Je marche dans les rues pavées de Lugnica, repensant à cette rencontre étrange avec Lia et Puck. Leur sérieux, leur coordination, et surtout la question obsédante qu'elle m'a posée. Une fille aux cheveux dorés et aux yeux rouges... Tout porte à croire qu'elle appartient à la famille royale, mais quelque chose cloche.

Pourquoi une fille de sang royal volerait-elle ?
La question tourne et retourne dans mon esprit comme une pièce lancée en l'air.
À moins qu'elle ne soit pas une voleuse de son plein gré... Peut-être a-t-elle été kidnappée à la naissance ? Mais alors, pourquoi se serait-elle retrouvée à commettre des crimes ?

Cela me rappelle des récits que j'ai lus, des histoires où un enfant enlevé est élevé dans un environnement criminel. Dans mon monde, les criminels ne sont pas toujours des monstres sans cœur. J'ai vu des Yakuza traiter leurs protégés avec plus de respect et d'humanité que des parents biologiques. Peut-être est-ce un cas similaire.

Je jette un coup d'œil à mon téléphone : 14 h 15.

---

Soudain, je vois une petite fille, vêtue d'une robe rose, marcher maladroitement à l'entrée des bidonvilles. Elle a l'air perdue, son regard paniqué cherchant quelqu'un.

Un frisson glacé me parcourt. Un homme gras, au visage huileux et aux yeux vicieux, avance vers elle, son sourire malsain m'indiquant clairement ses intentions.

Ma mâchoire se serre. Un déchet humain.

Je m'approche calmement de la fillette, affichant un sourire rassurant.

- Hé, petite, on va jouer à un jeu. Tu veux ?

Elle hoche la tête, les larmes aux yeux.
- Oui...

Je lui montre ma main.
- Ferme les yeux pendant cinq secondes, d'accord ? Et ne triche pas !

Elle obéit sans poser de questions, ses paupières se refermant aussitôt.

---

Une seconde.
Je me glisse entre elle et l'homme.

Deux secondes.
Je tends la main et attrape la tête de cet être abject.

Trois secondes.
Avec une force mesurée, je l'écrase contre le mur adjacent. Un craquement sourd retentit. Pas mortel, mais suffisant pour qu'il ne tente plus jamais quoi que ce soit.

Quatre secondes.
Je traîne son corps inconscient vers un tas d'ordures à proximité et nettoie rapidement les traces visibles de ce bref affrontement.

Cinq secondes.
Je suis de retour devant la petite fille, mon sourire intact.

- Tu peux ouvrir les yeux maintenant.

Je commence à faire le clown, agitant les bras et tirant une grimace. Elle éclate de rire, son visage s'illuminant.

---

Alors que je la ramène vers une zone plus sécurisée, je reconnais une silhouette familière. Le marchand musclé chez qui j'ai acheté mes pommes.

Il court vers nous, le visage inquiet, et prend la petite dans ses bras.
- Ma fille ! Je te cherchais partout !

Je souris légèrement.
- Elle était à l'entrée des bidonvilles. Un mauvais endroit pour une petite fille seule.

Il me regarde avec gratitude, une main massive se posant sur mon épaule.
- Merci, jeune homme. Si je peux faire quelque chose pour toi, dis-le.

Je profite de l'occasion.
- Vous avez vu une fille aux cheveux dorés et aux yeux rouges ?

Il réfléchit une seconde, puis hoche la tête.
- Oui, je crois qu'elle s'appelle Felt. Si mes souvenirs sont bons, elle traîne souvent du côté de la Maison du Butin.

La Maison du Butin. Cela ressemble à une cache de voleurs ou un repaire de criminels. Intéressant.

---

Je souris au marchand.
- Merci pour l'information.

Il me tend un petit sac rempli de pommes.
- Prends-les. C'est un cadeau pour m'avoir ramené ma fille saine et sauve.

Je prends le sac, hochant la tête.
- Sachez, monsieur, que je reviendrai sûrement vous voir. Vos pommes sont délicieuses.

