🕰️Ace et le Chapelier Fou🕰️
🕰️Chapitre trois🕰️ :
Prendre un Temps Fou.
Les deux jeunes hommes entrèrent. Ils marchèrent sur des aiguilles qui tournaient, sautant de temps à autre pour en atteindre d'autres. Marco appela :
"Le Temps ! Où es-tu ?
_Derrière le cadran !, répondit une voix lointaine, après le pendule !"
Ils sautèrent de rouage en rouage et finirent par atteindre un escalier. Marco tira Ace contre lui au moment où un poids accroché à une corde allait lui tomber dessus.
"C'est en haut, dépêchons, dit le Chapelier."
Arrivés en haut de l'escalier, ils durent attendre qu'un pendule se balance tout à gauche pour passer. Le Temps, dans une pièce derrière le cadran, se retourna en les entendant arriver.
"Chapelier ? C'est toi ? Qu'est-ce que tu fais ici ?"
Le Temps était un homme aux cheveux noirs et très longs, dont les pointes ressemblaient à des aiguilles. Son costume était entièrement fait de montres. Il ne semblait pas très effrayant, mais sa grande moustache en guidon lui donnait un air sérieux.
"Nous sommes venus te rendre visite, dit Marco.
_Tu n'essayeras plus de me tuer, Chapelier ?
_Je ne l'ai pas fait exprès. Ce n'était pas du tout mon intention, tu sais ? Je ne voulais pas tuer le Temps.
_Je t'ai pardonné, le temps est passé.
_Je t'en remercie, cher ami.
_Je ne suis pas rancunier. Il faut dire que je dois occuper mon temps autrement qu'en ayant de la rancune pour quelqu'un.
_Oui, c'est bien gentil de ta part.
_Mmh... Je vous accorde quinze minutes de moi-même. Je suis très occupé, en ce moment. Je dois préparer le changement d'heure qui arrive dans quelques mois."
Aussitôt, il sortit un chronomètre de sa poche qu'il régla sur quinze minutes.
Marco s'empressa de dire :
"Ace que voilà a une question de la plus haute importance pour toi.
_Laquelle ?, demanda Le Temps."
Ace s'avança et le salua poliment avant de poser sa question :
"Sais-tu où j'habite ?
_Où tu habites quand ?
_Bah...Maintenant.
_D'accord. Laisse moi vérifier."
Le Temps invita les deux jeunes hommes à le suivre dans une autre salle.
Des milliers de montres à goussets pendaient du plafond. Elles étaient rangées en colonnes, et un grand couloir en forme d'aiguille, sans barrière, passait au milieu. Il y avait des rangées de montres des deux côtés. En dessous des montres à goussets, il y avait un vide, sans fond. Ace pensa que cette pièce était très étrange. Il remarqua que les montres de droite faisaient "tic tac", mais que celles de gauches semblaient cassées.
Le Temps demanda :
"Quel est ton nom ?
_Ace.
_Ton nom complet.
_Portgas D Ace.
_Portgas... P... P..."
Le Temps avança dans le couloir, et Ace remarqua alors qu'il y avait des noms gravées sur les montres. Elles semblaient rangées par ordre alphabétique.
"Ah ! La colonne des P."
En un geste de la main, le Temps fit défiler les montres devant lui.
"Alors... Pa... Pe... Pi... Po ! Po... Portgas ! Voilà. Portgas D Ace."
Le Temps décrocha la montre qui portait le nom d'Ace et en écouta le "tic tac" en la portant à son oreille.
"Alors... Où habites tu, maintenant ?"
En écoutant le tic tac quelques secondes, le Temps déclara :
"Le numéro 301 B, Pinestreet, dans un petit village en bordure de Londres du nom de Hive Peak, en Angleterre. Charmante maison avec une grande cour, quartier plutôt aisé.
_En... Angleterre ?, répéta Marco.
_Oui. Ce n'est pas d'ici. Tu viens de loin, petit."
Ace hocha la tête, perplexe.
"Ça me dit quelque chose, mais je ne sais plus comment y aller.
_Ça, c'est complexe. Je ne sais déjà pas comment tu es arrivé ici.
_Comment rentrer, alors ?
_À toi de trouver.
_Hmm...
_Une autre question ?
_Oui. Comment va mon petit frère ?
_Maintenant ?
_Oui."
Le Temps secoua la montre.
"Très bien. Il joue à la dînette."
