Chapitre 45
La douce mélodie emplissait la pièce tandis que mon regard se perdait sur le blanc de mon plafond. Réveillée depuis deux heures, j'avais profité du calme régnant dans la maison pour tenter de faire le vide et envisager les possibilités qui s'offraient à moi. Malheureusement je n'arrivais pas à associer tout ce qui m'entourait : baiser, Axel, Vincent, secret, Chloé, trahison... Tant de mots qui ne pouvaient être accordés. Même si je n'étais pas seule, je savais que dans cette conjoncture personne ne pourrait me guider. J'étais entièrement responsable de cette situation. Et je pouvais désormais ajouter un autre nom à cette longue liste : culpabilité. Je craignais le pire bien que je ne considérais pas mes actes comme néfastes.
Un énième rappel m'obligea à sortir de ma contemplation. Ce n'était plus le moment de tergiverser, je devais me lever et me préparer. En silence, j'effectuai une mécanique de gestes, comme une ancienne ritournelle. Se déshabiller, se doucher, se sécher, s'habiller, se maquiller, manger, se brosser les dents, se taire, embrasser ma famille, récupérer mon sac et quitter la maison. Seulement cette boule au ventre n'avait rien d'ordinaire. Je luttais intérieurement entre mes vieux démons et mon envie d'avancer.
Ajustant mes affaires, je sortis sur le perron. Soudainement, le froid de cette nouvelle année me mordit la peau et me ramena à cette réalité que j'avais mise entre parenthèses durant une petite heure. Cachée par mon écharpe, j'espérai passer inaperçue. Pourtant à peine avais-je fait un pas que j'entendis mon prénom résonner dans la rue encore vide. Il ne me fallut pas longtemps pour reconnaître les deux prunelles azur et les cheveux bruns en bataille de mon meilleur ami. Je n'eus le temps d'ouvrir la bouche qu'il déposa un bisou sur ma tempe et se dépêcha de justifier sa présence auprès de moi ce matin.
– Salut, ma Lilou, je sais que tu as l'habitude que ce soit Vincent, mais là il ne pouvait pas alors il m'a chargé de venir te chercher.
Un poids s'écrasa lourdement dans ma poitrine, amenant avec lui son lot de questions. Était-ce la faute de notre baiser ? Allait-il moins bien qu'hier ? Avais-je dit quelque chose qui ne fallait pas ? Dans ma tête, un flot de scénarios firent irruption, me laissant désemparée. Je ne voulais pas perdre mon meilleur ami pour un moment d'égarement. On devait compter l'un sur l'autre quoi qu'il en soit. Mordillant nerveusement ma lèvre inférieure, Baptiste comprit immédiatement mon trouble et me prit dans ses bras.
– Il va bien Lilou, ne t'inquiète pas. Il m'a dit que son père le déposait directement. Je crois qu'il a une prise de sang à faire pour le rugby. Regarde-moi s'il te plaît, ajouta-t-il en relevant mon menton. C'est dur pour lui, mais il sait qu'il doit se battre, pour nous et aussi pour Zac. Il n'est pas seul...
Il n'est pas seul... Il y avait quelques mois, je ne l'étais pas non plus et cela ne m'avait pas empêchée de vouloir tout arrêter. Et si jamais il n'arrivait plus à lutter, si jamais il abandonnait, je ne pourrais jamais me le pardonner surtout après toutes nos épreuves.
M'enlaçant une dernière fois, il nous dirigea vers le lycée. Nous profitions de ces quelques minutes à deux pour discuter de ses vacances. Il me raconta les fêtes en famille et surtout ses moments avec Andréa. Ils avaient savouré ces petits après-midi ensemble, car avec la reprise des cours, ils ne pourraient se voir que certains week-ends. Si j'avais bien compris, sa petite-amie faisait des études pour devenir auxiliaire de vie en maison de repos. J'admirai son engagement, parce que cela ne devait pas être facile. Il m'avouait sans honte être bien avec elle, il ne faisait pas de plan sur la comète et se laissait porter. J'étais réellement heureuse pour lui.
