Chapitre 40

Savourant une dernière fois cette étreinte chaleureuse et amicale, je me détachai lentement d'elles. Mais Chloé saisit ma main et nous emmena dans la salle de bain à l'abri des regards. Elle s'installa sur le rebord de la baignoire, fixant un point au sol. Et même si je devais avouer que le carrelage gris anthracite était beau, je ne comprenais pas notre venue ici. Je tentai de ne pas la brusquer pourtant j'attendais avec impatience des réponses. Alors que je commençai à me dandiner d'un pied sur l'autre, elle souffla et se lança.

– Je ne l'aime plus Lilou, mais ça me fait bizarre de vous voir ensemble. Vous semblez vous compléter merveilleusement bien, vous semblez vous comprendre, vous semblez partager quelque chose à laquelle personne ne peut accéder... C'est terriblement perturbant... Sache que je ne veux que ton bonheur et si c'est avec Axel et bien je l'acc —.

– Axel ? Je ne sais pas laquelle de nous deux est le plus imbibée, mais je ne comprends rien.

C'était le cas. J'avais la sensation que quelque chose m'échappait. Après Luce qui voulait me caser avec Vincent et Chloé qui envisageait une hypothétique relation entre Axel et moi, je me sentais perdue. Alors comme pour chasser toutes ces idées farfelues, je me posai à ses côtés et liai ses doigts aux miens. Je ne saisissais pas tout, mais une chose était sûre, ce soir il n'y avait pas de place pour les confessions, les regrets et la torture.

– Ma Clo c'est nous contre le reste du monde ! Et là disons adieu à cette année, c'est tout ce qui compte.

J'embrassai sa tempe avant de lui offrir mon plus beau sourire auquel elle répondit. Nous quittâmes notre antre et rejoignîmes les autres. Tous les invités semblaient enjoués, heureux d'être réunis. Mon regard balaya la pièce et quelque chose clochait. En effet, au milieu de la foule, une personne semblait manquer à l'appel. Soucieuse de l'avoir laissé boire plus qu'il n'aurait dû, je me mis à le chercher dans la maison, mais aucun signe de lui. Rapidement, je sortis à sa recherche et repérai immédiatement sa voiture. Pourtant il ne semblait pas se trouver dans les environs. Je tentai de ne pas paniquer, mais l'alcool aidant, c'était peine perdue. Ma dernière chance était le jardin. Je contournai la bâtisse et me dirigeai derrière. Rien. Le néant. J'imaginai qu'il était parti sans un mot, titubant dans les rues sombres et froides. Il pourrait lui arriver quelque chose de grave et cela m'effrayait profondément. J'étais renvoyée des mois en arrière avec la crainte de revivre les mêmes instants. Au moment où je m'apprêtai à rentrer, une larme perla le long de ma joue. C'était stupide. Il ne pouvait pas être parti bien loin, malgré tout je me sentais responsable.

– Lou ?

Ce surnom et ce timbre de voix résonnaient en moi, faisant retomber toute inquiétude. Je me retournai et sans réfléchir, je me blottis dans ses bras. Il me rendit instinctivement mon étreinte, caressant doucement mon dos. Enserrant sa taille, mon corps entier se relâchait. Je humai son odeur, un parfum réconfortant et qui me rappelait à quel point j'avais été bête de croire au pire. Je relevai lentement le visage et croisai son regard empli d'interrogations.

– Mais Lou pourquoi tu pleures ? dit Axel en essuyant l'unique traîtresse de ma panique.

– J'ai eu peur que tu sois parti alors que tu avais bu...

Merci vodka pour ta franchise et adieu dignité !

Ses doigts bouillants se posèrent sur mes joues rafraîchies par le froid de décembre. Ses billes couleur émeraude se verrouillèrent à mon bleu azur. Mes mains sur ses flancs s'agrippèrent à son t-shirt. Nos souffles alcoolisés se mélangèrent. Mon palpitant s'emballa. Cette sensation ardente et brûlante se propageait en moi, m'enfermant dans cette envie naissante.

– Lilou ! Lilou ! hurla Leïla me sortant immédiatement de cette bulle si intense.

