Cela faisait une bonne heure que Stella et Nox se promenaient quand ils se décidèrent à rentrer. À peine arrivés au camp, ils croisèrent Angel. Celui-ci s'apprêtait à les aborder, mais il se stoppa net en croisant le regard froid de Stella. Toujours perturbée par la révélation qu'il lui avait faite le matin même, elle détourna immédiatement les yeux. Visiblement embarrassé, Angel paraissait sur le point de faire demi-tour lorsque Nox l'interpella.

—Angel ! Tout va bien ? demanda-t-il en voyant la mine ennuyée de son ami.

Ce dernier se racla la gorge et hocha la tête.

—Oui. J'aurais aimé te parler, mais je ne veux pas vous déranger.

Nox lança un regard hésitant à Stella, comme pour voir ce qu'elle en pensait.

—Vas-y si tu veux.

—Tu es sûre ? s'étonna-t-il.

—Certaine.

Elle afficha un grand sourire et se dressa sur la pointe des pieds pour déposer un baiser sur ses lèvres.

—Tu peux y aller, insista-t-elle. On se verra plus tard.

Nox avait l'air perplexe, mais le visage détendu de Stella finit de le convaincre.

—D'accord. À tout à l'heure, alors, dit-il avant de suivre Angel.

Stella les observa s'éloigner, et lorsqu'ils furent assez loin d'elle, son sourire disparut.

Nox avait passé l'après-midi à lui demander si elle allait bien, et elle avait eut du mal à le convaincre que oui. En vérité, elle se sentait étrange depuis l'incident de l'étang. Elle était en pleine forme et bouillonnante d'émotions en même temps.

Elle se mit en marche d'un pas ferme et se dirigea vers les plantations. À cette heure-ci de l'après-midi, quand le soleil tapait aussi fort, la plupart des habitants allaient se réfugier dans leurs cabanes. Cependant, Stella était à peu près sûre que Venus était encore dehors.

Comme elle s'y attendait, elle la trouva en train d'arroser les plants de tomates.

Bien qu'elle avait fait de son mieux pour que cela ne se remarque pas, elle était en colère. Sans compter ses inquiétudes quant à l'enfant à venir, la conversation qu'elle avait entendue entre Nox et Venus la mettait hors d'elle. Elle n'avait aucun doute sur les sentiments de Nox et elle pouvait imaginer la raison qui l'avait poussé à lui mentir, seulement elle était irritée qu'il ne lui en ai pas parlé quand elle lui avait tendu la perche. Mais ce n'était après lui qu'elle en avait. Non, celle qui alimentait sa fureur ce jour-là, c'était Venus.

Elle se rapprocha de la fautive et se planta derrière elle, attendant patiemment qu'elle la remarque.

Venus se retourna et sursauta brusquement.

—Stella ! s'exclama-t-elle en portant la main à son cœur. Tu m'as fait une de ces peurs !

Stella esquissa un sourire.

—Désolée, ce n'était pas mon but.

—Je voulais m'excuser pour tout à l'heure, enchaîna Venus. Je n'aurais pas dû te laisser dans l'eau alors que tu ne sais pas nager.

Le sourire de Stella se crispa.

—C'est rien. C'est déjà oublié.

Elle se balançait doucement d'une jambe à l'autre, les bras croisés derrière le dos. Son air innocent l'énerva encore plus, mais elle se retint de le montrer.

—Quand je me suis promenée avec Nox tout à l'heure, je suis tombée pas mal de plantes que je n'avais jamais vue. Je ne connais aucun de leur nom. Tu ne voudrais pas y retourner avec moi ?

Venus sembla surprise par sa demande mais accepta volontiers. Elles sortirent du camp, Stella marchant en tête.

—Je suis rassurée que tu ne m'en veuilles pas, lui dit Venus alors qu'elles s'enfonçaient dans la forêt.

Le sang battant fort dans ses tempes, Stella faisait de son mieux pour ne pas exploser tout de suite. Elle se fichait qu'elle l'ait laissée dans l'eau. Mais si Venus pensait qu'elle allait lui pardonner d'essayer de séduire Nox derrière son dos, elle se mettait le doigt dans l'œil. Gardant ses pensées pour elle, Stella se contenta d'avancer, les yeux rivés en face d'elle.

—Tu me connais, répondit-elle d'un ton qu'elle espérait désinvolte, je ne suis pas du genre rancunière.

Elles arrivèrent finalement à leur destination. C'était une petite clairière baignée de lumière et bordée de plantes en tout genre.

