Chapitre 33

Contrairement à la veille, le sommeil m'avait enveloppée, m'emportant dans un pays imaginaire réconfortant. Cette nuit-là, j'avais rêvé de l'homme qui avait fait entrer la passion dans ma vie. Je me souvenais être blottie contre Zac, savourant le contact de sa peau contre la mienne. Nous étions chez lui dans son lit parlant de la soirée d'anniversaire de Baptiste. Ce dernier avait tellement bu qu'il avait fini par se déguiser en fille. Nous nous étions mis à rire. Ce doux son m'avait transportée dans une bulle de bonheur. Pour une fois, il n'y avait rien de nostalgique, rien de triste, juste de l'amour en intraveineuse.

Je me réveillai tranquillement en entendant la musique de Lau. Je l'imaginais déjà en train de danser dans sa chambre... Comme je le faisais auparavant.

Je me levai et me glissai sans bruit dans le couloir pour pouvoir l'espionner. La porte entrebâillée me permettait de jeter un œil. Encore en pyjama, elle exécutait une chorégraphie simple, mais parfaitement appliquée sur une de ses mélodies préférées. Concentrée, elle refaisait un pas qui était sûrement maîtrisé. Un vrai besoin de perfection. Je me revoyais à son âge, passant des heures à m'entraîner, un acte libérateur du stress engrangé durant la semaine. Sans m'en rendre compte, mes pieds battaient le rythme. Alors pour éviter de replonger dans mes vieux démons, je m'éclipsai pour me préparer. Aujourd'hui mes parents avaient décidé que nous préparions le sapin de Noël que mon père avait acheté la veille. L'an passé, nous l'avions fait le vingt-quatre au matin. Nous faisions des progrès...

J'enfilai une robe pull afin d'être à l'aise. Je fis attention à ma présentation pour faire plaisir à ma mère. Après tout, elle avait donné son accord pour mon tatouage. Je ne pouvais nier qu'elle avait fait énormément d'efforts et de pas vers moi. À mon tour de lui prouver que je voulais essayer d'avancer.

En descendant dans la cuisine, seule, elle était là, derrière les fourneaux. Parée de son éternel tablier par-dessus ses blouses, elle avait laissé détachés ses longs cheveux. La ressemblance avec mon aînée était frappante. L'odeur sucrée m'envahit soudainement, apportant avec elle, son lot de petits souvenirs... Elle nous préparait des gaufres quand, plus jeunes, nous étions malades. L'image de ma mère douce, présente et attentionnée me revenait de plein fouet. Le soir, elle passait de chambre en chambre pour nous accorder un moment en tête à tête. Une parenthèse entre nous, un instant de tendresse, un lien maternel indéfectible. Je ne pus m'empêcher d'esquisser un sourire avant de la rejoindre.

– Bonjour Maman ! dis-je en m'approchant d'elle.

Elle se retourna avant de me prendre dans ses bras et de me serrer contre elle.

– Bonjour ma puce ! Tu as bien dormi ?

J'aquiesçai et me détachai d'elle afin de voler une petite douceur discrètement.

– Lilou, range tes mains et attends les autres ! me gronda ma génitrice en tapotant mon poignet.

Afin de me rattraper, j'installai la table pour que nous puissions petit-déjeuner tous ensemble. Ils finirent par arriver au compte goutte, tous armés de leur bonne humeur. Ce fut ce bonheur qui rythma notre journée. Lorsque nous avions décoré notre sapin, nous avions retrouvé nos âmes d'enfants. Lau avait mis des boules de Noël à ses oreilles et une guirlande en guise de boa. Elle s'était mise à défiler sous les applaudissements de mon père. Un moment magique. Accompagnée de Luce, j'ai été prise dans un fou rire à en pleurer. Ébahie par la scène, ma mère en avait profité pour nous mitrailler. Ces instants de joie pure faisaient plaisir à voir.

