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- Caro ! Caro ! Attends-moi !

Mes pas se sont fait plus rapides sur le goudron gelé. J'ai serré les dents et marché droit devant, le cœur grinçant. Le bruit des ses pas rapides derrière moi mêlé à sa voix hurlant mon surnom a  cheminé jusqu'à mes oreilles. J'ai pincé les lèvres.

Ne m'appelle pas comme ça ! a hurlé mon esprit embrouillé.

Le soleil declinait et nos ombres pressées slamonant entre les passants tracaient un sillon flou et désordonnée sur le sol. Le froid de cette fin d'après-midi claquait contre mon visage et léchait mes joues salées par les larmes. Une grosse boule croissait dans ma gorge. Si imposante qu'elle lui arrachait des sanglots étouffés.

Les rues étaient bondées et à plusieurs reprises, j'ai cru l'avoir semé entre les passants étranges, l'atmosphère étouffante, les bribes de paroles que portait le vent, les bousculades des gens rivés sur leurs portables et les regards de travers qui se posaient sur mes yeux rouges et mes lèvres pincées.

Mais son ombre réapparaissait toujours. Il me suivait et me collait aussi persistant qu'un vieux chewing-gum dans les cheveux. Mes membres étaient ankylosés et mon sac m'a semblé peser une tonne dans mon dos. Je n'ai eu qu'une seule envie : rentrer, vider ma peine dans mon oreiller et oublier cette horrible journée en matant quelques épisodes de Kaeloo avec Simba.

Seulement, là, maintenant, je ne pouvais pas. Je n'empruntais même pas la route de ma maison. Mon cœur blessé guidait mes jambes vers son hôpital. Vers notre parc. Dans les poches de mon sweat, mes poings se sont  serrés . Mathis a reconnu le chemin que je traçais. C'est sûr. C'est pour ça qu'il me suivait en silence à présent.

Mon cœur et mon cerveau se disputaient un combat acharné dans mon corps et embrouillait le flux de mes pensées. L'un voulait que Mathis parte, qu'il me laisse et qu'il arrête de rouvrir les plaies. L'autre voulait qu'il s'accroche, qu'il insiste qu'il fasse tomber les murs érigés autour de mon cœur déjà bancals à cause de sa présence.

Le parc s'est dessiné au loin, éclairé par la lumière de quelques lampadaires. Le ciel s'était entièrement revêtu de son voile sombre trouées pars quelques étoiles.

Je me suis souvenue de la grande dispute et mon cerveau m'a donné raison de le fuir.

Je me suis souvenue de l'éclat de nos rires, la joie que peignait nos sourires et des liens de notre trio et mon cœur m'a fait ralentir.

J'ai maudit six millions de fois mon cœur de prendre le contrôle quand je me suis laissé tomber sur l'un des bancs défraîchis du parc, à l'ombre d'un arbre dévêtu. Ma main alourdie par la fatigue et par ce tourbillon de pensées amères, a essuyé mollement les larmes qui s'échappaient de mes yeux. Mathis s'est posé silencieusement à côté de moi et souffle. Son parfum a atteint mes narines et je n'ai pas reconnu l'odeur. Il l'avait changé. Finie l'époque où il n'utilisait que de l'eau de Cologne. Mes lèvres se sont pincées en sentant son regard sur mon visage. Douleur. Douleur. Douleur. À quoi pensait-il là, tout de suite ? Après tout, j'avais carrément fondu en larmes en le voyant si joyeusement rire avec Soraya. Il m'avait vu. J'avais fui. Il m'a poursuivi. Et voilà où j'en étais : avec lui.

Ses grands yeux marrons ont glissé sur mes yeux rougis, mes joues trempées, mes immenses cernes témoins de mes nuits d'insmonie et mes lèvres gercées par le froid. Mon sweat-shirt ne me protegeait pas assez. J'avais l'air pathétique. Le voyait-il ? Sûrement. Mathis a eu pitié de moi. C'est pour ça qu'il m'a couru après.  Pour se donner bonne conscience. Pas parce qu'il s'inquiétait. Il a toujours été le plus attentionné de nous trois. Soraya m'a aussi vu. Elle ne m'a pas suivi. Soraya détestait les faux-semblants. Elle ne serait pas venue faire comme si elle tenait encore à moi.

Je ne comptais plus pour eux. Ça devrait être la même chose pour moi. Alors, pourquoi je m'étais suis sentie aussi seule, vide et exclue quand j'ai vu l'éclat de leurs rires ? L'éclat des miens avait tout bonnement pali face aux tiens. Pourquoi leur complicité avait fait tordre mon cœur de douleur et de jalousie ? Pourquoi je m'étais sentie aussi inutile en voyant qu'il n'avait pas besoin de moi pour être heureux ? Qu'il avait facilement remonté la pente, contrairement à moi qui traînait encore en bas ? Pourquoi ce manque dans mon estomac avait semblé s'agrandir ? Pourquoi j'avais craqué ? Pourquoi je n'avais pas pu les ignorer comme ces deux dernières années ? 

J'ai soupiré. Mon regard s'est échoué sur le combat que menait mes converses contre un vieux tas de feuilles mortes. J'ai serrée mon sweat contre moi, pensé aux absurdités de Moignon. Je me suis sentie un peu plus calmée.

- Caro, a commencé la voix calme de Mathis, regarde-moi.

