Chapitre 4
J'entrai doucement dans ma chambre, posant mes affaires sur mon lit. Je revenais de chez Leïla et il n'y avait personne chez moi. Luce et Laurianne étaient sûrement parties faire des courses. Mais malgré le froid de l'après-midi, je décidai de sortir, j'avais besoin de me vider l'esprit. J'enfilai alors mon pantalon de sport, mon débardeur, un pull et une paire de baskets. Je franchis la porte de la maison en mettant mon casque sur mes oreilles, et me mis à courir.
Je n'étais pas une grande sportive, mais j'avais fait de la danse pendant des années et j'aimais courir de temps à autre. C'était devenu de plus en plus fréquent ces derniers mois pour calmer ma colère.
Je mis toute mon énergie dans chaque foulée, chaque pas. Chaque mètre parcouru faisait disparaître peu à peu cette fureur. Même si celle-ci s'évaporait quelque peu, je ne pouvais m'empêcher de repenser à la soirée de la veille. J'avais su dès le début qu'aller à cette fête était une erreur, boire arrivait en deuxième sur la liste des mauvaises idées, en troisième se trouvait certainement Baptiste, et en première c'était évidemment Vincent. Je le haïssais au plus profond de moi, pourtant il avait raison tout était de ma faute, je ne pouvais le nier et c'est ce qui me tuait à petit feu.
Hier, comme toutes les autres fois, je n'aurais pas dû boire, je n'étais pas quelqu'un qui avait l'alcool mauvais ou triste. Il exacerbait juste mes humeurs du moment, et le faire hier avec toute cette colère aurait pu vraiment plus mal se terminer.
Quant à Thibault, je n'aurais pas dû danser avec lui, il y a plus d'un an, nous nous étions beaucoup tournés autour et je savais qu'il craquait sur moi. Hier soir montrait là encore à quel point j'étais stupide. J'avais été idiote de rester auprès de lui en sachant qu'il y aurait sûrement Baptiste pas loin. Ce garçon, une de mes plus grandes erreurs et il fallait que je répare ça tôt ou tard.
Cela faisait désormais plus d'une heure que je courais, il était temps de rentrer. Je m'étais calmée, ce qui était nécessaire pour passer un bon week-end avec mes sœurs.
En arrivant à la maison, j'aperçus Laurianne le nez plongé dans son livre et Luce scotchée devant la télévision sur une émission de cuisine. Malgré des études pour être enseignante, mon aînée avait toujours rêvé au fond d'elle d'être grande cheffe en cuisine. Malheureusement mes parents étaient persuadés qu'il fallait qu'elle fasse de grandes études même si ce n'est pas ce qu'elle souhaitait.
– Lilou, hurla la benjamine sortant le nez de son livre, tu nous as manqué hier !
– À moi aussi Lau, j'aurai mieux fait de rester avec vous, j'ai passé une mauvaise soirée.
Je vis ma grande sœur s'approcher et me prendre dans ses bras pour me dire bonjour.
– J'ai dit à Maman que tu étais partie réviser chez Chloé, je crois qu'elle n'a pas besoin de savoir que tu étais à une fête alcoolisée sans surveillance, n'est-ce pas ?
J'acquiesçai, en effet je n'avais pas besoin d'un sermon de plus venant de mes parents sur les effets néfastes de l'alcool chez les jeunes de notre époque...
Le samedi soir, Luce prépara un plateau télé pour que nous puissions toutes les trois regarder un film ensemble. Elles étaient ma bulle, mon cocon, avec elles, mes soucis ne disparaissaient pas, mais s'apaisaient. Après cette soirée remplie de tendresse, de rire, et d'affection, que je me mis au lit le cœur plus léger que la veille. Le dimanche, je me levai tranquillement et pris mon petit déjeuner avec Luce qui me racontait comment c'était déroulé leur soirée de vendredi. Nous attendions Laurianne pour aller nous balader avant le déjeuner.
Voyant qu'elle n'allait pas se lever de suite, je me préparai un bon chocolat chaud et me posai sur notre terrasse, j'aimais prendre l'air le matin. Je fixai ma tasse lorsque je sentis ma sœur poser le plaid sur mes épaules.
– Tiens couvre toi, je ne veux pas que tu tombes malade !
