Partie 13
-"Boss!!" hurlèrent Mady et Stef en éclatant la porte du bureau contre le mur.
Meryl sursauta à cause de cette entrée fracassante en se disant qu'elle devait des excuses à Todd. Il avait insisté pour que toutes les parois en verre soient blindées, que tous les murs soient insonorisés et il avait suggéré la même chose pour les portes mais elle l'avait stoppé en se moquant de lui et de son obsession pour la résistance des matériaux. En voyant la porte ne tenir que sur un seul gond avec la poignée totalement disloquée elle imaginait déjà son air blasé et entendait même venir son "je te l'avais dit" à des kilomètres. Il avait toujours été fan d'architecture et son rêve de gosse c'était de devenir un brillant architecte mais il venait d'une famille d'avocats et on ne lui avait pas vraiment laissé le choix. Quand Meryl et lui avaient acheté ces locaux une dizaine d'années plus tôt pour y installer ses bureaux à lui et "Ran Corp" elle l'avait laissé gérer tous les plans. Du garage au toit il avait tout géré. L'accueil, les appartements des employés de la sécurités, de l'entretien des quatre premiers étages, la crèche et la garderie du 5ème, l'étage de sports pour les employés au 6ème, les trois étages suivants pour son cabinet d'avocats et les 30 autres étages de l'entreprise de Meryl avant de finir par leurs trois derniers étages personnels. Il avait vraiment tout fait en anticipant le pire et en pensant à chaque détail. Dit comme ça l'immeuble pouvait sembler énorme mais en réalité il était bien plus haut que large comparé aux immeubles voisins. On ne logeait bien "qu'une" dizaine d'appartements d'une cinquantaine de mètres carrés chacun par étage.
-"Ecoutez on retire ce que l'on a dit il y a deux semaines!" déclara Stef en faisant des allers-retours rapides dans le bureau.
-"Ouais. On ne veut pas qu'elles changent leur relation. On s'en fout de risquer de se prendre un mammouth en passant entre leurs bureaux!" s'emporta Mady en s'appuyant sur le bureau de la rousse.
-"Et si vous m'expliquiez plus... Calmement?" tenta Meryl en essayant de calmer ses deux employés.
-"Elles se font la guerre là! Genre super méga tendu!"
-"Ce que Stef veut dire c'est que la situation a empiré et si avant on était en mode "guerre froide" là on atteint le niveau de guerre nucléaire."
-"Les filles vous n'exagérez pas un peu? De plus il me semble que la Guerre Froide était un peu portée sur le nucl...."
-"On s'en fout de cette stupide guerre! Là c'est genre pire que tout. On a vraiment peur que ça dérape au point que ça fait trois nuits que l'on dort avec elles pour éviter qu'elles soient tentées de s'entre-tuer dans leur sommeil."
-"Elles ne nous disent rien. Il y a un truc qui cloche. Elles sont encore plus renfermées que d'habitude. Vraiment. Elles sont toutes les deux supers tendues. On en a parlé avec Stef et même si c'est leur "mauvaise semaine" ça n'a rien à voir avec ça. Elles sont vraiment à cran. Vous êtes la seule à pouvoir les raisonner ou même les faire parler."
-"Vous me donnez beaucoup trop de pouvoir là. Avant tout si elles ne vous disent rien c'est peut être en lien avec ce qu'elles cachent depuis des années. On a leur autorisation alors parlez moi du peu que vous savez sur elles."
-"Eh bien par exemple vous vous posiez des questions sur l'origine d'Eli. J'ai longtemps pensé qu'elle avait été adopté jusqu'à nos 10 ans où, lors d'une réunion des anciens élèves, j'ai croisé sa tante qui l'a élevé. C'est bien une Davis je peux vous l'assurer. Mettez les yeux bleus, les cheveux blonds et la peau très claire de côté et tout correspond. C'est vraiment le portrait craché de Jane Davis. Enfin de face. De profil pas trop..."
