- Chapitre 38 -
Stella ne sombra pas vraiment dans l'inconscience. Face contre terre, elle prit quelques instants pour reprendre son souffle. Puis elle se retourna sur le dos, ignorant ses membres douloureux qui lui intimaient de ne plus bouger. Elle jeta un coup d'œil vers le haut : le trou n'était pas très profond, un mètre cinquante, deux peut-être.
La tête lui tournait encore mais elle aperçut derrière les barreaux de bois Angel et Brutus en pleine conversation. Stella était incapable d'entendre ce qu'ils disaient à cause du sifflement de ses oreilles, mais visiblement Brutus était en train de se prendre un sacré savon.
Finalement, elle vit Angel ouvrir la cage et rentrer à son tour. Il atterrit sur le sol avec une agilité étonnante. Il s'accroupit à côté d'elle et il lui sembla qu'il lui disait quelque chose. Elle mit plusieurs secondes avant de comprendre qu'il lui demandait si elle allait bien.
—Stella, est-ce que ça va ? insista-t-il.
La jeune fille poussa un gémissement de douleur et se redressa du mieux qu'elle put. Finalement, elle hocha lentement la tête.
Angel poussa un soupir de soulagement.
—Désolé pour Brutus. Bon, je ne vais pas te mentir, je ne pense pas que ce soit une mauvaise idée de t'avoir mise ici. Ne le prends pas mal, mais je pense que tu resteras là pour le moment.
Stella plissa les yeux et lui jeta un regard mauvais.
—J'ai comme l'impression que tu prends toute cette histoire un peu mal, Stella.
—Je ne vois vraiment pas ce qui te fait dire ça, se moqua-t-elle.
Angel secoua la tête.
—Laisse-moi sortir, ordonna Stella.
Il ne répondit pas.
—Angel, je te jure que si tu ne me laisses pas sortir tout de suite, Brutus ne sera pas le seul à pisser le sang.
Angel arqua un sourcil, amusé.
—C'est ton ami qui t'a appris à te défendre de cette manière ? Personne ne t'a dit qu'il n'était pas très convenable pour une jeune fille de mordre les gens ?
Stella résista à l'envie de se jeter sur lui. Mais elle n'avait pas encore assez de force. Elle avait besoin de récupérer encore quelques minutes.
—Pourquoi est-ce que tu ne me laisses pas juste partir ?
Angel prit un air pensif.
—Eh bien... Crois-le où non, j'essaie juste de...
—Si tu me dis que tu veux juste me protéger, tu vas vraiment le regretter, le coupa Stella.
—Alors disons simplement que j'ai certains principes. Et laisser une jeune fille seule à l'extérieur n'en fait pas partie. Tu n'as nulle part où aller, Stella.
Angel venait de lui rappeler une douloureuse vérité. Elle n'avait nulle part où aller. Mais ça, elle s'en fichait dans la mesure où elle pouvait être avec Nox.
—Et Nox ? Pourquoi tu ne le laisses pas partir ? Il ne vous a rien fait.
—Disons que je suis curieux.
Stella sentit un frisson lui parcourir l'échine. Curieux... La façon dont il l'avait dit ne lui présageait rien de bon.
—Curieux de quoi ?
—Curieux d'en apprendre plus sur les Prédateurs, bien sûr.
À présent, Stella avait peur. Peur de qu'ils pourraient faire à Nox.
—Angel, commença-t-elle les yeux brillants de larmes. Promets-moi que vous ne lui ferez pas de mal.
—On ne le tuera pas, si c'est ce qui t'inquiète. Enfin, sauf s'il devient incontrôlable.
—Tu n'as pas répondu à ma question, Angel. Je t'ai demandé de ne pas lui faire de mal.
Angel resta silencieux.
—Angel, s'il te plaît...
Mais Angel n'avait pas l'air d'humeur à se laisser attendrir. Alors Stella passa à l'option numéro deux.