Malgré tout, une pointe d'angoisse pointa lorsqu'elle évoqua le repas du réveillon. Cet événement me renvoyait dans un passé compliqué à gérer. Quand les souvenirs liés à Zac refaisaient surface en public, je peinais à contrôler mes émotions. Toutefois, je gardais le sourire pour ne pas entacher cette belle journée.

– Lilou, tu voudrais bien partager ta chambre avec Lina ? demanda ma mère soudainement.

Lina était la fille de la sœur de ma mère. Nous avions seulement quelques mois d'écart. Sa famille habitait à une centaine de kilomètres d'ici. Avant Zac, nous partagions beaucoup de temps ensemble, mais nous avions chacune fini par trouver quelqu'un et nous éloigner... Malgré tout, je savais que quoi qu'il arrive nos retrouvailles seraient naturelles.

– Oui oui, pas de soucis !

– Bon donc tout est parfait, dit ma mère en débarrassant la table.

Non tout n'était pas parfait... Mais faisons comme si...

Dans l'après-midi, j'avais mis un peu d'ordre dans ma chambre afin d'accueillir ma cousine comme il se devait. Évidemment me plonger dans mon bazar m'avait permis de souffler un peu, jusqu'à ce que je trouve un petit porte-clés tombé derrière ma commode. Je me souvenais parfaitement du jour où Zac l'avait gagné dans une machine à une fête foraine. Ne m'attardant pas sur ce souvenir, je l'avais rangé dans la boîte que Luce m'avait préparée quelques semaines auparavant. Cacher pour avancer.

J'étais également retombée sur des petites lettres que mes sœurs m'avaient écrites après le départ de mon amoureux. Certaines ne comportaient que trois mots. Sept caractères assemblés pour me rappeler que je n'étais pas seule. D'autres se comptaient en pages. Luce avait sorti sa plus belle plume pour me parler à cœur ouvert du mal être qui la rongeait de me voir m'autodétruire. Malheureusement à cette époque-là, j'étais enfermée dans ma détresse telle une prison, cachée derrière les barreaux de la colère.

Désormais ma rage s'était envolée pour laisser place à une culpabilité immense, mais un amour débordant. Moteur de mon envie d'avancer, je rangeais tous ces souvenirs.

Cet après-midi-là, j'en avais profité pour donner un coup de main à mes deux sœurs. Autant Luce était organisée et consciencieuse, autant Lau était l'impulsivité, la désinvolture et la déconcentration incarnée. Nous avions tenté de l'aider à remettre de l'ordre dans sa chambre, malheureusement à chaque fois qu'elle trouvait un ancien objet, elle en profitait pour faire une ânerie. En trouvant un haut qui ne lui appartenait pas, elle nous avait fait une belle imitation de notre mère lorsqu'elle avait aperçu que nous avions cassé son vase. Une chose était sûre c'est que si les études ne marchaient pas, elle avait tout pour se reconvertir dans une carrière d'humoriste.

Allongées dans son lit toutes les trois, nous avions fini par nous calmer en nous remémorant des souvenirs d'enfants.

Ces moments-là n'avaient pas de prix et me rappelaient ce que j'aurais pu rater si mon acte avait abouti.

Après avoir dîné, nous nous étions regroupés dans le salon. Assis dans le canapé, nous regardions un film que mes parents adoraient : E.T.... Le choc des générations. Mes sœurs feignaient de s'intéresser à l'histoire, mais leur visage les trahissait. Lau levait les yeux au ciel toutes les quinze minutes, quant à Luce, elle jetait un œil toutes les cinq secondes à son téléphone, espérant y trouver une échappatoire. Pour ma part, fatiguée de cette journée, j'étais concentrée sur le film pour ne pas m'endormir. Mais une légère vibration me tira de la contemplation.