-"En ce qui concerne Aly elle ressemble très peu à ses parents. Elle n'a même rien à voir avec sa mère mais pourtant elle ressemble beaucoup à sa grand-mère que j'ai vue lors d'une réunion d'anciens élèves aussi et sinon elle a bien les caractéristiques typique des Kelly. Grandeur, corps longilignes, teint pâle, cheveux châtains, yeux bleus il y a toutes les caractéristiques types de leur famille mais au niveau des traits... Oui à part sa grand-mère elle ne ressemble à personne de sa famille. Aucun de ses oncles, pas son père et encore moins sa mère. Et tout comme Eli elle est arrivée dans l'école à 6 ans alors que normalement on y rentre à 2 ou 3 ans ou alors au collège/ lycée."
Meryl resta songeuse un moment jusqu'à ce que des cris venant du couloir ne les interrompent. Les trois femmes sortirent en vitesse pour se diriger vers le bureau d'Alyssa.
-"Qu'est ce qui ne va pas chez toi?!"
-"Tu me demandes ce qui ne vas pas chez moi?! T'es sérieuse Alyssa?!"
-"Oui je suis sérieuse! J'en ai marre de ton comportement d'emmerdeuse de première. Qu'est ce que tu viens faire dans mon bureau là, maintenant?"
-"Tout le monde dans l'entreprise raconte que je me suis tapé Mike!"
-"Et tu crois que c'est moi? Je te rappelle que tout le monde me déteste ici alors, excuse-moi mais je m'imagine mal aller colporter des rumeurs autour d'un café. Enfin "rumeur" est un grand mort car j'ai pu voir de mes propres yeux que c'est la pure vérité."
-"La ferme!" hurla Elina "Ce n'est qu'à moitié vrai car tu t'en es bien assuré! Je te déteste du plus profond de mon être!"
-"Oh je suis flattée. Contrairement à monsieur charmant on dirait que j'ai de quoi t'atteindre en profondeur." rigola la femme aux yeux saphir.
Emportée par son mélange de sentiments qui alliait, colère, frustration, haine, peur et bien d'autres, Elina se saisit d'une des chaises du bureau avant de la lancer en direction de sa collègue qui eut juste le temps de se mettre à terre sous son bureau. La chaise atterrit directement sur le fauteuil, tout juste vide, avant que celui-ci ne roule en direction de la grande fenêtre où il s'arrêta dans un grand fracas.
-"Elina!" hurlèrent les deux amies en repoussant la plus jeune.
-"Je peux savoir ce qui vous prend?" demanda Meryl d'un ton glaçant mais calme.
-"Elle est complètement atteinte voilà ce qui lui prend!" hurla Alyssa en s'approchant dangereusement de la brune qui ne recula pas, au contraire.
-"Je suis atteinte ?! Il y a de quoi non?! Tu passes ta vie à te moquer de moi parce que je me tape jamais personne. Tu m'appelles "la none" ou encore "la frigide" à tout bout de champ mais la seule fois où je ramène quelqu'un tu fous tout en l'air!"
-"Sérieusement? Ça fait bientôt deux semaines que c'est arrivé et on s'était expliqué sur le moment même mais tu m'en reparles maintenant?"
-"Ça faisait six ans Alyssa! Six ans que je n'avais pas eu le courage de coucher avec qui que ce soit! J'ai de quoi être frustrée!"
-"Comme si ça te dérangeait! Si tu t'assumais tu n'aurais pas à t'abstenir comme tu le dis si bien! C'est pas en te forçant de..."
-"Ça suffit! Elina va dans ton bureau. Maintenant." intervint Meryl en voyant ses deux employés se rapprocher dangereusement l'une de l'autre. La jeune hispanique obéit en poussant un genre de grognement/hurlement sans oublier de claquer sa porte.
-"Oh bah merde..." souffla Stef en dévisageant la porte de bureau de sa meilleure amie.
-"Te rends-tu au moins compte d'à quel point tu as merdé Aly?" demanda Mady en portant un regard accusateur sur sa meilleure amie.
-"C'est bon cassez-vous! Je n'ai rien à vous dire. J'ai juste fait ce que j'avais à faire. Vous vous prétendez être les personnes les plus proches de nous mais pourtant vous ne semblez pas comprendre que ça n'a rien à voir avec ça. Je suis la personne qui la déteste le plus sur terre et pourtant j'ai compris que depuis une semaine il y a un truc qui ne tourne pas rond chez elle. Elle est absente, irritable et n'affiche plus aucun sourire. Si elle m'en voulait vraiment pour monsieur charmant elle m'aurait évité à l'appart en ne venant pas sur la terrasse comme la fois où elle n'y a pas mis les pieds pendants trois mois car j'avais kidnappé Maurice. Alors partez. Ne venez pas me faire la morale sur comment me comporter avec elle alors qu'en ce moment on dirait que je suis la seule à la comprendre."
