- Chapitre 25 -
Stella se regarda dans le miroir.
Elle n'avait aucune cerne et pourtant elle n'avait presque pas dormi de la nuit. Après le départ de Nox, elle n'avait cessé de penser à lui et de s'inquiéter. Où était-il parti ? Et s'il ne revenait pas ?
Elle laissa ses doigts tapoter nerveusement le bois de la table. Nox lui avait promis de revenir vite et qu'ils quitteraient la Ville, et elle se raccrochait à cette idée du mieux qu'elle pouvait. Plus qu'une journée. Si Nox tenait sa promesse, elle n'avait plus qu'une journée à tenir.
L'idée d'abandonner sa famille lui faisait un pincement au cœur chaque fois qu'elle y pensait, mais elle ne pouvait plus rester ici. Quoi qu'il arrive, elle ne voyait pas comment les choses pourraient s'améliorer. Et même si elle arrivait à se débarrasser de Jacob et de Latro, elle savait qu'elle ne pourrait jamais être avec Nox.
Elle passa sa main dans ses cheveux et poussa un long soupir. Quelqu'un frappa à la porte à ce moment-là et elle aperçut dans le reflet du miroir son père qui se tenait dans l'encadrement de la porte.
—Stella, tu es en retard.
Celle-ci se leva de sa chaise et attrapa son sac.
—J'y vais, dit-elle simplement.
Son père la regarda passer à côté de lui avec étonnement.
—Tu ne manges rien ?
—J'ai pas faim, répondit-elle en se dirigeant vers la porte d'entrée.
Elle avait déjà ouvert la porte quand elle s'arrêta brusquement.
—Papa ? l'appela-t-elle.
Tego arriva derrière elle et la regarda, attendant ce qu'elle avait à lui dire.
—Est-ce que tu es heureux ? Je veux dire... avec Vera. Est-ce que tu es heureux ?
Son père la regarda avec étonnement quelques instants, comme s'il essayait de comprendre le sens de sa question, avant de lui répondre en souriant.
—Plus que je ne pensais pouvoir l'être. (Il reprit un air sérieux.) Stella, s'inquiéta-t-il, est-ce que tu vas bien ?
Elle esquissa un faible sourire.
—Nickel, mentit-elle avant de refermer la porte derrière elle.
Une fois dans la rue, Stella prit son temps pour marcher. Elle savait que le dernier bus qui pouvait l'emmener au lycée allait bientôt passer et, si elle marchait assez lentement, elle pourrait le rater. Elle serait alors obligée de faire tout le chemin à pied et ce serait toujours ça de moins à passer en cours. Et, si elle prenait vraiment son temps, aucun doute qu'elle échapperait à son cours avec Latro.
Elle était en train de marcher en direction de l'arrêt de bus à présent vide quand elle entendit le son d'une voiture s'arrêtant à côté d'elle. Il n'y avait pas beaucoup de monde possédant une voiture dans le Quartier, et elle ne fut donc pas très étonnée de découvrir Jacob s'arrêter à sa hauteur.
—Je crois que tu as raté le bus, lui fit-il remarquer à travers la vitre, un grand sourire aux lèvres.
Stella haussa les épaules.
—Ce sont des choses qui arrivent.
Il ouvrit la portière du côté passager et lui fit signe de monter. Stella s'installa et poussa un soupir à l'idée qu'il la conduise jusqu'au lycée. Mais contrairement à ce à quoi elle s'attendait, Jacob prit la direction opposée.
—Un raccourci ? s'étonna Stella.
—Pas vraiment. J'ai pris ma journée et à moins d'une urgence je suis libre. Alors je me suis dit que l'on pourrait la passer ensemble.
Stella haussa les épaules, comme si ça n'avait pas d'importance. Elle n'avait pas particulièrement envie de passer du temps avec lui, mais elle n'avait définitivement pas envie d'aller au lycée ce jour-là.
Cela faisait une dizaine de minutes qu'ils roulaient et Stella n'avait pas décroché un mot. Elle se contentait de regarder les bâtiments défiler à travers la vitre.
Jacob lui jetait des coups d'œil rapides et poussa un long soupir.