—C'est là, dit Stella.

Venus s'arrêta à son tour et jeta un coup d'œil autour d'elle.

—Je ne crois pas être déjà venue ici. Enfin, je reconnais le coin, mais je ne m'y suis jamais attardé.

La jeune fille ne répondit rien.

Venus reporta son regard vers le bas, observant la flore autour d'elle.

—Je ne savais pas que tu t'intéressais aux fleurs, commenta-t-elle.

Stella haussa les épaules.

—J'aime surtout la symbolique qu'il y a derrière. Tu vois les celles à picots bleus ? rajouta-t-elle en les montrant du doigt.

Venus se rapprocha de ce que Stella lui désignait et s'accroupit pour mieux les observer.

—Tu sais ce que c'est ? lui demanda son amie.

—Aucune idée, avoua Venus. À vrai dire, je ne m'y connais pas trop d'une manière générale.

Derrière elle, Stella scrutait le sol du regard. Elle finit par apercevoir une épaisse branche qui reposait par terre et la prit dans ses mains.

—Ce sont des chardons, expliqua-t-elle en soupesant le morceau de bois. Tu sais quelle est leur symbolique ?

—Non, laquelle ?

Elle se rapprocha de Venus qui lui tournait toujours le dos et c'est d'une voix froide qu'elle répondit :

—La vengeance.

Sans plus attendre, elle abattit la branche sur le dos de la jeune femme. Venus s'écroula par terre dans un cri et tourna la tête vers elle, l'air perdu.

—Stella ! Qu'est-ce que tu fais ?

Ignorant sa question, elle brandit de nouveau son arme et Venus se recula de justesse, laissant la branche heurter la terre dans un bruit sourd.

—Je croyais que l'on était amies ! cria Stella.

Toute la colère et l'anxiété qui s'étaient accumulées en elle ces dernières vingt-quatre heures ressortaient enfin, et elle avait décidé de les laisser librement s'exprimer. Ignorant sa raison, elle s'abandonna à la fureur qui lui broyait le ventre et à la migraine qui lui vrillait le crâne.

—Tu sais ce que c'est l'amitié, Venus ? hurla-t-elle en la menaçant de nouveau.

Venus reculait du mieux qu'elle pouvait, tentant d'éviter ses coups, et rétorqua :

—Oui, et je suis à peu près sûr que ça n'inclut pas les tentatives de meur- Ah !

Elle poussa un cri de douleur quand la branche atteignit son bras.

—Et tu sais ce que ça n'inclut pas, non plus ? Essayer de briser un couple ! cracha Stella.

Les yeux de Venus s'agrandirent d'un coup.

—Quoi ? Mais... Je... je n'ai jamais essayé de...

—Menteuse !

Elle tenta de nouveau de la frapper mais la jeune femme esquiva au dernier moment.

—J'ai entendu ta conversation avec Nox, tout à l'heure !

Venus écarquilla encore plus ses grands yeux bleus.

—Oh non, murmura-t-elle.

—Ma relation avec Nox est la seule chose qui va dans ma vie ! (Elle resserra sa prise sur son arme, ignorant les échardes qui lui rentraient dans les mains.) Comment est-ce que tu peux songer à me le voler alors qu'il est tout ce que j'ai ?

Venus tenta de reculer de nouveau, craignant le prochain coup, mais elle buta contre un arbre.

—Stella, attends ! s'écria-t-elle en protégeant son visage à l'aide de ses bras. C'est pas Nox qui me plaît, c'est toi !

Stella s'arrêta net, stupéfaite.

—Quoi ?

—C'est toi, répéta-t-elle en baissant prudemment ses bras.

Le visage inondé de larmes, elle fixait Stella d'un air apeuré. Toute la fureur de cette dernière retomba d'un coup. Elle posa son regard sur la branche qu'elle tenait à la main et la lâcha aussi brusquement que si elle l'avait brûlée. Ses yeux se posèrent sur son amie recroquevillée par terre, et elle sentit son ventre se tordre. Qu'est-ce qui lui avait pris ? Elle se passa une main sur le visage, horrifiée par son soudain excès de violence. La dernière fois qu'elle avait perdu le contrôle de cette manière, elle s'en était pris à Vera. Et elle avait tué Latro.

—Désolée, s'excusa-t-elle d'une voix tremblante. Je crois... je crois que je me suis un peu emportée.

—Oh, vraiment ? ironisa Venus en se redressant.

