île et problèmes (de type graves)

Je fixe Lucas. J'ai du mal à saisir... Je... Moi, Karina, je peux attirer des ennuis au groupe parce qu'un SUP un peu trop manipulateur à mon goût a décidé que je lui appartenais?

"- Mais Lucas, ils vont quand même pas me faire dégager à cause d'un ado qui se croit tout permis?

-Karina, l'ado pourri-gâté dont tu parles est un SUP faisant partie d'une famille très puissante. S'il se met vraiment en tête de te retrouver, on a plus qu'à declarer forfait dès maintenant.

-Mais si on m'exclue du groupe, qu'est-ce que je vais devenir?

-Un cadavre.

- PARDON?

-Tu sais déjà où se trouve la planque et tu connais certains visages. Ils te tueront au cas où une envie de tout faire foirer te prendrait subitement.

-Tu... Leur dis pas... Lucas... Je ferai ce que tu veux tu m'entends? Leur dis pas... J'ai pas voulu tout ça, si je meure je veux que ça soit en étant utile...

-Ta gueule, je réfléchis.

-Ok Ok...

-Pour l'instant, je dirai rien. Mais on va surveiller ton ex petit copain et au moindre doute je balance tout. Je peux pas sauver temporairement une vie au prix d'une centaine d'autres!

-Mais peut-être qu'ils s'en moquent d'Ismaël! Ils sont bien au-dessus de ça! Et peut-être qu'ils me laisseront une chance!

-L'espoir fait vivre, on verra bien."

                                                    Sur ce, Lucas se lève et quitte le dortoir. J'ai fui ma ville pour échapper à la mort, et voilà que je me retrouve dans une situation similaire, sinon pire. Je soupire : pourquoi Ismaël veut-il absolument me retrouver? Il n'a pas cherché à me revoir pendant ma courte période de cohabitation avec Célestin, et, une fois que je commence vraiment à l'oublier, il décide qu'il  veut bien de moi? Si jamais il me retrouve, je l'enverrai balader. Je ne suis pas un objet! et puis, il ne fallait pas embrasser Camille. Je revois son sourire satisfait, la façon qu'il a eu d'étreindre Camille, de la faire rougir, d'exiger son amour... Je trouve cela révoltant. Enfin, au fond de moi, ancrée dans mon côté Inf, une petite voix hurle de jalousie : la place de Camille n'est pas dans les bras d'Ismaël, c'est moi qui devrait y être, c'est moi qu'il devrait embrasser, persuader, c'est à moi qu'il devrait ordonner l'admiration! Tout est de la faute de Camille, cette garce... Et puis, ce n'est pas vraiment de la faute d'Ismaël, c'est un SUP, il a toujours raison...

                                                      Il faut que je me libère de l'emprise qu'exerce sur moi, même à distance, cet enfoiré d'Ismaël. Mon attitude soumise envers lui me faire dire et penser n'importe quoi, et cela ne risque pas de plaire à Nadiet et autres "Extras"... 

Je reste ainsi prostrée pendant d'interminables minutes, à réfléchir à un moyen de me sortir de ce pétrin. Au moment où mes larmes commencent à couler, une sonnerie stridente retentit. Le musée ferme ses portes pour la pause méridionale. On va enfin pouvoir discuter sans chuchoter! D'ailleurs, au moment où je me dis ça, Nadiet nous demande de nous rassembler une nouvelle fois dans la salle de classe. Cette fois-ci, il parle fort et tout le groupe peut entendre ce qu'il nous explique sur l'île d'Amadouin, là où je dois récupérer ces fichues cartes permettant d'accéder à tous les bâtiments de la ville:

"- Une seule personne est concernée par ces informations dans l'immédiat, mais de nombreuses autres missions se dérouleront là-bas. Je vous demanderai donc d'ouvrir grand vos oreilles.

- Je rêve, me chuchote Lucie, assise à mes côtés, où il nous prend vraiment pour des enfants de cinq ans?