Sa fille me remercie timidement avant que je ne m'éloigne, le sac de pommes en main.

---

Alors que je marche dans les rues, mon esprit travaille à plein régime. Une fille aux cheveux dorés et aux yeux rouges nommée Felt, un repaire de voleurs nommé la Maison du Butin... Tout cela commence à prendre forme.

Mais la véritable question reste : pourquoi Lia et Puck la recherchent-ils ?
Ont-ils des intentions nobles ou quelque chose de plus sombre ?

Je dois en avoir le cœur net.

Pour cela, je vais devoir trouver Felt.

Je me tiens devant une bâtisse délabrée, encaissée dans les ruelles tortueuses des bidonvilles. La fameuse Maison du Butin. Plutôt qu'un repaire sordide de voleurs, elle ressemble à une boutique clandestine, un endroit où le "loot" volé change de mains contre de l'argent sale.

Les murs sont couverts de graffitis, et une odeur de métal et de bois humide flotte dans l'air. Un commerce discret, mais bien rodé.

Je prends des notes mentalement : emplacement stratégique, mais vulnérable à une descente si les autorités décidaient d'intervenir. Cela montre que ceux qui tiennent cet endroit doivent avoir des connexions solides avec les forces locales.

---

Les questions pour entrer

Je frappe à la porte. Un silence s'installe, brisé par une voix grave et éraillée, semblable à celle d'un géant de conte de fées.

- Pour les rats ?

Sans hésiter, je réponds :
- Poison.

Dans mon monde, les rats se tuent généralement avec du poison. Cette réponse devrait fonctionner ici aussi.

La voix reprend, méfiante mais patiente :
- Pour la baleine ?

Je m'arrête une fraction de seconde. Les baleines... Ce sont des créatures massives. Que chasse-t-on ces bêtes-là ?
Je me souviens alors des documentaires sur les océans qu'Hakurei m'a forcé à regarder. Une image d'un harpon géant me revient en mémoire.

- Harpon, dis-je calmement.

Un long silence s'installe, puis la voix gronde à nouveau :
- Pour le vénérable Grand Dragon ?

Ah, voilà la question piège. Le Grand Dragon de Lugnica, Volcanica. Un être divin, une figure mythique.

Dans mon monde, dans les bidonvilles, les gens rejettent souvent leurs dieux, les accusant de ne jamais intervenir dans leurs souffrances. Ces gens doivent avoir la même rancune envers Volcanica. Je dois jouer sur leur ressentiment.

- Des sacs à merde, lâché-je sans hésitation.

Il y a un moment de flottement, puis un rire gras et rauque retentit derrière la porte.
- T'as l'esprit tordu, gamin. Entre donc.

---

La porte grince en s'ouvrant, révélant un intérieur sombre mais organisé. Des étagères remplies d'objets divers : armes, bijoux, tissus rares, et même des grimoires que je soupçonne d'être magiques.

Tout ici respire le vol.

Au centre de la pièce, je remarque deux figures principales.

La première est une jeune fille à l'apparence espiègle, Felt. De courts cheveux dorés en bataille, des yeux rouges brillants d'intelligence et de défi. Elle est petite, mais sa posture dégage une assurance qui compense largement.

La deuxième est un homme massif, presque un géant, mais pas tout à fait. Son visage est marqué par des cicatrices, et ses bras sont aussi épais que des troncs d'arbre. Un demi-géant, sans aucun doute.

Il me fixe avec suspicion, croisant ses bras imposants.
- Qu'est-ce que tu veux, gamin ?

---

Entrer dans le jeu

Je ne mentionne pas Lia ni Puck pour l'instant. Si Felt et ce demi-géant ont effectivement volé un objet de grande valeur, il est probable qu'ils aient déjà un acheteur en tête. Je dois jouer avec prudence.

Je pose mon sac au sol, levant les mains en signe de paix.
- Je cherche à acheter des informations... et peut-être quelques objets.

Felt me dévisage, son sourire malicieux s'élargissant.
- Les informations, ça coûte cher. T'as de quoi payer ?

