30. De retour à la maison
Voilà, c'est la fin. Le véhicule passe les grilles de Rebirth et bientôt, je quitterai le village. Mes adieux avec la bande se sont plutôt bien déroulés. J'ai bien fait de ne pas trop m'impliquer dans nos liens d'amitié, ce qui les a aidés à me laisser partir. C'était simple, sans trop défusion. L'unique bémol, c'est que mon idiot de partenaire n'a pas fait acte de présence.
Finalement, j'ai eu raison de ne pas répondre à ses sentiments sinon ça douleur aurait été plus dure à supporter. J'espère qu'avec le temps, ce qu'il ressent s'estompera.
Mon angoisse grandit au fur et à mesure que j'approche de la maison.
— Mademoiselle Eva, vous êtes arrivé à destination.
Je jette un coup d'œil à travers la vitre.
Ma mère, Simon et Nohan m'attendent devant l'entrée de la porte.
J'hésite à sortir de la voiture alors que je sens le regard insistant du chauffeur.
— Vous ne pouvez pas me conduire ailleurs ? Je lui demande en espérant obtenir une réponse favorable de sa part.
— Je ne peux pas, Monsieur Curtiste m'a ordonné expressément de vous ramener et de m'assurer que vous rentrez chez vous.
Je soupire à l'idée de devoir leur faire face. Je prends mon courage à deux mains et me dirige dans leur direction.
— Eva, je suis tellement heureuse de te revoir. Comment est-ce que tu vas ? M'interroge ma mère avec empressement.
— Laisse ta fille arrivée tranquillement, tu vas la faire fuir, intervient Simon en récupérant mes affaires à terre.
Pendant que tout le monde rentre dans la demeure, je me retourne vers mon conducteur.
— Je vous souhaite de belles choses pour la suite, Mlle Kline, énonce-t-il toujours aussi formel.
— Merci Victor, bon retour.
Je rentre à l'intérieur et constate que rien n'a changé.
J'ignore ce que je dois faire maintenant et comment aborder les choses.
— Eva, pourquoi est-ce que tu n'irais pas ranger tes affaires ? Tu nous rejoindras lorsque tu seras prête, me propose Simon en voyant que je suis complètement perdue.
— Je vais te donner un coup de main pour monter tes bagages, déclare Nohan pour m'aider à faire le premier pas.
Je retrouve ma chambre intacte.
— Je vais te laisser, au moindre problème vient dans me voir, formule-t-il, en comprenant que j'ai besoin d'être un peu seule.
— Merci.
Après avoir vidé mon premier sac, je m'assois sur mon lit, totalement épuisé.
Mon départ précipité de Rebirth me perturbe. Je n'arrive toujours pas à comprendre pourquoi Argus m'a parlé si durement lors de cette fameuse soirée qui lui a servi à révéler sa supercherie.
J'allume mon portable et constate que j'ai déjà un SMS de la part d'Ariel et de Sprite, mais rien d'Elian. Je n'ai pas la force de leur répondre tout de suite.
Le temps s'écoule et je reste là, à ne rien faire. Je ne sais plus quoi penser de tout cela.
Je descends pile pour l'heure du repas.
— Es-tu bien installé ? Me demande ma mère en venant à ma rencontre.
— Oui merci.
Nous sommes tous autour de la table.
— Comment c'était ton établissement ? Tu y faisais quoi ? Me questionne Nohan intrigué par l'endroit où j'ai vécu que quelques mois.
— J'ai beaucoup appris, cependant, j'ai signé une clause de confidentialité. Je ne peux rien vous révéler.
— As-tu au moins bien manger ? Tu n'as pas été maltraiter ?
— La nourriture était délicieuse et comme tu peux le constater, je me porte à merveille, j'affirme pour la rassurer.
— C'est une bonne nouvelle. Tu comptes faire quoi maintenant ? Enrichit-elle sans vraiment d'arrière pensé.
— Je n'ai pas de projet en tête, puis-je y réfléchir ici ?
