- Chapitre 22 -
Le vent passait dans les arbres, faisant bruisser les feuilles. Nox jeta un coup d'œil à la lune au-dessus de lui et frissonna doucement. Les nuits étaient de plus en plus longues et de plus en plus froides. Les mains dans les poches, il marchait entre les arbres du parc, Neb et Meto derrière lui. Ceux-ci étaient en train de se disputer, leurs voix résonnant tout autour d'eux.
Nox s'arrêta brusquement et se retourna vers eux.
—Eh ! Fermez-la un peu. Je crois que j'ai entendu quelque chose...
Les deux se turent d'un coup et tout le monde tendit l'oreille.
Nox leur fit signe de le suivre et ils se glissèrent entre les arbres. Un homme marchait lentement entre les bancs, la vapeur blanche sortant de sa bouche alors qu'il respirait. Il s'arrêta brusquement et regarda autour de lui, comme s'il avait perçu leur présence.
—Eh ! appela-t-il. Est-ce qu'il y a quelqu'un ?
Nox vit instantanément une lueur s'allumer dans les yeux des deux jeunes Prédateurs. Cela faisait quelque temps qu'il n'y avait plus vraiment de proies dans les rues et aucun d'eux n'avait mangé depuis quelques jours.
Nox prit une profonde inspiration. Il n'avait pas envie de chasser, non. Mais il avait faim et s'il continuait ainsi... qui sait ce qu'il se passerait quand son instinct reprendrait le dessus.
Sans plus attendre, il sortit des arbres en trombe pour se précipiter sur l'homme et tous deux tombèrent à terre. Il se laissa habiter par l'esprit animal qui dormait en lui et sans même vraiment s'en rendre compte il planta ses crocs aiguisés dans la gorge de sa proie et tira d'un coup sec dessus.
Il jeta un coup d'œil aux yeux vides de sa victime et se demanda un instant d'où il venait. Il se demanda s'il avait une famille, si quelqu'un allait attendre qu'il revienne. Il secoua la tête pour chasser ces pensées de son esprit. Ce n'était vraiment pas le moment de penser à ça.
Quand ils furent enfin repus, ils commencèrent à rebrousser chemin à travers les arbres. Alors qu'ils passaient à côté de l'entrée dont seul Nox connaissait l'existence, celui-ci aperçut quelque chose refléter les rayons de la lune. Il se pencha par terre pour ramasser le petit anneau d'argent et il reconnut la bague de Stella.
Nox avala difficilement sa salive. Cela faisait une semaine qu'il ne l'avait pas vue. Depuis que les Nuits Calmes étaient finies, il n'avait pas trouvé d'occasion d'aller la voir. Meto et Neb étaient constamment avec lui la nuit et toutes les fois où il avait aperçu Stella dans la journée, celle-ci était accompagnée de Jacob.
Nox fixa la bague pendant quelques secondes avant de la ranger précipitamment dans sa poche. Il n'avait aucun doute que Stella l'avait laissée ici pour lui dire de venir la voir.
—Je vais faire un tour, lâcha-t-il soudain à ses frères. Seul.
Et il s'enfonça dans les arbres sans attendre de réponse.
Il marcha au hasard dans les rues, juste pour s'assurer que personne ne le suivait. Quand il fut sûr d'être seul, il se dirigea vers la rue de Stella. Il escalada l'arbre à côté de sa fenêtre et se retrouva dans sa chambre quelques secondes après.
Il se rapprocha lentement de son lit et Stella se réveilla en sursaut. Elle sembla avoir une seconde d'hésitation puis poussa un soupir de soulagement quand elle le reconnut.
—Nox..., murmura-t-elle en se jetant dans ses bras.
Nox la serra contre lui et prit une profonde inspiration pour sentir son parfum. Il réalisa alors que quelque chose n'allait pas. Le cœur de Stella battait rapidement et il pouvait sentir la peur se dégager d'elle aussi clairement qu'il l'entendit se mettre à pleurer.