Je la remerciai pour son geste avant de retomber dans mes pensées.
Flashback — Déc. 2013
– Tiens couvre toi, je ne veux pas que tu tombes malade !
– Je te rappelle que je ne suis pas en sucre et puis je ne reste pas longtemps je voulais juste voir la neige tomber.
– Et moi, je voulais juste trouver un prétexte pour être à tes côtés et te voir sourire.
– Je suis sûre que dans tes bras j'aurai encore moins froid, avouai-je timidement.
Cela faisait un peu plus d'un mois que nous étions ensemble et même si j'avais côtoyé quelques garçons avant lui, je voulais faire les choses bien. D'ailleurs pour cette raison, je ne savais jamais vraiment comment me comporter auprès de lui.
Puis je le vis avancer près de moi, ne me quittant pas des yeux. Ses mains chaudes se posèrent sur mes joues, ce qui me fit frissonner. Comme à chaque fois qu'il me touchait, je sentis ma respiration s'accélérer et se saccader. Mon cœur battait à tout rompre, et je compris que le sien aussi lorsque je posai mes mains sur son torse.
Sans un mot de plus, je me mis sur la pointe des pieds pour l'embrasser délicatement, et comme à chaque fois, il répondait à ce baiser avec passion.
Je le désirai plus que quiconque, j'avais besoin de ce contact avec lui, mais je finis par le rompre afin de profiter une dernière fois de la neige qui tombait avant de devoir rentrer...
Fin du flashback
J'observai silencieusement ce jardin que j'adorais tant étant petite. Avec Chloé et Leïla, nous avions fait les quatre cents coups ici, ce qui nous avait valu de nombreuses réprimandes de la part de mes parents lorsqu'ils voyaient l'état dans lequel nous le laissions. À dix ans, nous l'avions pris pour une grande salle de concert prenant tout ce qui se trouvait dans la maison pour installer la scène. Notre public composé uniquement de mes sœurs et de peluches était incroyable, mais nous n'avions pas prévu l'averse qui nous tomba dessus sans prévenir. À douze ans, on avait tenté avec des bâches de faire une piscine géante à l'extérieur. Seul souci, nous n'avions pas envisagé qu'il pouvait y avoir des trous dans les bâches et donc nous avions inondé la terrasse et transformé le jardin en marécage. À quatorze ans, nous avions fait brûler le petit arbuste qui se trouvait au fond en essayant d'apprendre à fumer. Et à seize ans, j'avais organisé une fête gigantesque chez moi, sans bien évidemment prendre la peine de ranger avant le retour de mes parents. Résultats : bouteille de bières vides partout, capotes usagées dans le barbecue, sans parler des nombreux mégots de cigarettes enfoncés dans la pelouse.
Ma sœur se racla la gorge me sortant de mes pensées. Elle s'installa près de moi et regardai dans la même direction que moi.
– Tu te souviens quand les parents t'ont vu embrasser... comment s'appelait-il déjà ? demanda-t-elle en souriant.
– Matthieu...
– Ah oui Matthieu ! Tu te souviens de la tête que vous faisiez, j'avais même dû dire aux parents que c'était de ma faute, à cause d'un pari stupide. Parce que vos visages valaient tout l'or du monde !
Luce rigolait à gorge déployée. En effet, je me souvenais très bien, j'avais treize ans. J'étais fière d'avoir un amoureux, tellement fière que j'avais oublié que mes parents rentraient ce jour-là, à cause de cela j'avais reçu une belle punition. Mais à l'évocation de ce souvenir, je ne pus m'empêcher de sourire.
– Les filles vous êtes où ? hurla Laurianne.
– Je crois qu'on ferait mieux de rentrer sinon elle va réveiller le quartier.
J'acquiesçai et souris en imaginant tout à fait la scène. Le reste de la journée se déroula sans encombre, chacune de nous avait décidé de faire ses devoirs afin de pouvoir passer la soirée ensemble devant une comédie romantique. Je tentai de faire croire à Luce que je commençai à tomber malade afin d'espérer ne pas aller au lycée le lendemain, ce qui bien évidemment ne fonctionna pas. Avant d'aller au lit, je décidai de jeter un œil sur Facebook. Je m'aperçus que les photos de la fête de Leïla avaient déjà fait le tour, lorsque l'une d'elles attira mon attention. Celle de moi et Vincent en train de nous disputer. La colère remonta aussitôt, et il allait payer pour ce qu'il m'avait dit ce soir-là. Je saisis mon téléphone envoyant quelques messages. Le premier, à Leïla pour lui souhaiter une « bonne nuit ». J'espérais qu'elle ne m'en veuille pas pour mon comportement de vendredi. Un message à Baptiste « il faut qu'on parle » et le dernier à Zac « plus que tout ». Il me manquait...