-Lucie, je vous prierai de fermer votre grande gueule lorsque j'explique quelque chose.  Vous empêchez Karina de se concentrer alors que ce... cours lui sera extrêmement utile.

                                J'observe Lucie rougir de honte et de colère, puis se lever et quitter la pièce. J'ai très envie de la suivre mais le visage impatient de l'orateur me convainc de rester bien sagement sur ma chaise.

- Bon débarras! reprend Nadiet, Où en étais-je? Ah oui alors... Cette île est quasiment déserte. Elle ne comporte qu'un poste de police en assez mauvais état, néanmoins très jalousement gardé, puisqu'il renferme les fameux badges. Il faut, dans la mesure du possible, y rester le moins de temps possible et éviter de s'aventurer hors des routes goudronnées et du poste de police, ce qui limite grandement notre liberté de mouvement. En effet, une centrale nucléaire a explosé sur une autre île au milieu de la mer il y a cinq ans, tuant tous les habitants d'Amadouin et une partie de ceux de la ville. Heureusement que la capitale possède des technologies pouvant limiter les dégâts... Bref, l'île est radioactive, comme Tchernobyl fois dix.

-Tcherno quoi? 

-Laissez tomber Lucas, je vous expliquerai un jour. Surtout, évitez la plage. Sables mouvants, faune et flore radioactifs donc insectes géants, rares végétaux très toxiques, tout y est. Personne ne doit y aller. Personne. C'est l'endroit le plus au nord, la seule véritable plage de l'île. Il n'y a aucune raison justifiant d'y aller, sauf une envie subite de suicide long et douloureux. Des questions?

-...

 -Tant mieux! Sur cette note joyeuse, je vous laisse vous préparer pour demain! Si jamais vous avez des doutes, ou si j'ai oublié de préciser quelque chose, dites-le moi vite. Sur ce, demain on se réveille tous à six heures et on fonce!

                                                 La salle se vide dans un bruit de raclement de chaises et de conversations animées.

-Euh monsieur? Pardon, Nadiet? appelé-je.

- Oui? Dépêchez-vous Karina, j'ai des choses à faire!

-Premièrement, est-ce que... On part vraiment demain? En mission?

-Effectivement! Je pensais avoir été  clair!

-Et... Est-ce que tu... pouvez... vous pouvez arrêter de me tutoyer? S'il te plaît?

- C'est négociable. Allez, pars maintenant."

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J'ouvre un œil, puis deux. L'obscurité. Quelqu'un ronfle. Sommeil... Qu'est-ce que... Je rêve ou Nadiet vient d'entrer dans le dortoir, tout habillé? 

"- DEBOUT! ON BOUGE SON... ON SE REVEILLE!

- Putain ta gueule Nadiet.

-Parle autrement, Rosie. J'suis ton chef.

- Ta gueule s'il-te-plaît.

- Pfff... ALLEZ ON SE BOUGE! Je veux que tout le monde soit prêt dans dix minutes! J'ai fait des pancakes!"

Un enfilage de vêtements dans le noir et je suis prête. Les autres émergent juste en grognant, les paupières lourdes. Quelques minutes après, je dévore mes pancakes au sirop d'érable:

"-Euh... J'ai une question, personne ne va se rendre compte que le musée est vide et qu'un groupe de hors-la-loi se balade en ville?

-Le musée est fermé pour cause "de rénovation" m'indique Keira, la marraine de Lucie, et le groupe va très vite se disperser. Mange, tu vas avoir besoin de force."

                                              J'agis comme un automate à partir de cet instant, et mes actions s'enchaînent sans que je comprenne comment. Je sais juste que lorsque je sors, et que je sens enfin l'air frais noyer mes poumons, une peur étouffante me saisit. J'arrive pas à m'en débarrasser. J'ai beau déglutir pour stopper la sensation de gorge sèche, j'ai beau triturer mes manches, entortiller mes cheveux et mordre mes lèvres à m'en faire saigner, elle ne disparaît pas.