* Salut la fille la plus drôle et souriante au monde, que fais-tu demain ? J'aimerais qu'on se parle un peu. Ne dis pas non, sinon je me pointe chez toi ! *

Un message à son image : fou et effrayant. Je ne pouvais nier que j'avais envie de le voir pourtant le fait qu'il veuille me parler me faisait peur. Je n'avais malheureusement pas oublié que nous devions nous rendre chez Juliette. Je n'étais pas prête. Retourner dans son univers, c'était comme revenir des mois en arrière. Je marchai sur une corde raide et au moindre écart, je retombai dans les méandres sombres de ma dépression. Je n'avais pas tant souffert pour perdre tout en quelques minutes. Je connaissais suffisamment Vincent pour savoir que s'il insistait pour avoir une conversation, ça n'était pas bon signe. J'optai finalement pour la politique de l'autruche. Ne pas répondre et faire comme si je n'avais pas lu son texto. Reposant l'engin sur le cuir du canapé, je tentai alors de me reconcentrer sur le film, mais c'était sans compter sur l'entêtement de Vincent qui me renvoyait dans la foulée un second message.

* Tic tac ! Je vais prévenir Luce, si tu n'acceptes pas ! C'est une alliée incroyable *

Mais qui m'avait fichu un ami pareil ? Il serait capable de débarquer ici, comme une fleur si je ne répondais pas positivement à sa demande. Je l'imaginais déjà tapant à la porte de chez mes parents, trouvant certainement une excuse bidon pour venir nous déranger et obliger mes géniteurs à accepter une sortie à laquelle je ne voulais pas prendre part. Je soufflai bruyamment, rangeai donc mes inquiétudes dans un coin de mon cerveau et répondis le cœur lourd.

* T'es insupportable ! C'est oui ! *

Oui, mais sous certaines conditions. Je ne voulais pas aller chez Zac, j'étais catégorique et il devait s'en douter.

* Lilou détends-toi, je te propose juste une sortie, je te promets que c'est juste un bon moment entre potes, rien de plus... *

Je cédais encore une fois à sa demande. À vrai dire, depuis notre violente bagarre, Vincent s'était montré très présent et digne de confiance. Il avait été bienveillant, ultra protecteur et patient à mon égard. Je savais que je pouvais lui confier sans crainte ma vie.

Je prévenais mes parents de mon absence, ce qui réjouissait ma mère. Je savais qu'elle voulait me voir sortir davantage et reprendre « le cours normal de ma vie », selon ses propres mots... Mon père, bien qu'heureux de me voir me relever, restait sur la réserve sur mon lien avec Vincent. Je savais au fond qu'il n'avait pas oublié notre accrochage de septembre alors je tentai de le rassurer comme je le pouvais.

L'heure avançant, je décidai d'aller me coucher et de passer à mon rituel nocturne.

Dimanche 22 décembre

Mon Zac,

Noël approche... Comment ne pas me souvenir de l'an passé ? Comment oublier le cadeau que tu avais déposé devant ma porte le vingt-cinq ? Je me souviens encore du cri de Lau quand elle avait trouvé la boîte sur le tapis de chez nous. Comme à ta grande habitude, tu avais tapé dans le mille en m'offrant des places pour un spectacle de danse suivi d'un repas en amoureux. Tu savais toujours trouver ce qui pouvait me plaire ou me toucher. Tu avais ce puissant don de lire en moi. C'est ce lien qui me manque. Avec toi, je n'avais jamais besoin de parler ni d'expliquer ce que je ressentais. J'étais un livre ouvert pour toi...

Demain je dois passer l'après-midi avec Vincent. Tu le connais, je n'ai pas pu lui dire non. C'est un véritable enfant. À chaque demande, je cède. Je sais que je dois lui faire confiance et c'est le cas, mais j'ai peur. Je sens que nous sommes tous les deux en train d'avancer, de passer un cap dans notre guérison. Je sais qu'il fait tout ce qu'il peut pour m'aider. Mais l'angoisse me tord les tripes.

Mon Zac, je n'ai de cesse de penser à toi. Pourtant je sens dans les tréfonds de mon âme que je commence à laisser place à d'autres. Je me rends compte que je ne suis pas la seule à être abîmée, brisée même si la douleur qui me sert de prison me donne cette sensation.

Plus que tout.

