Chapitre 7 - partie 2

Instinctivement, je fouille l'entièreté de la salle du regard. Lael rajuste son blouson en répondant à Romeo, Jonas et Brett sont devant nous avec le coach et Selena. Le seize septembre est arrivé beaucoup trop vite et je me retrouve dans le hall du bâtiment officiel de la League One, pour la cérémonie d'ouverture.

On a dû se farcir sept heures de routes pour arriver à l'heure, on dort ici et il ne me tarde qu'une chose : repartir. Il y a trop de mondes, trop de mains à serrer, trop de sourires à forcer. Memphis me traine de droite à gauche pour rencontrer les grands de la Commission de Football Américaines, les coachs des autres équipes ou encore nos sponsors qui veulent savoir qui est le petit chanceux. Jonas et Brett nous suivent et affichent des sourires polis, répondant chaleureusement à chaque question tandis que je fais au mieux pour faire bonne figure. Difficile quand le moindre contact devient de plus en plus insupportable.

— Et voilà la nouvelle recrue des Racoons, clame une femme en me serrant rapidement contre elle. Tu as époustouflé pas mal de monde la semaine dernière, lors de ton premier match.

— J'ai suivi mes coéquipiers, je réponds en m'écartant d'elle. C'est grâce à eux qu'on a gagné.

— Aucun doute sur ça mais tu as ton charme.

Je fige mon sourire avant qu'il ne disparaisse et Brett accapare son attention, parlant statistiques et stratégies de défense. Elle s'emballe, ce qui me permet de comprendre qu'elle est une de nos sponsors. Jonas me fait un signe de tête pour qu'on s'écarte et Memphis secoue la main pour m'assurer que c'est bon, j'en ai fini avec les présentations. Soulagé, je suis le capitaine jusqu'à notre équipe, mélangée autour des tables avec d'autres sportifs.

Les cheveux de Ness me permettent de le trouver sans difficulté et mon regard tombe sur Charleston, à côté de lui. Il hoche la tête quand Omare dit quelque chose à un autre gars. Je dévie pour les rejoindre mais Jonas me retient d'une main. Je tressaille en me tournant vers lui sans qu'il ne le remarque.

— On rejoint Kim, m'explique-t-il sans s'arrêter. Tu as vraiment envie de rejoindre les autres et discuter bouffe, alcool et musique ?

— Pas franchement, j'avoue en retirant mon bras de sa main sans brusquerie. Il est avec qui ?

— Les capitaines d'autres équipes. Certains sont venus à nos matchs, on va devoir leur extorquer ce qu'ils ont constaté.

Jonas esquisse un sourire diabolique et je secoue la tête en enfonçant mes mains dans les poches de mon sweat vert menthe et blanc. Comme le reste des autres footballeurs, je porte les couleurs de mon équipe et nos noms, numéros sont facilement reconnaissables ainsi. Jonas nous fait entrer dans le cercle et je me retrouve alors au milieu de types plus expérimentés, plus logiques dans leur conception du jeu et accro à la victoire.

Des doigts détournent mon attention bien plus tard alors que je baisse les yeux sur mon verre vide. Jonas rit avec le capitaine des Hools, Kim s'évertue à démontrer qu'il y a eu abus de pouvoir d'un arbitre lors d'un de ses matchs précédents contre une équipe qui nous écoute.

Je jette un œil derrière moi et constate que Ness se tient là, ses bouclettes multicolores légèrement décoiffés. C'est frustrant de l'avoir aussi près : avec sa tête de gamin, je le pensais plus petit que moi mais non, il a toujours quelques centimètres de plus.

— Le discours d'ouverture va avoir lieu, Brett veut qu'on se rejoigne.

— Déjà ? s'étonne un grand blond à côté de moi. On reprendra cette conversation après, Kim. Mais je t'assure que tu t'es planté !