Ace hocha la tête, soulagé, avant de se tourner vers Marco.
"Vas-y, pose ta question.
_Tu es sûr que tu ne veux pas en savoir plus, Ace ?
_Oui, ta question est importante aussi. Il ne faut pas qu'on manque de temps pour la poser.
_Tu as raison, acquiesça Marco."
Le Chapelier se tourna vers le Temps et demanda :
"Quel âge est-ce que j'ai ?
_Quand ?
_Maintenant, répondit-il."
Le Temps réfléchit un instant avant de chercher la montre de Marco.
"N... N... Ah ! La voilà ! Alors..."
Il secoua la montre et en écouta le "tic tac".
"Tu as 20 ans depuis 5 ans.
_Quoi ? Comment c'est possible ?, s'exclama Ace, perplexe."
Le Temps tendit la montre de Marco et les deux jeunes hommes constatèrent que les aiguilles ne tournaient pas, bien qu'elle faisait "tic tac".
Le Temps se tourna vers Ace et remarqua :
"La tienne aussi est comme ça.
_Ah oui ? Pourquoi ?, demanda le garçon.
_C'est parce que vous n'avez pas votre place dans cet espace-temps.
_Pas notre place ?, s'inquiéta Marco."
Le Temps hocha la tête.
"Je vous conseille de chercher un miroir, tous les deux.
_Un miroir ?, répéta Ace.
_Oui, mais il va falloir vous dépêcher, votre temps est compté. Surtout celui du Chapelier.
_Pourquoi notre temps est-il compté ?, demanda le garçon.
_Bientôt, il n'y aura plus de retour en arrière pour lui, je le crains."
Le Chapelier afficha une mine tristounette, même s'il ne comprenait pas tout ce que les mots du Temps impliquaient.
Le drôle de bonhomme ajouta :
"Et toi, Portgas D. Ace, ça ne va pas tarder non plus.
_Quoi ?"
Le chronomètre sonna. Le Temps s'exclama :
"Pardonnez-moi, mais je n'ai vraiment plus le temps. Bon courage !"
Ainsi, il laissa les deux jeunes hommes seuls dans la salle des montres.
Ace demanda au Chapelier :
"Quel miroir crois-tu qu'il faut qu'on trouve ?
_Je n'en sais rien, hélas... Ça m'inquiète un peu, cette histoire."
Marco se gratta le menton.
"En tout cas, ton petit frère va bien.
_Oui, c'est tout ce qui compte.
_Et je sais quel âge j'ai !
_Oui, ça c'est génial ! Mais tu n'es pas bien plus vieux que moi, finalement.
_Oui, mais je le suis quand même un peu. Donc j'avais raison.
_Ce n'est pas faux."
Le Chapelier afficha un air fier et sourit. Ace se pencha vers les colonnes de montres à goussets qui ne fonctionnaient plus.
"Pourquoi celles-ci sont arrêtées ?"
Marco en attrapa une.
"Mmh..."
Il observa les noms gravés sur les montres un petit instant avant de déclarer :
"Tous les noms que je connais et qui sont ici appartiennent à des morts."
Ace se pencha un peu plus.
"Les montres des morts...?"
En même temps qu'il dit cela, une des montres des rangées de l'autre côté émit un petit "tic" plus sec.
Aussitôt, le Temps revint dans la salle, attrapa la montre en question et l'observa attentivement.
"Ah... Ce petit soldat a cessé de fonctionner."
Il la referma et déclara :
"Monsieur Smith a fait son temps. Bon voyage..."
En même temps qu'il dit cela, il accrocha la montre de l'autre côté, dans la colonne "S".
Marco et Ace l'observaient avec de grands yeux, comprennant qu'ils venaient d'assister à la mort de ce Monsieur Smith. Le Temps se tourna vers eux et dit :
"Tiens, vous êtes encore là, vous ? Vous devriez vous en aller, ce n'est pas un endroit où chahuter."
Les deux jeunes hommes acquiescèrent et avancèrent vers la sortie en traînant des pieds, un peu choqués.
Ace demanda au Temps avant de partir :
"Si Marco ne viens pas d'ici non plus, où est-ce qu'il habite ?"
Le bonhomme fronça les sourcils, mécontent qu'Ace tente de lui faire perdre un peu plus de temps.
"Trente secondes. Pas plus. C'est bien parce que tu m'es sympathique, petit, dit-il en soupirant."