—Stella, s'inquiéta-t-il. Qu'est-ce qui ne va pas ?
—J'avais peur que tu ne reviennes pas, dit-elle entre ses larmes. J'ai cru que tu étais en colère contre moi.
—Pourquoi est-ce que je serais en colère contre toi ? lui demanda-t-il d'une voix douce en dégageant une mèche de son visage.
—À cause de Jacob. (Elle secoua vivement la tête.) Je n'aurais jamais dû accepter Nox... Je... je me sens tellement piégée...et...
Les mots s'entrechoquaient dans sa bouche et sortaient de manière désordonnée au rythme de ses sanglots.
—Je croyais que... je pensais que j'avais la situation en main, que je pouvais tout arrêter quand je le décidais... Mais j'avais tort, Nox, j'avais tort ! Je ne sais pas ce qu'il a dit à mon père, mais il lui fait du chantage d'une manière ou d'une autre... Et même si... même si je pouvais le quitter, Latro me tomberait dessus et je ne... je ne...
—Stella, la coupa Nox en prenant son visage entre ses mains pour la forcer à le regarder dans les yeux. S'il te plaît, calme-toi. Ça va aller, d'accord ?
Stella secoua la tête.
—Non..., murmura-t-elle, ça ne va pas aller, Nox.
—Stella, écoute-moi. Je vais m'occuper de Latro et de Jacob, d'accord ?
Les yeux de Stella s'écarquillèrent brusquement quand elle comprit ce qu'il était en train de dire.
—Nox, non ! Tu ne peux pas faire ça, tu ne peux pas juste les tuer comme ça...
—Et pourquoi pas ? la coupa Nox. Ce n'est pas comme s'ils étaient innocents.
Stella secoua la tête et les larmes coulèrent de plus belle sur son joli visage.
—Ce n'est pas ce que je veux. Je... je...
Nox posa son front contre le sien et prit une grande respiration.
—Je ne laisserais personne te faire du mal, d'accord ? murmura-t-il. Et tu sais pourquoi ? Parce que tu es la personne à qui je tiens le plus. Tu le sais, n'est-ce pas ?
Stella secoua doucement la tête en guise de réponse, comme si elle ne le croyait pas. Car si Stella avait toujours été assez claire quant à ses sentiments, Nox, lui, avait eu tendance à les cacher. Et peut-être avait-il cru bien faire jusque-là en essayant de lui faire croire qu'il ne ressentait rien pour elle. Et peut-être avait-il réussi à se persuader lui-même qu'il ne pourrait jamais rien se passer entre eux. Mais il se demandait à présent s'il n'avait pas eu tort, tout compte fait.
—Mais c'est le cas, insista-t-il. Et tu n'imagines même pas à quel point je tiens à toi.
Il la regarda dans les yeux quelques instants, le souffle court et le cœur battant, avant de poser délicatement ses lèvres sur les siennes. Il l'attira un peu plus contre lui et pendant un instant, un court instant de répit, il oublia tout ce qui n'allait pas dans leurs vies. Et pendant ce court moment, il lui sembla que tout n'allait pas si mal.
Stella fini par se retirer et baissa les yeux vers le sol.
—Il y a quelque chose qui ne va pas avec moi, Nox.
Il fronça les sourcils.
—Qu'est-ce que tu veux dire ?
—Je ne sais pas ce que c'est mais... mon sang... Il a quelque chose d'étrange, et je n'aime pas ça.
Nox la regarda longuement. Oh, il n'aimait pas ça non plus...
Il dégagea les cheveux de Stella pour laisser apparaître sa gorge. Il la regarda d'un air interrogateur, mais elle ne dit rien. Il se pencha lentement vers sa gorge et entailla la peau avec un de ses crocs pour laisser le sang couler sur sa langue.
Les yeux de Nox s'ouvrirent en grand. Il se retira brusquement et cracha le sang qu'il avait dans la bouche. Il reconnaissait à présent l'odeur si particulière qu'il avait eu tant de mal à identifier la première fois.