Je reculai, gênée par ce contact que j'avais tant désiré quelques minutes auparavant. Ce soir, l'ivresse et lui avaient le don de me faire tourner la tête. Aussi surpris que moi, ses yeux s'écarquillèrent et je le vis mordre sa lèvre. Je rentrai précipitamment ne lui laissant aucune chance de prononcer quoi que ce soit, même si une part de moi aurait aimé savoir ce qui se tramait dans son cerveau. À peine avais-je mis un pied dans le salon que ma tornade brune me sauta dessus.

– Tiens ! dit-elle en me tendant le énième verre de la fête. J'ai besoin que ton esprit soit bien ouvert pour que tu sois prête à entendre ma révélation.

Elle me tira dans la cuisine pour nous isoler de toutes les oreilles présentes dans la maison. Alors que j'hésitais fortement à le boire, son signe du menton me fit comprendre que je n'avais pas le choix. Avalant une première gorgée assez corsée, je l'écoutai attentivement.

– Je pense que je ne vais pas tarder avec Arthur.

Ne pas tarder ? Ne pas tarder à faire quoi ? À rentrer ? À dormir ? Décidément ce soir, elle et Chloé avaient décidé de parler en langage codé. Je portai une seconde fois, mon verre à ma bouche avant de reprendre la parole.

– Mais pourquoi vous voulez partir ? Leïla, on est chez toi, tu ne vas pas déjà aller au lit ?

Elle m'offrit de nouveau un cocktail et m'invita à le boire. Là, ça commençait vraiment à sentir mauvais. Elle cherchait certainement à me faire passer un message.

– Vu que tu ne sembles pas comprendre, je vais te faire une traduction simple. Je pense faire l'amour avec Arthur, j'aimerais enfin passer le cap...

Désormais je comprenais mieux pourquoi elle m'avait plus que conseillé de boire. Si j'avais été sobre, je me serais assurément évanouie. Par chance, l'alcool me permit de digérer la nouvelle sans tomber dans les pommes. J'hallucinai totalement. Leïla voulait perdre sa virginité. Elle m'avait toujours affirmé qu'elle n'était pas prête et qu'elle était angoissée. Ma Leïla, ma belle Marocaine folle, mais posée voulait devenir une femme. J'étais tellement heureuse pour elle, que je la pris dans mes bras. Je ne pouvais contenir davantage mon émotion.

– Fonce si tu es sûre de toi, mais protégez-vous ! soufflai-je au creux de son oreille.

Elle se détacha, me sourit franchement et m'ordonna de retourner au salon. Je n'en revenais pas. Cette nouvelle me mit réellement en joie. Revenant parmi la foule, je retrouvai cette ambiance festive. Chacun y allait de son petit pas de danse, le verre à la main. Toute occasion méritait de trinquer un coup. Et moi j'avais envie de croire que cette maudite année s'achevait enfin, laissant place à notre part de bonheur. Observant Vincent, je ne perçus pas immédiatement le taux d'alcoolémie d'Arthur. Malheureusement cette inattention coûta la sobriété de ma tenue. Elle ressemblait maintenant à une serpillère imprégnée de whisky et ce n'était pas la seule chose à être un peu trop alcoolisée. Je ne pus m'empêcher de glousser comme une idiote. Par chance, Leïla me prit par le poignet et m'emmena dans le bureau. Elle quitta la pièce, alla me chercher une robe quasi identique à la mienne et me somma de me changer avant de repartir. Je ne pensais pas qu'enlever ce vêtement virerait au parcours du combattant. Alors que je tentais d'ouvrir la fermeture, mon fessier rencontra soudainement le sol. Savoir comment je m'étais retrouvée dans cette situation relevait du mystère, mais je fus prise d'un fou rire incontrôlable.

– Lou, ça va ? demanda une voix que je reconnus immédiatement derrière la porte.

Est-ce que ça allait ? Oui. Est-ce que j'allais m'en sortir ? Ça, c'était moins sur...

J'imaginai tellement la scène que je peinais à me maîtriser. Je repris mes esprits, rassemblai mon courage et fis de gros efforts pour tenter d'enfiler tant bien que mal cette nouvelle tenue. Montée sur mes escarpins, je rassurai comme je le pouvais mon interlocuteur.

– Oui, ne t'inquiète pas Axel, j'arrive.

Passant ma main dans mes cheveux pour remettre de l'ordre, je pouffai de rire en me remémorant ma chute. Je pense que si je n'avais pas été seule, j'aurais été la star d'un grand show humoristique. Alors que j'ouvris la chambre, je tombai nez à nez avec de magnifiques iris verts. J'observais chaque trait de son minois. Malgré une légère inquiétude visible, il était d'une beauté à couper le souffle.