Il enclencha son chronomètre et attrapa la montre de Marco. Il la secoua près de son oreille et déclara :
"Numéro 11, Bakerstreet, Londres, Angleterre. Boutique de chapeau. Sympa, charmant, coquet. Allez, zou ! Dehors ! Je suis occupé !"
Aussitôt, ils furent mis à la porte par Le Temps, pressé.
"Au revoir ! Ne revenez pas me voir avant l'heure d'été, s'il vous plaît ! Et bon courage !"
Le temps que les jeunes hommes répliquent un "au revoir", Le Temps avait déjà claqué la porte.
Ace murmura :
"Alors nous ne venons pas d'ici ?
_Il semblerait bien, acquiesça le Chapelier."
Marco tira une carte à jouer qui était accroché à son chapeau avec une épingle à nourrice et sortit un stylo plume de sa poche.
"Qu'est-ce que tu fais ?"
Le Chapelier griffonna quelque chose sur la carte et la tendit à Ace. Il plaisanta :
"Oh, un As de Pique ? Aurais-je le droit à une dédicace du plus célèbre Chapelier du monde ?"
Le garçon ricana avant d'observer ce que son ami venait d'écrire.
"Ce sont les adresses que le Temps nous a donné, expliqua Marco. Étant donné qu'on a tous les deux tendance à oublier des choses, ce sera sûrement utile de les noter.
_Oui ! Tu as raison ! Bravo, Marco, c'est super d'y avoir pensé !"
Marco s'étira et rougit légèrement, flatté et fier d'avoir eu raison. Il fallait dire que le Chapelier adorait avoir raison, parce que quand on est fou, on a pas souvent de raison. Mais il adorait encore plus quand Ace le félicitait d'avoir eu raison, ça oui.
"On devrait rentrer chez moi, proposa le Chapelier, la nuit va tomber.
_Oui, d'accord."
Les étoiles apparaissaient une à une au dessus des garçons. Après un certain temps de marche, Marco déverrouilla sa maison et invita Ace à entrer.
"Mets-toi à l'aise, assieds-toi, dit-il, Je vais nettoyer un peu ce bazar et je tâcherai de préparer quelque chose à manger.
_Mais non, enfin ! On va faire ça ensemble, ça ira plus vite, proposa Ace."
Le Chapelier sourit tendrement et murmura :
"C'est vraiment gentil de ta part.
_Allez, allons-y ! Cette maison ne va pas se ranger toute seule !"
Ils passèrent deux bonnes heures à faire la poussière, balayer le sol et ranger la maison. Après avoir terminé la plupart des pièces, Ace tria les aliments qu'il y avait dans la cuisine pendant que Marco faisait la chambre. Il fallait dire qu'il ne restait pas grand chose de bon à manger, seulement du riz et quelques pâtes. Depuis le temps que Marco prenait le thé, il n'avait pas pû faire les course, alors le choix du repas était limité.
Malgré tout, ils engloutirent rapidement leurs assiettes. Ace remarqua, après avoir avalé une cuillère de riz :
"Demain, il faudra trouver ce que voulait dire le Temps quand il parlait de miroir.
_Sommes-nous si pressés ?
_Il a dit que notre temps était compté...
_Oui, mais si on ne trouve rien demain, qu'allons nous faire ?, s'inquiéta le Chapelier.
_Nous verrons bien. Gardons espoir !
_Tu as raison..."
Marco soupira longuement et débarrassa la table.
"Tu peux prendre un pyjama dans ma chambre, si tu veux.
_D'accord, merci beaucoup !"
Lorsque Ace revint dans la pièce principale, habillé de vêtements de nuit bien trop grands, le Chapelier déclara :
"Je vais me mettre au travail.
_Comment ça ?
_Pour ton chapeau."
Ace rit doucement et demanda :
"Maintenant ? Il est tard, on devrait aller dormir.
_Je suis fatigué mais je n'ai pas envie de dormir.
_Quand on est fatigué, on a envie de dormir, normalement.
_Je sais, mais je n'irais pas tant que je n'aurais pas au moins fait un croquis.
_Comme tu veux..."
Ace s'étira. La fatigue le gagnait.
"Vas-y, toi, si tu veux, dit Marco.
_Non, je voudrais te regarder faire."
Le Chapelier sourit et demanda :
"Tu veux du thé ?
