- Chapitre 10 -

Elle ferma vivement les yeux et attendit mais ne sentit rien. Elle réalisa alors que le Prédateur avait stoppé net dans son mouvement et ses crocs restaient en suspension de sa gorge, assez près pour qu'elle puisse sentir son souffle chaud sur elle. Il releva la tête et scruta les horizons.

—Qui est là ?

Elle entendit du mouvement en face d'eux mais elle n'arriva pas à relever la tête car il maintenait toujours la capuche en arrière. Elle respirait difficilement. Qu'est-ce qu'il se passait ? Est-ce qu'il comptait la tuer tout compte fait ?

—Meto, grogna-t-il. J'espère que tu as une bonne raison de me déranger.

—Neb' m'a dit que tu traînais encore dans les rue et je... (L'inconnu fit une pause.) Est-ce que c'est une fille ? Neb' m'a dit que vous en aviez chassé une l'autre jour aussi et...

Stella l'entendit s'approcher d'eux et le Prédateur gronda au-dessus d'elle.

—Qu'est-ce que tu veux, Meto ? dit-il d'une voix menaçante.

L'autre s'éclaircit la gorge.

—Hm, demain c'est... hm... la Grande Chasse débute et je me demandais si tu pourrais m'apprendre à chasser comme tu le fais avec Neb' et...

—D'accord, le coupa-t-il. Maintenant dégage.

Les pas s'éloignèrent mais il le rappela au dernier moment.

—Meto, attends avant de partir.

—Quoi ?

—Ne parle de la fille à personne, c'est compris ? Sinon tu peux oublier pour que je t'aide demain.

L'autre acquiesça avant de tourner les talons. Stella n'osait pas bouger, ne sachant pas ce qu'il comptait faire d'elle ensuite.

Ce qui lui sembla être une éternité après, il finit par se redresser et l'aida à se remettre sur ses pieds. Elle tituba un peu et s'appuya contre un mur pour reprendre son souffle.

—Ça va ? lui demanda-t-il d'une voix douce en posant une main sur son épaule.

Elle sursauta à son contact et lui lança un regard plein d'effroi.

—Désolé, je n'ai pas eu le temps de te prévenir, je l'ai senti arriver au dernier moment...

—Qu'est-ce que c'est ? demanda-t-elle une fois qu'elle eut repris ses esprits. La Grande Chasse ?

Il la regarda avec attention sans rien dire pendant quelques secondes, comme s'il se demandait qu'elle était la meilleure réponse à donner.

—Tu ne veux pas savoir, lâcha-t-il finalement d'une voix grave. Allez, viens.

Il se remit en marche et Stella accéléra le pas pour le rattraper.

—Qu'est-ce que c'est ? insista-t-elle. Pourquoi est-ce que ça tombe au même moment que les Nuits Calmes ?

Il s'arrêta brusquement et Stella butta contre son dos.

—Les Nuits calmes ? répéta-t-il, l'air confus.

—Tu sais... les nuits où vous ne chassez pas. Ça arrive tous les ans, pendant environ un mois à chaque fois...

Il se retourna vers elle et l'observa en fronçant les sourcils.

—Il n'y a pas de "Nuits Calmes", Stella. Pas comme tu l'entends.

Elle chercha à en savoir plus mais il refusa d'aborder plus la question. Une vingtaine de minutes plus tard, ils débouchèrent sur la rue des carillons sauvages, où habitait le père de Stella.

—C'est là, dit-elle, mais aucun des deux ne bougea.

Elle défit le sweat et le lui tendit.

—Merci...

—Nox, finit-il.

—Nox..., répéta-t-elle comme pour mémoriser son nom. Merci de m'avoir sauvé la vie, Nox.

Il acquiesça sans rien dire, le regard rivé vers ses pieds.

—Tu n'étais obligé de le faire, rajouta-t-elle après un court silence. Alors pourquoi ?

Il leva les yeux vers elle, et elle ne put s'empêcher de remarquer qu'il n'y avait aucune animosité dans son regard. Peut-être qu'il n'y en avait jamais eut, en fin de compte.