Je roule des yeux lorsque cet abruti renchérit et fais signe à Ness d'avancer. Son sourire s'agrandit alors qu'il me guide à travers la foule jusqu'à notre table. Plusieurs sont alignés dans la verticale d'une estrade où une équipe s'active à brancher un micro et un ampli. Les perruches et Lael sont assis d'un côté et Ness me tire la chaise entre lui et Charleston, devant Omare. Peu de temps après, Jonas et Kim s'assoient près de Romeo et notre équipe se retrouve au complet, à faire passer la bouteille de vin qu'on nous a laissé.

— Alors le troisième, tu te sens à ton aise au milieu de cette foule ?

Je me contente d'hausser les épaules. Les mots ont dû mal à passer mes lèvres depuis que mon corps est à l'affût du moindre frôlement. J'ai le cerveau qui tourne à pleine vitesse, constamment à retenir la position de chacun et d'étudier leurs mouvements pour les éviter. C'est en train de m'épuiser et j'ai beau enfouir ce qui me traverse, je ne peux pas mettre sur OFF mon crâne.

— Quelqu'un a mangé ta langue ? me souffle-t-il soudain à voix basse en se penchant vers moi. Ou tu as peur de quelque chose ?

— Fous-moi la paix.

— Ness.

L'intervention de Charleston me tétanise. Les yeux de Ness s'agrandissent et il jette un œil derrière moi avant de sourire plus grandement. L'émerveillement passe sur sa tronche et je serre les dents. Qu'il n'approche pas mes limites, je vais avoir du mal à rester calme. Pourtant, il se contente simplement de reculer, amusé, avant de tendre son verre à Omare. Je retire le mien de sa portée avant qu'il ne le remplisse et il passe à Charleston sans rien dire. Les lumières se tamisent alors et nos regards se posent sur l'estrade.

Benjamin Furl est devant le micro, mains dans le dos et tout sourire. Ses yeux parcourent la salle et il adresse un signe de tête à la table des coachs avant de prendre la parole.

— Comme vous le savez, ce soir a lieu la cérémonie d'ouverture de la League One et nous allons vous dévoiler les matchs des sélections dans quelques minutes. Mais avant ceci, je tiens à vous rappeler le règlement de la LO et le déroulement de la saison.

Ness soupire et je pose mon coude sur la table avant de poser mon menton dans ma main. Le baratin du président de la CFA, nous le connaissons déjà tous mais il était évident qu'on allait se le taper. Romeo et Omare boivent leur vin, l'air absent, alors que Kim et Jonas sont attentifs. Ils sont bien les seuls : en un regard, je constate que notre équipe a décroché. Enfin, un vidéo projecteur s'allume et notre attention revient.

—   Toutes les équipes ont été séparés en deux groupes de sept, en fonction de vos résultats de l'année dernière. Je vous laisse prendre connaissance de votre groupe et des équipes qui le composent.

La liste s'affiche et je plisse les yeux. Racoons, groupe B. Le nom des six autres équipes me laissent une sueur froide parce que certaines sont déjà certaines de se qualifier, comme les Hools. Ness se tourne vers nous, un grain de folie dans le regard, en se penchant vers les perruches. 

— GoldHawks, une nouvelle fois.

— Ça promet un sacré match, répond Romeo avec un sourire narquois. Vivement qu'on puisse leur rentrer dedans.

— Evitons le match nul cette fois, lance Brett en attrapant la bouteille.

Les garçons acquiescent, Omare assurant qu'on sera à la hauteur. Dans la salle, je repère le capitaine des GoldHawks, ses cheveux très court et son air de tueur. Il faisait partie de ceux qu'on a rejoint, avec Kim, et il avait l'air un peu plus sympa. Visiblement, leur équipe est balèze.

— Bon, reprend Benjamin en faisant signe d'éteindre le projecteur. Vous aurez donc six matchs à jouer pour accéder au quart de final. Ce sont les quatre meilleures de chaque groupes qui iront, ensuite les deux plus hauts classés en demi-finale. On reviendra sur tout ça lors de la réunion de janvier ! Vos coachs auront les dates de vos matchs et pourront vous les communiquer dès demain. Maintenant, profitez de la soirée.

