25. Eliva (Partie 1)

À peine rentré à la maison que les autres nous assomme de questions.

— Waouh... tu as une sale mine, commente Jade, en me détaillant de la tête aux pieds.

— Tu es toujours aussi agréable. Si ton but est de m'énerver, il va falloir élever le niveau. Cependant, je ne pense pas que tu parviennes à battre Elian à ce petit jeu.

Son air agacé me redonne de l'énergie. Dommage que j'aie dû impliquer mon partenaire dans cette querelle.

— Même si Eva n'est plus tout à fait fraîche, elle reste une véritable beauté que je servirais avec plaisir, intervient Derek pour rendre l'ambiance encore plus électrique.

— Et le séducteur de pacotille ! Je ne t'ai pas sonné alors tes compliments à deux balles, tu peux te les mettre où je...

— Eva ! Veuillez la pardonner pour son langage quelque peu vulgaire. À cause de la fatigue, nous sommes davantage héritables. Nous allons nous retirer dans nos chambres afin de nous reposer correctement, m'interrompt Elian, avant que la situation ne dérape.

Il me conduit de force jusqu'à ma porte. Il me pousse à l'intérieur de la pièce et referme aussitôt derrière moi. Il craint trop de se faire engueuler. Après avoir jeté mes vêtements au sol, je me précipite sous la douche pour sentir l'eau chaude ruisseler sur ma peau et délasser chacun de mes muscles.

Une fois bien détendue, je me glisse dans mes draps frais. En fermant mes yeux, je me remémore la sensation de la main d'Elian sur mon visage. Elle était douce et rassurante, je me sentais apaisée. Toutefois, ce qui m'a le plus marqué, c'est lorsque je les ai rouverts et que j'ai pu le contempler en train de dormir. Il dégageait également une sérénité que je ne lui connaissais pas. Il était tellement différent de d'habitude.

Je me trompe sûrement mais ... J'ai l'impression qu'il a trouvé la paix. Comme si les démons qui le ronge n'étaient plus qu'un souvenir lointain.

À peine réveillé, je descends me préparer mon petit-déjeuner. Je constate qu'il est tôt, car seuls quatre d'entre nous sont debout. Isaac est en train de lire un magazine scientifique dans le fauteuil et rien ne semble le distraire. Kaya, quant à elle, regarde la télévision depuis sûrement un bon moment à cause de son insomnie passagère. Elle ne dit rien, mais ... être en dehors des grilles de Rebirth l'angoisse. Elle craint de replonger dans les abysses de l'enfer que peut avoir la vie.

Je me retrouve en compagnie d'Awen pour manger. Elle n'arrête pas de me fixer, comme si elle attendait que je lui dise quelque chose en particulier.

Ignorant ce qu'elle me veut, je ne ferais pas le premier pas pour lancer une discussion dont le sujet m'est totalement inconnu. Finalement, voyant mon air agacé, elle décide de parler la première.

— Dis-moi, qu'est-ce qui te tracasse ? M'interroge-t-elle, sur un ton énigmatique qu'elle seule le fait à la perfection.

Quoi que... Argus le fait bien mais ... ce n'est pas le même rendu. Ça donne plutôt l'impression d'avoir un vieux en face de soi avec des pertes de mémoire. Je suis vraiment vilaine d'avoir ce genre de pensées.

Comme à chaque fois, elle sait me déchiffrer, j'en ai les frissons.

— Est-ce que tu as remarqués des changements d'attitudes chez chacun d'entre nous ? Je la questionne en noyant le poisson.

— Bien sûr. Nos habitudes, nos comportements d'origine ont refait surface en étant à nouveau dehors. Toutefois, je crois que tu essaies de détourner le véritable sujet de conversation, n'est-ce pas ?

Hélas... nous ne pouvons rien lui cacher. Elle devine en chaque être humain les préoccupations qui les rongent.

— En effet, Elian n'est plus lui-même en ce moment. Il devient trop tendre à mon égard et laisse davantage ses sentiments prendre le dessus.