– Tu sais que t'es très beau ! T'as de jolies fossettes quand tu souris, ça te donne du charme. Et puis lorsque je regarde tes yeux, j'ai l'impression de me balader en forêt. C'est tellement envoûtant. On a envie d'y plonger, d'y courir et même de s'y perdre pour découvrir tous tes secrets. Et je trouv — .

– Lou, tu es vraiment sûre que ça va ? m'interrogea-t-il prenant mon visage en coupe.

Perdue dans son regard, aucun mot ne franchit la barrière de mes lèvres. Les siennes, d'ailleurs, étaient parfaitement dessinées et d'une taille délicieuse. Elles semblaient douces et étaient un appel à la tentation... Alors sans réfléchir, ma main caressa sa joue, tandis que mon pouce dessina sa lippe. J'étais persuadée qu'y goûter serait encore meilleur qu'une bouffée d'oxygène après un an d'apnée... Je me laissai guider par mes envies, mes désirs et mon ivresse plus qu'avancée. Ma bouche se posa soudainement contre la sienne. Cédant à ce besoin primaire, j'avais la sensation que mon cœur allait sortir de ma poitrine.

La moindre caresse mettait mon corps en émoi, chaque pore de ma peau brûlait à son contact. J'étais transportée dans un autre monde, détachée de la réalité. Le temps était suspendu, seul notre baiser comptait. Ses mains au creux de mes reins me maintenaient contre lui, m'emprisonnant dans ses filets. Perdue dans ce délicieux échange, ce contact aurait pu durer des heures. Malheureusement, une légère vibration nous tira violemment de ce doux moment. Je m'écartai de lui, subitement très mal à l'aise, amenant une vague de froid.

– Je. En fait, je. Pardon. Non. Enfin ce n'est pas ce que je voulais dire. Je. Tu...

Je bredouillai comme une débutante, stressée et embarrassée. Cet instant était une parenthèse que je devais fermer. Je devais la verrouiller à tout jamais et l'oublier. Je me sentais si mal, si honteuse. Rongée par ma culpabilité, je n'osais lever le regard. Je ne voulais pas le blesser ni lui laisser apercevoir cette tempête de sentiments qui sommeillaient en moi... Sentant mon malaise, il s'avança délicatement et brisa ce douloureux silence.

– Pardonne-moi si j'ai été trop loin, mais sache que je ne regrette rien Lou.

Sa voix si chaude me brisa intérieurement, ressassant ce baiser prohibé. Si cela n'avait pas eu lieu maintenant, dans ses conditions, j'aurais certainement adoré. Mais je ne pouvais rester près de lui-même si ce que nous venions de faire prouvait le contraire.

– Je ne peux pas... soufflai-je en faisant demi-tour.

Je m'échappai de ce maudit couloir. Me dirigeant vers la cuisine, je portais mes doigts sur mes lèvres. Je n'arrivai pas à assimiler ce qui venait de se passer, tout cela m'avait fait dessaouler instantanément. Je venais de trahir Zac, Chloé, Vincent et tous ceux qui m'avaient soutenue. Je me sentais affreusement mal. J'avais la sensation d'avoir frôlé un interdit. Pourtant je ne pouvais nier que ce moment d'égarement était magique. L'air devint, tout d'un coup lourd, étouffant. Il fallait que je sorte, que je respire de nouveau. Le poids dans ma poitrine m'oppressait de plus en plus. Je me précipitai à l'extérieur espérant souffler. Mais à peine avais-je posé un pied dehors qu'un bras se posa sur mes épaules.

– Ma Lilou ! Je suis trop content de te voir ! Je crois que j'ai un peu bu, mais ce n'est pas grave, car je dors ici ce soir, avec toi ! lâcha mon blond. Et je sais que tu veilleras sur moi.

Si je n'avais pas été aussi gênée par mon échange avec Axel, j'aurai ri de le voir ainsi. Cependant, mon esprit restait embrumé par ce baiser. Je l'observai alors qu'il se marrait seul en regardant le fond de son verre. Je crois qu'il avait atteint un taux d'alcoolémie bien trop élevé. Mais quand je m'apprêtais à lui retirer son gobelet, il s'installa sur une des chaises posées sur la terrasse. Je me sentais tellement démunie, ce Vincent-là était un ancien souvenir que je ne voulais pas revoir.