Ce fut avec mon casque sur les oreilles que je m'endormis, puis me réveillai vers deux heures du matin avant de finalement trouver le sommeil vers cinq heures.
Je vous laisse imaginer à quoi je pouvais ressembler lorsque mon réveil se mit à sonner vers sept heures. Je grognai puis me souvenant rapidement de la menace de ma sœur, j'éteignis ce son insoutenable et me levai. Depuis quelques mois, l'anticerne était devenu mon meilleur ami, tout comme le fond de teint. Je m'habillai en vitesse enfilant une robe pull, un collant et des boots.
Après un rapide câlin avec Laurianne, une bise à Luce, je me mis en route, envoyant mes éternels messages matinaux. Le trajet me glaça, ce qui me fit accélérer pourtant j'arrivai juste à temps au lycée.
Plus que cent cinquante jours de torture. En entrant dans la classe où tout le monde était déjà installé, quelqu'un était à ma place. Vincent. Il allait me le payer très cher. Lorsque je le vis tourner la tête, je ne pus m'empêcher de lui sortir mon plus beau sourire forcé et mon majeur.
– Mademoiselle Morel, de l'aide peut-être ? demanda mon prof de philo surpris par mon geste.
– Non merci. J'expérimente seulement la citation d'Eschyle, Monsieur. Qui nous dit que « la parole apaise la colère ». Finalement, il aurait pu aussi ajouter que certains gestes la soulagent.
Sur ce, je pris place à une table au fond de la classe, espérant bien pouvoir retrouver ma chaise le plus tôt possible. Je savais que j'avais été trop loin avec ce prof, mais j'étais en colère et surtout je n'avais clairement pas envie de me muer dans mon silence quotidien.
Ces deux heures de cours me semblaient interminables et je fus la première à sortir pour prendre l'air, j'avais besoin d'une pause avant d'enchaîner sur les deux heures de maths qui suivaient. Je sortis alors à l'arrière du lycée, on ne pouvait y accéder qu'en passant par une sortie de secours, ce qui bien sûr n'était clairement pas autorisé. Mais je savais que peu d'étudiants connaissaient l'endroit et encore moins osaient s'y aventurer. Alors que j'ouvris tranquillement la porte, je fus surprise de voir quelqu'un de dos.
– Je vois que je ne suis pas le seul à venir ici, lâcha le jeune homme de dos, une cigarette à la main.
– Bien sûr que non, tu t'es pris pour qui, le roi de ce lycée ?
– Lilou ? demanda le garçon que je reconnus immédiatement lorsqu'il se retourna.
Non c'est ta mère crétin !
– Axel, mais je ne savais pas que tu fumais et encore moins que tu connaissais cet endroit.
– Comme tu l'as si bien dit, tu n'es pas la reine du lycée, ajouta-t-il l'air amusé.
Connard !
Je fis demi-tour avant de m'énerver, je n'avais pas aimé sa remarque à la soirée et encore moins la façon dont il s'était comporté en cet instant, comme si nous étions amis. Je gérais déjà mal mes amitiés ce n'était pas pour essayer de m'en faire de nouvelles. En plus je ne l'aimais pas, je n'aimais pas le fait qu'il était collé à Chloé, je n'aimais pas qu'il soit arrivé dans ce lycée l'air de rien, je n'aimais pas son air « pseudo sympa » juste parce qu'il se tapait ma meilleure amie. Me dépêchant de rentrer en classe, je fus rapidement arrêtée par quelqu'un qui m'attrapa en passant et me projeta contre le mur.
– Tu vas regretter de m'avoir giflé !
Vincent se tenait à quelques centimètres de moi, sa main sur mon cou, ses yeux noirs charbons qui me fixaient et qui contrastaient tellement avec sa peau si pâle. Je savais que ça allait très mal se passer entre nous, car je ne comptais pas me laisser faire.
