- Chapitre 34 -
Cela faisait un moment maintenant que Stella s'était assoupie et Nox ne l'avait pas quittée des yeux.
Il n'avait pas dormi depuis près de vingt-quatre heures et pourtant il se sentait incapable de fermer l'œil. Il ne pouvait pas dormir parce qu'il était terrifié. Il avait longtemps rêvé du jour où il pourrait enfin quitter la Ville, mais maintenant qu'il ne pouvait plus faire marche arrière il craignait ce qu'il pourrait arriver.
Plus l'heure de s'enfuir approchait et plus il s'inquiétait quant à savoir ce qu'ils allaient trouver au-delà des frontières. Mais il n'y avait pas que ça. Maintenant qu'il s'apprêtait à partir, il pensait à ce qu'il laissait derrière lui : ses frères.
Il ne s'était jamais très bien entendu avec Nebulo, mais il était censé s'occuper de lui. C'était la promesse qu'il avait faite à leur mère peu avant qu'elle ne meurt. Et quant à Meto, Nox était surpris de s'être autant attaché à lui. Il avait gardé son secret quand bien même il aurait pu le dénoncer.
Nox avait aimé s'occuper des deux jeunes Prédateurs et il ne pouvait s'empêcher de se demander comment ils allaient faire sans lui.
Nox prit une profonde inspiration. Il ne pouvait pas se permettre d'avoir des doutes, pas maintenant. Stella comptait sur lui et il savait que cela lui coûtait à elle aussi de quitter sa famille.
La jeune fille se mit alors à remuer entre ses bras et elle ouvrit les yeux.
—Hey, dit-elle en frottant ses yeux. J'ai dormi longtemps ?
—Environ une heure.
Elle hocha la tête et se redressa. Elle jeta un coup d'œil autour d'elle et poussa un soupir.
—Je suppose qu'il est temps de réfléchir, maintenant ?
Nox se redressa un peu et acquiesça. Stella se leva hors du lit attrapa son sac.
—J'ai récupéré une carte de la Ville, expliqua-t-elle en fouillant à l'intérieur. Je crois qu'elle indique comment sortir et...
—Je ne pense pas qu'on devrait quitter la Ville.
Stella s'arrêta brusquement de chercher dans son sac et releva la tête vers lui, le regard remplit d'incompréhension.
—Tu... tu ne veux plus partir ? demanda-t-elle avec une pointe d'inquiétude dans la voix.
Nox se leva à son tour et se rapprocha d'elle.
—Ce n'est pas ça. C'est juste que...
Il fit une pause, cherchant les mots corrects pour exprimer sa pensée.
—Est-ce que tu as déjà entendu parler de la Résistance ?
La jeune fille fronça les sourcils un instant puis hocha la tête.
—Vera l'a mentionnée. Elle pensait que tu en faisais partie, mais je ne sais pas ce que c'est exactement.
Il hocha la tête d'un air pensif.
—J'ai appris des choses au Centre, hier. Comme l'on s'en doutait, les proies que les Prédateurs chassent la nuit ne sont pas des habitants de la Ville, ou très rarement. Ce sont des prisonniers qui ont été condamnés à mort. De ce que j'ai compris, certains d'entre eux ont réussi à s'enfuir et ont formé un groupe appelé la Résistance.
Stella écoutait silencieusement, attendant de comprendre où il voulait en venir.
—On ne sait pas ce qui nous attend en dehors de la Ville, Stella. Peut-être qu'on devrait plutôt essayer de trouver la Résistance.
—Et après ?
—Je ne sais pas, avoua Nox.
Un silence de plomb emplit la pièce.
—Ce n'est qu'une proposition, dit Nox. Si tu ne veux pas, on peut quitter la Ville comme prévu.
Stella baissa les yeux pour réfléchir.
—Non, je te fais confiance. Si tu penses que c'est plus sûr comme ça, je te crois. Est-ce que tu sais où se trouve la Résistance ?
—Quelque part au niveau des Frontières.
Ils étalèrent la carte sur la table et la regardèrent de plus près. Ils en conclurent que la Résistance devait se cacher quelque part dans la forêt qui entourait la Ville et ils déterminèrent le chemin à emprunter.
—Il y a autre chose que j'ai pris chez Jacob, se rappela alors Stella.
Elle fouilla dans le sac et en sortit la tablette noire. Nox lui prit des mains pour l'examiner de plus près. Il n'avait jamais rien vu de similaire et il ne voyait pas trop quelle pouvait être son utilité. Il trouva comme une fine barre en relief sur le côté et appuya machinalement dessus. La tablette s'illumina alors et il la lâcha sous le coup de la surprise.
—Qu'est-ce que... ? murmura-t-il.
Il regarda la chose de plus près. La surface noire avait pris une toute autre couleur et des chiffres étaient apparus sur un fond blanc.
Intriguée, Stella posa le doigt sur le chiffre sept au hasard et ouvrit grand les yeux quand elle vit que la surface plate avait réagi à son doigt : le chiffre s'était inscrit au-dessus des autres. Elle appuya sur trois autres chiffres au hasard et la tablette émit un son.