– Tu sais qu'à cause de toi, je me suis fait tacler pendant des mois ! claqua-t-il.

Je ne comprenais rien, m'agenouillant face à lui, je haussai un sourcil. Malgré l'angoisse qui s'immisçait doucement en moi, je lui tins la main pour lui montrer mon soutien. Je le regardai attentivement et sus que la conversation allait être compliquée. En effet, son regard vitreux démontrait son état d'ébriété. De plus, un petit pli prit place sur son front, signe d'une contrariété profonde.

– Oui, oui, fais pas ton innocente Lilou, dit-il en agitant son doigt devant mon nez. J'avais dit aux mecs que tu serais la prochaine. Quand on est rentré en première, tu étais devenue une vraie fille. Un corps de rêve, un visage d'ange, des yeux bleus océans dans lesquels on aimerait plonger. T'étais un challenge à l'état pur.

Posant son gobelet sur sa cuisse, il semblait à des années-lumière. Plongé dans ses souvenirs, Vincent ne mâchait pas ses mots. Mais pour ma part, je ne comprenais rien. Mais une chose était sûre, je ne voulais pas revenir à cette période.

– Vincent, tu devrais arrêter de boire et ne dis rien que tu pourrais regretter s'il te plaît.

Je récupérai son verre et le posai au sol. Je saisis ses deux mains dans les miennes tentant de capter son regard. Malheureusement, il n'y avait rien à faire, il était loin. Très loin. Il était reparti aux côtés de Zac, certainement au lycée ou aux entraînements de rugby. Je comprenais ce qu'il ressentait, je connaissais cette déconnexion de la réalité.

– Si, Lilou, je te dois toute la vérité. Je veux que cette nouvelle année commence sans mensonge. Tu étais un défi Lilou, je voulais t'avoir. Zac ne savait pas tout ça, il n'aimait pas cet aspect de moi. Et je vous ai vus ensemble plusieurs fois et il a fini par m'avouer qu'il t'appréciait vraiment. Il est tombé sous ton charme me laissant de côté pour la fille que je voulais mettre dans mon lit. Je n'étais pas amoureux de toi, mais je t'en voulais. Tu l'avais préféré à moi et en plus tu me privais du temps que j'avais avec lui.

Il souffla et secoua sa tête. Il revenait lentement mais sûrement auprès de moi, dans ce jardin. Ses doigts se posèrent sur ma joue, traçant de délicieux cercles. Ses yeux plongèrent dans les miens, espérant entrevoir tout ce que je gardais au fond de moi.

– J'ai essayé de te détester, mais il a suffi que je te connaisse mieux pour comprendre mon meilleur ami. J'aimais te pousser à bout, te voir exploser devant moi, j'aimais te voir râler et bouder, j'aurais aimé être celui qui essuie tes larmes, mais je ne supportais pas te voir te dénigrer. Comme on dit, fuis-moi, je te suis, fuis-moi, je te... Roh, je sais plus, mais tu vois de quoi je parle... J'ai espéré pour rien. Alors quand ce soir là, tu as encore une fois écouté les conneries de cette poufiasse, j'ai vu rouge et —

– Stop !

Je ne voulais pas en entendre plus. Remuer tout notre passé était trop douloureux. Toutes ces fois où il me malmenait dans le seul but d'attirer mon attention m'avaient brisé le cœur. Savoir que j'avais été une sorte de délire entre potes pour finir en trophée me dépassait. Je connaissais ce côté-là de sa personnalité, mais il n'était plus ce garçon. Il avait changé, mais j'avouais que je n'appréciais pas ces révélations...

– Voilà je voulais être honnête ! Fallait que ça sorte petit ange. Je suis désolé ! Maintenant je crois que je mérite un bisou après tout ça... dit-il d'une moue rieuse.

D'un seul coup, son regard retrouva ce minuscule éclat que j'aimais tant percevoir dans ses pupilles. Il posa son index sur sa pommette attendant sagement sa récompense. Alors après toute sa longue tirade, je décidais de lui accorder ce qu'il demandait. À peine avais-je embrassé sa joue, qu'il se leva soudainement en brandissant ces deux bras dans les airs.

– J'ai gagné ! J'ai eu mon bisou !