Elle épousseta ses vêtements et frotta son bras endolori. Stella s'approcha d'elle, inquiète.

—Est-ce... Est-ce que je t'ai fait mal ? balbutia-t-elle.

Venus la toisait, les sourcils froncés, visiblement perplexe face à ses brusques sautes d'humeur.

—Un peu... Enfin... Tu m'as frappée plusieurs fois, quoi. Avec un bâton.

—Je suis désolée, répéta-t-elle. Je ne voulais pas te faire de mal, je ne sais pas ce qui m'a pris...

Venus haussa les épaules d'un air détendu, bien que ses yeux trahissaient son trouble.

—Je sais pas, je suppose qu'on se rapproche de la mauvaise période du mois, hein ? tenta-t-elle de plaisanter.

Stella laissa échapper un rire, mais le cœur n'y était pas.

—Ouais, ça doit être ça. Ça, et le fait que j'ai vraiment cru que tu voulais semer la zizanie dans mon couple.

Venus se mordit la lèvre et ses yeux se mirent à briller.

—Je suis désolée, s'excusa-t-elle à son tour. Je n'ai jamais vraiment eu l'intention de briser ton couple. Mais... (Elle leva les yeux au ciel pour retenir ses larmes.) Ça faisait longtemps que je n'avais pas eu des sentiments pour quelqu'un. Alors quand je te vois avec Nox... Je crois que ça me rend jalouse.

Elle essuya ses joues humides d'un coup de main et renifla.

—S'il te plaît, Stella, dis-moi quelque chose.

Stella avait du mal à réfléchir. Son esprit était embrumé et elle secoua la tête dans l'espoir de remettre ses idées en ordre.

—Qu'est-ce que tu veux, Venus ? Qu'est-ce que tu attends de moi ?

La jeune femme s'approcha d'elle et prit ses mains dans les siennes.

—Je veux juste qu'on soit amies. Je sais que je n'aurai jamais rien de plus, de toute façon. Je n'essaierai pas de vous séparer, Nox et toi ! Je te jure.

Venus planta ses yeux dans les siens et la regarda d'un air suppliant.

—Je ne veux pas te perdre, murmura-t-elle.

Stella était troublée par la situation. Jamais elle n'aurait imaginé que Venus puisse ressentir ce genre de chose à son égard. Mais quelle que soit la nature de ses sentiments, elle ne voulait pas perdre son amitié. C'était sa seule véritable amie, et elle tenait à elle.

Elle serra les mains de Venus et souffla :

—Tu ne vas pas me perdre. On est toujours amies, d'accord ?

Venus esquissa un sourire de soulagement et son visage se détendit.

C'est à ce moment précis qu'une détonation retentit, aussi soudaine qu'assourdissante. Le temps que Stella comprenne ce qu'il venait de se passer, il était trop tard : un filet de sang s'échappa de la bouche de Venus et celle-ci s'écroula sur la jeune fille, l'entraînant avec elle. Stella referma les bras autour de son amie pour amortir sa chute, et une vague de panique l'envahit quand elle sentit le sang chaud couler entre ses doigts.

—Venus ? s'étrangla-t-elle.

Elle la fit s'allonger sur le sol et étouffa un cri en apercevant la tâche sombre sur sa poitrine.

Venus la regardait, ses pupilles dilatées par la peur et la respiration sifflante.

—Oh, non, Venus, sanglota Stella. Tiens bon, tiens bon...

Elle serra sa main dans la sienne, complètement perdue. Trop perturbée pour se demander d'où était parti le coup, elle regardait son amie sans savoir quoi faire.

—Stella, articula difficilement Venus. Stella... derrière toi...

Elle n'eut pas le temps de comprendre le sens de ses paroles qu'elle sentit quelqu'un l'attraper par-derrière et lui plaquer un mouchoir contre le visage. Elle tenta de se débattre, affolée, mais les bras qui la maintenaient la serrait comme un étau. N'en pouvant plus, elle ne put s'empêcher de respirer et sombra immédiatement dans un profond sommeil.

* * *

Après avoir laissé Stella, Nox avait suivit Angel à l'écart. Celui-ci lui avait parlé de la discussion qu'il avait eu le matin-même avec la jeune fille, visiblement inquiet de sa réaction.

—Je ne pensais pas qu'elle réagirait comme ça, avoua-t-il. Je ne lui aurais pas dit, sinon.

Nox se passa la main dans les cheveux, gêné. D'une certaine manière, c'était de sa faute. Après tout, c'était lui qui avait attisé la curiosité de Stella.

