Chapitre 11 :

UN AUTRE après-midi à se laisser dorer au soleil chez Déotile. Parfois, lorsque je levais le nez de mes livres, je la voyais allongée sur son matelas, en train de dormir et j'avais l'impression d'être béni par cette vision.

D'autres fois, nous préparions des sandwichs que nous mangions dans son jardin. La tête sur mes cuisses, Déotile mâchonnait son pain en me suppliant de lui masser le crâne.

Elle se montrait de plus en plus affectueuse, tendre, au fil des jours. Et moi je sentais mon coeur battre un peu plus fort chaque jour, à chaque fois que j'embrassais sa peau ou rencontrais ses yeux clairs.

Ce jour là, je venais de la pousser dans la piscine, avec sa robe en prime. Mes blagues ne changeait pas mais sa réaction était toujours aussi drôle.

« Je te déteste ! rugit-elle en remontant à la surface, ruisselante d'eau. »

Je lui souris d'un air moqueur avant de réaliser un petit détail auquel je n'avais pas pensé.

Sa robe bleue lui collait terriblement au corps, sans laisser aucune place à l'imagination - certes, je l'avais déjà vue en maillot de bain, je ne pouvais pas être surpris.

« Arrête de me mater et aide moi à enlever ce truc, je déteste avoir des vêtements mouillés ! »

Je m'approchais d'elle et de son visage coulant de mascara.

« T'es sûre que tu vas pas rougir ? soulignais-je. Tu veux pas aller te changer dans ta chambre et je t'attends sagement dehors ?

- Gnagnagna.

- C'était une question sérieuse. »

C'est à cet instant précis qu'elle se mit à rougir.

« C'est juste une robe. »

Je l'aidais à enlever ce bout de tissu détrempé avant de lui donner une serviette : ses dents claquaient.

« Désolé c'était pas drôle.

- Non c'était pas drôle. Par contre, si je l'avais fait, ça aurait été très drôle. Je vais aller me changer, tu viens ? »

Je la suivis dans les escaliers, avec ses tongs qui faisaient couac-couac quand elle marchait. Elle en profitait pour danser ou traîner les pieds au sol pour changer la sonorité. C'était ça qui me plaisait autant chez elle : elle me faisait rire.

Elle laissa choir sa serviette au sol et se planta devant sa penderie afin de choisir une nouvelle tenue. Sa moue perplexe me donnai deux envies.

La première, c'était d'éclater de rire surtout quand elle enfilerait un tee-shirt ringard.

Et la deuxième, c'était de lui dire de rester comme ça et de lui planter des centaines de baisers le long du cou.

« Déotile, je crois que faudrait que tu saches que t'es vraiment vraiment belle.

- D'où vient cette démonstration d'affection subite ? s'étonna-t-elle, un débardeur à la main, qu'elle enfila rapidement.

- De mon cœur, je suppose. »

Elle sourit. Doucement. Lentement.

« Tu sais, je crois que je te l'ai jamais dis à voix haute, alors que c'est la première et la dernière chose à laquelle je pense dans mon lit. Mais faudrait que tu saches que t'es la plus belle personne que j'ai jamais rencontrée. Physiquement et mentalement. »

   Son sourire fleurit immédiatement sur ses lèvres. Mais c'était comme si elle ne semblait pas y croire, comme si je ne pouvais jamais avoir dit un truc pareil.

   « T'y crois pas, c'est ça ?  

   - Si...c'est que...enfin, non, je pense juste que tu te trompes, tu sais. »

   Elle s'assit sur le lit et les larmes commencèrent à perler sur ses yeux, roulant le long de ses joues. Elle m'invita à m'asseoir à côté d'elle. 

   « C'est la plus belle chose qu'on m'ait dite et je... »

   Ses doigts se mirent à courir sur ma joue, et elle laissa échapper un sourire éclatant malgré ses larmes d'émotion.