Je me tapai le front, je crois que je l'avais perdu. Il était vraiment beaucoup trop alcoolisé. J'allais devoir le surveiller de près pour être sûre qu'il ne fasse aucune bêtise. Mais brusquement ses deux mains se posèrent sur mes hanches me soulevant pour me coller contre lui comme un vulgaire doudou. Je le laissai faire, il était hors de question que ma force de mouche tente de se débattre face à ce géant. Il me fit basculer sur son épaule tout en ricanant.

– Vincent ! Repose-moi tout de suite ! On va finir par voir ma culotte avec tes conneries ! criai-je à son encontre.

Je l'entendis rire grassement tandis que son corps gigota dans tous les sens. Au bout de quelques instants, mes pieds touchèrent de nouveau la terre ferme. Je réajustai ma robe lorsque je le vis se pencher vers moi.

– Personne n'a le droit de la voir, murmura-t-il au creux de mon oreille.

Je sentis le rouge me monter aux joues. Ce garçon avait vraiment le don de me rendre folle et de jouer avec mes nerfs. Il saisit ma main m'adressant un large sourire. Le contact de sa peau froide sur la mienne me provoqua une vague de frisson le long de la colonne vertébrale. Il nous ramena à l'intérieur en glissant son bras sur mes épaules. À peine étions-nous rentrés que la bouteille de vodka qui me servait d'ami se mit à hurler dans le salon.

– J'ai chopé les mecs ! Elle est t — .

Ou pas !

Je plaquai ma paume sur sa bouche avec une telle violence que je me cognai sur ses dents fraîches, m'arrachant une grimace. Mon Dieu, cet homme voulait ma mort. J'étais véritablement morte de honte. Par chance, beaucoup de nos compagnons étaient alcoolisés et n'avaient donc pas relevé les propos tenus par Vincent. Mais lorsque mon regard se posa sur Axel, je compris que lui les avait bien entendu. Décidément, cette soirée était placée sous le signe de la gêne entre nous. L'observant du coin de l'œil, un cri me tira de mes pensées.

– Ça va être le moment ! hurla une fille de ma classe.

Le décompte allait commencer dans moins d'une minute. Tout le monde se regroupa au centre du salon un verre à la main prêt à trinquer. L'ambiance était de plus en plus électrique, mes camarades étaient tous sur le qui-vive.

– 10, 9, 8, 7, 6, 5, 4, 3, 2, 1 ! Bonne année ! crièrent tous les invités en chœur.

Alors que le bruit des gobelets s'entrechoquant envahissait la pièce, je vis Vincent smacker Baptiste, avant de se tourner vers Lina qui se trouvait en face de lui. Si je semblais choquée, elle au contraire ne paraissait pas désapprouver ce geste. Cette soirée prenait une tournure qui me dépassait.

Soudainement, des lèvres chaudes se posèrent sur les miennes, brièvement. Les yeux écarquillés, je vis mon imbécile de meilleur ami me souhaiter la nouvelle année à sa façon. Évidemment, cela ne semblait surprendre que moi.

– Bonne année petit ange ! Allez, maintenant danse avec moi !

Lutter ne servait à rien, alors j'abdiquai. Je laissai la musique m'envahir et mon partenaire me guider. Après m'avoir faite pivoter sur moi-même, il colla son torse contre mon dos. Nos corps se balançant au rythme des chansons, ma tête bascula en arrière prenant appui sur sa clavicule. Fermant les paupières, je le laissai prendre les rênes.

Je relâchai toute la pression de cette année. Je voulais laisser 2014 derrière moi et accueillir à bras ouverts 2015. Pourtant je ne pouvais pas oublier, je n'en avais pas envie. Je voulais garder en mémoire la manière dont Zac m'avait souhaité une belle année, notre rendez-vous pour la Saint Valentin, les sorties avec nos amis, nos projets, sa folie, son rire, son amour. J'étais profondément amoureuse de sa façon de m'aimer, de me toucher, de me regarder. Alors oui ce soir, je tournais une page sur mes douloureux souvenirs pour ne garder que l'homme que j'aimais. Il n'y avait que passion, bonheur et partage de notre relation. Il était temps que je réapprenne à vivre pour moi, parce que quoiqu'il se passe il était une partie de mon être.