—Ce n'est pas si surprenant que ça, dit-il. Tu connais un peu son passé, non ? Elle en a subit des injustices. Savoir que tu en as commis du même genre, c'est normal que ça la chamboule.

Angel serra les mâchoires.

—Injustice ? Alors quoi, toi aussi tu t'y mets ?

Nox poussa un long soupir.

—Angel... On est amis. Ce que tu as fait dans le passé ne change pas l'opinion que j'ai de toi aujourd'hui. Mais tu dois admettre que ce que tu as fait à cette fille... (Il ne termina pas sa phrase.) Peut-être que le meurtrier de Tragedia méritait de connaître la même souffrance que toi. Mais sa sœur ne méritait certainement pas de mourir pour assouvir ta vengeance.

Nox fixait son ami d'un air grave, espérant qu'il comprenne ce qu'il cherchait à lui dire.

—Je sais, avoua-t-il finalement.

—Alors dis-le à Stella. C'est tout ce qu'elle a besoin d'entendre. Savoir que tu as conscience d'avoir fait quelque chose de mal.

Angel hocha lentement la tête.

—Je sais que c'était mal. Mais je le referais sans hésiter.

Nox souffla, découragé.

—Eh bien, ça, évite de lui dire. Sinon, tu peux être sûr qu'elle ne t'adressera plus jamais la paro...

Un bruit sourd retentit au loin, l'empêchant de terminer sa phrase. Nox se redressa brusquement, aux aguets.

—Qu'est-ce qu'il y a ? demanda Angel.

—Tu as entendu ?

Angel fronça les sourcils.

—Le bruit ? C'est rien, quelqu'un a dû faire tomber quelque chose en bas.

Nox secoua la tête.

—Non, ça venait de plus loin. Et c'était un coup de feu.

Le visage d'Angel se décomposa.

—Tu es sûr ?

Le Prédateur acquiesça.

—On n'a aucune arme ici, déglutit Angel.

—On devrait aller voir, dit Nox en se dirigeant vers la porte. J'ai un mauvais pressentiment.

Le cœur battant, le Prédateur se pressa pour descendre et traversa le camp d'un pas rapide, Angel sur les talons. Quand il ouvrit la grande porte de bois, Angel l'arrêta par le bras.

—Tu es sûr qu'on devrait y aller seuls ? Ça pourrait être dangereux.

—Ça prendrait trop de temps de chercher quelqu'un d'autre pour nous accompagner. Et on sera plus discrets à deux.

Il franchit la porte et s'engagea dans la forêt, suivit de prêt par Angel. Rapidement, l'odeur de sang emplit ses narines et il sentit une vague d'adrénaline se propager dans ses veines.

—Quelqu'un est blessé, affirma-t-il.

—Peut-être que c'est un animal ? dit Angel, bien qu'il n'avait pas l'air convaincu. Des habitants qui voudraient chasser un peu ?

—Aussi loin de la Ville ? Pas sûr qu'ils prennent le risque de s'aventurer jusque-là.

Il se mit à avancer plus vite, sentant qu'il se rapprochait de l'endroit, et fit signe à Angel de rester silencieux.

Quand il arriva dans la petite clairière et qu'il vit la jeune femme allongée sur le sol, son cœur rata un battement.

—Oh non, murmura-t-il.

Angel le poussa pour voir à son tour et son visage blêmit quand il comprit.

—Venus ! s'écria-t-il en se précipitant vers elle, ignorant toute mesure de précaution qui s'imposait.

Nox le suivit, regardant prudemment autour de lui, mais il ne sentit aucune présence aux alentours.

Il se rapprocha des deux Résistants, et remarqua avec soulagement que Venus était encore envie. Soulagement qui fut de courte durée, car il comprit vite que son état était critique.

Penché au-dessus d'elle, Angel pressait la plaie du mieux qu'il pouvait, mais le sang continuait de couler entre ses doigts. Elle ouvrit la bouche et articula difficilement :

—Stella... il a pris Stella...

Nox eut l'impression qu'on lui avait versé un seau d'eau glacée à la figure.

—Quoi ?

—Il a pris Stella, répéta-t-elle.

Elle toussa sous l'effort, crachant un peu plus d'hémoglobine au passage.