   « Je sais que tu le penses, je te fais confiance. Totalement confiance. Et je sais que je mérite pas un mec comme toi...parce que t'es tellement bien, t'es tellement pur, t'es tellement génial, je sais même pas comment te dire. Et que tu mérites tellement mieux qu'une pauvre meuf comme moi. Et je sais que tu restes pas avec moi par pitié et donc ça me permet de me dire que je suis peut-être pas si nulle que ça... »

   Elle se pencha pour attraper son téléphone. Ses boucles brunes encore humides cascadaient sur son dos. Il y avait une grosse piqûre de moustique sur son épaule, une constellation de grains bruns sur sa nuque et ses bras.

   « Cette chanson, elle me fait penser à toi. Je sais que t'es pas une fille un peu mate de peau et tout le bazar mais voilà. »

   Je savais déjà de quelle chanson elle parlait. D'Infirmière. Dans le délire Fauve, moi aussi je pensais à elle sous la voix de Quentin Postel, surtout sur Rub à Dub.

   Elle aussi était précieuse. Comment elle me regardait, les yeux encore émus, le sourire aux lèvres. Je commençais à l'embrasser, et elle répondait, comme si au fond elle en voulait plus. Sa la respiration se mourait dans ses lèvres, les mains fourmillantes et mille et un soupirs déposés au creux de mon cou.

Nos lèvres se rejoignaient incessamment comme si elles étaient conçues pour. S'allongeant sur son lit, elle me fit chuter avec elle en passant les mains sous mon tee-shirt.

Je l'aidais à sa tâche avant de m'occuper moi-même de ses affaires, lui enlevant son débardeur tout juste enfilé. Ne restait que son soutien-gorge encore trempé.

Mais lorsque je posais les doigts sur son dos pour le défaire, elle arrêta instantanément, refroidissant l'atmosphère d'un coup. Elle avait prit le regard d'un petit animal piégé et se releva, enfilant son débardeur par dessus son soutien-gorge mouillé.

« Je peux pas. Je suis désolée mais...

- Je comprends.

- Non tu peux pas comprendre. Je te promet que j'essaye de passer au dessus mais je peux pas. J'y arrive pas.

- Ok, je comprends pas. Mais c'est pas grave. »

   La température de la pièce avait comme chuté d'une dizaine de degrés. Je me rassis comme si de rien n'était, alors que des flashs me revenaient. 

« Je suis vraiment désolée...

- Je sais, Déo. T'inquiète.

- Je m'en veux, tu sais. Je te raconterais, hein. Mais, là, je...

- C'est à cause de ton ex, pas vrai ? »

Elle tenta de sourire mais ses yeux se brouillèrent de larmes. Doucement, la lèvre rougie de sa morsure, elle hocha la tête.

« T'y es pour rien, Gus, promis t'y es pour rien. Je veux le faire avec toi, c'est juste que...

- Que t'as peur. Ou que t'es dégoûtée. Ou n'importe quoi mais t'es pas bien. T'as pas envie au final. C'est ok, je comprends. T'as pas besoin de te justifier, t'inquiète. »

Elle s'empara de son paquet de cigarettes dans son sac et en approcha une à ses lèvres avant de se raviser et de me tendre son tube de tabac.

« On s'en fait une pour deux ? proposa-t-elle avec un sourire presque timide, encore désolé. »

Elle essayait de se rattraper maladroitement, rongée de culpabilité. Elle ne comprenait pas que j'acceptais. Pour elle, j'étais un mec frustré de sexe, parce qu'elle avait eu l'habitude de voir ça de toute part. Elle avait peur que j'aille voir ailleurs parce qu'elle-même était incapable de pouvoir assouvir mes besoins.

   Elle ne comprenait pas que c'était elle que je voulais, et que j'attendrais toute ma vie s'il le fallait. Je l'attendrais jusqu'au bout du monde, jusqu'au bout du temps.

« En allant au port ? proposais-je avec un sourire complice.

- J'ai la flemme de marcher...enfin, si ça peut te faire plaisir, tu sais...je... »

Sa bouche se tordit en un sourire grimaçant qui devint expression de malheur. Je me mis à penser qu'elle paniquait tellement à l'idée de me perdre qu'elle faisait n'importe quoi. Elle cédait souvent à la panique, et cette situation était sûrement paniquante pour elle.