_Encore ?
_Comment ça, "encore" ?"
Ace secoua la tête de gauche à droite, amusé, et accepta par politesse.
Marco commença à croquer quelques idées sur un papier, alors qu'Ace l'observait attentivement, sa tasse à la main.
"Comme je suis heureux de reprendre mon travail !
_C'est très joli. J'aime beaucoup."
Le Chapelier se gratta la nuque, flatté.
Alors que Marco commençait à coudre, Ace s'endormit sur le fauteuil.
"Ah ! J'ai terminé ! Alors, qu'est-ce que tu en dis, Ace ?"
Le Chapelier ne remarqua que son invité s'était assoupi que lorsqu'il se tourna vers lui pour lui montrer son ouvrage terminé.
"Oh... Je vois."
Il ricana doucement face à cette vue du garçon.
Le Chapelier s'approcha doucement du fauteuil, s'agenouilla par terre et posa sa tête contre l'accoudoir. Il resta un petit moment à l'observer dormir, avant de poser délicatement le bout de son doigt sur la main d'Ace, et de lui prendre sa tasse de thé froide. Il murmura pour lui-même :
"Pire que le Loir dans la théière"
Marco posa le chapeau et la tasse sur la table basse et porta Ace dans ses bras pour l'emmener dans son lit.
Il se coucha à ses côtés et s'endormit presque aussitôt qu'il eût soufflé sur la bougie. En un mouvement las, Ace se blottit contre lui, et ils passèrent la nuit à se serrer dans leurs bras.
Le lendemain matin, Ace se réveilla le premier. En levant la tête, il constata la position dans laquelle il était et rougit immédiatement. Pourtant, il ne quitta pas les bras du Chapelier avant une bonne demie-heure, profitant de son souffle sur son front et de ses bras serrant ses hanches.
Doucement, il s'extirpa de l'étreinte et partit dans la cuisine sur la pointe des pieds. Il se mit immédiatement à la tâche : thé et pancakes à la banane.
Alors qu'il dressait la table pour le petit déjeuner, un fracas le fit sursauter.
"Ma... Marco ?"
Personne ne répondit, alors il posa la poêle sur la table et s'empressa d'aller dans la chambre.
"Marco, ça va ?"
Ace trouva le Chapelier recroquevillé sur lui-même, à même le sol. Le garçon s'approcha de lui doucement et s'assit par terre avec lui. Marco marmonnait des mots à voix basse sans prêter attention à son invité.
"Où est-ce qu'elle est passée ? J'ai oublié, j'ai oublié... A... A... A... Accident. C'était un accident. Je ne voulais pas oublier... Je n'ai pas fait exprès d'oublier...
_Marco... Est-ce que tu te sens bien ?"
Rien à faire, c'était comme s'il ne l'entendait pas.
"A... A... A... Anarchie. A... Angoisse. Anxiété... Allumé. A... Autorité. A... A... A...
_Marco, arrête...
_A... Arrête ! Armé... Abasourdi... Assez !"
Ace posa sa tête sur l'épaule du Chapelier sans dire un mot.
"Où elle est...? Où elle est...?"
Marco se frappa le front.
"Non ! Je l'ai perdue !
_Qu'est ce que tu as perdu ?, demanda Ace, d'une voix basse.
_Elle est partie !
_Qui ?
_Elle s'est envolée ! Elle m'a A... A... A... Abandonné !
_Qui, Marco ?"
Le Chapelier se mit à verser de grosses larmes.
"Comme un p'tit oiseau. Un p'tit oiseau... Un oiseau.
_Je ne comprends pas, chuchota Ace.
_Un oiseau... Un oiseau... A... A...
_Alouette ?
_Alouette ! Non... A... A... Ace.
_C'est moi, je suis là.
_Un p'tit oiseau...
_Qui est ce petit oiseau ?
_Oiseau... Oiseau... Pourquoi un corbeau ressemble... À... Euh...
_À... Un bureau ?
_Un bureau ! Un bureau ! Pourquoi un corbeau ressemble à... A... A... A... à un bureau ?
_Je ne sais pas, Marco...
_Tu ne sais pas ! Tu ne sais rien ! Rien du tout ! Tu es fou !
_C'est toi qui est fou.
_Moi, je vais bien ! Je vais... Je... Je vais bien..."
Ace voulut prendre la main de Marco pour le rassurer, mais le Chapelier la ramena à lui brusquement.