Seulement en arrivant à quelques mètres du lycée, je ne pus cacher mon angoisse. Elle revenait au galop me stoppant dans notre avancée. Baptiste posa sa main au creux de mes reins et m'incita à l'accompagner, me coupant ainsi dans mes doutes. Nous franchissions enfin les grilles lorsque je l'aperçus. En grande conversation avec Chloé, Axel ne m'avait pas vue arriver. Une part de moi se demandait ce que les deux anciens tourtereaux pouvaient bien se dire. La curiosité se mélangea doucement à un début de jalousie. Sentiment malsain que je ne connaissais que trop bien et qui n'avait pas lieu d'être dans ma situation. Axel et moi n'avions rien, juste une relation qui n'appartenait qu'à nous, et je ne devais pas oublier la position que j'avais vis-à-vis de ma meilleure amie. À cet instant, je pris complètement conscience du bourbier dans lequel mon cœur m'avait empêtrée. Une trahison pleine et entière envers les êtres auxquels je tenais le plus. Je savais que la bataille interne que j'allais me livrer pouvait effriter tous les progrès que j'avais faits jusque là.
– Lilou-Ann Morel ? Est-ce que tu m'écoutes ?
Revenant sur terre, je vis Baptiste planter devant moi, agitant sa main dans tous les sens. Comprenant mon absence, je m'excusai platement et repris le chemin à ses côtés. Nous rejoignîmes rapidement mon groupe de camarades qui s'était agrandi par l'arrivée de Leïla et son amoureux. Par chance, mon Baptiste se contenta de saluer d'un geste de la main nos amis, je décidai de copier lâchement sa façon de faire. Ainsi je m'enlevai tout moment de gêne. Levant les yeux, je perçus le léger rictus se dessiner sur le visage de la petite Marocaine. Je supposai aisément ce qu'elle avait en tête. J'avais une confiance aveugle en elle et je savais que mon secret était bien gardé avec elle.
– Chloé, tu m'accompagnes à la vie scolaire s'il te plaît ? demanda Leïla.
Celle-ci acquiesça avant de déposer un bisou sur ma joue. Arthur, quant à lui, accompagna mon meilleur ami à son cours de sport, me laissant seule avec Axel. Autant dire que je venais de tomber lamentablement dans un coup fourré de ma belle brune. De tout ce que j'avais pu imaginer, ce plan là n'en faisait pas partie.
– Comment vas-tu Lou ?
Le son de sa voix suffit à faire envoler toute crainte, tout malaise pour ne laisser place qu'à un sentiment de plénitude. Je ne pus m'empêcher d'esquisser un sourire et de mordiller ma lèvre inférieure.
– Je vais bien et toi ? soufflai-je en me perdant dans ces émeraudes.
– Ça va même si je ne te cache pas que ça me perturbe un peu de faire comme si de rien n'était...
Je comprenais parfaitement son ressenti. Mais alors que je m'apprêtai à lui proposer un tour dans mon petit coin secret, un bras se posa véritablement sur mes épaules. Je n'avais pas besoin de savoir de qui il s'agissait, son parfum m'emplissait les narines. Déposant un baiser sur ma joue, Vincent me garda fermement blottie contre lui. J'assistai en direct à un combat de coqs. Je me demandais lequel des deux allait finir par m'uriner dessus pour marquer son territoire. Songer à cela me fit glousser nerveusement.
– Bon Lilou, on y va tu as cours de maths, je te rappelle.
Sans me laisser le temps de répondre, il m'embarqua à l'intérieur de l'établissement. Évidemment je jetai un dernier coup d'œil en direction d'Axel, espérant qu'il ne m'en veuille pas. Nous nous dépêchions de rejoindre ma salle, pourtant une fois devant, mon meilleur ami me retint par le bras.
– Désolé, mais j'ai du mal à te voir avec lui. Il y a un truc qui me bloque...
– La jalousie sûrement non ?
Merci impulsivité !
J'avais beau savoir qu'il n'y avait rien de méchant, je n'avais sincèrement pas envie de me retrouver au milieu d'une quelconque bataille ou concours de celui qui a le plus gros égo. Étonnamment et pour la première fois depuis longtemps, je venais de clouer le bec de Vincent. Je ne voulais pas me disputer avec lui alors pour éviter de rentrer dans un débat sans queue ni tête, je décidai de rentrer en classe. M'installant derrière mes deux meilleures amies, je me préparai à cette heure de torture qu'était cette discipline.
Les cours étaient très intenses malgré tout, j'avais l'esprit ailleurs. Je commençai à culpabiliser. Je m'étais mise involontairement dans une situation inconfortable. Je n'avais pas réfléchi une seule seconde aux conséquences. Je m'étais laissée porter par mon cœur, comme me l'avait conseillé Luce. Malheureusement, j'avais peur de regretter mes échanges avec Axel...