Mon corps s'est raidit en entendant Mathis. La sonorité de sa voix a résonné longuement dans ma tête et mon cerveau s'est amusé à comparer l'ancienne que je connaissais par cœur, à la nouvelle dont je ne savais presque rien. Elle avait des intonations plus graves et un léger accent anglais, presqu'imperceptible. J'ai deviné qu'il avait dû reprendre les cours à domicile. Sans nous. Le sens de ses paroles m'est ensuite venu et mon ventre s'est noué .

- Non.

C'est tout ce que j'ai répondu . J'ai eu peur de ne pas pouvoir conserver le calme de ma voix si j'avis ajouté autre chose alors, j'ai fait court. Ça fait deux ans que nous n'avions pas échangé. Ça faisait bizarre.

- Caro ...

- Je t'ai déjà dit de ne pas m'appeler comme ça ! Et puis, laisse-moi tranquille.

Mathis a soupiré . Ses épaules ont claqué contre le dossier du banc. Moi, je suis resté raide comme un piquet à fixer bêtement le sol comme un enfant têtu à qui on faisait bêtement la morale.

- Non. J'ferais pas ça. Si tu veux, je peux arrêter de t'appeler Caro, mais je te laisserai pas seule.

- J'ai pas besoin de ta pitié, Mathis.

- C'est pas par pitié que je t'ai suivi.

Et là, mon cœur a raté un battement et mes yeux ont accroché les siens. Mes sourcils se sont froncés, mes iris ont luit. C'est pas par pitié. Ces mots ont résonné . J'étais soulagée.

- Écoute, Caro ... line. Quand je t'ai vu pleurer, je me suis dit qu'en nous voyant tu t'étais sentie mal et seule. Qu'peut-être que toi aussi, t'avais ce vide dans le bide depuis cette dispute et je me suis dit qu'il était pas encore trop tard pour recoller les morceaux.

Une lueur de tristesse a peint les traits de Mathis. Il a posé sa paume contre son visage et ses coudes sur se genoux. La pensée que Mathis ait pu aussi souffrir de notre séparation m'a soulagé. Je me sentais comprise. Recoller les morceaux. Ces mots ont rebondis contre les parois de mon cerveau. En avais-je envie ? En avais-je la force ? En avais-je le temps ? Recoller les morceaux, c'était aussi leur pardonner tous les mots qu'ils m'avaient crachés à la figure et leur absence ce jour-là. La réalité et les blessure sont réapparues plus vives. Plus fortes. Et je me suis souvenue qu'ils m'avaient trop blessé et que je n'étais pas prête à l'accepter.

- Où est Soraya ?

Mathis a immédiatement levé  la tête et détourné les yeux, suite à ma question. Mon regard à voulu paraître dur. Rude.

- Elle était ... Elle devait ... Elle est ...

- Pas là, je termine. Et elle ne  voulait pas être là. Tout comme moi, je ne veux pas de ta présence ici. On ne peut pas recoller ou  réassembler les morceaux d'un puzzle si on a pas toutes les pièces, Mathis. Faut que tu le comprennes.

À la suite de mes paroles, j'ai vu les lèvres de Mathis se pincer et son regard se voiler. Je me suis tout de suite relever et est décidée de rentrer sans un autre regard pour lui. Sur le chemin du retour, j'ai encore pleuré. Les plaies se sont réouvertes. J'ai repensé à tous nos moments heureux et mon cœur s'est serré en revoyant les mauvais. C'était comme ça avec moi. Bonheur suivait toujours tristesse et jamais l'inverse. Le trou noir dans mon cœur absorbait tous les rares moments de joie. Sans mon accord. Le visage triste de Mathis est réapparu dans mon esprit. Mon ventre s'est noué de culpabilité. Je ne pouvais pas gommer la grande dispute. Elle était apparu à un moment de ma vie que je ne pouvais ignorer. Mahtis et Soraya m'avaient lâché au pire moment. Ça se pardonnait pas en deux ans.

C'était sur ses pensées amères, que je marchais tête baissée, joues trempées et intérieur de la joue presque arraché. Je n'ai pas vu cette fille s'arrêter en me voyant. J'ai juste senti un liquide froid s'écouler sur mon visage et se répandre dans les cheveux.

Outrée, surprise, choquée, j'ai levé la tête vers la fille qui se tenait en face de moi, une cannette dans une main et l'autre plaquée sa bouche. La première pensée qui m'est venue en voyant ses cheveux roux tout emmêlés, sa jupe qui semblait mise à l'envers et les paillettes multicolores sur ses joues a été : bizarre. Ensuite, quand j'ai glissé ma paume sur mon visage pour me débarrasser du jus et que je me suis rendue compte de l'état de mes cheveux, je me suis demandée comment une si petite bouche était arrivée à contenir tout ça. Car oui, il était clair que cette fille avait recraché l'intégralité de sa boisson sur moi. Le pire, c'est qu'elle avait pas l'air du tout désolé.

- Underbarch ! s'est-elle exclamée en me prenant soudainement les mains.

Ses mains étaient chaudes malgré le vent glacé et l'éclat azuré de ses yeux était renforcé par la lumière du lampadaire en dessous duquel nous étions.

Merde, mais sur quelle folle j'étais tombée ?

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Salutations. Bienvenue sur ce premier chapitre. Caro m'avait vraiment manqué pas vous ?

Vos impressions sur ce premier chapitre pas du tout corrigé  ?

- Que pensez vous de Mathis ?

- " Caro ?

- Des conseils ?

- Des remarques ?

-  Qui est cette fille bizarre d'après vous ? 

Et une question pour apprendre à se connaître :

- C'est quoi votre couleur préféré? 

Sur ce, je vous dis bye.

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