"Arrête ! A... A... A... Arrête... Arrête !
_D'accord. Pardon... Je ne voulais pas te brusquer.
_Tu veux me tuer ! Tu... Veux... M'a... A... A... M'assassiner ! Démon ! A.... Abomination. Amer. A... Attristé.
_Marco... Calme toi, ne crie pas... Je ne veux pas te tuer. Je veux t'aider.
_A... A... Aider. M'aider. M'aider... M'aider à mourir ! Tu veux... Tu veux...
_Non... Je veux que tu te sentes bien, moi.
_Tu... Me hais ! Tu veux ma mort ! Tu veux... Tu es... Tu... Toi !"
Ace versa quelques larme également en voyant à quel point Marco souffrait. D'une voix tremblante, il chuchota :
"Je suis là...
_Tu n'existes pas ! Tu n'es pas là ! Tu n'étais pas là ! Tu...
_C'est parce que je suis sorti du lit ?
_Non ! Tu comprends rien ! Tu comprends rien parce que t'existes pas ! A... Hallucination !
_Ça commence par un H.
_Un... Un H ?! Un H ?! Une hache ?! Où ?!
_Non... Je... Marco... J'existe.
_Tu existes... Menteur ! Tu es dans ma tête !
_Non, je... Je... Je suis là..."
Ace se sentait désemparé. Il n'avait aucune idée de comment calmer le délire du Chapelier.
"Pourquoi un corbeau...
_Marco... Qu'est ce que je dois faire ?, sanglota le garçon.
_Ne... Ne me tue pas !
_Pourquoi est-ce que tu crois que je veux te tuer ?
_Tu... Tu... Mon cœur ! Tu..."
Ace ouvrit de grands yeux. Il demanda :
"Ton cœur bats vite ?
_À.. A... A... A... A... À cause de toi !
_Rappelle toi notre conversation, Marco.
_Me rappeler... Me rappeler... Abru- A... A... A... A... A... A... Abruti ! Je t'ai dit qu'elle était partie !
_Mais... Qui...?
_Ma tête ! Ma tête ! Elle est partie !
_Mais non... Elle est toujours là, je la vois, elle est très belle, chuchota Ace.
_Non ! Le dedans ! Ma... Ma... Ma conscience. Non... Ma... Lucidité ! Je suis fou !
_Je sais, Marco.
_Mais si je suis fou... Tu ne m'aimeras pas. Et si tu ne m'aimes pas... Tu me tueras ! Je suis fou !
_Marco... Tu es fou... Et ce n'est pas grave. Je t'aime malgré ça. J'aime que tu sois fou, mais je n'aime pas que tu sois triste. Calme toi, s'il te plaît... Tu me fais un peu peur...
_Tu m'ai... A... A... A... A... Aimer. Aime. Tu m'aimes.
_Oui...
_Je... Je t'aime. A... A... Ace."
Le jeune homme ouvrit les bras pour réconforter Marco. Le Chapelier s'y laissa tomber.
"La... Tête... J'ai perdu la tête. Je ne veux pas oublier... Je ne veux pas oublier...
_Marco...
_Je ne veux pas t'oublier !"
Ace caressa doucement le dos du jeune homme.
"Je suis là...
_J'ai peur ! J'ai peur !
_Je sais...
_Je vais mourir !
_Non... Ça ira... Je te le promets.
_Un corbeau. Un corbeau... Pourquoi un corbeau ressemble à un bureau ?
_Je ne sais pas... Je ne sais pas...
_Tu ne sais rien.
_Souviens-toi de notre conversation d'hier, Marco. S'il te plaît, essaye..."
Les pleurs du Chapelier ne cessaient pas.
"Je ne sais pas ! Je ne sais plus ! J'ai peur ! J'ai peur !
_Je t'ai dit que le cœur battait fort quand on aimait quelqu'un. Je t'ai dit que les meilleures personnes étaient folles. Je t'ai dit que...
_Les chats ronronnent lorsqu'ils sont contents.
_Oui. J'ai dit ça, aussi.
_Je me rappelle ?
_Oui.
_Je me rappelle !"
Marco resta silencieux un petit moment et calma ses larmes. Ace murmura :
"Ça va ?
_Oui..., chuchota le Chapelier.
_J'ai préparé des pancakes...
_Pancakes. Pancakes ?
_Oui... Tu en veux ? Ils sont à la banane.