Elle se jeta sur lui et ils tombèrent tous les deux à la renverse. Elle lui décocha un coup de poing à la mâchoire, mais elle n'eut pas l'occasion d'en faire plus car Angel reprit rapidement le dessus. Il la repoussa et bientôt ce fut lui qui se retrouva au-dessus d'elle. Calmement, il attrapa ses poignets d'une main et de l'autre fit pression sur sa cage thoracique.
Stella sentit l'air lui manquer immédiatement et elle arrêta de se débattre.
—Tu sais Stella, si tu veux pouvoir sortir d'ici un jour, il va falloir que tu fasses un effort.
Des larmes de colère coulèrent sur ses joues et elle se mit à sangloter, rendant sa respiration encore plus difficile.
—Écoute, je comprends que tu te sois attaché à Nox. Enfin, non, je t'avouerais que j'ai un peu de mal à comprendre, en fait. Mais il va falloir que tu l'oublies. C'est mieux pour tout le monde.
—Tu... ne... comprends... rien, articula Stella du mieux qu'elle put.
Parce que c'était le cas. Angel ne comprenait rien. La preuve était qu'il considérait Nox comme un animal que Stella aurait domestiqué. Sinon, pourquoi emploierait-il le même ton que celui de son père quand celui-ci lui avait dit qu'il avait vendu son chat ?
Pourquoi est-ce que personne ne l'écoutait jamais? « Nox est dangereux », c'est ce qu'on arrêtait pas de lui répéter. Et elle, elle n'était pas dangereuse peut-être? N'avait-elle pas tué un homme de sang froid moins de vingt-quatre heures auparavant? Pourquoi tout le monde se sentait-il obligé de la protéger ?
Stella refusait de se laisser faire. Instinctivement, elle ramena son genou vers elle, frappant Angel au passage. Celui-ci s'écroula sur le côté, le visage tordu dans une grimace de douleur, preuve qu'elle avait visé juste.
Elle prit à peine le temps de reprendre son souffle avant de se relever et de se précipiter vers la sortie. Elle remarqua des enfoncements dans la paroi, sûrement faites pour grimper. Elle escalada la paroi rapidement et tira de toutes ses forces sur les barreaux en bois, mais ceux-ci ne bougèrent pas. Au fond, elle savait que c'était peine perdue, car même si elle arrivait à sortir de sa cellule, quelqu'un finirait bien par l'attraper.
Elle sentit alors Angel lui attraper une jambe et elle lui balança son pied libre dans la figure. La tête d'Angel partie en arrière, mais il revint rapidement à la charge et lui bloqua cette fois-ci les deux jambes.
Il arriva à la faire redescendre et il la plaqua violemment contre la paroi.
En voyant le sang s'échapper de son nez et les éclairs que lançaient ses yeux, Stella se dit qu'elle y était peut-être allée un peu fort, surtout en sachant qu'elle n'aurait pas pu lui échapper de toute façon.
Toute sa colère était retombée pour faire place à la peur.
—Je suis désolée, murmura-t-elle en ouvrant ses yeux en grand, bien qu'elle ne l'était pas le moins du monde.
Angel prit une grande inspiration et Stella comprit qu'il prenait sur lui pour ne pas lui rendre la pareille.
—C'est okay, dit-il. Je ne te ferai pas de mal. Tu avais peur, tu étais en colère... Je ne te ferai pas de mal. Je ne te ferai pas de mal.
Stella n'était pas sûre s'il disait ça pour la rassurer ou pour se convaincre lui-même de ne rien faire.
—Maintenant j'aimerais aller chercher Venus pour qu'elle soigne tes blessures. Est-ce que je peux te lâcher et te tourner le dos sans crainte, ou il vaut mieux que je t'assomme d'abord?
Stella secoua la tête.
—Tu... Tu peux me lâcher...
Il la relâcha brusquement mais resta planté devant elle un instant, l'air menaçant, comme pour s'assurer qu'elle ne tenterait rien.
Puis il tourna le dos et sortit de la cage.
Stella se laissa glisser sur le sol et se força à respirer calmement.
C'était en train de revenir, elle le sentait. Elle ne savait pas ce que Marcus lui avait donné, mais il avait réussi à mettre en sommeil ce qui l'avait tourmenté ses dernières semaines. Et si elle ne faisait pas attention, elle allait le réveiller de nouveau. Et ça, elle n'y tenait vraiment pas.
