XXIII.
— Et si nous nous accordions un moment de détente ? Un bon café fera du bien à notre invité. N'est-ce pas, Noa ? suggère Nicole, maternante.
— Oui, réponds-je du bout des lèvres, tandis qu'Elio, protecteur, retire son bras de mes épaules pour se charger des valises dans le coffre.
Entrer dans leur foyer me donne immédiatement l'impression que je vais en apprendre davantage sur Elio. Pendant l'absence du brun, je suis sa mère à travers leur maison jusqu'à un salon spacieux, chargé d'histoires personnelles. Des photos familiales retracent le parcours du brun, de l'enfance à aujourd'hui, et montrent aussi l'évolution de ses parents, dont les premières photos de couple remontent à leur adolescence.
La décoration en bois, bien que vieillie, crée une atmosphère chaleureuse et reflète des moments partagés en famille. Il semble que rien n'a été changé depuis l'enfance d'Elio, sans doute pour préserver les souvenirs qui leur sont chers en ces lieux.
Soudain, je remarque un homme d'une quarantaine d'années assis dans un fauteuil en cuir. La ressemblance avec mon colocataire est frappante, de leur teint doré à leurs cheveux d'ébène soyeux. Cependant, chez celui que je devine être le père d'Elio, des mèches poivre et sel ajoutent une subtile empreinte de maturité à sa chevelure. Sa mâchoire ciselée, réplique parfaite de celle de son fils, accentue sa virilité. Son allure distinguée et son charisme naturel m'impressionnent à tel point que je deviens livide, et je ne doute pas qu'il s'en aperçoive.
Pourtant, il se lève et s'approche de moi en souriant. Une main tendue, il me surplombe d'une bonne tête.
— Tu es Noa, c'est ça ?
L'instant suspend mon souffle. Ma gorge se serre, enserrant mes émotions face à cet homme, incarnation paternelle. Contrairement à mon propre père, il se révèle chaleureux et démonstratif. Sa main tendue, accueillante, met quelques secondes à capturer la mienne. Sa poigne est ferme, contrastant avec ma nervosité, bien qu'il semble ne pas m'en vouloir, souriant avec bienveillance.
— Oui, monsieur, soufflé-je difficilement.
— Pas de monsieur ici, tu peux m'appeler par mon prénom. Moi, c'est Michel.
Invité à m'installer sur un canapé douillet, je suis aussitôt enveloppé par des regards compréhensifs. Chaque moment sans Elio se transforme en supplice, une angoisse s'accrochant à mon être. En réalité, mon anxiété semble infondée, car Elio a l'air d'appartenir à une famille d'une bienveillance exemplaire.
Aucune mention n'est faite de l'état douloureux de mon visage, comme si ces marques étaient de simples détails sans importance. Je suis même traité avec une affection particulière, comblé de soins alors qu'un café fumant et une part de gâteau sont délicatement présentés devant moi. La mère d'Elio tente de me mettre à l'aise en déversant un flot de paroles auxquelles je n'arrive pas à prêter attention.
Soudain, le canapé s'enfonce près de moi. La présence rassurante de mon colocataire apaise instantanément mes inquiétudes. Avec une douceur qui ne m'échappe pas, il récupère mon assiette, restée intacte jusqu'à présent, et me la tend.
— Allez, prends une bouchée.
Du bout de ma fourchette, je capture un morceau de pâtisserie que je porte à mes lèvres.
Mes yeux croisent soudain ceux de la mère du latino, dont le sourire s'épanouit avec une telle chaleur que deux fossettes adorables apparaissent dans ses joues. Elle me lance alors avec sincérité :
— Tu ne peux pas imaginer à quel point je suis ravie qu'Elio t'ait emmené avec lui.
Michel, que je vois du coin de l'œil, clairement conscient de l'impact des mots de son épouse, approuve chaudement. L'émotion me submerge face à la profondeur et à la gentillesse de ses paroles. Je réalise soudain que je ressens également de la joie à être ici, même si le stress persiste dans mes sentiments. La perspective de m'éloigner de mon quotidien promet d'être agréable, mais c'est surtout le fait d'être aux côtés d'Elio et de ses parents, dans un cadre familial empreint de bonheur, qui me procure une satisfaction particulière.
Et au plus profond de moi, dans un coin secret de mon cœur, l'éventualité d'être en tête-à-tête avec mon colocataire, d'avoir l'occasion de nous rapprocher et de nous découvrir mutuellement, emplit mon être d'un plaisir coupable.
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