuse. Bref, je lui ai donné ton cadeau et elle le porte sur elle, tu as fait fort, comme toujours.
Baptiste rejoignit Vincent et déposa sa main sur son épaule avant de la serrer. Ils prenaient sur eux pour ne pas craquer. Mon blond utilisait le sacarme tandis que le brun se réfugiait dans le silence. Quant à moi, je les observais attendant le moment où je devrais intervenir.
– On est tous les trois ensemble pour te prouver qu'on avance. On voulait aussi qu'elle sache qu'on est tous là pour elle et surtout, continua-t-il en se tournant vers moi, on ne lui en veut plus, depuis bien longtemps... Rien n'est de notre faute, ce soir-là a changé notre vie. On doit apprendre à accepter et à vivre sans toi. J'arrive juste pas à me dire que tu le sentais, quand sur ton lit d'hôpital, tu m'as dit que tu avais un mauvais pressentiment, j'aurais dû te croire. Je m'excuse d'avoir douté de toi, pardonne moi...
Après ces quelques mots, je m'approchai du blond et lui apportai un peu de soutien. Nous voir ici tous les trois était complètement nouveau et même si j'appréciais cette image, j'avais la sensation d'être privée de mon intimité. Contrairement au mois de décembre, Vincent semblait, tout de même, plus serein que lors de notre venue ensemble. Baptiste, quant à lui, paraissait étranger à la situation. Il prenait sûrement sur lui pour ne pas craquer. Donc comme pour le soulager, je pris la parole à mon tour.
– Mon Zac, soupirai-je en caressant son portrait. Pour une fois, il n'y aura pas de long monologue sur mes avancées. Sache juste que vider tes affaires a été particulièrement dur. Je n'ose te parler de ma découverte, je crois qu'il me faut encore un peu de temps pour avaler la pilule. Mais sache que je t'aime plus que tout.
Je tentai de faire bonne figure pourtant au fond de moi, mon cœur se brisait. Je me noyais dans une tempête de sentiments. J'aurais aimé réussir à me battre, mais ici, avec eux, je me laissais simplement porter par le courant. Baptiste prit alors le relais. Il avança et se baissa toutefois contrairement à nous, il murmura si bas, que nous ne pouvions pas entendre ses mots. Au bout de quelques minutes, il se releva.
– Je suis désolé pour tout ce que j'ai fait depuis. Maintenant, je t'assure que nous allons bien. Évidemment tu les connais, ils font des conneries, mais je veille sur les deux. Et promis je viendrais bientôt te présenter Andréa, sourit-il.
Nous étions restés encore quelques instants, blottis les uns contre les autres dans un silence réconfortant. J'adressai une dernière prière à l'homme que j'aimais avant de faire demi-tour. Accompagnée par mes deux compagnons, nous rebroussions chemin. En repartant, j'étais sûre d'avoir aperçu la silhouette de Axel au loin. Je ne sus s'il venait se recueillir ou s'assurer que j'allais bien. Quoi qu'il en soit, croiser ses traits tirés avait eu le mérite de m'égratigner davantage. Je secouai la tête et décidai de rentrer chez moi.
Ce soir-là, j'avais mis un certain temps à émerger malgré tout je me promis de ne pas baisser les bras...
Les jours avançaient et se ressemblaient. J'allais en cours et suivais de façon assidue, je profitais de la compagnie de mes amis et ne voyais plus Axel au lycée. Si je faisais abstraction de ce dernier, mon existence semblait absolument ordinaire. Toutes les pièces du puzzle reprenaient leur place et je tentais de retrouver la mienne, tout simplement. En rentrant à la maison, nous reprenions nos vieilles habitudes, à l'exception de ma mère, contrairement au passé. Elle était là, tous les soirs, veillant sur nous. Elle s'impliquait davantage dans notre vie d'adolescente en nous préparant de bons petits plats, mais aussi en s'intéressant à notre quotidien. Avec mes sœurs, nous tentions de garder nos moments ensemble, toutes les trois réunies, comme avant.
Vincent, quant à lui, était plus présent que jamais. Il prenait un malin plaisir à jouer le faux couple avec moi dès qu'il apercevait celui qui m'avait blessée. Évidemment je lui avais demandé d'arrêter, mais il n'en faisait qu'à sa tête.
Assis face à moi, dans la cafèt, il ne disait rien. Un silence bien surprenant quand on le connaissait autant que moi.
– Tu comptes admirer mon visage d'ange longtemps ? demandai-je en tentant d'attirer son attention.
– Excuse, j'étais ailleurs...
Merci je l'avais remarqué !
Malheureusement pour lui, sa réponse ne me convenait absolument pas. Alors je posai ma main sur la sienne et poussai l'interrogatoire au risque de me heurter à un mur.
– Tu étais où ? Parce que tu n'es clairement pas avec moi...
Ses yeux me fuirent subitement. Il s'installa au fond de son siège, retira ses doigts et croisa les bras. Honnêtement, il commençait à m'angoisser.
– Samedi, y a une soirée chez Florent pour la Saint-Valentin et j'aimerais que tu m'accompagnes. Je sais qu'on n'est pas ensemble et que tu préférerais certainement être seule ce jour-là, mais j'ai vraiment envie d'y aller avec toi.
– Oh.