                                                    Respire à fond. Je vais risquer ma vie... Je relis pour la centième fois mon ordre de mission avant de rentrer dans la navette qui me conduira à la potence. Une fois assise, j'apprend que je serai la dernière à descendre du groupe puisque Amadouin est le lieu la destination la plus éloignée. A côté de moi, ma marraine de mission essaie de briser la glace et de me rassurer. Elle me tend un donut mais l'odeur de la nourriture me donne des haut-le-cœur.

                                      Je sais que je lui répond, mais je ne sais pas vraiment quoi. Elle finit par me prendre dans ses bras ("les câlins ça diminue le stress") et je l'écoute parler des bénéfices des contacts humains sur l'anxiété pendant un bon quart d'heure. Lucie est juste derrière moi, elle descend en premier, et est en pleine crise d'angoisse. Quand elle finit par partir, elle me glisse un "salut" qui ressemble à un adieu.

En plus, j'ai le mal de bus. 

Le temps passe et le véhicule se vide me laissant seule avec Serena, qui essaye toujours de me remonter le moral, et notre chef aux iris adamantins. Une crise de larmes m'empêche de parler. Nadiet lui-même finit par voir ce qu'il se passe, et demande à Serena de me laisser seule avec lui. Ma marraine de mission s'assoie donc tout au bout du bus, et Nadiet me regarde d'un œil critique:

"-C'est fou. T'es vraiment leur créature. Une pure inf... Relève la tête. Lève les yeux. LEVE LES YEUX! Ne. Détourne. Jamais. Le regard. C'est dommage de cacher tes yeux, ils sont plutôt jolis... Ah, j'ai réussi à te faire sourire... Tu parles jamais?

- Si.

- Eh bah t'es bavarde hein. 

-J'ai peur.

-Normal! Tu vas devoir éviter la police et accomplir des actions illégales... Arrête de me regarder comme si j'allais te manger, c'est perturbant.

-J'ai peur de la police, et en disant ça, le souvenir du policier m'ayant interpellée en début d'année refait surface. Les policiers ne font que maintenir l'ordre. Ils ont raison. Je suis censée leur obéir...

- Mais bordel où est passé ton sens critique?  

-...

- T'as déjà parlé à un policier avec des valeurs? Quelqu'un qui t'as écouté ou manifesté de l'amitié? 

-Non. La seule fois où j'ai parlé à un policier, il m'a tiré les cheveux et m'a menacée.

- Pourquoi?

- Je m'étais montrée présomptueuse. J'avais pris la parole en cours.

-Je rêve! Eh, va falloir que tu réagisses un jour hein, t'as rien à faire ici si tu te laisses marcher sur les pieds à ce point! Tu mérites autre chose, d'accord? Regarde-moi. Lève les yeux. Tu mérites mieux. Dis-le.

-Je... Je mérite mieux?

-Voilà. Maintenant tu repenses à cet enfoiré de policier qui t'a manifestement agressée et tu passes ta rage sur les cons qui se trouveront sur l'île. Tu vas les massacrer, ok? Serena te couvrira. Tu sais te servir d'une arme à feu?

- Plus ou moins... Y'a deux ans on a étudié la troisième guerre mondiale, et on a manipulé certaines armes... 

-Bon, ça fera l'affaire. T'as intérêt à assurer, d'accord?

-Mhm"

Il se lève et retourne à l'avant du bus. Tout est calme; Serena est assise au fond; il fait chaud et c'est l'heure de la sieste...

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"-Comment elle s'appelle déjà? Karine?

- Karina, réveille-toi, on arrive."

                                                    Je suis toute engourdie. On me met une arme à feu dans les mains et je descend du bus dans la lumière de fin de journée. Je vois Serena descendre et me rejoindre, et le bus repartir. On marche un peu, comme dans un rêve, j'suis pas encore bien réveillée. Je regarde à peine autour de moi, je suis en mode automatique, fonction survie. Il pleut.