« Eh, c'était juste une blague, une référence tu vois, à notre premier rendez-vous. Me dis pas que c'était tellement insignifiant que t'as oublié ce moment, si ? Parce que moi je le revois encore, et je revois encore la première fois que je t'ai vue, et la première fois que je t'ai embrassé, et je me suis dis que c'était toi. 

- Tu mens.

- Tu me fais confiance ou pas ?

- Tu veux me rassurer. Je te connais suffisamment, tu sais. »

Elle alluma sa cigarette et s'appuya au rebord de la fenêtre. Son front était barré d'un pli soucieux et ses lèvres tremblaient nerveusement. Comme ses mains, sa flamme qui vacillait dans le creux de son briquet.

« T'as pris un ton gentil, conciliant, le genre de ton qu'on prend quand on veut rassurer quelqu'un et lui dire plein de mensonges. Je suis pas conne, tu sais.

- T'as pas toujours confiance en toi, ça te rend conne. »

Elle soupira et baissa les yeux vers les graviers. Regard coupable et épaules basses, elle n'en menait pas large. Elle laissa tomber un peu de sa cendre sur le balcon, sans oser me regarder. 

« T'as pas tort, murmura-t-elle comme si ça lui coûtait de l'avouer.

- Moi aussi je te connais, tu sais. »

Elle eut une moue attristée et sans ajouter un mot, elle me tendit lentement sa cigarette. J'eus à peine le temps de tirer une bouffée qu'elle larmoyait déjà, les yeux plantés vers le soleil, et semblait lutter de toutes ses forces pour retenir les larmes de couler le long de son visage ovale.

Nous alternâmes sans jamais nous toucher un mot, seules nos mains s'effleuraient lors de l'échange de cette cigarette. C'était la clope la plus glauque qu'on ai jamais partagée, parce que c'était notre seul instant de partage. On ne parlait pas, on s'ignorait presque.

Et ses larmes s'évaporèrent au soleil comme par magie au fil du temps, laissant place à un maigre sourire quand je glissais ma main dans la sienne, après avoir jeté son mégot dans un pot de fleur vide qui lui servait de poubelle.

Elle se mettait la pression, se disant que ses rejets pouvaient être source de conflits, voire de rupture. Elle se laissait bouffer par le stress, par la peur de l'abandon. Et elle seule pouvait s'y résoudre, elle seule pouvait se guérir. Déotile pensait que si on restait encore au stade 'bisous', ça pourrait nous nuire.

En vérité, ça m'allait. Quand je sortais avec Violette, elle avait insisté pour coucher avec moi. J'avais maintes fois refusé et à ce jour j'étais encore vierge ; mais je n'aimais pas le fait de le fait pour se débarrasser de son pucelage. Il fallait le faire par amour, par envie, pas parce que "ma meilleure amie l'a fait avec son copain, elle" ou que "apparemment on doit le faire au bout de deux mois et quatre fois par semaine".

Je lui souris, sûrement avec tendresse parce que mon regard se faisait caramel salé lorsque je la voyais. Et elle me détaillait des yeux avec beaucoup de douceur en leur fond, parce que son regard se faisait coton lorsqu'on en échangeait un.

« Ne laisse pas la société te foutre la pression. »

Elle me dévisagea sans répondre. Ses yeux me dévoraient. Elle se mordillait la lèvre et c'était adorable, j'avais envie d'embrasser ses lèvres, son front et son cou et toute sa peau qui s'offrait à moi..

« Je crois, fit-elle d'une voix posée, que j'ai énormément de chance de t'avoir.

- Mais clairement, je suis un gars exceptionnel c'est super triste de passer à côté de la chance d'être pote avec moi.

- Abruti, soupira-t-elle. »

Ses yeux océan rencontrèrent les miens. Pour la millième fois de ma vie au moins, je m'y noyais.

« Dis moi quelque chose que je ne sais pas, plutôt. Parce que je sais déjà que je suis un abruti.

- T'es pas un abruti ! protesta-t-elle.

- Tu dis toujours que je suis un abruti.