– Vincent ! Vincent ! hurlai-je perdue dans le bois. Réponds-moi ! Ça ne me fait pas rire du tout !

Fatiguée de crier à tout va, je me précipitai près de la cabane. M'arrêtant soudainement, je dirigeai mon regard vers le sol. À mes pieds se tenait la petite boîte noire que Zac avait confiée à son meilleur ami. Intriguée, je me baissai pour l'attraper. Blotti au creux de ma main, le velours brûlait mon épiderme. Je ne pouvais pas l'ouvrir, c'était trop dur. Une légère brise fraîche caressa ma nuque provoquant une vague de frissons le long de ma colonne vertébrale.

– Lou, regarde à l'intérieur, me dit Baptiste qui se tenait devant moi.

Emmitouflé dans son anorak, il me sondait inquiet. Je ne comprenais rien. J'étais simplement venue avec Vincent. Baptiste nous avait donc rejoints. Si c'était une idée du grand blond, je ne l'approuvais pas du tout.

– Je ne peux pas. C'est Zac qui aurait dû me la donner. Si je ne l'avais pas appelé ce soir-là, il n'aurait pas eu ce putain d'accident. Il n'aurait pas été à l'hôpital. Et tout ça ne serait pas arrivé.

Alors que la première larme se fraya un chemin sur mes joues rosies par le froid, je pris mon visage dans mes paumes. Je ne voulais plus qu'on me voie pleurer. J'avais déjà craqué bien trop souvent devant mes proches. Perdue dans mes pensées, je ressassais tous mes douloureux souvenirs. Soudainement, je sentis la présence de quelqu'un. Surprise, mes yeux rencontrèrent de belles billes vertes.

– Lou, ce n'est pas ta faute. C'était son destin. Tu as fait honneur à sa mémoire en acceptant les directives qu'il avait données à sa mère, quelques heures avant de mourir. Continue à te battre s'il te plaît, murmura Axel près de moi.

Je me sentais terriblement confuse. Que faisait-il ici ? Vincent, Baptiste et Axel m'entouraient sans vaciller. Les regards posés sur moi me gênaient profondément.

– Laisse-nous t'aider, lâchèrent-ils en chœur, posant une main sur mon épaule...

Je me réveillai en sueur dans mon lit. Je délirai totalement. Cette forêt renfermait mon passé, mes joies, mes peines, mes doutes et ma douleur. Ces trois hommes jouaient un rôle incontestable dans ma vie. Chacun à leur façon m'apportait un semblant de normalité, une échappatoire à ma dépression. Je crois qu'inconsciemment, revoir Vincent me rappelait ce petit écrin caché dans ma table de chevet. Ce jour-là, je l'avais déposé à l'abri des regards, espérant avoir le courage de l'ouvrir à un moment ou à un autre. Pourtant plus le temps passait, plus cela me semblait invraisemblable.

J'ouvris délicatement le tiroir pour saisir l'objet de mes tourments. Posé dans la paume de ma main, je le contemplais. Telle une boîte de pandore, je craignais que l'ouvrir me fasse retomber lamentablement dans mes souffrances les plus sombres. Connaissant Zac, je savais qu'il était prêt à toutes les folies nous concernant. Mais pour une fois, je n'avais aucune idée de ce qu'il avait prévu. Malgré toute ma bonne volonté, j'en étais incapable. Je reposais avec délicatesse la boîte dans son temple. La mélancolie s'insinuait lentement en moi. Je me sentais faible. Lorsqu'il s'agissait de lui, je perdais tous mes moyens.

Tentant de me rendormir, je me tournai dans tous les sens. Trois heures de silence absolu dans la maison, trois heures de changement de position, trois heures de pensées qui divaguaient. Une pure torture.

Pour le premier vrai jour de vacances, le repos n'était apparemment pas sur la liste. Je décidai donc de rester dans ma chambre et de lire. Lire pour m'évader, m'impliquer dans un monde loin du mien, m'identifier à une héroïne courageuse prête à tout pour sauver sa famille, vivre par procuration une histoire d'amour dont je m'étais malheureusement privée. Tout était bon pour oublier les cauchemars qui me hantaient et les heures à venir.