                                           Enfin, j'aperçois le poste. Un cube de béton armé, gardé par une bonne vingtaine de policiers. En voyant autant de personnes armées, contre seulement Serena et moi, je frissonne. Je suppose qu'il y en a au moins autant à l'intérieur et que les renforts ne sont pas loin. Et ils ont des chiens... 

                          Cependant, je remarque que certains policiers ont posé leurs armes et discutent en finissant de digérer. Ils ont raison de se croire en sécurité: qui serait assez fou pour venir ici et espérer voler quoi que ce soit? Ah oui, moi... Soit très peu de gens. Serena vise un des policiers, un peu à l'écart, avec une arme dont j'ignore complétement le nom. Quelques minutes après, trois policiers sont morts, et dix-sept cherchent le coupable. Lorsque je croise le regard de l'un d'eux, j'oublie ma mission.

                               Je n'ai qu'une pensée: fuir.  Seulement voilà, Serena me pousse loin d'elle. En terrain découvert, et je sens tous les regards converger dans ma direction... 

Mais... 

Elle m'a consciemment mise en danger de mort?

 Oh la salope. 

Et encore, le taux de dangerosité de ma mission était plutôt bas...

 Je suis paralysée.

Une balle siffle tout près de mon visage.

Réveil. Course. Loin, loin d'eux, de Serena qui entre dans le bâtiment, des chiens qui se rapprochent, des visages déformés par la haine.

Devant moi, y'a un tunnel. J'sais pas pourquoi, mais il est là, et j'entends des "j'ai plus de munitions", alors je reprends espoir. Et je reprends mon souffle. Une demi-seconde de pause. Tout s'arrête. 

Et puis je reprend ma course effrénée, alors que mes muscles me font souffrir le martyr, et que je sens une balle s'enfoncer dans mon épaule.

Oublier la douleur.

Je passe dans le tunnel.

Cours le plus vite possible. Mon arme tombe, mais je ne peux pas m'arrêter. Ils sont trop proches... 

Mon corps meurtri refuse de coopérer. Je sens le sang couler le long de mon omoplate.

Ah! La lumière! La pluie! Et un mur...beaucoup trop haut pour moi...

Pourquoi avoir mis un mur ici? Il sert à rien bordel!

J'vais pas attendre devant ce mur qu'ils me rattrapent! Ah! Un appui! Pied droit, main gauche...

Hop! Main droite au-dessus ...et merde! Je glisse! AAA! Ok! Calme-toi. Inspire, Expire,...

Ils arrivent! Merde merde merde...main gauche au-dessus du mur, appui, traction, ça y est! Enfin! Sauvée! Ou presque...Allez! plus vite! Le sprint de ma vie! Je traverse la forêt, les branches me griffent le visage, et eux et leurs chiens se rapprochent!

Soudain un des chiens, le plus rapide, me mord de toutes ses forces le mollet...La douleur est aïgue, insurmontable et le sang chaud coule le long de ma jambe. Une droite bien placée et le chien lâche prise en glapissant. Je boite, je sautille et galère à avancer...  Ils crient qu'ils n'ont plus de balles, qu'ils m'achèveront à mains nues, que les chiens me traqueront... 

Et puis, ils s'arrêtent. Etonnée, je ris comme une folle: j'ai gagné! Ma mort n'est pas pour aujourd'hui! Ils ne m'ont pas attrapée! Ah vous vous sentez cons les policiers!!! Vous et vos chiens de malheur...Mais pourquoi ils sourient comme des débiles? Le doute m'envahit...Tout à coup je comprends: Je suis dans du sable, j'entends la mer, je suis sur la plage...

L'endroit le plus dangereux de toute l'île...

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C'est tout pour ce chapitre! Je ne l'aime pas du tout, alors je suis désolée s'il est moins bien que les précédents...




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