- Parce que j'aime mieux te charrier que te dire "c'est bien mon amour t'es trop intelligent". »

Un autre regard dérobé. Elle souriait en me regardant et je crois bien que je souriais aussi. La tête légèrement penchée et rentrée dans ses épaules, plus petite que moi, elle avait levé ses yeux de sirène vers moi et me portait un regard plein d'espoir et de coton.

« Et tu penses vraiment que je suis un abruti ?

- Oui. Mais un abruti marrant. Pas le genre de con qui donne envie de se cogner la tête contre les murs. »

Sur ses mots, elle se redressa, posa sa main sur ma joue et m'embrassa. Doucement d'abord, le baiser gagnait en intensité. Nos mains, timides d'abord, comme avant, s'assuraient et visitaient, taquines, le corps de l'autre.

Je me souvenais de notre premier baiser, quand j'avais forcé sur la boisson. Elle avait pressé ses lèvres sur les miennes, comme un geste qu'elle osait enfin faire et qu'elle ne voulait pas laisser s'échapper l'adrénaline qui la poussait à m'embrasser. Puis, il y avait eu ceux sur le canapé. Une danse maladroite de langues qui ressemblait à Lilith qui improvisait sur des musiques. Tout était maladroit, mal assuré. Elle avait eu du mal à poser ses mains, essayant les hanches d'abord avant de conclure que ce n'était pas pratique. Un bras par dessus mon épaule rendait les choses trop bizarres alors elle avait fait glisser ses doigts sur mon torse.

Les choses avaient changé sans trop le faire ; elle n'hésitait plus, elle prenait confiance en elle. Elle s'épanouissait. C'était comme une jolie fleur : chaque jour en train de devenir un peu plus belle et ouverte que la dernière fois.

Mais cette fois, c'était comme la première fois qu'on s'embrassait : nos mains semblaient braver l'interdit.

Une part de moi me murmurait de la serrer fort contre moi, une autre de passer la main sous son tee-shirt pour effleurer son dos et une troisième voix me raisonnait pour me dire que le tee-shirt allait refroidir l'ambiance.

« Je, bredouilla-t-elle, les yeux pétillants. Tu...?

   - Tu révises tes conjugaisons ou tu essayes actuellement de communiquer ?

   - Abruti. »

Elle éclata de rire, ses yeux pétillants de vie.

« Tu me rends tellement heureuse. »

Elle venait de lâcher ça comme une bombe, sans prévenir. J'étais déjà pas prêt pour une telle déclaration en générale, mais ne pas y être préparé m'ajoutait un choc supplémentaire. Surtout que sa confession de musique en constituait une suffisante.

Parce que, certes, j'essayais de l'aider du mieux que je pouvais, mais j'essayais surtout d'être moi. Je n'agissais pas comme un connard, je faisais un minimum attention pour ne pas la perdre, mais je ne portais surtout pas de masque. J'étais qui j'étais vraiment.

« Merci ? baragouinais-je. Je suppose que c'est le seul truc intelligent que je vais réussir à dire...?

- Arrête de te dénigrer. Y a que moi qui peut te traiter d'abruti. Toi t'as pas le droit, tu dois avoir confiance en toi. Moi j'ai confiance en toi.

- Je te suis pas trop.

- T'es persuadé que t'es con. Et tu sais quoi, tu m'as dis de pas écouter la société. Sauf que c'est à cause de la société que tu te trouves con. Les L, on les dénigre en les appelant les chômeurs. Ne parlons pas des STMG, eux c'est encore pire. Et les S sont les élites. Pourtant je suis persuadée que t'es vraiment plus intelligent que moi. Alors que selon la société, je suis plus intelligente. Juste parce que je fais S. »

Elle soupira avant de conclure :

« La société n'a aucun sens. Et pour moi, t'es le plus intelligent parce que t'as fais les choses que t'avais envie de faire. Et ça, c'est la véritable intelligence.

- Je peux te poser une question ?

   Elle hocha la tête en s'appuyant au mur.

« Pourquoi tu détestes tant la société alors que nous on fait partie intégrante de cette société ?