Chaque chose avait une fin et il était temps pour moi de sortir de ma bulle. Je me levai et partis me préparer pour ma sortie avec Vincent. Objectif numéro un : cacher la teinte bleutée sous mes yeux. Objectif numéro deux : déstresser sinon il s'inquièterait pour rien. Objectif numéro trois : respirer, car à ce rythme-là, je syncoperai avant de l'avoir vu.

– Lilou ! Vincent est là ! cria mon père depuis l'entrée.

Midi, ponctuel ! Je regardai une ultime fois mon reflet dans le miroir. Tenue basique et efficace, maquillage léger, mais suffisant. L'apparat parfait pour une simple sortie entre amis. Je me dépêchai de faire mon sac pour le rejoindre. En descendant les escaliers, je vis mon géniteur et Vincent en plein échange passionné. Mon père avait noué un lien particulier avec Zac : la passion du rugby. Chaque fois qu'ils se voyaient, ils faisaient un point sur les derniers matchs, se battant corps et âme pour leur équipe respective. J'en concluais qu'ils étaient en train de débattre du match de la veille.

– Me voilà ! dis-je pour attirer leur attention.

Flashback — Fin mars 2014
Comme à chaque fois, que j'avais rendez-vous avec Zac, je ne pouvais m'empêcher de ressentir cette excitation. Nous avions beau être ensemble depuis quelques mois, j'étais profondément et littéralement amoureuse. Pourtant en arrivant devant chez lui, je fus surprise de le surprendre en grande conversation avec Vincent. La discussion semblait houleuse et je n'aimais vraiment pas ça, cela ne leur ressemblait pas...

– Me voilà ! dis-je pour attirer leur attention.

Soudainement leur visage se détendirent, même si les traits de mon petit-ami trahissaient sa contrariété. Je n'osais les questionner, mais je ne pouvais nier qu'une pointe de curiosité naquit en moi.

– Je vous laisse, je rentre ! lâcha le grand blond.

Et avant même de lui répondre, il fit demi-tour. Je ne comprenais pas ce qu'il venait de se passer. Eux qui étaient si proches, il y avait aujourd'hui un insaisissable détail qui rendait cette dispute différente.

– Ne pose pas de questions Lou, s'il te plaît. Ce n'est pas le Vincent qu'on connaît, c'est tout.

Je connaissais suffisamment l'homme que j'aimais pour savoir que c'était sa façon à lui de clore la conversation. Malgré tout ce silence, les interrogations s'installaient doucement en moi, prenant racine.
Fin du flashback

J'embrassais une dernière fois le plus âgé des deux avant de me blottir contre mon surveillant, qui me garda silencieusement contre lui quelques minutes. Je récupérai mon manteau avant de sortir et de me retrouver de nouveau dans les bras de mon meilleur ami.

– Salut toi ! Tu sembles de bonne humeur pour une fois, lâcha le grand blond.

Je ne pus m'empêcher de lever les yeux au ciel. L'après-midi qui m'attendait allait être un calvaire s'il passait son temps à m'enquiquiner. Pourtant sans le vouloir, sa façon d'être me faisait du bien. Avec lui, j'avais l'impression d'écrire une nouvelle page, de fréquenter une nouvelle Lilou-Ann.

– En fait, j'allais bien jusqu'à ce que tu arrives, soufflai-je lourdement.

Je me mordis la lèvre afin de ne pas rire. J'aimais le déstabiliser, c'était un petit jeu entre nous. Un instant d'amusement encore plus satisfaisant quand je gagnais.

– Putain, si t'es chiante comme ça la journée va être longue...