Étonnée, elle jette un regard en direction de Simon. Il est vrai que ma demande est quelque peu inhabituelle, elle s'imaginait que je quitterai la maison.
— Bien sûr que oui ! Tu es chez toi.
Je la remercie et décide d'aller me coucher une fois le repas fini.
Allongé paisiblement dans mon lit, je lis mes messages.
Je commence par celui de Sprite.
« Salut Eva, comment est-ce que tu vas ? Tout se déroule comme tu veux ? Je voulais juste te rappeler que mon offre est toujours d'actualité si tu ne sais pas quoi faire, mais je ne te force à rien. Au moindre souci, n'hésite pas à m'en parler. Tu es également la bienvenue à la propriété si tu ne veux pas rester chez toi. Tu manques terriblement à Ariel. J'espère qu'elle pourra bientôt quitter Rebirth pour que vous vous retrouvez ».
Je lis le prochain SMS.
« Coucou, les retrouvailles avec ta famille se passent bien ? Rebirth sans toi, c'est triste. Nous n'avons pas vraiment le moral. Nous ne voyons pas trop Elian en ce moment, il est comme un fantôme errant. Lors des repas, l'ambiance est pesante à cause de la présence d'Argus. Depuis ton départ, il ne nous a pas adressé la parole et il n'apprécie pas énormément que l'on cite ton prénom. Il a même renvoyé les profs chez eux, maintenant que la mission est close. Seule Océanne n'est pas perturbée par ton absence. Tu me manques, j'attends ta réponse avec impatience »
Je déteste savoir que les choses ne vont pas bien là-bas et qu'Argus ne fait rien pour améliorer la situation.
Je lui répondrai demain, en me demandant si je devrais prendre des nouvelles de mon partenaire.
Je m'ennuie déjà sans eux, leurs présences agaçantes me manquent.
Je voudrais que ma tristesse s'atténue avec le temps. Sans m'en rendre compte je me suis attachée à eux, même si je le démentais à chaque fois. J'ai pensé à leur propre souffrance, seulement, je me suis oubliée.
En me remémorant mes souvenirs à Rebirth, des larmes coulent sur mes joues.
Le cœur lourd, je me laisse aller.
Il n'est pas question que je m'apitoie sur mon sort alors que les autres n'ont pas pu quitter l'établissement.
J'ai passé trois jours à errer comme un zombie dans la maison. Je passe la plupart de mes journées allongées sur mon lit, dans le noir. Je n'ai même pas pris la peine de me changer, ni de faire un brin de toilette. J'ai arrêté d'écrire à Ariel car notre discussion me faisait encore plus de peine. Étrangement, ma mère n'est pas intervenue, c'est peut-être grâce à l'intervention de Simon qui a le don de me comprendre. Elle me laisse agir à ma guise, manger dans ma chambre sans la moindre protestation.
Cette solitude me permet de faire un point avec moi-même et d'atteindre le fond du gouffre.
J'ai été stupide de croire que je pouvais guérir alors que mon cœur me fait encore souffrir, malgré le fait que ma rancœur envers ma mère s'est estompée.
Quatrième jour, à mon réveil, je me rends dans la cuisine.
— Bonjour ma chérie, comment te sens-tu ? Me demande-t-elle légèrement inquiète par mon état.
— Un peu mieux. Simon et Nohan, ne sont pas là ?
— Ils sont partis voir un match de basket et comme ce n'est pas à côté, ils ne rentreront que demain, déclare-t-elle, en essayant de décrypter mon attitude.
— D'accord, as-tu quelque chose de prévu ?
C'est la première fois depuis longtemps que nous nous retrouvons que toutes les deux et je dois avouer que je suis un peu mal à l'aise.
— Non, tu veux te rendre quelque part en particulier.
Bien qu'elle ne le montre pas, je sais qu'elle est heureuse. Je peux apercevoir un petit rictus au coin de ses lèvres.
— Nous pouvons sortir en balade et pique-niquer, je propose en espérant qu'elle accepte.
— Excellente idée ! Je prépare le repas pendant que tu t'habilles.