_Oui...
_Je suis là, Marco. Ne t'inquiètes pas.
_Tu restes ?
_Comment ça ?
_Tu vas rester avec moi ?
_Oui, Marco.
_Pour toujours ?
_Oui, Marco. Pour toujours. Tu es mon ami, maintenant.
_A... A... A... Ami... Ami..."
Le Chapelier secoua la tête.
"Je ne veux pas.
_Tu ne veux pas être mon ami ?, fit Ace, vexé.
_Non. Non... Je veux... Papa. Papa..."
Ace ferma les yeux. Il comprit que les souvenirs du Chapelier lui revenaient en bribes, et qu'il se souvenait probablement de son père.
"Je ne suis pas ton père, Marco... Excuse-moi. Je suis Ace, moi.
_Ace... Je veux voir mon papa... Je veux rentrer chez moi...
_Tu te souviens de chez toi ?
_Je veux rentrer... Et je veux que tu m'aimes...
_Je t'aime, Marco. Je t'aimes déjà.
_Non, tu ne m'aimes pas comme il faut.
_Comme il faut ? Comment veux-tu que je t'aime ? Je t'aime comme un Marco, tu te souviens ?
_Je veux que tu m'aimes comme... Comme... Comme j'aime comme un Ace.
_Comment tu aimes comme un Ace ?
_A... A... A... Amour.
_Amour ? Amour... Comme dans amoureux ?
_A... A... Amoureux."
Ace sentit ses joues le brûler instantanément. Il bafouilla :
"Ah... Ah... D'accord... C'est que... Je..."
Il s'éclaircit la gorge.
"Oui... Je... Je ne sais pas... J'ai... Je t'aime beaucoup Marco, mais... C'est... Euh... Je ne sais pas comment le prendre.
_J'ai peur, chuchota le Chapelier.
_Je sais... Moi aussi j'ai peur.
_Tu vas m'aban... A... A... Abandonner ?
_Non. Je reste avec toi. Je te l'ai promis.
_Tu m'aimes comme il faut ?
_Je..."
Ace se gratta la nuque.
"Tu es tellement pressé...
_Mon temps est compté, affirma Marco.
_Oui... Mais... Ça va vite... Ça..."
Ace posa les yeux sur le Chapelier qui serrait son haut.
"Rah ! Tu aurais pu attendre...
_Attendre ? Pourquoi faire ?"
Les sanglots de Marco s'étaient enfin totalement calmés.
Ace passa sa main dans ses cheveux et murmura :
"Parfois, il est mieux d'attendre un peu. Tu comprends ?
_Non.
_Ce n'est pas grave, c'est fait, après tout..."
Le Chapelier se redressa et déclara :
"Je veux des pancakes.
_Quel... Changement soudain... Oui, viens avec moi. Je vais les faire réchauffer un petit peu."
Ace prit la main de Marco et le conduisit jusqu'à la salle à manger. Le garçon déposa les pancakes dans l'assiette du Chapelier et remarqua en levant les yeux vers la fenêtre :
"Il pleut, dehors...
_Oui. Restons là.
_Il faut qu'on aille trouver le miroir, tu te souviens ?
_Oui... Mais... Je veux rester avec toi...
_On restera ensemble, Marco.
_Mais si on trouve le miroir... Qu'est-ce qu'il va se passer, après ? Et si... Et si je ne te revoyais plus ?
_Pourquoi est-ce qu'on ne se reverrait pas ? Tu as écrit nos adresses sur la carte à jouer, rappelle toi. Ça ira.
_Oui... Mais... Et si on s'oubliait ?
_Jamais je ne pourrais t'oublier.
_J'avais oublié mon papa.
_Mais tu t'en souviens, maintenant.
_Oui..."
Marco avala une grosse fourchette de pancake. Il soupira :
"Ne vois tu pas qu'il pleut ? Il n'y a nul besoin d'aller dehors... Peut-être pourrions-nous retourner dans le lit et rester encore un peu... Et si... Et si nous faisions comme si c'était le week-end ? Et si... Nous faisions comme si c'était le week-end pour toujours ? Et si nous fermions les rideaux et faisions comme s'il n'y avait pas de monde dehors ?
_Marco...
_Quand... Quand tu peux prendre le monde entier dans tes bras, il n'y a pas besoin d'aller dehors."
Ace souffla du nez, amusé.