Des doigts s'enroulant autour de mon poignet firent éclater cette bulle, me ramenant à la réalité. Lina m'attira vers elle pour me faire danser. Suivant les pas de mes camarades, j'ondulai mes hanches en balançant les bras en l'air. La danseuse, qui sommeillait en moi, nous trouvait ridicules, mais cela avait le mérite de nous libérer. Les rires de joie emplissaient le salon encourageant les invités à se mouvoir. Nous perdions la notion du temps, animés par notre envie de savourer cette soirée. Au fil des chansons, la salle se vidait peu à peu, ne laissant la place qu'à un petit cercle. Je perçus dans le regard de mes meilleures amies une lueur disparue des mois plus tôt. Un sourire s'étira sur mon visage approuvant ce qu'elles ressentaient.

Mais la nuit avançant, Baptiste nous annonça qu'Andréa et lui quittaient la soirée. Et lorsque d'un œil, je balayai la pièce, je vis que beaucoup de mes camarades avaient déjà déserté le lieu. Toutefois, ce qui me perturbait, je remarquai que quelqu'un manquait à l'appel. Depuis notre baiser, je n'avais pas réussi à aller le voir pourtant son absence m'intriguait. Intérieurement je priai pour qu'il n'ait pas décidé de prendre le volant. Décidant de raccompagner le couple à l'extérieur, j'en profitai pour vérifier mes doutes. Arrivée à hauteur de la portière conducteur, je le vis, sa petite touffe brune calée contre le siège. Tapotant doucement au carreau, ses yeux qui avaient le don de me faire chavirer se posèrent sur moi. Hésitation et déception semblaient s'être invitées auprès de nous, nous laissant flotter dans un silence inconfortable. Mordillant ma lèvre, je me sentais profondément gênée. Alors que je m'apprêtai à faire demi-tour, il ouvrit la porte, fit quelques pas et m'arrêta.

– Lou ? Qu'est-ce qu'il se passe ?

Ce qu'il se passe c'est que je t'ai embrassé, que j'ai aimé ça, que j'aimerais recommencer, mais je ne peux pas... Je suis simplement en train de me noyer...

– Je m'inquiétais, j'ai eu peur que tu prennes la route... soufflai-je consciente de lui mentir ouvertement.

– Je ne prendrais pas le volant rassure toi, mais je pensais que tu étais déjà occupée...

Je compris immédiatement qu'il avait dû entendre les propos de Vincent et qu'involontairement je l'avais blessé. Les yeux dans le vague, il marqua une pause. Il secoua la tête avant de se reprendre.

– Excuse-moi, c'est nul... Bonne année Lou, murmura-t-il en déposant un bisou sur ma joue.

Il s'apprêta à repartir seulement je ne pouvais m'y résoudre. J'attrapai en vol son poignet et le ramenai vers moi. Sans donner de plus amples explications, il comprit que j'avais envie qu'il reste à mes côtés. Sa paume se glissa alors au creux de mes reins, me ramenant ainsi à l'intérieur. Je ne sus combien de temps s'était passé durant mon excursion, mais les lieux s'étaient littéralement vidés. Il ne restait plus que mes deux meilleures amies, leurs compagnons de fête — car finalement Chloé avait passé la soirée avec Florent —, Vincent, Lina, Axel et moi. Un cercle restreint, mais plus facilement gérable pour ceux restés encore sobres. Leïla, Chloé et leurs partenaires, avachis dans le canapé, refaisaient le monde. Lina et Vincent continuaient de danser, enfin s'agiter était le mot exact. Je décidai donc de jeter les derniers gobelets qui restaient. Pour une fois, nous aurions peu de ménage le lendemain. Observant l'horloge, je compris que j'avais la lourde de tâche de coucher mon blond et ma cousine. Leïla avait installé plusieurs matelas collés les uns aux autres dans le grand bureau. Avec Axel, nous avions convaincu nos amis d'aller dormir. Par chance, je n'avais pas eu à batailler longtemps. Vincent avait juste souhaité que je dorme à sa droite et Lina à sa gauche. C'était entouré des gens que j'aimais que cette nouvelle année débutait...


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Coucou mes petits lecteurs,

Je vous souhaite un très bon réveillon et une très belle année 2021. Je sais que 2020 a été une année difficile mais j'ose espérer que celle qui débute sera remplie d'espoirs.

Sinon pour en revenir à ce chapitre. Qu'en avez-vous pensé ? Un chapitre plein de rebondissements et de révélations, vous a-t-il plu ?
J'ai hâte d'avoir vos avis!

Bisous, bisous 🖤,
L.

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