Mady et Stef restèrent sur place en ouvrant et fermant leurs bouches sans qu'aucun mot n'arrive à sortir et sans pouvoir retenir leurs larmes. Elles n'opposèrent aucune résistance quand Meryl leur prit la main pour les emmener dans son bureau ou elle les fit s'asseoir sur un des canapés le temps de leur préparer un thé chacune.
-"Vous les connaissez. Quand elles se sentent en danger, acculer, dos au mur elles se braquent et ça pique. Aly doit déjà culpabiliser et même être en larmes en ce moment."
-"On sait mais ça fait mal. Quand on ne va pas bien elles nous poussent à bout pour qu'on craque, que l'on recrache toute notre haine sur elles jusqu'à ce que finalement on arrive à leur dire ce qui ne va pas mais on ne peut pas faire ça avec elles." pleura Stef.
-"Leurs réactions sont trop violentes. On n'a pas le cran nécessaire et elles nous détruiraient si facilement comme Aly vient de le faire. Elle sait pertinemment que rien sur terre ne peut nous blesser plus que notre incapacité à les comprendre et les aider. Je déteste la voir comme ça. Cet amas de haine ce n'est pas elle mais elle a raison. On a loupé les signes." continua la blonde en fondant également en larmes.
-"Quels signes?" demanda Meryl en leur donnant leurs tasses.
-"Quand elles vont mal elles ne réagissent pas vraiment différemment. Elles commencent par se renfermer sur elles mêmes surtout Eli et après ça, elles rentrent dans un processus d'auto-destruction vraiment violent." expliqua Stef entre deux sanglots.
-"Et là c'est Aly la meilleure pour ça. Elle peut vraiment se foutre en l'air en très peu de temps. Je l'ai retrouvé à la limite du coma en plein après-midi au lycée sans savoir pourquoi alors que les signes sont apparus juste lors de la pause-déjeuner. Elle ne m'a jamais rien dit sur les raisons de son geste mais s'enfiler presque une bouteille de vodka seule n'est pas anodin."
-"Ça fait une semaine qu'on a tous les signes annonciateurs. On aurait dû se douter que ça n'allait pas tarder à exploser mais pourtant on ne s'inquiétait pas car depuis qu'elles ont commencé leur petite guerre au lycée on peut dire qu'elles se régulent."
-"On sait c'est stupide mais d'une certaine manière elles s'équilibrent. Leur combat les pousse à toujours se relever pour continuer de se faire face peu importe ce qu'elles traversent. Elles refusent l'idée de laisser l'autre gagner. Le problème c'est qu'avant aujourd'hui ce n'était jamais arrivé qu'elles soient en même temps au bord du gouffre. C'est facile de voir les premiers signes chez Eli mais pour Aly c'est tellement plus compliqué."
-"Vous n'y êtes pour rien. Savez-vous si quelque chose de particulier est arrivé? Il y a un sujet aux infos qui pourrait les toucher ? Dernièrement j'ai été trop débordé pour regarder la télé et lire les journaux de faits divers."
-"Je n'en sais rien. Je regarde jamais les infos. Tu as une idée Stef?"
-"Non pareil. On y entend toujours les mêmes choses. Par exemple, d'après une discussion entendue à la cafet, ils ne parlent que d'un accident de bateau pas loin d'ici et ça fait repenser à un accident similaire d'il y a une vingtaine d'années. Apparemment ça tourne en boucle sur toutes les chaines."
-"Je ne vois pas en quoi ça pourrait les concerner." marmonna Mady avant de se relever en vitesse, comme les deux autres femmes, en entendant une porte s'ouvrir violemment.
En voyant Elina foncer dans le bureau d'Alyssa avant de revenir avec cette dernière, en la tirant par le col, et de claquer la porte de son bureau derrière elles, les trois femmes restèrent interdites plusieurs minutes, les mines déconfites.
-"Faut y aller avant qu'elles s'entretuent!" réagit Stef avant de partir en courant.
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