Chapitre 22


Mon aplomb doit être ultra solide pour que je persuade Tyna, il ne doit y avoir aucune faille dans ce que je raconte.
Si mon plan se déroule comme prévu, nous pourrons rapidement passer à autre chose et encore plus rapidement nous en aller. En m'entendant dire ça, je m'auto-dégoûte. Je suis avec une personne qui compte beaucoup pour moi, que je n'ai pas vu depuis un certain nombres d'années et tout ce qui me m'intéresse c'est foutre le camp.

En même temps, c'est normal. Plus longtemps tu restes, plus ça devient dangereux pour elle et son fiancé.

Malgré les sages paroles de ma conscience, j'ai toujours l'impression d'être un monstre égocentrique.
C'est tout à fait le moment pour les états d'âmes, vous ne trouvez pas ? #Sarcastique, diraient les ados. Les fractions de secondes que je gagne à garder le silence  sont précieuses, elles me permettent de peaufiner mon mensonge.
Cela dit, il faut bien que je me lance.
- Te souviens-tu de l'homme qui nous a arrêté dans la rue une semaine avant que je ne...
Je m'arrête un instant, ne sachant que dire. Avant que je ne disparaisse ?
Tyna prend un air pensif en réfléchissant.
- Oui, je m'en souviens, affirme-t-elle en fronçant les sourcils. Il t'offrait soi-disant un travail dans une agence de mannequinat n'est-ce pas ?
Je grimace avant de répondre.
- Effectivement...
Elle pince des lèvres avec une moue désapprobatrice.
- Et je t'avais déconseillé de le rappeler pas vrai ?
Je plisse honteusement mon nez en baissant les yeux.
- Oui.
L'homme dont parle Tyna s'avérait être Robin, et c'était plutôt des tueurs qu'il cherchait pour être tout à fait honnête .
- À vrai dire, il n'était pas exactement en quête de mannequins ...
Les épaules de Tyna se contractent brutalement. Venant de moi, il est logique qu'elle s'attende au pire.
- Je voulais à tout prix t'aider à payer le crédit de ton magasin et te payer un loyer, me justifiais-je avec empressement. Alors je suis allée au rendez-vous qu'il me proposait et j'ai accepté le travail sans réfléchir.
Je croise mes mains et les tords nerveusement. Pour l'instant, rien de ce que je n'ai dit n'est faux.
- Mon premier soir de service était une des pires choses qui me soit arrivée, dis-je en secouant faiblement la tête. C'était l'enfer, j'étais totalement débordée. Des commandes arrivaient de tous les côtés et j'avais un mal fou à garder le rythme. Je suis rentrée exténuée de cette première soirée et le lendemain, je ne me suis pas levée avant midi.
Le deuxième soir, j'ai commencé à m'habituer aux conditions de travail. J'ai acquis certains réflexes, comme esquiver les mains baladeuses, et j'ai commencé à intégrer les grands traits du métier de serveuse.
Voila, ça y est, j'ai casé que je faisais seulement serveuse.
- Tout devenait de plus en plus facile et ça n'était en fait pas déplaisant. Le seul, mais imposant, inconvénient était que je devais te mentir quant à mes sorties tardives car je savais que tu n'apprécierais pas ce que je faisais.
Ma bouche se contracte volontairement et je me gratte le lobe de l'oreille avec vivacité.
J'avoue un petit mensonge pour dissimuler le plus gros.
Tyna se détend imperceptiblement. Apprendre que je n'étais pas redevenue call girl, semble la soulager.
- Mais pourquoi prétendre t'offrir un travail de mannequin si c'était pour être serveuse ? Me demande-t-elle, les sourcils légèrement haussés.
Oups...
- Parce que c'était un travtail de serveuse dans des conditions... Spéciales, dis-je en réfléchissant à toute vitesse. Premièrement, j'étais plutôt... Court vêtu. Et deuxièmement, les représentations qu'il y avait tous les soirs étaient elles aussi spéciales, l'avertis-je sans m'étaler sur le sujet.
Tyna pince des lèvres une nouvelle fois mais n'ajoute rien, alors je continue mon récit.
- Et le troisième soir, une bande d'étudiants étrangers perdus dans New York sont rentrés et se sont installés en riant du spectacle. Ils ont passé leur commande et sont restés jusqu'à ce que l'on ferme. Vers 4 heures du matin, je suis allée les voir pour, le plus poliment possible, leur demander de sortir et ils m'ont invité à m'asseoir avec eux.
