- Chapitre 16 -
Le lendemain, à l'heure du dîner, alors que Stella était perdue dans ses pensées, Vera se leva brusquement de table pour courir jusqu'à la salle de bain.
—Qu'est-ce qu'elle a ? demanda Stella, qui n'était pas sûre s'il y avait une raison évidente à sa soudaine sortie.
Son père haussa les épaules, mais elle remarqua qu'il avait un léger sourire en coin. Elle fronça les sourcils en signe d'interrogation et il lui fit signe de se rapprocher.
—Elle est partie vomir, elle n'arrête pas depuis quelques jours.
—Et ça te met en joie parce que... ?
—Je pense qu'elle est enceinte. Je m'en doutais déjà quand on s'est mariés, mais j'en suis sûr à présent.
Tego avait l'air plutôt content, comme si c'était la meilleure chose qui pouvait arriver.
—Oh, dit Stella qui ne savait pas trop quoi répondre.
—Je vais être de nouveau papa, rajouta-t-il avec un grand sourire.
—Et ça ne te dérange pas ? s'étonna-t-elle. Que ce ne soit pas le tien ?
Il haussa les épaules pour montrer son indifférence.
—Pour moi, ce sera le mien.
Stella regarda son père et hésita quelques instants.
—Tu devrais dire à Vera que tu es au courant. Je pense que ça la rassurerait.
Vera arriva à ce moment-là et Stella décida de s'éclipser.
Alors qu'elle était de retour dans sa chambre, elle commença à s'inquiéter. Maintenant que son père savait pour le bébé, Vera n'avait plus vraiment de raison de lui cacher l'existence de Nox.
Elle faisait les cent pas dans sa chambre quand elle crut entendre Vera et son père discuter. Elle se rapprocha de la porte et y colla son oreille. Étrangement, elle n'eut pas de mal à les entendre clairement.
—J'avais peur que tu n'en veuilles pas, dit Vera.
—Pourquoi ? s'étonna Tego.
—Parce que ce n'est pas ton enfant.
—Ça ne fait pas de différence à mes yeux.
—Vraiment ?
Il y eut un silence, et Stella arrêta de respirer de peur qu'ils ne l'entendent à travers la porte.
—Je peux te dire un secret ? murmura alors Tego, et Stella du se concentrer pour pouvoir entendre la suite. Je ne suis pas le vrai père de Stella.
La suite, Stella ne l'entendit pas car ses oreilles s'étaient misent à bourdonner sous le choc de la révélation de son père.
Tego n'était pas son vrai père.
Elle se laissa glisser sur le sol.
Elle avait du mal à avaler l'information. Est-ce qu'elle avait vraiment bien entendu ? Au fond, elle savait que oui.
Tel un automate elle se prépara pour aller au lit et s'allongea sans prendre la peine de défaire les couvertures.
Quelqu'un frappa à la porte et Vera entra juste après. Combien de temps s'était-il écoulé depuis qu'elle avait entendu la conversation à travers la porte ? Une heure ? Deux ?
Vera referma la porte derrière elle et se rapprocha du lit.
—J'ai discuté avec ton père.
Stella garda les yeux fixés sur le plafond, sans rien dire.
—Il est au courant pour le bébé, rajouta-t-elle.
—Ce n'est pas moi qui le lui ai dit, répondit simplement Stella. Il le savait déjà, je lui ai juste dit de t'en parler.
—Je sais, je sais...
Un silence s'installa dans la chambre. Stella n'arrivait pas vraiment à être là, et elle ne prit même pas la peine de se demander ce que Vera cherchait exactement en venant la voir.
—Je ne lui ai rien dit. Pour Nox.
—Tant mieux.
—Et j'espère vraiment que ce n'est pas une erreur, rajouta-t-elle.
Stella resta silencieuse, plus parce qu'elle avait du mal à rester concentrer qu'autre chose.
—Est-ce que ça va, Stella ? Tu es bizarre ce soir.
Stella tourna enfin la tête vers elle, sortant un peu de son brouillard.
—Je vais bien. Je crois que j'ai juste besoin de dormir.
Vera acquiesça et se dirigea vers la porte avant de s'arrêter.
—Est-ce qu'il va revenir, ce soir ?
—Je ne sais pas, dit Stella après quelques secondes d'hésitation.
Vera sembla réfléchir quelques instants.
—Ce petit jeu ne pourra pas durer éternellement, tu le sais, n'est-ce pas ?
—Je sais.
Vera soupira en signe de désapprobation et sortit de la chambre.
Stella se demanda pourquoi Vera continuait à garder le secret. Peut-être était-ce pour ne pas se mettre Stella à dos, ou simplement parce qu'elle craignait de révéler à Tego qu'elle lui avait caché quelque chose jusque-là.
Stella se décida à éteindre la lumière et tenta malgré tout de s'endormir.
Cette nuit-là, Nox ne fit aucun bruit quand il entra par la fenêtre mais Stella ne fut pas le moins du monde surprise quand elle ouvrit les yeux et qu'elle le retrouva en face d'elle.
—Je ne voulais pas te réveiller, chuchota-t-il.
Stella haussa les épaules.
—J'avais du mal à dormir.
Nox la scruta pendant de longues secondes, comme s'il cherchait à trouver ce qui pouvait ne pas aller.
—Qu'est-ce qui ne va pas ? demanda-t-il finalement.
—J'ai entendu mon père discuter avec Vera. Il a dit qu'il n'était pas mon vrai père.
Nox ne répondit pas tout de suite, la regardant avec attention.