Nox avala difficilement sa salive. Stella avait dû ressortir avec Venus pendant qu'Angel et lui discutaient. Il jeta un coup d'œil anxieux autour de lui, cherchant un indice qui lui indiquerait de la direction dans laquelle elle avait été emmené. Il essaya de se concentrer sur son ouïe, espérant pouvoir repérer sa trace. Malheureusement, ses sens s'étaient émoussés ces dernières semaines et il n'arriva pas à entendre autre chose que les battements affolés de son propre cœur. De même, l'odeur du sang de Venus était trop présente pour qu'il puisse en distinguer une autre.

Il serra les poings. Il était persuadé que le coupable était Jacob. Qui d'autre aurait pu être assez fou pour s'aventurer jusque-là et tirer sur quelqu'un dans le seul but d'enlever Stella ?

—Nox ! l'appela Angel en le sortant de ses pensées.

Il se retourna vers son ami et remarqua qu'il pleurait.

—Je... je dois retrouver Stella, s'excusa-t-il. Si je ne pars pas tout de suite, je risque de perdre sa trace et...

Angel l'agrippa par le bras avant qu'il n'ait le temps d'esquisser le moindre mouvement.

—Nox, s'il te plaît, aide-moi. Aide-moi !

Il put lire le désespoir dans les yeux de son ami, seulement il ne pouvait rien faire pour Venus.

—Angel, je ne suis pas médecin. Je...

—Fais-lui boire ton sang !

Nox le regarda avec stupéfaction.

—Stella m'a dit que tu lui avais fait boire ton sang la première fois, quand tu l'avais mordue. Elle a dit que ça l'avait sauvée.

Le Prédateur avala difficilement sa salive.

—Ça... ça ne marche pas toujours. Angel, elle a déjà perdu beaucoup de sang et je crois que la balle a perforé son poumon. Je ne sais pas si...

—Essaye ! gémit Angel. Nox ! Essaye, je t'en prie ! Sauve ma sœur, ne la laisse pas mourir comme ça, s'il te plaît, sauve ma sœur, Nox...

Nox resta figé un moment, ne sachant pas quoi faire. Venus était humaine et il doutait que son sang ait un quelconque effet sur elle. Rester ici ne faisait que lui faire perdre plus de temps et il devait retrouver Stella au plus vite. Cependant, il se sentit obligé de tenter le tout pour le tout.

—D'accord, céda-t-il. Je... je vais essayer.

Il entailla son poignet à l'aide d'un croc et s'accroupit à côté de la jeune femme. Il releva sa tête d'une main et lui fit boire son sang, la faisant tousser de plus belle.

Elle planta ses yeux dans les siens et il put ressentir toute sa peur et sa douleur en un seul regard. Une vague de tristesse envahit Nox. Il retira son poignet et essuya distraitement la plaie contre son t-shirt.

—Elle va s'en sortir, hein ? demanda fébrilement Angel. Ça va l'aider, n'est-ce pas ?

Nox ferma les yeux et secoua la tête en signe de négation. C'était trop tard. Il pouvait sentir la mort s'emparer doucement de Venus, et il n'y avait plus rien à faire pour elle.

Il rouvrit les yeux et dit :

—Angel, tu devrais lui dire au revoir.

—Ta gueule ! s'égosilla Angel. Elle ne va pas mourir, d'accord ?

Il reporta le regard vers celle qu'il considérait comme sa sœur et serra sa main dans la sienne.

—Tu ne vas pas mourir, tu m'entends ?

Elle le regardait mais n'avait pas la force de dire quoi que ce soit.

—Me laisse pas, Venus, supplia Angel. J'ai besoin de toi, tu comprends ? Me laisse pas, s'il te plaît, Venus, reste avec moi, reste...

Il n'eut pas l'occasion de terminer sa phrase. Les yeux de Venus, jadis si pétillants de vie, ne fixaient à présent plus rien. Angel relâcha la main de sa sœur, et elle retomba mollement sur le sol.

Nox voulu dire quelque chose, mais il ne voyait pas quelle parole pourrait atténuer la douleur d'Angel.

Il se redressa, la tête lui tournant légèrement.

—Angel... Je... Je dois aller retrouver Stella.

—Ça n'a pas marché, dit Angel d'une voix blanche. Pourquoi est-ce que ça n'a pas marché ?

—Je suis désolé.

—Pourquoi est-ce que ça n'a pas marché ? hurla le jeune homme en se relevant brusquement.

Il se planta devant Nox et lui jeta un regard mêlé de colère et de tristesse.

—Pourquoi ? insista-t-il.