Un léger rire lui échappe. Pourquoi dès que je discute avec elle, j'ai l'impression d'avoir loupé quelque chose d'important.

— D'après ce que j'ai vu, il a tout simplement tourné la page. Il a un nouveau but dans sa vie, dit-elle toujours aussi mystérieuse.

— Et en langage claire, tu veux en venir où ?

— Je pense qu'il est parvenu à se pardonner pour ses actes passés et laisser place à un présent plus heureux. Une certaine personne a su lui ouvrir les yeux en le poussant à bout dans ses émotions.

Franchement, je lui demande gentiment d'être plus compréhensible dans ses propos et pour finir, je suis encore plus perdue.

Elle a parfaitement compris qu'elle m'avait paumé en voyant mon air déphasé.

— Patience, tu comprends bientôt sauf si ton caractère de merde vient encore tout gâcher.

Je ne suis pas prête à trouver la réponse à son énigme.

En parlant du loup, je le vois débarquer dans la cuisine. Il est grand temps que j'aille me préparer. Je m'éclipse en toute discrétion en évitant de rencontrer mon partenaire.

Environ trois heures se sont écoulées depuis que je me suis levée, nous sommes tous à présent regroupés dans le salon à attendre le coup de fil d'Ernest. C'est vraiment une perte de temps car nous ignorons à quel moment il nous contactera et si l'homme de main du méchant nous appellera.

Je profite de cet instant ennuyant pour observer Elian. Je ne vois pas où Awen veut en venir.

Je jette un regard en direction de la médium qui semble se réjouir de cette situation.

Lorsque je reporte mon attention sur mon coéquipier, ses yeux soutiennent mon regard. Il me fait des petits signes de la tête pour savoir ce qui se passe.

Par chance, la sonnerie du téléphone résonne, mettant fin à notre duel.

Ninon décroche puis me tend l'appareil.

— Bonjour Eva, comment vas-tu ?

Je suis surprise d'entendre sa voix, j'espère que cet appel n'est pas de mauvais augure.

— Bonjour Argus, je me porte bien. Vous vouliez m'entretenir de quelque chose en particulier ? Je le questionne, intriguée de connaître la raison soudaine de vouloir me parler.

— Oui. Dans deux jours, c'est l'anniversaire de Lucien et j'aimerais que tu organises une petite fête surprise avec les autres. Bien entendu, cela ne doit pas vous gêner dans votre enquête.

Je ne m'attendais pas à ça.

— Pourquoi me demander un tel service ? Je l'interroge pour en savoir plus sur ces intentions.

— Tu as lu son histoire, n'est-ce pas ?

En théorie non mais ... Awen a dû lui dire pour avoir son accord.

— Il n'a jamais eu de preuve d'affection sauf à Rebirth. Vous tous, vous lui avez prêté attention et vous l'avez écouté. Aucune famille, ni d'amis ne lui ont souhaité la moindre fête. C'est la raison pour laquelle j'ai pensé que lui faire ce genre de surprise, lui permettrait de prouver à sa génitrice qu'il a le droit de vivre et d'être aimé. Bien sûr, je ne t'oblige à rien. Toi seule et Lucien êtes au courant pour son anniversaire. A toi de décider si tu veux ou non lui offrir un tel cadeau.

— Pourquoi moi ? Je le sollicite à nouveau perplexe.

— Parce que tu sais ce qu'est de recevoir l'amour. Tu peux toujours essayer d'oublier le passé, seulement les souvenirs de bonheur, de tristesse ne s'effaceront pas.

Argus fait référence à ma relation avec mon père. J'ai reçu beaucoup d'affections de sa part, même dans les moments difficiles. Lorsqu'il était au plus mal et complètement saoule, il pleurait comme un gamin, mais il s'est toujours excusé auprès de moi. Il savait que le voir ainsi me faisait terriblement souffrir, car la tristesse qui le rongeait était aussi ma douleur.