* * *
Quand il se réveilla ce matin-là, Jacob comprit que son mal de tête n'était pas près de repartir. Il était de mauvaise humeur. Comment aurait-il pu en être autrement ?
Il se leva ensuite avec la ferme intention de résoudre la situation. Ce jour-là, il irait voir les Caeli et il obtiendrait des réponses à ses questions. Puis, d'une manière ou d'une autre, il retrouverait Stella. Et il tuerait le Prédateur une bonne fois pour toutes. Stella lui ferait certainement la tête au début, mais il s'en fichait. Il lui dirait la vérité, toute la vérité. Il répondrait à toutes ses questions. Et alors elle comprendrait que c'était une erreur de vouloir quitter la ville. Elle s'excuserait d'avoir mal agi et elle resterait avec lui.
C'était ces pensées-là qui tournaient sans cesse dans la tête de Jacob lorsqu'il se rendit chez les Caeli en milieu de matinée.
Il monta les escaliers qui menaient jusqu'à la porte d'entrée et frappa bruyamment sur celle-ci. Vera ouvrit peu après, les yeux rougis comme si elle avait passé la nuit à pleurer. Elle leva les yeux et sembla surprise quand elle aperçut Jacob.
—In...inspecteur Anceps ? dit-elle d'une petite voix. Stella n'est pas là.
—Je sais qu'elle n'est pas là, répondit Jacob d'un ton sec.
Il poussa la porte violemment et entra sans y être invité. Vera se recula, prise de court, et referma la porte derrière elle. Elle ne semblait pas apprécier qu'il fasse intrusion chez elle, mais Jacob dégageait quelque chose de menaçant, aussi elle ne protesta pas.
—Asseyez-vous, lui ordonna Jacob en indiquant le canapé. J'ai quelques questions à vous poser.
Vera obéit et Jacob s'installa sur le fauteuil en face d'elle.
—Est-ce que vous savez où se trouve Stella, Vera ?
—Je... je pense que vous devriez revenir quand Tego sera là, balbutia Vera en se tortillant sur son siège.
—C'est à vous que je pose la question. Et vous avez intérêt à me répondre.
Vera semblait apeurée mais ne répondit pas. Elle savait, pensa Jacob. Elle savait beaucoup de choses mais elle refusait de les lui dire, et cela le mettait dans une rage folle.
Tout en gardant son calme, il s'enfonça dans son siège, sortit son arme de sa ceinture et fit mine de l'examiner. La tension monta d'un cran dans la pièce.
—Vous savez que je ne suis pas là en tant qu'inspecteur, Vera. Tout ceci est une affaire assez... personnelle pour le moment.
Vera écarquilla grand ses yeux.
—Vous... vous ne me feriez pas de mal, inspecteur, n'est-ce pas ? demanda-t-elle d'une petite voix.
Jacob haussa les épaules.
—Où est Stella ? répéta-t-il en articulant chaque syllabe.
—Je... je ne sais pas.
Jacob se redressa un peu et frappa la table basse de son poing, faisant se renverser le vase qui s'y trouvait. Vera sursauta.
—Où est-elle ?!
—Je ne sais pas ! Je sais juste qu'elle voulait quitter la Ville. Juste après que vous soyez parti hier... Il était là.
—Qui ? Le Prédateur ?
—Oui. Il voulait savoir où était Stella. Il a menacé de me tuer si Tego ne l'amenait pas jusqu'à elle. Alors Tego l'a fait. Et quand il est revenu... il m'a dit qu'ils étaient partis. Mais je ne sais pas où ils sont allés, je le jure !
Jacob hocha pensivement la tête.
—Pourquoi est-ce qu'il s'intéresse à elle ?
—Je ne sais pas. Je sais juste qu'ils se voyaient en cachette la nuit. Je ne savais pas... jamais je n'aurais imaginé que...
—Elle est spéciale, la coupa Jacob. Elle a quelque chose de spécial, n'est-ce pas ? Je veux savoir ce que c'est.