Je regarde Thibaud en disant ça. Il à l'air perdu. Il ne sait pas dans quelle direction va mon mensonge et il attend de savoir s'il doit y participer.
- Ils m'ont expliqué qu'ils venaient du New Jersey, dis-je en reprenant après une courte pause, et qu'ils entraient à la rentrée ( donc seulement deux semaines plus tard ) dans une école d'ingénierie française appelée l'EEA. Je suis restée un moment et plus je les regardais, plus je les enviais. Je voulais être comme eux et baigner dans l'insouciance de ce monde financé par la banque P.A.P.A.
Ça m'a fait drôle de réaliser qu'ils sortaient d'un univers totalement différent du mien.
Quand ils ont été sur le point de partir, l'un d'entre eux m'a très soudainement proposé de les accompagner en France. Je suis restée coite un instant, totalement prise de court. Il me brûlait de dire oui, et c'est bien ce que j'ai failli faire. Mais après avoir  rapidement réfléchi, le fait que je n'avais même pas assez d'argent pour me payer l'avion m'a plutôt refroidie.
Et un autre garçon, dont l'esprit n'était plus très clair non plus, a lui aussi trouvé que c'était une bonne idée de me ramener avec eux. Il a alors demandé l'avis général du groupe et ils ont tous crié haut et fort leur approbation. Le premier m'a expliqué, en essayant de se faire entendre par dessus le brouhaha, que son frère se trouvait déjà en France et qu'une serveuse était recherchée pour la cantine universitaire. Alors j'ai repris un peu l'espoir et je lui ai demandé quand ils partaient. Il a regardé sa montre et m'a répondu : "L'avion décolle dans quarante-cinq minutes de l'aéroport de Teterboro."
J'ai calculé rapidement combien de temps il nous faudrait pour l'atteindre et suis arrivée à la conclusion de 40 minutes, si la circulation était très faible. Chose quasi-inexistante dans la Big Apple. Autrement dit, il fallait que nous partions immédiatement. Ils m'ont pratiquement supplié et sans vraiment comprendre comment, je me suis retrouvée dans un taxi bondé qui m'emmenait vers un aéroport privé. Je t'ai téléphoné, bien qu'il n'ai été que cinq heures du matin, et j'ai expliqué ma folie sur ta boîte vocale en te promettant de te rappeler à l'atterrissage. Nous sommes arrivés à Teterbro en 44 minutes et notre avion a décollé près d'une minute plus tard. Dans les 24 heures, nous étions arrivés en France. Je t'ai appelé un nombre incommensurable de fois et plus je te laissais de messages, plus je réalisais à quel point il avait été stupide de partir. Tu n'as jamais rappelé derrière, alors j'en ai conclu que tu étais fâchée avec moi.
Tyna pose une main sur sa bouche, les yeux larmoyants.
- J'ai fait tombé mon téléphone dans l'évier le matin ou tu n'es pas rentrée à la maison et il a était déchiqueté par le broyeur.
Oui, je sais, j'ai envie de répondre. Bien que le nouveau patron que j'avais à l'époque -et que j'ai toujours- m'ai interdit de garder des contacts avec mes proches, je suis revenue le lendemain et je l'ai vu par la fenêtre faire tomber ton téléphone. Je plisse les lèvres et prétends retenir moi aussi des larmes, mais si je continue elles risquent sérieusement d'arriver.
- J'ai pris le job de serveuse et j'ai recommencé des études. J'ai repassé mon bac en candidat libre et j'ai eu la mention très bien et j'ai ensuite, moi aussi, intégré la fameuse fac.
Tyna enlève sa main de sa bouche et sourit malgré ses yeux qui la trahissent.
- Il ne m'a jamais traversé l'esprit qu'il te soit arrivé du mal. Je savais juste qu'au même titre que tu étais venue habiter chez moi, tu pouvais en repartir. Ça m'a attristé de ne plus t'avoir à la maison, mais je savais qu'à un moment donné, il t'aurait fallu un objectif, que tu aies un but pour ne pas perdre le goût.
Elle regarde Thibaud avec gentillesse.
- Et je crois que tu l'as trouvé.



Hello ! Désolée, ça fait une éternité que je n'ai pas posté ! En fait je n'ai pas arrêté d'apporter des modifications à ce chapitre... Et il n'est toujours pas au point! Dites moi ce que vous en pensez

Kisses

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