– Tout ça, c'est de ta faute, tu n'es qu'une sale traînée, qui passe son temps à boire pour oublier à quel point elle est trop conne. Je vais faire de ta vie un enfer Lilou-Ann, tu m'entends ?
Ma vie est déjà un enfer Vincent, que comptes-tu faire de plus ? Dis-moi ? Parce que je suis déjà en enfer...
– Et toi t'es qu'un connard arrogant égoïste !
Je sentis sa poigne se resserrer autour de mon cou, si bien que je commençai à avoir du mal à respirer.
Serre plus fort, ne lâche pas Vincent, je t'en supplie.
– T'es qu'un sale con qui ne pense qu'à lui, qui ne voit pas à quel point les gens le haïssent ! Tu es seul Vincent !
Cette dernière phrase lui fit l'effet d'une bombe, il plaça sa deuxième main sur ma gorge, si bien que je ne respirai plus. Je sentis ma vue se brouiller et mon cœur ralentir, pour repartir violemment d'un coup. En levant les yeux, Axel avait attrapé Vincent par les épaules pour le faire reculer tandis que moi je me retrouvai au sol, reprenant doucement ma respiration. Axel s'approcha de moi me tendant la main que je refusai immédiatement. Je me levai déjà et m'approchai de Vincent.
– Ça, c'est pour m'avoir insulté de traînée, dis-je en le giflant fortement. Et ça c'est pour ne pas avoir été fichu de serrer plus fort ! criai-je en lui mettant un coup de genou dans ses parties intimes.
Il fut blessé sur l'instant, mais ne tarda pas à m'attraper en me jetant de nouveau violemment contre le mur.
– Monsieur Leroy et mademoiselle Morel dans le bureau de la proviseure immédiatement, hurla un des surveillants en tentant de le séparer de moi.
Il nous conduisit alors dans le bureau de la directrice, qui fut rapidement informée des événements. Après nous avoir hurlé dessus, elle nous annonça que nous serions renvoyés du lycée jusqu'à la fin de la semaine. Je n'avais même pas essayé de protester et d'ailleurs Vincent non plus, même si je sentai qu'il en mourrait d'envie.
Nous sortions du lycée, nos parents respectifs ayant été prévenus, ce fut son père et Luce qui nous attendaient à la sortir. Sans un mot, Vincent reçut une gifle de la part de son père tandis que Luce me prit dans ses bras. Je croyais qu'elle savait que même si je méritais ma punition, je n'avais jamais été quelqu'un de violent.
– Lilou-Ann ? Puis-je vous parler s'il vous plaît ? demanda soudainement le père de Vincent me tirant des bras de Luce.
– Bien sûr.
– Je tiens à m'excuser pour le comportement de mon fils. Je lui ai toujours dit de respecter les femmes et je crois avoir la preuve aujourd'hui qu'il ne le fait pas. Je sais que ça n'excuse en rien son comportement, mais sachez qu'il vit lui aussi des moments difficiles.
Et moi ? Je connais suffisamment Vincent pour savoir ce qu'il ressent, mais qui s'intéresse à moi ?
– Je comprends. Par contre, ne m'en veuillez pas, mais je suis épuisée par cette matinée. Au revoir monsieur Leroy.
Après un rapide trajet silencieux en voiture, nous arrivions à la maison et Luce me prépara à manger avant d'aller me reposer. Je fis mon possible pour ne pas ressasser ce que Vincent m'avait dit. Même si au fond de moi, je savais pertinemment qu'il n'avait pas tort...
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Coucou mes petits lecteurs,
Après avoir reçue des critiques sur mes livres (concernant mon style, mon écriture, mon histoire ou même mes personnages), je ne vous cache pas que c'est le cœur un peu tristoune que je vous poste ce chapitre. J'espère vous faire toujours voyager, vibrer et tout simplement plaisir avec ce nouveau chapitre...
Je remercie encore ma petite CCLHC, qui me soutient, me réconforte et me motive quand je baisse les bras. Mais aussi les 3 folles qui se reconnaîtront pour me donner le sourire avec leurs délires sans fin ^^.
Et enfin un grand merci à tous ceux qui me lisent et me soutiennent au quotidien !
Bisous bisous 🖤,
L.
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