Je craquai, je ne pus m'empêcher d'éclater de rire. Je le vis se décomposer, souffler puis me pousser doucement en ricanant. Je le fatiguais pourtant il m'adorait. Nous nous mîmes en route vers le centre-ville. Il me raconta son week-end et sa sortie avec son père. Monsieur Leroy était un homme qui pouvait paraître froid au premier abord, mais il avait inculqué de belles valeurs à son fils, prônant le respect avant tout. Ils s'étaient accordé un moment de mécanique tous les deux, ensemble. Même s'il était peu présent, les instants passés à deux étaient intenses. À mon tour, je lui racontai les jours écoulés depuis vendredi, en omettant les confidences d'Axel. Je lui parlai de ma séance de torture ce qui bien évidemment le fit rire. Il en profita pour me traiter de douillette. Pourtant son sourire s'arrêta soudainement.

– Il fout quoi lui ici ? cracha-t-il en fixant droit devant.

En suivant son regard, je compris immédiatement de qui il parlait. Axel. Le brun, emmitouflé dans son manteau, se tenait là à quelques mètres de nous. J'étais surprise de le voir en compagnie de Chloé. Elle ne m'avait rien dit et au fond, ça me chagrinait. Évidemment ma conscience me rappela que j'en avais fait autant. Pourtant, je ne pouvais nier que j'étais déçue. Je tentai de les observer discrètement malheureusement c'était peine perdue.

– Tu savais qu'il était de retour ? Chloé te l'avait dit ? claqua-t-il en se tournant vers moi, le regard sombre.

Non Vincent, il semblerait que chacune ait ses secrets sur ce garçon...

– Non, elle ne m'a rien dit, soufflai-je.

Au loin, les anciens tourtereaux semblaient plongés dans une conversation intense. Je n'étais pas capable de savoir si c'était bon signe. Toutefois la main de Chloé posée sur celle d'Axel me fit prendre conscience que j'appréciais cet homme plus que je ne le pensais. Malheureusement je me rappelai que leur relation avait un poids bien plus important que les confidences récentes que nous nous étions livrées.

– Bon, on n'est pas là pour admirer les gens, je pense, lâchai-je à l'attention de mon ami.

Il me saisit par les épaules avant de m'emmener vers le lieu de notre rendez-vous. La fraîcheur de décembre commençait à mordre violemment ma peau. À ce rythme-là, j'allais mourir de froid avant d'arriver à destination. Pourtant pour la seconde fois de notre sortie, je le vis s'arrêter. Levant les yeux, mon esprit mit un certain temps à réaliser notre présence devant cette bâtisse. Un café billard. Notre café billard. Nous y allions très souvent en groupe. À l'époque où notre amour à Zac et moi avait réuni deux bandes d'amis. Je tournai la tête vers Vincent surprise qu'il m'ait emmenée dans cet endroit. Décidément remuer les souvenirs était devenu sa spécialité ce mois-ci. Lorsque ses yeux se posèrent sur moi, je compris que pour lui aussi, franchir les portes de ce lieu allait être compliqué.

– Ne pose pas de question, Lilou. Je dois essayer, parce qu'avec toi, je suis sûr que je peux y arriver, que je suis plus fort.

Je me contentai de me coller à lui pour le soutenir. Je n'étais pas la seule à souffrir même si je l'avais longtemps oublié. Il fallait vraiment que je l'aide à avancer autant qu'il l'avait fait pour moi.

En entrant, mon regard s'ancra immédiatement sur notre table. Pourtant quelqu'un était déjà là, quelqu'un de bien trop familier. Que faisait-il là ? Je soufflai et acceptai de ne pas avoir toutes les cartes en main. La vie m'offrait une seconde chance, je devais donc accepter d'être entourée. Chacun à sa façon représentait une aile qui m'aidait à voler de nouveau...

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Coucou mes petits lecteurs,

Comment allez-vous en ces temps particuliers ?
Me revoici avec un petit chapitre beaucoup plus calme, plus léger...
Alors comment trouvez-vous ma petite Lilou ? Et le retour de notre Vincent ?

J'espère qu'il vous a plu et j'ai hâte d'avoir vos avis ^^
Bisous, bisous 🖤,
L.

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