—Qu'est-ce qui ne va pas ? demanda-t-il.
Stella tourna la tête vers lui et regarda avec étonnement.
—Qu'est-ce qui te fait penser que quelque chose ne va pas ?
Cela faisait une semaine maintenant que Jacob et elle sortaient ensemble, et Stella avait rapidement laissé tomber le vouvoiement. Jusque-là, Jacob ne s'était pas montré particulièrement désagréable et avait au contraire été assez gentil avec elle, si bien qu'elle ne savait plus très bien quoi penser de lui.
—Eh bien, pour commencer, cela fait plusieurs jours que je n'ai pas eu le droit à un seul commentaire sarcastique de ta part. Rien que ça c'est assez inquiétant.
Stella pouffa. Jacob lui sourit puis redevint sérieux.
—Je me fais du souci pour toi, tu sais ?
Stella leva les yeux au ciel.
—Je vais bien, Jacob, répondit-elle en grattant nerveusement son avant-bras gauche.
Jacob la regarda faire en fronçant des sourcils et arrêta brusquement la voiture.
—Eh ! s'exclama Stella. Qu'est-ce que tu...
Mais Jacob avait déjà attrapé son bras et avait retroussé sa manche, laissant apparaître les cicatrices qui la démangeaient.
—Est-ce que c'est toi qui t'es fait ça ? l'interrogea-t-il.
Stella retira vivement son bras et baissa la tête. Elle regrettait de ne pas avoir fait attention à cacher ses cicatrices. Elle ne pouvait pas lui dire pourquoi elle avait fait ça. Elle ne pouvait pas lui expliquer que si elle persistait à s'entailler le bras, soir après soir, c'était afin de voir si son sang continuait à changer comme il l'avait fait jusque-là.
—Ce n'est rien, dit-elle simplement. Je n'ai pas cherché à me tuer si c'est ça qui t'inquiète. C'est juste... arrivé.
—Bon sang, Stella ! s'emporta Jacob. Qu'est-ce qui cloche avec toi ?
Cette remarque dit lui fit l'effet d'une gifle et elle sentit la colère monter en elle.
—Tu veux savoir ce qui ne va pas chez moi, Jacob ? cracha-t-elle. Peut-être le fait que je doive côtoyer tous les jours quelqu'un qui attend juste que tu tournes le dos pour me tuer !
Jacob fronça des sourcils.
—Est-ce qu'il t'a menacée ?
Stella ne put s'empêcher de rire.
—Je ne dirais pas qu'il m'a menacée, plutôt qu'il me l'a clairement affirmé.
Jacob donna un coup rageur dans le volant.
—Tu aurais dû me le dire, Stella.
Stella ouvrit ses yeux en grands et explosa.
—Mais à quoi est-ce que tu t'attendais, Jacob ? cria-t-elle. Latro est cinglé ! Il a déjà essayé de me tuer, et tu le sais très bien ! Et tu ne fais rien à propos de ça, alors n'essaie pas de me faire croire que tu t'inquiètes pour moi !
—Stella, dit-il d'une voix ferme. Écoute-moi, je ne...
—Tu pourrais l'arrêter si tu le voulais ! lui lança-t-elle alors que les larmes lui piquaient les yeux. Mais tu t'en fous !
—C'est faux, Stella, je te jure que c'est faux mais...
—Laisse tomber, l'interrompit-elle en levant les yeux pour tenter d'empêcher les larmes de couler sur ses joues.
—... c'est plus compliqué que ça n'en à l'air...
—Arrête.
—... et je ne le laisserais pas te faire du mal, je te le...
—Laisse tomber, j'ai dis, le coupa-t-elle sèchement. Je n'ai plus envie d'en parler.
Elle essuya ses joues mouillées par les larmes et fixa la route en face d'elle. Plus qu'une journée. Plus qu'une journée, et ce soir, ce serait fini.
—J'ai juste envie d'oublier ça et de passer une bonne journée, d'accord ?
Jacob la fixa quelques instants avant de se décider à redémarrer la voiture.
—Comme tu voudras, dit-il simplement en reportant son regard vers la route.
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