"Qu'est-ce-que ça veut dire ?
_On... On pourrait rester ici et... Et rester au lit... Et manger des pancakes à la banane... Et... Se prendre dans les bras...
_C'est un bien joli programme, Marco... Seulement, le miroir...
_Oui... Mais..."
Le Chapelier soupira.
"J'aurais aimé... Euh..."
Il posa sa fourchette.
"Tu sais... Rester avec toi."
Ace sourit et attrapa sa main.
"Je sais. J'aimerais rester avec toi aussi. C'est pour ça que nous allons chercher le miroir tous les deux. Et on ne se séparera pas."
Marco planta son regard dans celui d'Ace et finit par esquisser un petit sourire.
"D'accord... Faisons ça..."
Le Chapelier se leva.
"Ton chapeau... Je l'ai terminé.
_Ah, vraiment ? Déjà ?"
Marco l'attrapa sur la table basse et le lui montra.
"Qu'est-ce que tu en dis ?"
Ace murmura avec douceur :
"Il est magnifique...
_Tu le trouves joli ?
_Il est plus que joli ! Je l'adore !"
Le Chapelier le posa sur sa tête et chuchota :
"Un joli chapeau pour une jolie tête."
Marco sourit devant les rougeurs d'Ace et attrapa sa tasse de thé qu'il but d'une traite avant de déclarer :
"Tu peux utiliser la salle de bain, si tu veux.
_Oui, c'est gentil. J'y vais, dit le garçon."
Dès que son invité partit prendre un douche, le Chapelier décida de faire de la couture. Une demie heure plus tard, la voix timide d'Ace résonna :
"Marco ?
_Oui ?"
Il arrêta la machine à coudre.
"Euh..., hésita Ace, c'est à dire que... J'ai oublié mes vêtements dans la chambre.
_Oui. Attend une seconde."
Marco termina rapidement son travail et s'avança jusqu'à la porte de la salle de bain. Il toqua.
"Tiens."
Ace entrouvrit la porte et passa sa main pour attraper ce que lui tendait le Chapelier. Il chuchota :
"Ce n'est pas à moi...
_Si. Je l'ai fait pour toi."
Le garçon détailla le vêtement que Marco lui avait donné.
C'était une très jolie salopette très colorée, et, surtout, à sa taille.
"Merci beaucoup, Marco. Je l'adore ! Elle est très belle ! Tu es vraiment très rapide !
_Oh... Euh... Pas de quoi ! C'est mon travail !"
Le Chapelier se gratta la nuque, très flatté.
"Même si ma spécialité c'est les chapeaux, je me débrouille un peu en couture..."
Pour remercier Marco, Ace ouvrit un peu plus la porte de sorte à ce que sa tête puisse passer et embrassa sa joue.
Aussitôt, le visage du Chapelier se teinta de rouge. Il bafouilla :
"Ah... Euh... Ah..."
Ace referma la porte après un petit ricanement.
Marco se racla la gorge et demanda après une petite minute :
"Euh... Alors ? Elle te va ?"
Son invité sortit de la salle de bain peu de temps après sa question. Il le questionna :
"Qu'est-ce que t'en dit ?
_Oh... Euh... Elle est à ta taille."
Ace esquissa un sourire tendre et attrapa la main de Marco.
"Je te remercie beaucoup."
Une fois les deux jeunes hommes prêts, ils partirent.
Marco tenait un parapluie au dessus de leur tête.
"Tu n'as pas froid ?
_Non, répondit simplement Ace. La pluie est étrange, non ?
_Comment ça ?
_Elle a une odeur bizarre.
_Bah... Elle sent la pluie d'aujourd'hui.
_La pluie... d'aujourd'hui... ? Non... On dirait qu'elle sent la poire.
_C'est ce que je dis."
Ace passa sa main en dehors du parapluie, la ramena à lui et sentit les gouttes de pluie.
"Oui, la poire !
_C'est parce que c'est une poireverse. En quoi c'est spécial ?
_Rien que le nom est spécial.
_Goûte.
_Hein ?"
Le garçon lécha le bout de sa main et ouvrit de grands yeux.
"Du sirop de poire ?!
_Bah oui. L'averse est plutôt réussie, aujourd'hui. Tu n'as jamais goûté de poireverse ?
_Euh... Non.
_Et une pêchipitation ?
_Pêche... Pêche...ipitation ? Une pluie de sirop de pêche ?