– Mademoiselle Morel ? m'interrogea subitement mon professeur de mathématiques. Vous pouvez répondre s'il vous plaît ?
Je baissai honteusement les yeux. Encore une fois, je m'étais laissée emporter par mes pensées. M'excusant auprès de lui, je repris assidûment mes notes et écoutai attentivement les explications. Évidemment à la fin de l'heure, je n'échappai pas à un interrogatoire par Leïla et Chloé. Je comprenais leur inquiétude seulement je ne pouvais rien dire, comme par habitude je me contentai de garder mes tourments enfouis profondément en moi. La matinée s'enchaînait avec une lenteur extrême.
Mais alors que le prof d'anglais donnait sa dernière recommandation, je profitai du flot de mes camarades pour m'éclipser rapidement et retrouver mon endroit préféré pour souffler. Sur le chemin, j'en profitai pour envoyer un bref message à Axel. Cependant, au moment de passer la porte, je fus surprise de le voir déjà là. Emmitouflé dans son manteau, il se tenait debout, les mains dans les poches, son bonnet vissé sur la tête. Je n'aurai jamais envisagé six mois auparavant pouvoir admirer ce garçon. J'aimais voir ses mèches brunes dépasser, qui se posaient délicatement sur son front, son nez droit parfaitement dessiné, sa mâchoire carrée...
– Je sais que tu es là, lâcha-t-il sans se retourner.
Surprise, j'affichai un grand sourire. Pourtant lorsque ses iris croisèrent les miens, je sus que l'attitude de Vincent quelques heures plus tôt l'avait blessé. Reculant contre le mur, je le vis glisser le long de la pierre pour s'asseoir par terre. Prenant place à ses côtés, je posai ma tête sur son épaule. Profitant de notre proximité, je fermai les yeux et savourai cet instant. J'avais décidé d'être totalement transparente avec lui. Comme pour me donner du courage, je glissai mes doigts dans les siens et me lançai.
– Vincent est venu chez moi hier et il m'a embrassée, murmurai-je.
Il relâcha soudainement ma main et se releva. Les bras croisés sur sa poitrine, il regardait au loin. Je compris immédiatement que ma confession l'avait blessé. En deux grandes enjambées, je le rejoignis et calai mon torse contre son dos. Mon oreille le long de sa colonne vertébrale, j'entendais son cœur battre. Mes poings sur sa cage thoracique, je le retenais prisonnier. Mes jambes près des siennes, je tentais de ne pas m'effondrer.
– Je suis désolée Axel, je ne veux pas te faire de mal, mais je ne voulais pas te le cacher. Je suis vr — .
– Est-ce que tu as aimé ? me coupa-t-il.
– Non, enfin je ne crois pas...
Il se retourna soudainement et prit mon visage en coupe. Ses yeux plantés dans les miens, je vis une détermination que je ne lui connaissais pas.
– Est-ce que tu as ressenti ça ?
Ses lèvres se pressèrent brutalement sur les miennes. Mes mains agrippèrent son manteau. Nos peaux se frôlèrent. Nos souffles se mélangèrent. Nos cœurs battirent à l'unisson. Je savourai ce baiser comme si ma vie en dépendait. Mais il y mit un terme bien trop tôt. Posant son front contre le mien, il reprit sa respiration.
– Alors, dis-moi Lou, dis-moi que tu n'as pas ressenti ça pour lui, je t'en supplie...
Oh que non Axel, si seulement tu savais...
Comment lui dire ? Comment lui dire que sa façon de me regarder me faisait chavirer ? Comment lui dire que sa façon de me toucher me renversait ? Comment lui dire que sa façon de m'embrasser me bouleversait ? Je ne pouvais pas, c'était bien trop dur. Je ne pouvais pas avouer à haute voix cette alchimie qu'il y avait entre nous. Donc à mon tour, je pris les devants et déposai ma bouche sur la sienne. Les bras autour de son cou, je l'attirai contre moi. J'aurais aimé rester ainsi pour le reste de la journée. Oublier ce qui m'entourait. Laisser de côté la réalité. Savourer. Profiter. Parce que oui, j'avais de nouveau peur.
Malheureusement, un léger bruit nous coupa. Nous réfugiant brutalement le long du mur, j'aperçus un élève de seconde passer la tête dans l'entrebâillement de la porte avant de repartir. Mes doigts enlacés aux siens, je me plaçai face à lui.
– Je crois que j'ai répondu à ta question...