—Qu'est-ce que ça veut dire, Nox ? s'inquiéta Stella en plaquant sa main sur la plaie.
Nox attrapa un verre d'eau qui était posé sur la table de nuit et le but d'une traite pour enlever le goût du mieux qu'il put.
—Rien, mentit-il. Ce n'est rien.
Mais Stella ne semblait pas convaincue.
—Qu'est-ce qui m'arrive, Nox ? lui demanda Stella, les yeux étaient embués de larmes.
Nox ne répondit rien, parce qu'il n'y avait rien à répondre. Il fixait ses yeux, ses yeux qui n'étaient plus aussi foncés qu'ils l'étaient la première fois qu'il l'avait rencontrée, tout en cherchant ses mots.
—Qu'est-ce qui m'arrive, Nox ? répéta-t-elle.
—Je ne sais pas, Stella.
Elle le regarda d'un air implorant.
—Nox, est-ce que je vais...
Mais elle ne finit pas sa phrase. Au lieu de ça, ses yeux s'ouvrirent en grand et elle eut un hoquet de surprise. Nox fronça des sourcils avant de comprendre qu'elle regardait quelque chose derrière lui. Il se retourna et aperçut quelqu'un qui se tenait entre eux et la fenêtre grande ouverte.
Sans plus attendre, il se précipita vers l'intrus et l'attrapa par la gorge avant de le plaquer contre le mur.
—Nox, dit le Prédateur d'une voix étranglée, arrête, c'est moi !
—Je sais très bien que c'est toi, Meto, gronda Nox. Tu n'as rien à faire ici.
Meto secoua la tête. Il ne semblait pas aussi sûr de lui que la dernière fois, peut-être parce qu'il pouvait sentir la colère qui se dégageait de Nox ce soir-là.
—J'étais... venu... te chercher...
Nox se décida enfin à relâcher la pression pour entendre ce qu'il avait à dire et Meto s'écroula sur le sol en toussant.
—Pourquoi, Meto ? s'impatienta-t-il.
Le jeune Prédateur prit quelques secondes avant de retrouver son souffle.
—On doit aller au Centre, dit-il péniblement. Neb et moi, on te cherche depuis tout à l'heure. On est les derniers du Quartier à ne pas encore être partis et la dernière navette part dans vingt minutes.
—Génial, lâcha Nox. Vous n'auriez pas du vous donner autant de mal, parce que ce sera sans moi.
Meto lui jeta un regard noir.
—Tout le monde doit y aller, Nox. (Il jeta un coup d'œil à Stella.) À moins que tu ne veuilles leur expliquer pourquoi tu ne peux pas venir ?
Nox serra les mâchoires et sembla hésiter quelques secondes.
—Descends, ordonna-t-il à Meto. J'arrive dans cinq minutes.
Meto poussa un soupir de soulagement et disparut par la fenêtre.
Nox se retourna et jeta un coup d'œil à Stella.
—Nox, balbutia-t-elle, comment... comment est-ce qu'il est arrivé jusque là ?
Il se rapprocha d'elle et la prit par les épaules.
—Il m'avait suivi une nuit alors que j'étais venu te voir. Ne t'inquiète pas pour ça, d'accord ? Il ne reviendra pas, je m'en assurerais.
Stella hocha lentement la tête et frissonna.
—Ne me laisse pas, Nox, s'il te plaît, l'implora-t-elle.
Il passa ses bras autour d'elle et la serra contre lui.
—Je n'ai pas le choix... Je reviendrais dès que possible, je te le promets. Peut-être que je pourrais trouver des informations sur comment quitter la Ville. Et après... on partira, d'accord ?
—Quand, Nox ?
—Demain, souffla-t-il. Demain soir, on s'enfuit. Promis.
Stella hocha de nouveau la tête.
—Reviens vite, s'il te plaît.
—Promis, murmura-t-il avant de poser ses lèvres une dernière fois sur les siennes.
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