« Code PIN incorrect » affichait à présent l'écran.
Nox et Stella regardaient la tablette avec incompréhension.
—Jacob a dit que tu lui avais volé son téléphone, se rappela alors Nox. Est-ce que tu penses que ça pourrait être... ça ?
—Je ne sais pas, mais je ne tiens pas particulièrement à y toucher. On pourra toujours demander à la Résistance quand on les trouvera.
Nox hocha la tête. Ils fixèrent le téléphone quelques instants et celui redevint noir. Stella le rangea rapidement dans son sac, comme s'il risquait d'exploser.
Elle poussa un long soupir et releva les yeux vers lui.
—Et moi ? demanda-t-elle sans préambule.
Nox fronça les sourcils.
—Qu'est-ce qui m'arrive, exactement ? continua-t-elle. Je cicatrise plus vite, mes sens sont plus aiguisés et j'ai même... mes dents qui ont repoussé ? Je veux dire... si mon père était un Prédateur, je comprends pourquoi tout cela arrive. Mais pourquoi maintenant ?
Nox passa sa main dans les cheveux de la jeune fille et en profita pour caresser doucement son visage.
—C'est quelque chose de très primitif comme instinct. Je suppose qu'il n'avait aucun besoin de se manifester tant que tu n'étais pas en danger. Mais tu as frôlé la mort pas mal de fois ces dernières semaines.
Stella se mordit l'intérieur de la joue et releva ses yeux vers lui.
—Je me sens différente depuis que je suis allée chez Marcus. Je ne sais pas ce qu'il m'a fait, mais je crois qu'il a fait régresser le processus, au moins pour un certain temps.
Nox se retint de pousser un soupir de soulagement. Il ne lui avait pas parlé de ce qui l'attendait si elle continuait à se transformer comme elle l'avait fait jusque-là. Il ne lui avait pas parlé de l'espérance de vie de plus en plus courte des Prédateurs. Il ne voulait pas l'inquiéter avec ça, ils avaient assez de problèmes en tête pour le moment.
—Tant mieux, répondit-il simplement. On n'a plus qu'à faire en sorte que tu sois toujours en sécurité.
La jeune fille lui sourit et se rapprocha de lui pour se blottir dans ses bras. Nox grimaça un peu en sentant l'odeur qui se dégageait ses vêtements. Il n'y avait pas prêté attention jusque-là, mais l'odeur aseptisée de l'appartement de Marcus lui irritait le nez.
—Qu'est-ce qu'il y a ? demanda Stella en voyant son expression.
—Rien, c'est juste tes vêtements... Je n'aime pas leur odeur.
Elle le fixa un instant sans rien dire et se mordit la lèvre.
—Peut-être que je devrais les enlever alors, proposa-t-elle.
Nox la regarda sans comprendre.
Ce n'est que lorsqu'elle commença à déboutonner son chemisier et que celui-ci tomba sur le sol qu'il comprit où elle voulait en venir. Stella passa ses bras autour de sa nuque et déposa un baiser sur ses lèvres.
—C'est mieux comme ça ? murmura-t-elle.
Il posa mains sur sa taille et un frisson lui parcourut l'échine lorsqu'il sentit sa peau nue sous la sienne.
—Beaucoup mieux, souffla-t-il.
Il l'attira un peu plus contre lui et l'embrassa avec douceur. Sans vraiment s'en rendre compte, il l'avait poussée jusqu'au lit. Allongé au-dessus d'elle, le souffle court, Nox prit le temps de l'observer un instant. Leur première rencontre lui revint alors en mémoire et il ne put s'empêcher de se demander ce qu'il se serait passé s'il ne l'avait pas épargnée, ce soir-là. S'il l'avait tuée, il aurait perdu la seule personne capable de donner un sens à sa vie et il ne l'aurait jamais su.
—Qu'est-ce qu'il y a ? lui demanda Stella.
—Rien. Je crois que je suis juste en train de réaliser à quel point je t'aime.
Un grand sourire se dessina sur le visage de la jeune fille.
—Moi aussi, je t'aime.
Il sourit à son tour et se laissa glisser à côté d'elle.
—Nox..., continua-t-elle. J'ai peur de quitter la Ville, vraiment. Mais je ne pense pas que je sois capable de regretter un seul des choix qui m'a mené jusqu'à ce moment précis. Et même si je devais mourir ce soir, je ne pourrais pas le regretter. Parce que je n'ai jamais été aussi heureuse que je le suis maintenant.
Nox fronça les sourcils, ne sachant pas trop comment prendre ce qu'elle venait de dire.
—Moi non plus, je ne pense pas être capable de regretter. Mais tout va bien se passer, tu sais ? Et tant qu'on est tous les deux, tout ira bien.
Elle lui répondit par un sourire sincère. Ensembles, ils seraient plus forts.
Elle l'attira vers elle pour l'embrasser, créant chez lui une nouvelle vague de frissons. Oubliant tout ce qui pouvait mal se passer, il se laissa enfin aller, profitant de ce dernier moment de calme.
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