Nox se sentait terriblement mal. Venus était morte et Angel était dévasté. Quant à Stella, plus le temps passait et plus il deviendrait difficile de la retrouver.

—Angel, je suis désolé, il faut que j'y aille. Si j'attends plus longtemps, Stella sera trop loin et...

Ignorant ce qu'il disait, Angel l'attrapa par les épaules et le secoua.

—Pourquoi t'as abandonné ? lui reprocha-t-il. T'aurait dû lui faire boire plus !

Nox repoussa Angel pour qu'il le lâche.

—Ça n'aurait servi à rien ! se défendit-il. Ça n'aurait pas marché !

Angel le poussa à son tour, visiblement furieux.

—Qu'est-ce que tu en sais ? gronda-t-il. Si tu as pu sauver Stella comme ça, alors pourquoi pas Venus ?

—Parce que Stella n'est pas humaine !

Nox regretta ses paroles au moment même où elles avaient franchi le seuil de ses lèvres. Angel se figea d'un coup, ébahi.

—Pas humaine ? répéta-t-il.

Le Prédateur hésita un instant avant de réaliser qu'il était trop tard pour reculer.

—Sa mère était humaine, mais son père était un Prédateur. C'est... c'est pour ça que j'ai pu la guérir en lui faisant boire mon sang. C'est pour ça que ça n'a pas marché sur Venus.

Angel laissa échapper un rire sans joie qui lui fit froid dans le dos.

—Tu es en train de me dire que ma sœur est morte parce que j'ai eu la stupidité d'accepter deux Prédateurs dans mon camp ?

Le visage de Nox se décomposa. Il voulut dire quelque chose mais la lueur de haine qui brillait dans les yeux d'Angel lui fit réaliser qu'il ne servirait à rien d'essayer de le raisonner. Venus était morte et il avait besoin d'un coupable.

—Je dois retrouver Stella, se contenta-t-il de dire.

Il tourna brusquement les talons et s'éloigna de la scène du drame d'un pas rapide.

—Tu ne vas nulle part ! rugit Angel derrière lui.

Nox sentit quelque chose s'abattre violemment sur son crâne et il s'écroula par terre. Il réalisa alors à quel point il avait perdu en force et en agilité depuis qu'il avait changé de régime alimentaire. Habituellement, il aurait perçu le coup bien avant qu'il n'arrive et aurait largement eu le temps de le contrer.

Il tenta de se relever, mais sa vision était trouble et le sol tanguait sous lui. Il aperçut Angel dans son champ de vision, une pierre ensanglantée à la main. Il se rapprocha dangereusement de lui et Nox essaya une nouvelle fois de se redresser, sans succès. La peur s'infiltra en lui quand il comprit qu'il n'avait pas assez de force pour se remettre debout. Lui qui ne craignait jamais rien, il se retrouvait à présent impuissant face à Angel et sa colère.

—Angel, tenta-t-il de le raisonner, s'il te plaît, ne fais pas quelque chose que tu pourrais regretter.

Angel esquissa un rictus et rétorqua :

—Ne t'inquiètes pas pour moi. Je ne suis pas du genre à avoir des regrets.

Et il balança son pied dans le visage du Prédateur.

🌙

Alors... Déjà, le chapitre était beaucoup plus long que d'habitude. Je ne me voyais le couper et j'espère que ça ne vous a pas dérangé !

Qu'avez-vous pensé de la réaction si agressive de Stella au début du chapitre ?

Est-ce que certains d'entres vous avaient deviné que Venus était amoureuse de Stella et non de Nox ? (À part lilylubie qui a mis exactement deux SECONDES à comprendre)

Puisqu'on parle de Venus... *rigole nerveusement*... Je n'ai pas l'habitude de tuer des personnages (sauf Latro mais lui ça ne compte pas vraiment, tout le monde voulait qu'il meurt dans d'atroces souffrances), et même si la mort de Venus était prévue relativement depuis la création du personnage et bah ça m'a fait un petit pincement au cœur. Je sais que certains d'entre vous ne l'appréciaient pas particulièrement, alors je suis curieuse de connaître vos réactions !

Je crois que tous les personnages sont dans une situation critique à présent. Mais bon, que voulez-vous ? Les précédents chapitres n'étaient que le calme avant la tempête 😈

À votre avis qu'est-ce qu'Angel va faire de Nox ? Que va-t-il se passer du côté de Stella ?

N'hésitez pas à me dire ce que vous avez pensé du chapitre, et je vous dis à la semaine prochaine 😘