Il esquissa un sourire communicatif. Bougeant les phalanges, je le vis se focaliser sur ma main gauche. Il fronça les sourcils puis releva son visage vers moi.
– Elle est sublime, mais tu ne l'avais pas avant ? me questionna-t-il en m'indiquant les deux anneaux entrelacés sur mon majeur.
Je contemplais de nouveau ce bijou. Il avait raison, elle était d'une beauté à couper le souffle. Je l'avais enlevée avant le Nouvel An pour être sûre de ne pas la perdre. Je n'arrivais pas à la porter constamment, c'était si difficile, mais ce matin je l'avais enfilée comme pour me donner du courage. J'avais espoir qu'elle serait une sorte de bouclier, de protection dans la tempête qui se jouait en moi. Observant une dernière fois le métal froid qui ornait mon doigt, je mis un certain temps à répondre. Je ne savais pas par où commencer.
– C'est Zac... Il me l'a achetée avant de... avant son accident... Vincent me l'a donnée quand je suis allée au cimetière en décembre. J'ai mis du temps avant de pouvoir ouvrir l'écrin, mais je devais le faire pour lui...
Admirant ma main, il esquissa un sourire avant de resserrer sa poigne. Je vis son regard se perdre dans sa contemplation.
– Elle est vraiment très b-
Soudain mon téléphone vibra, nous interrompant. Regardant le nom de mon interlocuteur, je décrochai immédiatement.
– Allô, Leïla, qu'est-ce qui se passe ?
– Si tu ne ramènes pas ton fessier dans les minutes à venir, Chloé va finir par comprendre que tu es actuellement en train d'enfoncer ta langue dans la gorge d'Axel, chuchota-t-elle en ricanant.
Je raccrochai sans attendre et expliquai la situation au brun qui se tenait à mes côtés. Non sans un pincement au cœur, je déposai furtivement un baiser sur ses lèvres avant de le quitter. J'arpentai promptement les couloirs pour me rendre au gymnase qui juxtaposait notre lycée. Sac à dos sur l'épaule, je me dépêchai de me glisser dans les vestiaires. Par chance j'étais la première, j'enlevai rapidement mon jean et mon pull et enfilai ma tenue de sport. À peine avais-je fini que mes meilleures amies et un groupe de filles débarquèrent.
– Mais Lilou, t'étais où ? me questionna Chloé en s'asseyant à côté de moi.
– J'ai eu besoin de prendre l'air avant de venir ici, mais arrête de t'inquiéter, dis-je en la bousculant légèrement pour la taquiner.
Je n'aimais pas lui mentir seulement je ne voulais pas la blesser. Je savais que depuis le départ de Zac notre amitié restait très fragile et je ne voulais pas risquer de la perdre pour quelque chose que je n'arrivais pas encore à définir. En attachant mes cheveux, je perçus le regard empli de compassion de Leïla. Elle me connaissait suffisamment pour savoir que mon omission n'était pas une façon de faire du mal à Chloé mais une manière de nous protéger. Au fond je savais que la tornade qui sommeillait en elle finirait par éclater et il était hors de question que cela la blesse elle aussi. Alors intérieurement je me fis la promesse de ne pas faire perdurer la situation.
-– Bon les moches, on y va, je n'ai pas envie de faire trois tours de terrain supplémentaires à cause de vous, bougonna ma grande brune.
Une heure intensive de badminton. Autant dire que c'était de la torture pure et dure. J'avais beau adorer le sport, celui-ci me laissait pantoise. Je ne comprenais pas le principe de taper dans un objet qui ressemblait plus à un suppositoire qu'à une balle.
– Lilou, tu nous files un coup de main pour le devoir de mathématiques s'il te plaît, me supplia Leïla en sortant du vestiaire.
En effet, nous avions une heure de pause et malgré son côté déluré, elle était très studieuse et profitait de chaque instant pour faire le travail qu'on nous demandait. J'acceptai non sans ronchonner un peu. J'avais espéré profiter de cette heure de répit pour lire tranquillement dans un coin du lycée. Malgré tout, je me laissai guider par mes meilleures amies. Nous retrouvions très vite une salle de travail et nous nous installions à une des tables rondes. Évidemment, ce qui devait être un moment d'assiduité, tourna rapidement court quand Vincent, Baptiste, et deux de leurs camarades décidèrent de faire leur entrée. Comme une sensation de déjà-vu s'empara de moi à la seule différence, c'était que lors de ce premier vécu, Zac se tenait derrière eux. Je me souvenais parfaitement de son sourire quand il était entré dans la pièce. Nous étions ensemble depuis un mois. Bien sûr, notre couple avait surpris tout le monde, attirant les mauvaises langues et les rumeurs plus bêtes les unes que les autres. Mais nous n'en avions pas tenu compte. Il n'y avait que nous et notre bulle. Une des magies de notre amour était, comme le disait si bien l'adage, d'ignorer qu'il puisse finir un jour... Secouant ma tête, je tentai désespérément de chasser ces souvenirs.
