20 - J'avais besoin de parler

/ CW : Mention d'abus, de harcèlement et brièvement de viol. \


Parfois, je prends un peu de temps pour me poser et réfléchir. Réfléchir à ce que je suis. A comment j'en suis arrivé-e là.

Ca a notamment été le cas, hier soir. J'ai essayé de faire un point sur mes ressentis, mes émotions. Les comprendre. Celleux qui m'ont sur Instagram savent à quoi je fais allusion.

Et cette réflexion m'a amené-e à une interrogation.


A quel moment mon cerveau s'est-il détérioré au point d'en devenir malade ?


J'y ai pensé une bonne partie de la nuit. J'ai essayé de mettre le doigt sur le pourquoi du comment. De comprendre ce qui a causé chez moi cette peur-panique de l'abandon. Ce désir de ne jamais déplaire à qui que ce soit. Cette inquiétude à l'idée d'éveiller la colère de quelqu'un. Et ce malaise que je peux ressentir en compagnie de quelqu'un que je ne connais pas ou peu.

Et puis, ça m'a frappé. Jusqu'à récemment, je ne me suis jamais senti-e en sécurité nulle part. Le danger me suivait toujours, où que je me trouve.

A l'école? Je me faisais au mieux ignorer, au pire harceler. La moindre de mes actions pouvait être un sujet à rigolade ou à critique. Moqueries, menaces, jugements. L'on s'amusait avec moi comme une vieille poupée de chiffon, ne considérant pas un seul instant ce que je pouvais ressentir face à ce flot de haine et de mépris.

A la maison? Je vivais dans l'inquiétude permanente d'éveiller la colère de mon géniteur. Le moindre faux pas était prétexte à crier, blâmer, frapper. Même lorsque tout semblait bien aller, j'avais la peur au ventre, tendu-e au possible, de peur de faire une erreur et de briser ce petit instant de paix.

Alors, oui, j'ai cherché de l'aide. Auprès de la CPE, pour mon problème de harcèlement. CPE qui n'a rien trouvé de mieux à reporter la faute sur moi, en disant que si je me faisais moins discret-e, les choses seraient différentes. Alors que si j'étais "discret-e", c'était justement parce que les choses se déroulaient ainsi.

Auprès de ma génitrice pour ma peur envers mon géniteur. Génitrice qui me sortait toujours les mêmes excuses. "C'est ton père, il est comme ça". Et est-ce que c'est une raison pour frapper son enfant? Pour le faire vivre dans la peur? Non. Ce n'est pas excusable. Mais je devais faire avec. Je ne savais pas vers qui me tourner.


Au lycée, le harcèlement s'est calmé. Il y avait toujours quelques élèves de mon collège pour me pointer du doigt et inciter les autres à rire. Mais la chose se faisait moins fréquemment.

Mes parents ont divorcé. Je voyais mon géniteur un week-end sur deux. Le reste du temps, je pouvais être en paix, malgré son spectre ne cessant de me hanter.

J'ai eu un copain. Je pensais trouver un petit havre sécurisé à ses côtés. Ce n'était pas exactement ce qui m'attendait - bien que je ne développerais pas ce qui a pu se passer entre lui et moi ici - et je sais que lui aussi est responsable de mon état actuel.


Je n'ai pas l'envie, ni l'énergie de décrire tout ce qui a pu m'arriver, mais vous saisissez le tableau, je suppose.


Vous savez quand j'ai commencé à me sentir sain et sauf? Il y a trois ans.

Il y a trois ans.

Lorsque j'ai emménagé avec mon partenaire actuel. Que j'ai pu dire au revoir à mon ancien foyer, mon ancienne ville. Que j'ai pu reprendre à zéro, à ses côtés. Mais inutile de vous dire que depuis, les dégâts avaient déjà été fait. J'avais déjà été formaté-e, tant on m'avait poussé-e à penser que mon existence était indésirable. On m'avait appris à me détester. A me mépriser.

Et c'est cette longue période d'insécurité qui a amené à ce que je suis aujourd'hui. Quelqu'un qui a peur de perdre celleux qu'iel aime et de se retrouver seul-e. Qui a peur de faire le moindre faux pas, de vexer qui que ce soit. Qui subit une montée d'anxiété dès qu'iel sent un brin de colère dans l'air. Qui ne supporte pas la colère et les conflits. Qui ne comprend pas ce qu'iel ressent, la plupart du temps. Qui a dû pendant si longtemps se réfugier dans la fiction pour ne pas finir au bout d'une corde. Dont l'humeur ne parvient pas à se stabiliser.

Quelqu'un qui se sent souvent vide. Seul-e. 


Alors est-ce que j'ai choisi d'être atteint de troubles borderlines? Non.

Est-ce qu'ils me sont tombés dessus, un jour, sans aucune raison? Non plus.

Toutes ces années durant, la maltraitance a planté leurs graines. Les a alimentés. Leur a permis de grandir et s'enraciner. 

Les rires, les moqueries, les coups, les menaces, les cris, les dépréciassions, les viols, l'esseulement. Tout cela s'est ancré dans mon esprit. Tout cela a forgé la maladie. L'a rendue plus forte.

Je ne parviens pas à m'aimer. A avoir la moindre confiance en moi. A accorder la moindre valeur à ma vie.

C'est pourquoi, pour compenser, je donne le plus d'amour possible aux personnes qui m'entourent. C'est pourquoi je fais de mon mieux pour leur offrir un safe-space, un endroit où elles peuvent parler sans crainte de se faire juger, déverser leurs émotions. Je ne veux pas que qui que ce soit vive la même chose. Je sais que c'est impossible. Que l'injustice est partout. Mais je veux au moins pouvoir aider un minimum.


Je ne sais pas trop où je vais, en écrivant tout cela. J'avais besoin de vider mon sac, je suppose. Je ne sais même pas si quelqu'un lira jusqu'au bout.

Peu importe, ça m'a fait du bien.

Prenez soin de vous. Je le dis souvent, mais n'hésitez pas à me solliciter, si vous avez besoin / envie de parler. Rester seul-e avec ses idées noires n'est jamais une bonne idée.

Je vous aime.

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