- Parce que c'est à cause de la société qu'on se sent si mal. La société est séparée en deux parties : celle qui veut évoluer et l'autre encore vieux jeu, qui ne veut pas changer. Et cette dernière partie est majoritaire. Moi, la société qui m'apprend des choses, m'éduque et me fait grandir, je l'aime et je l'estime. Mais celle qui me fait comprendre qu'être vierge c'est être coincée et ne plus l'être c'est être une salope, je la méprise.

Là, je me suis mis à sourire parce qu'elle pensait exactement la même chose que moi. Et je me suis dis que j'avais vraiment trouvé une perle.

Elle avait les gestes passionnés quand elle parlait. Elle expliquait tout avec ses petites paumes aux doigts fins parce qu'elle parlait avec les mains. Je trouvais ça mignon.

En fait, je crois que plus le temps passé, plus les plus petits gestes m'attendrissaient. Le fait qu'elle parle avec les mains, d'abord, mais aussi le geste qu'elle avait en allumant sa cigarette, le regard qu'elle me jetait entre la fumée, la première bouchée goulue qu'elle prenait en mâchant son sandwich, la manière qu'elle avait de chanter les paroles du bout des lèvres et les fleurs colorées qu'elle ne pouvait s'empêcher de photographier.

Les gens immortalisaient les beaux bâtiments dans leur entièreté, les couleurs vives et les couchers de soleil. Déotile, elle, aimait les jeux de lumière dans leur simplicité pure et photographier des parterres de fleurs. Avec elle, une simple marguerite dans un gazon verdoyant avec soudainement beaucoup de charme.

Avec elle, j'avais l'impression d'être une marguerite dans le gazon. Personne ne semblait m'accorder réellement d'importance, ne savait tirer de moi quelque beauté ou intérêt ; en fait, pour certains, je faisais presque tâche dans ce gazon impeccable. Mais il y avait Déotile, qui ne faisait pas que remarquer cette fleur solitaire. Elle lui accordait de l'importance. Elle lui trouvait de l'intérêt.

J'étais une marguerite. Et ça pouvait sembler triste aux yeux de certains, moi ça m'encourageait. 

- Je pensais la même chose, c'est marrant.

- Non, c'est pas marrant, mais c'est cool. Ca veut dire que je suis une bonne prof.

Elle me décocha un clin d'œil et regarda le paquet de cigarettes qu'elle avait négligemment posé sur sa table de nuit.

- Je devrais arrêter de fumer.

- Attends. Toi, arrêter de fumer ? Ce serait comme si la princesse Leia se rasait le crâne. La cigarette fait partie intégrante de toi !

- Peut-être mais ça me ruine et j'aimerais bien me débarrasser de cette clope toxique. Et en plus je veux des enfants, alors autant s'habituer à ne pas fumer pendant neuf mois.

- Je pense que dix sept ans c'est un peu trop jeune pour avoir un enfant, tu sais. Moi je me sens pas très prêt pour être père, je sais même pas si j'en voudrais, des enfants...

Elle me fixa avec des yeux ronds comme des soucoupes.

- J'ai jamais dit que j'en voulais maintenant ! Ah non sûrement pas. Mais dans un futur entre le proche et le lointain, tu vois. Par contre, tu veux pas d'enfants ? Je suis sûre que tu ferais un excellent papa pourtant.

- Tu m'as jamais vu m'occuper d'un enfant, Déo...

- Ta cousine ! Elle t'adore !

- Quand elle est venue j'ai passé la moitié du temps à l'ignorer, j'appelle pas ça être un père génial. Ou un cousin génial, comme tu veux.

- Ouais, mais...c'est un peu ma faute.

Le regard baissé sur les nervures de bois, son front plissé, la mémoire de cette semaine était encore douloureuse. Pas une chose dont on rirait avant longtemps.

- Je sais pas. Je te vois bien père. Il y a des gens qu'on voit bien avocats, basketteurs ou artistes. Moi je t'imagine papa.

- Génial, un père au foyer pendant que toi tu bosses. Couple féministe goal.

- Ne rigole pas, le père d'Emilie est comme ça ! Il a arrêté de travailler pour s'occuper de sa fille. Et comme tu peux le voir, Emilie n'est pas complètement déséquilibrée ou négligée. Elle est normale.