Ce fut l'unique réponse que je fus capable de lui donner. Il venait de me clouer le bec. Je savais que la célèbre fête des amoureux avait lieu dans deux jours, mais j'avais décidé de faire abstraction. J'aurai sûrement mangé un paquet de bonbons devant Valentine's Day. J'aurai pleuré et lu une partie de la nuit pour oublier le manque. Je ne savais pas quoi lui répondre pourtant je savais au fond que je devais accepter.
– Laisse-moi du temps pour y réfléchir, mais ça me touche...
– Je ne te force pas, mais je me dis que ça pourrait nous faire du bien, une soirée coupée de tout... Lilou, je veux juste sortir avec toi, entre amis, pour profiter un peu, reprit-il.
Il avait raison, ça ne pouvait pas me faire de mal. Sortir, voir d'autres personnes, sourire, lâcher prise, rire. Comme avant. Alors je pris sur moi et lui répondis plus vite qu'il ne l'espérait.
– C'est oui ! Si mes parents sont d'accord, je suis prête à t'accompagner.
Le sourire qui s'afficha sur ses lèvres valait tout l'or du monde. Il semblait vraiment très heureux de ma réponse. Rapidement, il débarrassa son repas et nous emmena voir Chloé et Leïla qui venait seulement de finir leur cours de mathématiques.
– C'est bon les filles, on sera là, elle veut bien m'accompagner !
J'aurais dû être surprise pourtant je savais qu'il avait dû leur en parler. Sans attendre, elles se précipitèrent pour me sauter au cou. M'enlaçant une à une, je n'aurais jamais pensé que le fait d'aller à une soirée puisse autant les mettre en joie.
– Florent nous avait invitées, mais on n'était pas sûres que tu acceptes de venir. Je serais avec Arthur, mais je te promets que je ne serais pas collée à lui et qu'on profitera tous ensemble comme au bon vieux temps ! s'exclama Leïla.
Je tentai de paraître sereine seulement, une part de moi craignait cette soirée. Je savais que mes amis seraient présents pour me soutenir, mais je ne pouvais les empêcher de profiter de leur moment festif. J'allais devoir me vêtir, me maquiller, me préparer psychologiquement à sourire tout simplement.
Bras dessus-dessous, les filles m'embarquèrent pour discuter de ce qu'elles envisageaient de porter. Évidemment, ma Marocaine se mit en tête que l'on se prépare toutes les trois chez elle. Joie et bonheur, j'allais devoir jouer à la poupée.
Et malheureusement pour moi, cet instant-là arriva bien plus vite que prévu. Je me tenais là, debout, sur le perron devant chez Leïla. Mes parents avaient trouvé l'idée brillante et ma chère et tendre grande sœur m'avait bien sûr plus que poussée à y aller. Sac vissé sur le dos, j'attendis la boule au ventre que l'on vienne m'ouvrir. J'appréhendais cette fête. Je n'arrivais pas à prévoir la tournure de la soirée et je craignais le pire.
– Lilou ! Entre, dépêche-toi, on a tellement de choses à faire, faut qu'on te trouve une tenue, qu'on te coiffe, qu'on te maquille et que tu m'aides pour Chloé ! Elle refuse de porter ma petite robe verte avec le col Claudine alors que je suis sûre que ça lui irait à merveille !
Saluant rapidement la maman de Leïla, elle m'emmena dans sa chambre. Elle ne changeait pas et par chance, j'aimais ça. Alors je jouais le jeu et acceptais sans broncher toutes les élucubrations de ma meilleure amie. Elle m'avait donc fait une jolie tresse épi sur le côté. Chloé s'était occupée de mon maquillage, un beau smocky eye sombre pour faire ressortir mes yeux bleus. Et enfin j'avais opté pour une combinaison-pantalon noire. À peine avais-je fini de me préparer qu'elle me tira devant le grand miroir de l'entrée.
– Je veux nous photographier, je veux un souvenir de ce moment ! souffla Chloé en sortant son téléphone. Ça me fait tellement de plaisir de nous voir tous les trois comme ça !
En attendant nos cavaliers, nous nous allongions sur le lit de Leïla. Entre confidences, photos et rires, cela faisait un bien fou et me permit de me détendre avant la soirée.
– Je crois que Florent aimerait plus, nous confia ma blonde, gênée. Mais je ne suis pas sûre de pouvoir franchir ce cap.
J'aurais aimé la questionner seulement j'avais peur que son hésitation n'ait un lien avec son ancien amoureux, celui qui m'a brisé le cœur. Par chance, la sonnette nous interrompit et nous obligea à nous lever. Enfilant nos manteaux, nous rejoignîmes Vincent sur le pas de la porte. La voiture de Monsieur Leroy nous attendait juste devant. Tout s'enchaînait bien trop vite pour moi. Je me rendis compte que je n'étais pas prête à affronter tout ça. Percevant mon malaise, mon meilleur glissa naturellement sa main dans la mienne, comme si ce geste aussi intime nous semblait normal et légitime. Je me laissai porter et décidai de mettre mon cerveau sur pause. Le temps d'une soirée, je m'offrais une renaissance.
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Coucou mes petits lecteurs,
Un grand merci pour vos retours sur le chapitre précédent, ça fait chaud au cœur.
Alors concernant ce chapitre? Que pensez-vous de l'attitude d'Axel? Je sais que beaucoup parmi vous sont déçus du comportement de son comportement mais je vous promets que vous aurez toutes les explications?
Et notre Vincent, à la fois sérieux et drôle mais toujours présent...
Bref, j'espère que ce chapitre vous a plu. A très vite !
Bisous, Bisous 🖤,
L.
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