_Bah, oui.
_Euh... Non.
_Hmm... Étrange, remarqua Marco.
_Il y a d'autres pluies de fruits ?
_Oui, il y a la cassiboulée, mais il ne vaut mieux pas sortir parce qu'il pleut vraiment trop dans ce cas, précisa le Chapelier.
_Cassis ?
_Oui. Il y a aussi les pommerages. Il faut faire attention à ta tête dans ce cas, car de gros grêlons-d'amour peuvent te tomber dessus.
_Des... Grêlons-d'amour...? Comme des pommes d'amour ?
_Oui. Ça fait très mal si tu t'en prends une un pleine tête. Et ça colle aux cheveux.
_Je... Je vois."
Marco expliqua :
"Il y a aussi les ananarosemments : ananas, ça c'est léger, ce sont mes préférées. Sauf celle de la semaine dernière, elle était ratée. Sinon, il y a les lichintempéries : litchi. Ou les mouillelons : melons , les tempastèques : pastèque... Euh... Les ceriflottes... Ça, c'est à la cerise.
_Ah, d'accord."
Le Chapelier se tourna vers le garçon.
"Au fait, on marche... Mais on va où, exactement ?
_Euh...Je ne sais pas... Le Temps a dit qu'il fallait trouver un miroir.
_Je ne sais pas où c'est, moi.
_Et si nous demandions à quelqu'un ?
_Il faudrait trouver Cheshire. Il connaît beaucoup d'endroits.
_Le chat d'hier ?
_Oui."
Soudainement, le minet apparût devant eux.
"On parle de moi, par ici ?"
Il tenait au dessus de sa tête une grosse feuille en guise de parapluie. Marco s'exclama :
"Cheshire ! Justement, on te cherchait !
_On ne l'a pas cherché longtemps, précisa Ace.
_C'est pour quoi ?
_Nous sommes à la recherche d'un miroir, expliqua le Chapelier.
_Quel genre de miroir ?
_Euh..., hésita Ace, on ne sait pas vraiment...
_C'est le Temps qui nous a dit de chercher un miroir, compléta Marco.
_Oui, mais des miroirs, il y en a plein. Presque dans chaque maison, en fait, remarqua le minet.
_Et bien... Peut-être un miroir spécial, tenta Ace.
_Spécial ?
_Magique, peut-être, affirma le garçon."
Le chat, qui flottait nonchalamment dans les airs, fit plusieurs tours sur lui même en faisant mine de réfléchir avant de dire :
"Un miroir spécial... Ou... Magique... Hmm... Oui. J'ai remarqué une chose, lors de ma dernière balade. Il y en a un que La Reine de Cœur garde derrière un rideau, dans une pièce fermée à clef. Il doit sûrement être spécial, si elle le protège autant.
_La... La maudite grosse tête ?! Mais on ne peut pas y aller, paniqua le Chapelier.
_Si vous cherchez un miroir spécial, je pense que c'est celui-ci, affirma Cheshire."
Ace hocha la tête, pensif. Marco lui avait attrapé la main et commençait à la serrer nerveusement.
"Bon, si vous n'avez plus besoin de moi... Je m'en vais, fit le Chat."
Aussitôt, sa queue, ses pattes et son corps disparurent dans cet ordre. La tête du minet flottait encore dans les airs quand il murmura :
"Je pourrais officier le mariage, au fait ?"
Alors qu'Ace, les joues en feu, allait répliquer, le chat s'était totalement volatilisé.
"Bon... Euh... Allons chercher ce miroir, Marco.
_Euh... Chez... Chez elle ?, fit le Chapelier, serrant un peu plus la main du jeune homme.
_Bah... On a pas le choix, non ?
_Et bien...
_Si tu veux, tu peux m'attendre. Je peux y aller tout seul et te rejoindre, si tu as peur, dit Ace tendrement."
Marco inspira profondément et souffla :
"Puisque tu iras que je vienne ou pas... Je... Je te suis... On a dit qu'on ne se séparerait pas."
Ace hocha doucement la tête. Avec assurance, toujours sa main dans celle de Marco, il déclara :
"Allons-y."
Ils se mirent à avancer.
Le Chapelier ricana nerveusement :
"C'est... C'est de l'autre côté."
Ace fit demi-tour.
"Oui ! Je te suis !"
La pluie s'était arrêtée.
4880 mots
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