— Très bien, je verrais.

— Sinon comment ça se passe avec ton partenaire ? Me demande-t-il, en changeant radicalement de sujet.

Je n'imaginais pas que Mr. Argus soit aussi curieux. Je ne vais certainement pas lui faire plaisir en lui déballant les croustillants sur notre mission.

— Bien tenté. Je dois vous laisser, au revoir.

Je lui raccroche au nez avant qu'il n'essaie de me retenir.

Ernest rentre pile au bon moment. Personne n'a le temps de me questionner sur cette conversation.

— Bonne nouvelle ! Vos CV plaisent beaucoup au chef du gang et vous donne rendez-vous dans trois jours à Illa pour faire la transaction avec son homme de main. Il enverra l'adresse exacte du lieu de la rencontre le jour J. Je vais rester à l'hôpital pour qu'il n'arrive rien à Mr. Siger. Durant mon absence, vous serez sous la responsabilité de Rachel et Aurélien, donc soyez sages.

En fin de compte, mes conneries vont m'être utiles dans ma vie.

Bon, ça me laisse un peu de temps pour organiser une petite fête pour l'anniversaire de notre chez Lucien.

Je prends Awen à part pour lui parler de mon idée et de la confier aux autres, étant donné que presque tout le monde se confie à elle.

Ariel a discuté avec son père pour qu'il l'aide à trouver un lieu et un restaurant malgré ma réticence. Pour pigmenter la fiesta, j'ai opté pour thème de la soirée paillette ou brillance.

Nous sommes tous parvenus à garder le secret jusqu'au fameux jour, sans que Lucien ne soupçonne quoi que ce soit.

Aujourd'hui, c'est son anniversaire. Nous agissons le plus naturellement possible, bien que certaines personnes soient impatientes d'être ce soir. A aucun moment de la journée, Lucien n'a dit qu'il s'agissait du jour de sa naissance.

Sous les coups de dix-sept heures, Derek et Elian ont « kidnappé » notre camarade pour lui faire enfiler sa tenue.

Tout le monde à jouer le jeu, nous sommes tous très élégants et pas du tout discrets. Celui qui ne comprend rien à ce qui se passe, c'est notre cible. Les yeux bandés, il n'a pas pu encore découvrir sa tenue, ni où nous comptons l'emmener.

Une limousine nous attend devant la maison. Elle a été envoyée par Sprite pour sûrement éblouir sa fille. C'est une première qui m'a beaucoup plu ainsi qu'à Ariel. Apparemment, Derek, Jade, Kaya et Isaac sont déjà montés plusieurs fois dans ce genre de véhicule.

Notre bienfaiteur a vu les choses en grand pour l'ami de sa fille. Je n'ose à peine imaginer ce qu'il pourrait préparer pour celui d'Ariel et encore moins si elle venait à se marier.

Il a réservé un prestigieux restaurant au bord de la mer rien que pour nous. Il a dépensé une fortune en croyant s'attirer l'admiration de sa fille.

Bon, avant de faire la fête, Rachel me rappelle que je ne dois pas abuser de l'alcool avec Elian, car le lendemain, j'ai un rendez-vous important. Elle n'a pas tout à fait tort. Je ne tiens pas encore à oublier une soirée et me mettre à dos mon partenaire.

Nous retirons le bandeau des yeux de Lucien pour qu'il admire la belle décoration. Elle est sobre, quelques ballons dispersés, des banderoles, des fleurs et une grande table avec les cadeaux puis notre table ronde pour manger en face-à-face.

Cette soirée va nous permettre d'oublier durant quelques heures la raison de notre présence dans cette ville et de vivre normalement. Pas de grille, pas de règles, pas de responsabilité, juste des jeunes qui vont s'amuser à fond.

En voulant notre geste, Lucien a été énormément bouleversé. Lui qui a l'habitude de sourire constamment, il s'est mis à pleurer de joie.