- Un peu excentrique quand même.

- C'est parce que c'est une artiste, fit Déotile en baissant la voix comme si c'était un secret. Tu sais qu'en vrai, elle fait la forte tête indestructible, mais elle se sent vraiment pas à sa place. En cours, apparemment, elle n'écoute rien et elle sort juste son carnet pour écrire des tas de trucs dedans. Elle dessine, aussi. Moi je trouve ça génial.

- J'ai jamais dit le contraire.

- Ah, oui, et elle est en L.

Plus elle me parlait d'Emilie, plus j'avais envie de la découvrir. Elle semblait intéressante, cortiquée et créative. Le genre d'amis rafraîchissant et que ça faisait du bien d'avoir.

Mais je n'avais pas envie de parler à Emilie juste parce qu'elle me trouvait mignon et que quelque chose pouvait potentiellement se passer entre nous (après tout, elle m'avait légèrement dragué l'autre jour) : non, j'avais envie d'une relation amicale où on pouvait échanger de tout et de rien, parler de la L, de nos artistes préférées, si nous avions des options en commun et vers où elle comptait se diriger plus tard.

- Je connais ce regard.

- Ah, tiens donc, tu as un doctorat en regard maintenant ?

- Cherche Emilie Rachaud sur Facebook. C'est ça que tu voulais savoir, non ?

Elle était forte, très forte. Déotile me sourit d'un regard complice.

- Bien joué.

- J'ai un bac plus cinq en étude de regards.

En rentrant chez moi - parce que je ne passais pas ma vie qu'avec Déotile, je fis ce que ma copine m'avait proposé et envoyais une invitation à Émilie.

Quelques minutes plus tard, celle-ci m'envoya un message :

Émilie Rachaud :
oh, mais c'est le copain de cette chère Déo, je me trompe?

Augustin Favreau :
perspicace

Émilie Rachaud :
pourquoi cette soudaine envie de m'ajouter sur ce réseau de Satan?

Augustin Favreau :
Déo m'a parlé de toi et t'as l'air cool (pourquoi t'es inscrite sur Facebook du coup?)

Émilie Rachaud :
je SUIS cool* (pour la conv de classe, c'est pratique pour les DM ou savoir quand les profs sont absents)

Augustin Favreau :
ça je le verrais plus tard, si t'es ok pour qu'on parle évidemment (les gens de ma classe demandent juste qui va en cours le lendemain)

Émilie Rachaud :
je suis même super ok!! pq je serais contre ? (les gens de Facebook, tu sais...)

Augustin Favreau :
bah je sais pas vis à vis de Déo ou quoi ? (tu parles mais t'es sur Facebook)

Émilie Rachaud :
mdrrrr ? t'as le droit d'avoir des amis non ?  (alors non je suis sur Twitter)

Augustin Favreau :
ok donc nickel on essaye de se voir un de ces quatre (je crois que Déo est sur twitter aussi)

Émilie Rachaud :
pas de soucis mec, tu me dis quand tu es pas collé à Déo, je connais un endroit sympa (oui je sais je la follow elle parle que de toi c'est trop marrant)

Augustin Favreau :

je suis libre dans la semaine stv (ça me donne envie de m'inscrire ça)

Emilie Rachaud
je propose mardi à 17h alors (va y, Twitter c'est génial !!!)

BON
Aujourd'hui j'ai fait mon dernier cours du lycée haha c'était... Bizarre
Mais j'ai pas réalisé du coup ça va vous voyez
Du coup c'est la dernière ligne droite
Portez vous bien, bon courage, je crois en vous
Am'.

P.S : quant à faire, j'ai un petit compte Twitter auteur c'est amapolawattpad pour ceux qui ne savaient pas hihi :))
P.P.S : et celui d'Émilie c'est @emlesratschauds mais j'y poste rien pour l'instant (et celui de Deo c'est @poussieredeotil) (UPDATE JE VIENS DE LES DÉPOUSSIÉRER JE VAIS VOIR SI JE FAIS CELUI DE GUS MDR)

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