L'équipe applaudit et je les imite avec très peu d'entrain. Lael me lance un bout de pain et je l'ignore alors que des serveurs ramènent des plateaux pour manger. Enfin une activité intéressante. Romeo nous ressert du vin sans que je ne m'en aperçoive. Il arrive devant mon verre et j'ouvre la bouche pour l'arrêter au moment où Charleston tend le bras pour maintenir sa main au-dessus de mon verre.

— Oh. C'est vrai, marmonne Romeo avant de passer à Ness. Désolé Max.

— C'est rien.

Je lance un regard à ma droite mais Charleston attrape simplement son verre en m'ignorant. Il écoute Omare lui vanter les mérites du poulet à l'orange et je dévisage tour à tour mes colocataires qui agissent normalement avant d'abandonner. De l'autre côté, Ness joue avec ses légumes puis pioche une pomme de terre dans mon assiette. Je laisse faire et commence à manger, écoutant d'une oreille mes coéquipiers commencer à élaborer des plans pour parvenir à l'étape d'après. Je suis le seul à ne pas participer mais aucun ne s'en offusque, même Kim qui me lance des regards noirs de temps en temps sans rien ajouter.

Quelques heures plus tard, on rejoint enfin notre hôtel en laissant derrière nous l'immeuble de la CFA. L'équipe est à fond et Memphis distribue les clefs des chambres en baillant tandis que Selena nous donne quelques recommandations. En retrait, je regarde le numéro sur ma clef et guette celles que j'aperçois. Comme je m'y attendais, le coach nous a regroupé comme au dortoir. La seule différence est qu'on dormira tous dans la même pièce, dans des lits séparés. Encore heureux, je suis incapable de supporter quelqu'un ce soir.

Quand Memphis nous fait signe de nous disperser, je détourne le groupe et prends les escaliers alors qu'ils se glissent tous dans l'ascenseur. Lael m'interpelle mais je l'ignore puis je salue le coach et Selena avant de grimper les marches une à une, tranquillement.

— Tu fuis quelqu'un ?

Mon corps se tend tandis que Ness se met à ma hauteur. Les mains dans les poches, il regarde devant lui sans se départir de son foutu sourire.

— Toi.

— Menteur. Je ne t'ai rien fait, ce soir.

Je ne réponds pas parce que le souvenir de la voix de Charleston est encore présent. Ness a capitulé à la simple mention de son prénom, comme si les deux avaient signé un accord, comme s'ils savaient qu'il y avait une ligne à ne pas franchir, autour de moi. Je déglutis en repoussant la panique qui vient lentement se glisser sous ma peau. Je refoule les frissons, les sensations et d'un pas, je m'écarte de Ness sans réfléchir.

— Oh. Peut-être que c'est vrai, finalement, rit-il en regardant le vide soudain entre nous. Ou est-ce que c'est l'un de tes secrets ?

— Lâche-moi.

— Tu ne parles pas beaucoup, depuis qu'on est arrivé. Peur de la foule ?

Je tente de calmer ma respiration qui s'accélère mais c'est peine perdu. Il nous reste encore deux étages à monter et Ness n'a pas l'air de vouloir me foutre la paix.

— Ou tu préfères te faire tout petit pour ne pas attirer l'attention sur toi ? Tu te sens menacé ? enchaine-t-il en souriant de plus en plus. Dis-moi ce qu'il se passe, je déteste insister.

— Oublie-moi.

— Impossible. J'ai besoin de comprendre.

— Va chercher les réponses ailleurs, bordel !

— Impossible aussi. Tu peux me dire la vérité, je suis...