En effet, l'odeur que je dégage ne doit pas être très agréable. Je m'empresse d'aller prendre une douche et mettre des vêtements propres.
Nous prenons la route direction le parc naturel d'Opal.
Nous suivons le sentier forestier qui débouche sur la montagne, dans un silence de plomb.
La vue est à couper le souffle.
Nous pouvons voir le lac d'Opal en contrebas dans la vallée. Les rayons du soleil se reflètent dans l'eau claire, qui rend le spectacle encore plus beau. Une légère brise s'amuse à mettre mes cheveux en bataille.
L'air est tellement vivifiant que je prends de grandes bouffées d'être frais, comme si j'étouffais.
— Ça fait du bien.
Les yeux fermés, je ressens une boule d'émotions surgir en moi. Les larmes ne sont pas très loin.
— Je sais que tu souffres. Étais-tu si bien là-bas ?
Je pivote dans sa direction pour lui faire face.
— Ils m'ont changé, grâce à eux, j'ai retrouvé le goût de vivre. Je veux tellement les rejoindre.
J'ignore ce qui me prend, mais je cède facilement à l'appel de ses bras ouvert.
— Quelle que soit ta décision, je serai toujours là pour te soutenir.
C'est adorable de sa part, cependant, je ne sais pas ce que je dois ou ne doit pas faire.
— Allons jusqu'au sommet puis nous rentrons à la maison.
Qui sait, peut-être que la réponse me viendra en prenant de la hauteur.
De retour, je décide de prendre à nouveau une douche pour relaxer mes muscles.
Une fois sec, je m'attaque à déballer le restant de mes sacs.
En sortant mes affaires, une enveloppe tombe à terre. J'ai dû l'oublier en empilant mes vêtements dessus.
Je me rappelle qu'Argus me l'avait confié pour que je la lise. Il faudra que je la lui retourne par la poste.
En commençant la lecture, je comprends de quoi il s'agit.
J'hésite vraiment à la poursuivre, étant donné qu'elle est plutôt de l'ordre du privé.
Il s'agit d'une lettre d'adieu laisser par son fils, César, avant de rejoindre le paradis.
« Ceci n'est pas une lettre de suicide, juste un au revoir. Il est difficile pour moi de trouver les bons mots pour expliquer mon départ. Ma plus grande peur n'est pas la mort, mais la souffrance que je vais vous infliger.
Ma tendre maman, je sais que cette épreuve te sera douloureuse et je te demande de t'accrocher. Où que je sois, je t'attendrai sagement alors profite de la vie. Garde le sourire, même dans les moments les plus durs. Je sais que cette demande te sera difficile à tenir alors que je ne suis qu'un égoïste qui a décidé de t'abandonner.
Au grand Argus, mon père, je veux être clair sur le fait que ton absence n'est en rien la cause de mon départ pour l'au-delà. Je ne t'en veux absolument pas car je sais que tu faisais face à cette situation à ta manière. J'angoisse à l'idée de m'en aller en sachant que tu t'en voudras toujours de n'avoir pas pu me protéger alors que tu as accompli à la perfection ton devoir de père.
Une fois profondément endormi, je voudrais que tu fasses quelque chose pour moi. Je veux que tu prennes soin de maman et que tu aides les âmes égarées. Grâce à toi, tu m'as aidé à ne pas craindre la fatalité.
Peut-être qu'un jour, l'un de tes protégés te sauvera de ta propre perte. La vie est faite pour être vécu quelle que soit sa fin. La mienne, bien qu'elle fût brève s'achève aujourd'hui sans le moindre remords. Je pars vivre de nouvelles aventures.
Ceci n'est pas un adieu, mais un au revoir car nous nous reverrons le moment venu.
Je vous aime. »
César
À travers cette lettre, je prends conscience qu'Argus ne les laissera jamais quitter Rebirth. Toutefois, je ne comprends pas pourquoi il m'a éjecté de là-bas.
Étais-je une menace pour garder captive ces protéger ?
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top