11.5 - Silverstone 2022 - Milo

J'ai l'impression que l'on compresse mon crâne entre deux murs de béton.

La sensation est atroce, en plus de ça, je suis incapable de bouger mes jambes. Dites-moi que c'est une mauvaise blague.

J'ouvre lentement les yeux et ils me brûlent à cause de la lumière blanche de la pièce.

— Bienvenue parmi nous, monsieur Richard.

En rouvrant les yeux, je découvre un médecin en blouse blanche devant mon lit avec une plaquette.

— Comment vous sentez-vous ?

— J'ai l'impression qu'on écrase ma tête et..., je regarde mes pieds, je n'arrive pas à bouger mes jambes...

La panique s'empare de moi, mais je ne montre rien.

— Pour ce qui est de votre tête, c'est normal, vous avez subi un traumatisme crânien lors de votre accident, vous vous en souvenez ?

— Je me souviens d'avoir tapé le véhicule devant moi... je me vois allé droit vers le mur et trou noir.

Il note en acquiesçant, mais ça ne répond pas à la problématique de mes jambes.

— Et pour mes jambes ?

— Nous allons faire des examens complémentaires, mais ne vous inquiétez pas, cela pourrait revenir dans la journée sans que vous vous en rendiez compte.

Il n'est pas très rassurant comme médecin quand même...

Je regarde le plafond, perdu dans mes pensées quand la porte s'ouvre sur Noa. Ses traits sont tirés, ses yeux cernés, elle a certainement vécu un enfer pendant que je dormais tranquillement sur ce lit.

— Noa...

— Tu es un imbécile.

— Je n'avais pas le choix, Noa, je comprends ta colère... Je t'ai dit plusieurs fois que je prendrais les risques nécessaires, mais ça n'avait rien avoir, je n'avais pas le choix.

— Tu as manqué de mourir putain...

Elle s'approche lentement du lit, comme si c'était interdit et elle pose ses deux mains sur la barrière à l'avant tout en regardant la couette. Comme si me regarder était bien trop complexe pour elle.

— On est né pour mourir Noa.

Une larme roule sur sa joue à l'entente de ma phrase et son regard triste croise mon regard vide.

— Ne dis pas ça, Milo. Jamais ! On est né pour vivre avant de mourir, sinon à quoi sert la vie, hein ? Vingt-six ans n'est pas un âge pour finir sa vie.

J'ouvre mes bras et elle vient s'y réfugier en pleurant alors que j'embrasse son front.

— Je suis désolé Noa, réellement. Je ne te laisserais pas seule.


**


— Monsieur Richard ? Je peux vous voir en privé ?

J'acquiesce et Max, Noa, Eliott ainsi que les parents de Noa et Max sortent de la chambre pour me laisser seul avec cet étrange médecin qui a mon avenir entre ses mains.

— Alors, suite aux examens...

Il cherche ses mots et je n'aime pas ça du tout... quel est le verdict putain !

— Vous êtes temporairement paralysé des membres inférieurs de votre corps autrement dit : vos jambes.

Je... je suis paralysé.

— Je... Pour combien de temps ?

— La saison 2022 est terminée pour vous, Milo... et sûrement celle de 2023.

Non.

Non.

Non.

Je refuse d'y croire, c'est une véritable catastrophe, ce n'est pas possible, ça ne peut pas être vrai. Qui a payé le médecin pour me faire une telle blague. Qui a mis en scène ce prank !

— Nous allons nous occuper de vous et votre rééducation sera très bien encadrée, mais nous ne savons pas s'il sera possible pour vous, un jour, de reconduire une formule 1.

J'ai l'image dans ma tête d'une personne qui vient me reprendre ma coupe alors que je suis sur la première marche du podium. Et cette personne, c'est lui.

Alors qu'il s'éloigne pour quitter ma chambre, je lui demande :

— Dites à tout le monde que je ne veux plus recevoir de visite aujourd'hui, je suis fatigué.

— Ne vous renfermez pas, Milo.

— Je me fiche de vos conseils, je veux juste... je ne veux voir personne.

— Très bien.

À travers les vitres, je le vois renvoyer tout le monde à la maison et je fais semblant de dormir jusqu'à ce qu'ils soient tous partis avant de rouvrir les yeux.

Ma vie est foutue.

Mon rêve est brisé.

Ma carrière ruinée à néant.


**


— Hello ! annonce Noa en passant sa tête par la porte de ma chambre.

Je ne lui réponds pas et continue de dessiner sur mon cahier que m'a apporté ma sœur quand elle est passée avec Juan hier.

— Bonjour l'ambiance...

Ça fait déjà trois jours que je suis réveillé, trois jours que l'enfer a commencé.

— Ça va ? la questionné-je détaché.

— Milo, vraiment j'essaie de faire plein de choses pour te changer les idées, mais si tu ne fais pas un effort minime on ne va pas y arriver.

— Aide-moi à marcher alors. Je m'en fous du reste.

Je croise enfin son regard avant de reporter mon attention sur mon dessin, incapable de soutenir la déception lisible dans ses pupilles.

— Je ne peux pas faire ça et tu le sais très bien. Mais je fais tous les efforts possibles pour te changer les idées.

— Alors fais-moi conduire une voiture de course, continué-je. Ah ben non, je n'ai plus de jambes.

— Tu es détestable, mais ce n'est pas pour autant que je vais abandonner.

— Tu ferais mieux Noa.

— Comment ça ?

— Nous deux... ça ne peut plus continuer comme ça.

Parce que je vais finir par te détruire.

— Alors, tu me quittes ? C'est ça que tu essaies de me dire ? Une petite difficulté et monsieur abandonne ?

— C'est plus compliqué que ça Noa.

— Je ne te lâcherai pas, Milo. Tu ne peux pas me faire ça maintenant, laisse-nous une chance de passer au-delà de cet épisode.

Je ne passerais jamais au-dessus de cette peine Noa... Et pourtant...

— D'accord.

Elle se blottit dans mes bras et je la serre fort contre moi de peur qu'elle ne s'évapore.

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