- Chapitre 20 -

Le lendemain, Stella avait donné rendez-vous à Nox dans le parc. Les Nuits Calmes étant terminées, elle préférait éviter au maximum qu'ils se voient la nuit. Elle s'installa sur le banc et ouvrit un livre en l'attendant.

Quelques minutes après quelqu'un s'assit à côté d'elle et elle sut sans même regarder que ce n'était pas Nox.

—Je peux savoir ce que vous faites ici ? demanda-t-elle sans lever les yeux de son livre.

—Eh bien, je venais m'excuser pour hier soir, expliqua Jacob.

Stella haussa un sourcil et leva la tête vers lui.

—Vous excuser ? Est-ce que vous savez seulement de quoi, ou votre ego vous aveugle trop pour ça ?

Jacob lui adressa un grand sourire.

—Je venais m'excuser d'avoir été un peu brusque avec vous.

—Oh, mais qu'entends-je là ? ironisa Stella. Vous vous êtes remis à me vouvoyer.

Jacob semblait réfléchir à la suite mais Stella le coupa.

—Je ne suis pas stupide, vous savez ? Je sais très bien que vous si vous insistez tant à sortir avec moi c'est simplement pour me surveiller ou quelque chose comme ça. On vous a demandé de vous assurer que je ne fasse pas de bêtises et vous obéissez comme un gentil petit toutou.

Jacob se passa la main dans les cheveux, son sourire semblant un peu forcé à présent.

—Disons que je suis curieux.

—Curieux ?

—Curieux de savoir ce que vous avez de si spécial pour que vous surviviez après deux sorties en pleine nuit. J'ai reçu vos analyses de sang, il n'y a rien d'anormal. Alors c'est plutôt étrange, non ?

—Oh, Jacob... On se pose tous des questions. Par exemple, j'ai passé une bonne partie de la journée à me demander comment Octave avait pu savoir que je me trouvais dans ce restaurant. Il n'avait rien à faire là. À moins que quelqu'un n'ait voulu jouer les héros et l'ait prévenu.

Jacob ne put s'empêcher de ricaner un peu.

—Vous savez, je n'ai jamais vraiment eu de problème avec la gent féminine. Alors pourquoi est-ce que j'ai autant de mal avec vous ?

—Eh bien, vous l'avez dit vous-même. Je suis une jeune femme intelligente. Et vous savez à qui vous me faites penser, Jacob ? À mon beau-père.

—Votre beau-père ? s'offusqua-t-il. Celui qui a essayé de vous tuer ? J'espère que vous plaisantez.

—Je ne parle pas de ça. Mais vous êtes les mêmes au fond. Vous pensez que vous pouvez avoir tout ce que vous voulez parce que votre sourire fait fondre les filles et vous avez un ego démesuré. Sans oublier le côté manipulateur.

—Je vois. Je suppose qu'il est inutile de vous proposer un autre rendez-vous dans ce cas ?

—Effectivement.

Jacob poussa un long soupir et se leva du banc. Il fit mine de partir et au moment même où Stella s'étonna qu'il abandonne aussi facilement il s'arrêta.

—Oh, j'ai failli oublier de vous souhaiter une bonne chance pour votre retour au lycée.

Stella fronça les sourcils.

—De quoi est-ce que vous parlez ?

—Votre père ne vous a pas dit ? Vous ne pouvez pas étudier chez vous. Vous allez devoir finir votre année scolaire au lycée, comme tout le monde. Mais ce n'est pas si mal, cela vous fera voir du monde et... (Jacob prit un air faussement étonné.) Oh ! J'avais presque oublié... Votre beau-père est professeur dans l'établissement, non ? Aïe... à votre avis, comment va-t-il réagir quand il vous reverra ?

Le visage de Stella crispa.

—Vous vous foutez de moi ?

—C'est dommage, l'ignora Jacob, la présence d'un inspecteur de police dans votre entourage aurait pu le dissuader de faire quoi que ce soit...

—Vous êtes un enfoiré.

—Et vous, vous êtes insupportable. Mais à défaut d'être aimable... (Il la scruta de la tête aux pieds.) Vous avez l'avantage d'être très agréable à regarder.

Stella le fixa d'un regard noir mais ne répondit rien.

—Vous avez jusqu'à lundi pour réfléchir à ma proposition, conclut Jacob. Si jamais vous changez d'avis...

Il s'éloigna avec un grand sourire et quitta le parc. La mâchoire serrée et les yeux dans le vague, Stella réfléchissait à la discussion qu'elle venait d'avoir.

—Tu as écouté ? demanda-t-elle sans tourner les yeux quand elle sentit Nox s'asseoir à côté d'elle quelques secondes après.

—Oui.

Elle glissa sa main dans la sienne et leurs doigts s'entrecroisèrent.

—Et qu'est-ce que tu en penses ? l'interrogea-t-elle en continuant de fixer le vague en face d'elle.

—Que je n'ai pas besoin de m'inquiéter de ce que je vais manger cette nuit.

Stella ne put s'empêcher de pouffer.

—Ne dis pas n'importe quoi. Je vais accepter.

Les doigts de Nox se resserrèrent brusquement sur les siens jusqu'à lui en faire mal mais elle ne dit rien.

—Quoi ? s'exclama-t-il. Est-ce que c'est à cause de Latro ? Je peux m'occuper de lui aussi, si c'est ça le problème.

—Ce n'est pas ça, répondit Stella d'un ton un peu irrité. Qu'est-ce que tu crois, que j'ai peur de lui ?

—Oh, je ne crois pas que tu as peur de lui, Stella, je sais que tu as peur de lui. Tu transpires la peur dès que tu entends son nom et je peux le sentir. Alors n'essaie même pas de jouer à ça avec moi.

—Très bien. J'ai peur de lui. Et Jacob peut croire que j'accepte de sortir avec lui à cause de ça si ça lui chante, mais ce ne sera pas le cas.

—Alors pourquoi ?

Stella tourna la tête vers Nox et remonta un peu sa capuche pour pouvoir le regarder dans les yeux.

—Parce que là où l'on a des questions, Jacob a des réponses.

Nox desserra un peu la pression de ses doigts sur les siens.

—Je n'aime pas ça, dit-il simplement.



Quand elle rentra chez elle, Stella trouva son père en train de faire les cent pas dans le salon, l'air irrité.

—Qu'est-ce qui se passe ? demanda-t-elle.

Tego sursauta, comme s'il venait soudain de réaliser sa présence. Il sembla hésiter un instant avant de lui dire ce qui le tracassait.

—J'ai reçu un courrier du ministère de l'éducation, expliqua-t-il en avalant difficilement sa salive. Ils refusent que tu finisses tes études à la maison.

—Je sais, bougonna Stella en fixant ses chaussures. Je viens d'avoir une discussion... intéressante avec Jacob. Je pense que Latro me laissera tranquille tant que Jacob est dans les parages.

Tego plissa les yeux jusqu'à ce qu'ils ne soient plus que deux fentes.

—Je croyais que tu ne voulais plus jamais le revoir ?

—J'ai changé d'avis. Je crois... je crois que j'ai beaucoup à apprendre de cette relation.

Elle sourit faiblement à son père et alla se réfugier dans sa chambre.

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