Vera le regarda de ses grands yeux gris sans rien dire. Elle avait très légèrement tressailli quand Jacob lui avait posé la question et cela lui suffisait pour deviner qu'elle en savait plus que ce qu'elle voulait dire. Il voulait des réponses. Il voulait savoir ce que Stella avait de si particulier. Savoir comment un Prédateur avait pu s'éprendre d'elle. Savoir pourquoi elle semblait rendre les hommes fous autour d'elle. Oui, Jacob voulait des réponses. Mais Vera ne semblait pas disposée à les lui fournir.
—Je... Je ne vois pas de quoi vous parlez, dit-elle d'une voix tremblante.
—Quand elle s'est enfuie de chez moi hier, elle s'était violemment pris un coin en bois dans l'arrière du crâne. Il y avait tellement de sang... J'ai cru qu'elle était morte, vous savez ?
Vera ne disait rien. Elle se contentait d'écouter Jacob, l'inquiétude la gagnant de plus en plus.
—Et pourtant, rigola Jacob, quelques minutes après elle s'est relevée, m'a assommé et s'est enfuie en courant. Et elle avait l'air en pleine forme. En pleine forme...
Vera regardait Jacob comme s'il était fou. Peut-être était-ce le cas, ou du moins, c'était l'impression qu'il avait.
—Alors comment est-ce possible, Vera ?
—Je... je ne sais pas.
—Mensonge ! cria Jacob en se levant brusquement du canapé. Dites-moi la vérité !
—Je ne sais pas !
Jacob attrapa son arme et la braqua sur Vera. Celle-ci poussa un cri de surprise. Jacob ne savait pas ce qu'il faisait. Il n'avait aucune idée de ce qu'il pouvait faire pour avoir des réponses, jusqu'où il était prêt à aller.
Un son le tira alors de ses pensées et il mit quelques secondes avant de comprendre de quoi il s'agissait : son bipeur. Jacob baissa son arme et la rangea, au grand soulagement de Vera.
Toujours sous le choc, elle ne bougea pas et se contenta de hocher lentement la tête quand il lui demanda s'il pouvait emprunter son téléphone.
—Que se passe-t-il, sergent ? s'énerva-t-il d'emblée quand quelqu'un décrocha finalement le téléphone.
—On... on a eu une attaque, inspecteur. Mais...
—Mais quoi ? soupira Jacob.
—C'est un habitant de la Ville.
—Voilà qui est fâcheux, répondit Jacob qui ne semblait pas s'en préoccuper le moins du monde.
—Ce n'est pas tout. D'après nos spécialistes, il n'aurait pas été attaqué la nuit dernière mais quelques heures avant, pendant la journée.
Cette fois-ci, Jacob tiqua.
—Le corps n'a même pas été totalement dévoré, continua le sergent.
—Vous avez l'identité de la victime ?
—Latro Saeva.
Un frisson lui parcourut l'échine. Pas besoin d'y réfléchir à deux fois pour comprendre que Nox avait dû régler son compte à Latro pour Stella. Et qu'il valait mieux faire taire l'affaire avant que ses supérieurs ne mettent le nez dedans.
—Classez l'affaire, sergent, ordonna Jacob.
—Mais, inspecteur, il semblerait que ce ne soit pas une affaire comme les autres et...
—J'ai dit, classez l'affaire, sergent, répéta Jacob d'une voix ferme.
Son interlocuteur eut un instant d'hésitation avant de se résigner.
—Tout de suite, dit-il finalement avant de raccrocher.
Jacob jeta un regard à Vera : elle ne lui apprendrait rien de plus. Peut-être qu'elle ne savait rien, finalement.
Il secoua la tête et sortit de l'appartement sans rien dire. Mais il n'avait pas encore abandonné, oh non. Il irait chercher Stella lui-même s'il le fallait.
🌙
Et voilà un nouveau chapitre de terminé :')
Que pensez vous d'Angel ?
J'essaie d'écrire de façon à pouvoir poster 2 fois par semaine mais pour l'instant c'est assez compliqué T.T Mais j'y travaille, promis ! :')
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