Je suis étendue sur mon lit depuis le début de la journée et j'aperçois déjà le soleil qui se couche par la fenêtre de ma chambre. J'ai lu ses correspondances si souvent aujourd'hui que je les connais par cœur. Des mots tracés à l'encre, jusqu'aux plis dans le papier, ses lettres sont ancrées dans ma mémoire. J'aurais presque l'impression qu'il est ici avec moi. Si seulement...

Je prends la dernière lettre qu'il m'a envoyée dans mes mains et je lis les quelques lignes une énième fois:

« Ma chère Lucinda,

J'espère que tout va bien pour maman et toi à la maison et que l'automne n'est pas trop rude. Ici, au moment où je t'écris, le temps est triste. Ou peut-être est-ce juste l'impression que j'ai puisque vous êtes loin de moi toutes les deux? Vous me manquez...

J'adorais vous avoir avec moi en ce moment. Est-ce égoïste? Au fond de moi, je sais que vous êtes mieux à la campagne, en sécurité, mais une partie de moi voudrait vous avoir à mes côtés. Peut-être qu'avec vous j'arriverais à surmonter cette peur qui s'empare de moi au moment même où je me dresse sur ma paillasse.

Quand tout ça sera fini, vous pourrez quitter la campagne pour venir vous installer avec moi, en ville. Tu adorerais la capitale! On m'a raconté que la musique est plus dansante que partout ailleurs, que le bonheur est plus joyeux et que le soleil brille toujours.»

Je ferme les yeux et essaie de m'imaginer à ses côtés dans cette capitale qui semble si merveilleuse. Je donnerais tout pour être avec lui en ce moment sous ce soleil brillant. Nous ririons et danserions sans se soucier de la tristesse de notre monde. Nous serions heureux, entourés de personnes heureuses, dans une ville heureuse. Je ne connais pas cette réalité, mais elle me manque déjà autant que lui.

J'ouvre les yeux et reprends ma lecture:

« Ici, rien de tout ça n'est vrai, pour le moment. Le ciel est terne et le sol est froid. La seule musique qui résonne ici, ce sont les sanglots étouffés des hommes dans leur couchette, et chaque soir c'est au tour d'un autre musicien. Parfois, quand je pense à vous, moi aussi je pleure, mais ce n'est jamais pour longtemps puisque je sais que je finirai par vous revoir.

Je suis ennuyé par ce temps si malheureux. Pourtant, je serais prêt à parier que toi tu l'adorerais. Le ciel est gris, l'air est humide et les feuilles ont ces teintes flamboyantes que tu adores. Quand je ferme les yeux, je te vois un livre entre les mains, posées sous un de ces arbres colorés. Est-ce que le grand chêne devant la maison a commencé à changer de couleur lui aussi?

Il me presse de vous revoir. Embrasse maman pour moi.
Je vous aime,Jacob

P.S. J'espère que le collier te plaît! Je l'ai acheté à un petit marchand pour qui les temps sont difficiles. Je suis certain qu'il s'agencera bien avec la broche que maman t'a offerte. »

En lisant les dernières lignes, mes doigts vont trouver le bijou logé entre mes clavicules. L'or froid me confirme qu'il est toujours à sa place, près de mon cœur.

Je regarde le grand chêne par la fenêtre. Il a perdu ses feuilles il y a un mois de cela. Maintenant, ses branches dégarnies sont recouvertes d'un épais manteau blanc. Cette lettre est la dernière que nous avons reçue de Jacob. Maman dit qu'il est probablement trop occupé pour écrire, maintenant que les combats achèvent. De plus, avec les fêtes qui approchent, les messagers ont beaucoup de courrier à distribuer, une lettre prendra du temps à nous arriver.

J'ouvre le tiroir de ma commode et j'y range délicatement la lettre avec les autres. Alors que je le referme, j'entends un ronflement de sabots par ma fenêtre. Dans une calèche se gare dans l'allée devant la maison. La nuit ne va pas tarder à tomber, qui peut bien nous rendre visite à une heure pareille?

Je repassais mes jupons du revers de ma main avant de descendre en courant les escaliers menant au hall. Ça ne peut pas être possible...

Voilà, c'est tout pour cet os!

J'espère que ça vous a plu, en ce moment je suis vraiment passionné par l'ancien temps (si je peux appeler ça comme ça) un peu comme dans la série Netflix Bridgerton alors je m'en suis un peu inspirée.

Bizous