– Lilou-Ann en salle de travail ? On n'est pas le premier avril pourtant ! blagua Thomas, un des amis de Vincent.
En guise de réponse, je préférai lever les yeux au ciel. Je savais que je ne pouvais rien répliquer. Depuis des mois, j'avais été un fantôme dans ce lycée, une ombre errante.
– Et toi, depuis quand tu connais le chemin pour venir ici ?
Je me redressai soudainement sous la remarque acerbe sortie de la bouche de Chloé. Estomaquée, je la regardai surprise, tandis que mon abruti de meilleur ami était plié en deux.
– Bonjour, mademoiselle, qui êtes-vous ? osai-je lui demander. Rendez-moi ma Clo s'il vous plaît.
– Non, mais c'est vrai Lilou, ce type est un trou du cul qui pense qu'il est meilleur que les autres. Or, on sait tous les nombres de vents qu'il se prend par jour alors il ferait mieux de s'occuper de ses affaires.
J'explosai de rire, accompagnée de mes camarades qui avaient eu la chance d'entendre ces propos. Évidemment, nous nous fîmes recadrer par le surveillant en charge des deux salles de travail. Après avoir lancé un regard noir à mes partenaires masculins, nous retournions chacun à notre occupation. Trois fois que je relisais l'intitulé de l'exercice : On considère une fonction f définie et continue sur l'intervalle [1 ; 15]. Son tableau de variation est indiqué ci-dessous. Soit F une primitive de la fonction f sur l'intervalle [1 ; 15]. On peut affirmer que... Rien, le néant. Je n'étais pourtant pas mauvaise, seulement je n'arrivais pas à être suffisamment concentrée. Mon ventre me criait famine, ma tête me hurlait de fuir et ma raison m'obligeait à rester, en bref une vaste bataille intérieure.
Alors en espérant que la réponse tombe du ciel, je jetai un œil en direction de mon blond. Celui m'observa, le sourire en coin. Il me fit signe de regarder dans mon sac donc discrètement je sortis mon téléphone. Trois messages non lus.
* T'es où ? * — Chloé
* On mange ensemble ce midi ? * — Vincent
* Viens, on se tire ? * — Vincent
Alors que je m'apprêtai à le ranger et à ne pas céder aussi facilement à sa requête, mon portable vibra de nouveau. Il pouvait être particulièrement tenace et cet exemple n'échappait pas à la règle.
* Ne me dis pas non... * — Vincent
Levant le regard vers mon harceleur, il clignait des yeux et faisait ressortir sa lèvre inférieure. L'attirail parfait du chat potté. Malheureusement pour lui, j'étais d'humeur taquine.
* Je cède seulement si tu es capable de te conduire en gentleman et que tu viens me demander de t'accompagner en bonne et due forme *
Reposant mon smartphone dans mon sac, je tentai de reprendre mon exercice. Il ne fallut qu'une minute pour attendre un raclement de gorge. Contrairement à Chloé et Leïla, je ne relevai pas et tentai de paraître aussi neutre que possible.
– Qu'est-ce que tu veux encore Vincent ? questionna ma Marocaine.
– Je me présente face à vous, pour vous demander si je peux vous emprunter Lilou-Ann Morel ici présente afin de pouvoir souffler un peu. Ne vous inquiétez pas je prendrai soin d'elle.
Je pouffai lamentablement de rire. Ce garçon voulait ma mort, alors afin de ne pas attirer davantage d'ennuis à mes deux amies, je récupérai mes affaires, déposai une bise à chacune et m'éclipsai discrètement.
Déposant nonchalamment son bras sur mes épaules, il nous fit sortir du lycée. Je ne savais pas où il comptait nous emmener, mais je me laissai guider. Avec le froid de janvier, nos possibilités s'amenuisaient. Il nous emmena donc dans le minuscule café situé à côté de notre établissement. Je dictai rapidement nos commandes en nous installant. Face à lui, je pris les devants. J'avais besoin qu'on discute de ce qui s'était passé la veille.