—Je ne sais pas. Quand je t'ai vue ce soir-là... Je t'ai trouvée jeune. Du genre innocente. Ça m'a perturbé... Et je suppose que j'étais un peu curieux, aussi.

—Curieux ?

—Parce que je n'avais vu quelqu'un comme toi. Et je ne pouvais pas m'empêcher de me demander ce que tu faisais là en pleine nuit.

—Ma mère m'avait jetée dehors, expliqua Stella. Et aucun de mes voisins n'a voulu prendre le risque de m'ouvrir, de peur de subir le même sort.

Il la regarda en fronçant les sourcils, comme s'il ne comprenait pas.

—Mais elle savait, n'est-ce pas ? Ce qui risquait de t'arriver.

—Si elle savait ? s'esclaffa la jeune fille. Elle priait pour que je me fasse bouffer, ouais.

—C'est... cruel. Ton espèce n'est pas si différente de la mienne, au final.

—Oh, ma mère peut-être. Pas tout le monde.

Il la fixa avec attention quelques instants.

—Je pense que tu n'es pas si différente de nous non plus.

—Moi ? s'écria-t-elle. Oh non ! Je n'ai rien avoir avec ton espèce. Je ne...

Elle s'arrêta sans terminer sa phrase.

—Quoi ? Tu ne chasses pas la nuit pour manger ?

—Oui.

—Ce n'est pas... C'est juste notre instinct, tu sais ? On fait ça pour survivre. Tu ferais la même chose à notre place.

Elle secoua vivement la tête.

—Je ne pense pas.

—Vraiment ? demanda-t-il en se rapprochant d'elle. Pourtant, le sang autour de ta bouche dit le contraire.

Il passa ses doigts sur ses lèvres encore rouges du sang de Latro.

—Plutôt animal comme instinct, non ? rajouta-t-il avec un sourire.

Elle tourna sa tête sur le côté, laissant les doigts de Nox retomber dans le vide.

Autour d'eux, le ciel commençait à devenir plus clair et Stella remarqua que les yeux de Nox ne brillaient plus autant qu'en pleine nuit. À ce moment précis, il ressemblait à un jeune homme comme les autres. Alors, sans vraiment savoir pourquoi, elle se pencha légèrement vers lui et posa ses lèvres contre les siennes. Nox eut une seconde d'hésitation puis finit par lui rendre maladroitement son baiser.

Ce fut Stella qui se retira la première. Elle s'écarta de lui, un peu surprise par ce qu'elle venait de faire. Nox la regardait d'un air interrogateur, comme s'il n'avait pas comprit ce qui venait de se passer.

—C'était... (Nox fit une pause pour reprendre son souffle.) C'était intéressant.

Stella se sentit rougir d'un coup. Intéressant ?! C'était le seul mot qu'il avait trouvé pour qualifier leur baiser ?

—Le soleil commence à sortir, dit-elle en fuyant son regard. Peut-être que tu devrais y aller. Je ne voudrais pas que tu finisses réduit en cendres ou je ne sais quoi.

Nox haussa un sourcil.

—Je ne crains pas vraiment le soleil, mais tu as raison. Je devrais peut-être y aller.

Il rabattit sa capuche sur son visage et s'éloigna dans la rue qui commençait tout juste à sortir de la pénombre. Stella le regarda s'éloigner puis monta les escaliers jusqu'à la porte de ce qui était à présent sa nouvelle maison. Elle fit tourner la clé dans la serrure et referma doucement la porte derrière elle.

Elle se retrouva face au miroir de l'entrée et lâcha son sac en apercevant son reflet. Elle ne se reconnaissait pas vraiment. Ses cheveux étaient ébouriffés, ses vêtements largement déchirés et du sang avait coulé le long de son visage et de son menton.

Elle se rapprocha un peu du miroir. Quand elle avait rencontré Nox la première fois, il l'avait épargnée à cause de son innocence, et elle avait eu peur de lui à cause de son caractère en apparence sauvage. Cette nuit-ci, elle l'avait embrassé en découvrant une étrange part d'innocence en lui. Elle passa sa main dans ses cheveux en bataille et esquissa un sourire à son reflet. Peut-être avait-elle un côté sauvage, après tout.

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