Je sors discrètement la bourse que m'a donnée la mère dans la matinée, en montrant juste assez de pièces pour attirer leur intérêt.
- Je ne suis pas venu les mains vides.

Elle jette un coup d'œil au demi-géant, qui hoche la tête, apparemment satisfait.

- Alors, parle. T'es qui, et qu'est-ce que tu veux ?

---

Gagner leur confiance

Je décide de leur donner une version édulcorée de mon histoire.
- Je suis un voyageur. Je viens d'arriver en ville et je cherche à me faire une idée des lieux... et des gens qui y vivent. On m'a dit que vous pourriez m'aider.

Le demi-géant ricane.
- Un gamin bien habillé qui se perd dans les bidonvilles, ça sent l'embrouille.

Felt, elle, semble intriguée.
- Qu'est-ce qui te fait croire qu'on a envie de t'aider ?

Je souris légèrement.
- Parce que vous aimez l'argent. Et je suis prêt à payer pour les bonnes informations.

Elle plisse les yeux, méfiante, mais intéressée.
- Quels genres d'infos ?

Je choisis mes mots avec soin.
- Je cherche à comprendre les forces en jeu ici. Les alliances, les conflits, les opportunités. En bref, je cherche à m'intégrer.

Felt éclate de rire.
- T'intégrer ? Dans les bidonvilles ? Bonne chance.

---

Un marché silencieux

Alors que je parle, mes yeux balayent discrètement la pièce. Je cherche un indice, un objet, quelque chose qui pourrait confirmer que Felt a bien volé ce que Lia et Puck cherchent.

Et là, sur une table près du mur, je remarque une boîte finement sculptée, ornée de motifs complexes. Un éclat d'or en dépasse légèrement. Un sceau royal.

Mon cœur rate un battement. C'est ça.

Mais je garde mon calme. Je ne dois pas montrer que j'ai repéré l'objet.

---

La première étape du plan

Je regarde Felt dans les yeux.
- Très bien, que diriez-vous de commencer par un échange ? Vous me donnez des infos utiles, et je vous paie en retour.

Elle hausse un sourcil, amusée.
- Et si je te donne des infos bidons ?

Je souris.
- Alors je reviendrai, et je demanderai un remboursement... avec intérêts.

Le demi-géant éclate de rire, tandis que Felt me dévisage, évaluant ma détermination.

- D'accord, dit-elle enfin. Pose tes questions.

Je commence par des questions générales sur Lugnica, les factions en présence, et les dangers des bidonvilles. Pendant qu'elle répond, je continue d'observer discrètement la boîte sur la table.

Il est clair qu'elle ne compte pas me parler de ce vol. Si je veux récupérer cet objet, je vais devoir la jouer fine.

---

La partie est lancée

Après avoir obtenu des informations basiques, je me lève, feignant de ranger mes affaires.

- Merci pour votre aide. Je reviendrai peut-être si j'ai besoin de plus d'infos.

Je fais quelques pas vers la sortie, mais je m'arrête brusquement.

- Oh, une dernière chose... Je cherche un bijou spécifique. Une pièce rare, ornée d'un sceau royal. Vous sauriez où je pourrais trouver ça ?

Felt se fige, son sourire disparaissant instantanément.

- Pourquoi tu cherches ça ? demande-t-elle d'une voix froide.

Je hausse les épaules, feignant l'innocence.
- On m'a dit que ça pourrait valoir une petite fortune.

Le demi-géant avance d'un pas, son regard devenant menaçant.
- Et qui t'a dit ça ?

Je croise les bras, fixant Felt droit dans les yeux.
- Juste des rumeurs. Mais si vous ne savez rien, je chercherai ailleurs.

Un silence tendu s'installe. Felt échange un regard avec le demi-géant, puis elle se met à rire.

- T'es intéressant, toi. Mais fais attention où tu mets les pieds.

Je leur rends un sourire tranquille.
- Merci du conseil.

Alors que je sors de la Maison du Butin, une chose est claire : ils savent exactement de quoi je parle.

La partie vient de commencer.