Je suis la seule à me sentir mal. J'ai l'impression de faire semblant de me soucier de Lucien. J'ai seulement accédé à la requête d'Argus, car cela semblait bénéfique à la guérison de mon camarade.

Je n'en retire aucune satisfaction personnelle, je suis lasse de cette mascarade.

Ma coupe de champagne à la main, je me dirige sur le balcon pour prendre un bon bol d'air frais.

Je peux parfaitement admirer les nombreuses étoiles dans le ciel, ainsi que la magnifique pleine lune, dont la lumière étincelle se reflète sur l'eau.

Cette nuit m'en rappelle une autre, celle où j'attends toujours une réponse.

— Je me doutais bien que je te trouverais ici, s'exclame une voix masculine que je reconnais sans la moindre difficulté.

— Je savais que tu viendrais me rejoindre, Elian.

Il prend place à mes côtés.

— Ah... Que le temps est agréable, n'est-ce pas ? Cette situation me paraît familière. Elle se serait déroulée la veille de notre départ de Rebirth, commente-t-il, en gardant un air détaché.

— En effet, il me revient en mémoire quelques souvenirs, néanmoins, je ne suis pas bourrée. Je suis pleine conscience de mes actes, cette fois.

— Tu crois vraiment pouvoir être lucide face à moi ? Dit-il, d'un air taquin.

— Certainement ! Je n'ai jamais faibli face à toi.

Il se met à rire.

— Veux-tu toujours connaître la fameuse réponse à cette soirée avant que tu ne t'écroules comme une masse dans mes bras ?

— Evidemment que oui ! Je n'ai pas peur. Quoi qu'il se soit produit, cela appartient au passé, je confirme avec fermeté ma décision.

Bon... je dois avouer que je suis un peu stressée à l'idée de savoir enfin la vérité.

— Très bien, laisse-moi te rafraîchir la mémoire.

Il passe un bras autour de ma taille et m'attire contre lui. Nos corps se touchent, je peux sentir son souffle dans mes cheveux. Nos regards se croisent sans jamais se quitter. Je peux ressentir une tension palpable entre nous deux. Je regrette de ne pas être ivre en ce moment.

— Nous étions en train de danser puis tu as divagué. Je n'ose répéter les mots mielleux à mon encontre, tellement que j'étais perturbé. Ensuite, nos lèvres n'étaient plus qu'à quelques centimètres l'une de l'autre. Tu t'es davantage avancé vers moi, tel un fauve prêt à bondir sur sa proie, tout en délicatesse pour ne pas me faire prendre la fuite puis...

— Ah !! Désolé !! Je n'ai rien vu, s'excuse Ariel toute gênée.

Je comprends mieux sa confusion. Elian avait allié les gestes à son récit. Nous sommes dans une position plutôt intime.

Ce n'est pas aujourd'hui que j'aurai ma réponse.

Je m'éloigne de mon partenaire pour faire retomber toute cette tension sensuelle.

— Laissons tomber Elian, c'est du passé. Plus besoin de revenir dessus, surtout que je ne me souviens de pas grand-chose.

— Je ne suis pas d'accord, c'est trop facile. Je ne veux pas être le seul à me souvenir de cette magnifique soirée. Tu dois également en assumer les conséquences !

Il s'approche de moi d'un pas vif et déterminé, prenant au creux de ses mains ma tête pour l'avancer vers la sienne.

En l'espace d'une fraction de seconde, ses lèvres sont délicieusement posées sur les miennes.

Étant sous le choc, je n'ai pas eu la moindre réaction. Il ne cherche pas à être plus entreprenant, car dès qu'il a fini, il m'écarte de lui.

— A ton tour d'assumer cette vérité.

Je n'ai pas encore repris mes esprits qu'il décide de prendre congé.

J'ai déjà du mal à réaliser que mon idiot de partenaire et moi-même nous nous sommes embrassés à l'instant, mais, qu'il s'agit de la seconde fois... C'est bouleversant. 

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