– Vincent, il faut qu'on parle s'il te plaît...
Il acquiesça en plantant son regard noisette dans le mien. Je détestai sa façon de me regarder en cet instant. Je ne pouvais oublier son soutien, les efforts qu'il a faits et le chemin que nous avions parcouru ensemble. La petite voix de Luce me revint en mémoire : « Quand tu es avec lui, tu souris. Un vrai sourire comme avant. Depuis qu'on a failli te perdre, il ne t'a jamais lâchée. Il veille sur toi, passe son temps avec toi, fait son maximum pour t'aider à avancer... Si ce garçon ne t'aime pas, c'est parce qu'il ne le sait pas encore. » Une fois nos boissons arrivées, je respirai profondément et me lançai.
– Comment vas-tu depuis hier ?
En voyant son visage, je compris qu'il s'attendait à une autre question pourtant avant de pouvoir envisager la suite, j'avais besoin de prendre la température.
– Mieux Lilou... Je ne dis pas que je vais sortir le champagne, mais après être parti de chez toi j'ai marché, j'ai réfléchi et franchement je ne devrais pas me plaindre. Je n'en ai pas le droit. Je suis là, avec les gens que j'aime...
Il avait raison, nous avions la vie devant nous et devions la croquer à pleine dent, car nous ne savions pas de quoi l'avenir pouvait être fait. Malheureusement, j'avais quand même certaines choses à mettre au clair...
– Pourquoi tu m'as embrassée hier ? Et est-ce que c'est pour ça que tu n'es pas venu ce matin ? envoyai-je sans attendre.
– Non, ne t'inquiète pas. Au dernier entraînement, j'ai fait un malaise donc le coach m'a obligé à faire une prise de sang, voilà tout. Et pour hier Lilou, je ne sais pas, c'était une envie. Je ne sais pas comment t'expliquer... Je sais que je ne devrais pas, mais au fond j'ai peur que n'importe qui prenne la place de Zac...
La bombe qu'il venait de lâcher m'explosa en plein cœur. Je n'avais pas envisagé l'espace d'une seconde qu'il puisse imaginer que quelqu'un d'autre remplace Zac. Parce que quoi qu'il se passe, personne ne pourrait me faire vibrer comme lui. Malheureusement, j'avais aussi peur de comprendre tout ce que cette phrase sous-entendait.
– Oh... donc si tu te comportes comme un connard possessif c'est pour repousser tous les hommes autour de moi ?
Il baissa la tête honteux. Je ne voulais pas le blesser, mais je voulais qu'il comprenne que nous n'étions pas à la préhistoire et que ses méthodes dignes de Cro-Magnon n'avaient pas lieu d'être.
– Ce que je veux dire, c'est que tu n'as pas besoin de réagir comme ça. Je suis grande pour faire attention à moi. Tu vaux mieux que ça et moi aussi. Je ne veux pas être de nouveau un défi. Du genre si elle est avec moi, personne ne l'aura, ça n'a pas de sens. Et s'il te plaît, sois plus sympa avec Axel... murmurai-je.
Je vis sa main se crisper autour de sa tasse. Je savais que j'abordai un sujet compliqué, mais je ne voulais pas d'une espèce de guerre de celui qui a la plus grosse. Je ne voulais pas avoir à choisir entre deux garçons, qui chacun à leur façon m'aidaient à avancer. Il tentait de garder le contrôle pourtant je sentais bien que cela était bien trop dur.
– Lilou, ce n'est pas un défi du tout et puis ce mec, je sais p —
– Stop Vincent. Laisse-moi faire mes choix s'il te plaît. Si tu tiens à moi, ne me mets pas dans cette position...
Appuyant sur son point sensible, je savais que je venais de gagner une première bataille, du moins pour quelque temps. Quoi qu'il m'en coûte, je ne voulais pas entrer en guerre contre lui. C'était bien plus qu'un allié, il m'était indispensable...
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Coucou mes petits lecteurs,
Désolée pour ce petit retard, mais j'ai profité de ces petites vacances pour souffler un peu. Voici le retour de Lilou-Ann, après le baiser avec Vincent.
Qu'en pensez-vous ? Ce chapitre vous a-t-il plu ?
Il reste une quinzaine de chapitres... Préparez-vous ça va secouer ^^
Bisous, bisous 🖤,
L.
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