Je craque. Mes doigts s'enfoncent dans ses épaules et il se retrouve violemment plaqué contre le mur. Après le choc, c'est au tour de la surprise d'étirer ses traits puis autre chose que je ne décrypte pas. Son sourire reste planté sur ses lèvres, tenace et je m'écarte d'un bond quand il essaye de m'attraper les poignets. Son geste reste en suspens alors qu'il regarde mes mains. Tremblantes, je les enfouis dans mes poches et monte quatre à quatre les marches pour rester le plus loin possible de lui.

Cette fois, il ne me poursuit pas et je trouve ma chambre. Omare est allongé dans son lit, Romeo assis au bout à lui lire une connerie sur son portable qui les fait rire. Charleston sort de la salle de bain au moment où je referme la porte et le bruit sec leur font tourner la tête.

— Ça va ? me demande Romeo en fronçant les sourcils.

— Je vais me doucher.

Omare se redresse pour me retenir mais j'ai déjà mon sac en main et je claque la porte de la salle de bain, la verrouillant la seconde d'après. La douche m'aide à éloigner les sensations qui courent sur ma peau et je ferme les yeux, le front contre le carrelage. De l'autre côté, j'entends les perruches saluer Charleston avant de sortir et la cage autour de mon cœur se desserre légèrement. Je n'étais pas prêt à les affronter, je ne veux pas entendre de questions. Je veux qu'on me lâche.

Quand je sors de la pièce, Charleston est assis, les jambes croisés, sur un des trois lits et tourne la page d'un manuel posé devant lui. Il lève à peine les yeux vers moi quand je me laisse tomber sur le lit du milieu et je fixe le plafond, un bras sous la tête. Le bruit du stabilo contre les feuilles me détend et je tourne légèrement la tête pour voir Charleston froncer les sourcils.

— Un problème ? marmonne-t-il en surlignant autre chose.

— Non.

— Alors dors.

— J'aimerai.

Pour le coup, il s'arrête de lire et plante ses yeux dans les miens. Ses cheveux bruns encore mouillés retombent sur son visage et il les repousse doucement. Mon regard suit le mouvement de ses mains, comme il n'a pas cessé de le faire tout le long de la soirée. Epier, s'assurer, s'écarter, analyser, éviter.

— La soirée a été longue.

Ce n'est pas une question, pourtant je hoche la tête. Il referme son bouquin et le laisse tomber au sol avec son stylo. Il tend le bras au-dessus de son lit et éteint la lumière, nous laissant seulement avec la lumière de la lune qui traverse la fenêtre. Mon cœur bat sourdement alors que j'aperçois Charleston se lever. Il s'arrête devant le sac d'Omare et en sort une enceinte. La seconde d'après, l'objet est allumé et il lance une musique calme avec son téléphone. Juste des instruments qui jouent une mélodie lente, douce. Puis il ferme la porte à clef avant de retourner dans son lit.

— Personne ne peut entrer, aucun bruit pour t'effrayer et je ne bouge pas de là. Donc, dors.

Je guette la porte et la clef qu'il a laissé pour empêcher Omare de revenir. La musique me berce et cache le bruit des pas dans le couloir, tout comme celui que font nos draps quand on se glisse dessous. Sur le dos, je n'arrive pourtant pas à fermer les yeux, jusqu'à ce que la respiration de Charleston ralentisse. Ma nuit est courte, jonglant entre des mains, des rires, des sourires et des souvenirs.

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Hey !

L'histoire commence à avancer à grand pas, et Max se dévoile de plus en plus... J'espère qu'il vous plait autant qu'à moi !

Est-ce que vous avez déjà un personnage préféré ? 

Sinon, j'ai décidé de poster un chapitre le mercredi et le dimanche, étant donné que vous étiez tous pour ce choix ! Mais seulement pour les chapitres divisés en deux ! Ceux qui sont en un bloc seront postés le dimanche :D Du coup, on se retrouve dimanche pour la première partie du chapitre 8 !

Merci à vous de lire l'histoire des Racoons <3

Bonne semaine !

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