—Est-ce que ça change quelque chose ? demanda-t-il doucement.
—Je suppose que non.
—Mais ça te rend triste ?
—Je ne sais pas.
Il posa son front contre le sien et elle sourit faiblement.
—Tu sais, ma mère n'est pas ma vraie mère non plus. Aucun de nous n'est élevé par notre véritable mère. Pourtant, je ne pourrais jamais considérer une autre femme comme ma mère. Même si on a le même sang.
—Tu t'entends bien ? Avec ta mère, je veux dire.
Il sembla à Stella que le visage de Nox s'était crispé pendant un instant. Cependant il hocha la tête.
—Je retourne la voir des fois. Je ne suis pas vraiment supposé le faire, mais je m'en fous. Elle n'est pas comme les autres mères, elle a cet instinct maternel dont ceux de mon espèce semblent dépourvus.
Stella continua à lui poser des questions sur sa famille et apprit que Nebulo n'était pas le vrai frère de Nox, juste un autre Prédateur que la mère de Nox avait élevé et sur qui elle lui avait demandé de veiller.
Ils discutèrent jusque tard dans la nuit et Stella finit par s'endormir sans s'en rendre compte.
* * *
Nox avait décidé de partir avant les premières lueurs du jour. Il n'avait pas dormi de la nuit, il n'en avait pas vraiment l'habitude. Au lieu de ça, il avait passé les dernières heures de la nuit à observer Stella dormir.
Il y avait quelque chose chez elle, quelque chose d'étrange qui l'intriguait tout autant qui l'attirait, mais il n'était pas capable de trouver ce dont il s'agissait exactement. Tout ce qu'il savait, c'était qu'il devait faire attention.
Il marchait dans les rues sombres depuis quelques minutes déjà quand il s'arrêta brusquement.
—Depuis combien de temps est-ce que tu me suis ? demanda-t-il alors.
—Pas mal de temps.
Nox se retourna et fit face à Meto.
—J'espère que tu as une bonne raison pour ça, lui lança-t-il d'un ton menaçant.
—Je te trouvais étrange depuis quelque temps. Et je ne t'ai pas vu participer à la Grande Chasse, je me demandais où tu pouvais bien être passé.
Nox ne répondit rien, n'étant pas sûr de ce que Meto avait découvert.
—Je croyais que l'on avait pas le droit d'entrer chez les humains.
Nox se rapprocha vivement de Meto et l'attrapa par le col.
—Je pense que tu es un peu trop curieux, gamin.
Du haut de ses douze ans, Meto semblait plus confiant que Nox ne l'aurait souhaité.
—Je ne comprends pas pourquoi tu vas la voir. C'est une humaine.
—Je ne te demande pas de comprendre, siffla Nox entre ses dents, je te demande juste de la fermer.
—Je ne dirais rien à personne. J'aurais pu le faire avant si je l'avais voulu.
Nox se détendit un peu et le relâcha.
—C'est la même fille, n'est-ce pas ? Celle avec qui tu étais la veille de la Grande Chasse. (Nox ne répondit rien.) Ça me semblait bizarre, aussi. Elle portait ton sweat.
Nox se contenta de le regarder sans répondre.
—C'était aussi celle que Neb et toi avez chassée l'autre jour, continua Meto.
—Qu'est-ce qui te fait dire ça ?
—Quand tu es revenu, tu avais son sang sur toi. Son sang... il a quelque chose de bizarre, c'était très léger. La plupart ne l'auraient pas remarqué, mais je sais que toi tu l'aurais forcément senti. Je me suis dit que tu n'aurais pas mangé ça.
—Tu l'as senti, toi aussi ? dit Nox en fronçant les sourcils.
Meto acquiesça.
—Qu'est-ce que c'est ? Je n'ai pas réussi à identifier l'odeur. Est-ce qu'elle est malade ?
—Je ne sais pas, Meto.
Les deux Prédateurs restèrent silencieux pendant quelques secondes.
—Pourquoi est-ce que tu vas la voir ?
—Ça ne te regarde pas.
—Est-ce que c'est parce que c'est une fille ?
—Non.
—Alors pourquoi ? Insista Meto.
—Je ne sais pas, répondit-il finalement en haussant les épaules. J'aime bien être avec elle. Elle a quelque chose que les nôtres ne connaissent pas. Elle est gentille. Elle est douce.
—Et elle n'a pas peur de toi ? s'étonna Meto.
—Non.
—Est-ce que tu pourras me la montrer un jour ?
—Non.
—Est-ce que tu penses qu'elle pourrait avoir un enfant de toi si elle est humaine?
—On ne fait pas ce genre de chose, Meto !
—Vous faites quoi alors?
Nox soupira. Le flot incessant de questions commençait à mettre ses nerfs à rude épreuve.
—Ça ne te regarde pas.
Meto sembla réfléchir un instant, comme s'il cherchait une nouvelle question à poser. Il était jeune et, tout comme Nox, il était parti très tôt du cocon maternel.
—Pourquoi est-ce que tu me colles comme ça depuis quelque temps ? demanda alors Nox.
—Oh... J'ai remarqué ça le soir où tu avais mordu la fille. Tu saignais. J'ai failli ne pas le sentir à cause de l'odeur de l'humaine mais...
Meto prit son poignet et y donna un coup de crocs, laissant le sang couler pour que Nox puisse en sentir l'odeur.
Celui-ci fronça les sourcils puis sourit. Le sang avait la même odeur que le sien : Meto était son frère.
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