Jour 11 (partie deux).
Mardi.
On se retourne et c'est à ce moment là que je me rends compte que nos épaules se touchaient depuis tout à l'heure. Je rougis et me décale un petit peu.
- Ah, je me disais bien qu'il n'y avait que toi pour massacrer ainsi mon piano mon chéri !
Elle entre au salon, mon père derrière elle. Ils rient tous les deux. Sa grande robe lui donne l'air beaucoup plus jeune, un peu hippie, elle retire son chapeau. Leurs regards se posent sur nous, Harry et moi nous redressons du tabouret en même temps.
- Euh, je commence en cherchant mes mots, désolé maman. Harry me montrait comment jouer un morceau, il est très doué.
- Harry, donc, sourit ma mère, bonjour ravie de te rencontrer. Je m'appelle Jeanne.
- Et moi c'est Emmanuel, mon père tend la main à Harry et la serre, bonjour mon garçon.
Je les regarde se faire les présentations, un peu pris au dépourvu par leur arrivée. Je ne m'attendais pas tellement à ce qu'ils voient Harry, qu'ils apprennent son existence ainsi et surtout qu'ils soient de retour aussi tôt. Mais, ce n'est peut-être pas une si mauvaise chose.
Mon père me demandait, il y a peu, ce qui me rend si heureux ces derniers temps. Il rencontre la raison principale aujourd'hui.
Harry les salue poliment, un sourire timide sur les lèvres. Mon père va s'occuper de ranger des affaires et étendre leurs serviettes.
- Il est en vacances ici avec ses parents, je précise, ils sont arrivés Samedi dernier.
- Ah je me disais bien que je ne t'avais encore jamais vu dans le coin et Louis ne nous a pas parlé de toi avant aujourd'hui, dis ma mère en souriant, comment vos chemins se sont croisés alors ?
Je tourne la tête et Harry et moi nous regardons en même temps. Je hausse les épaules et lui réponds que nous nous sommes rencontrés au lac. Je leur explique que j'ai montré à Harry le musée et les vestiges romain. Mon père vient tout de suite s'ajouter à la conversation et parle vivement des autres richesses de notre village.
Ils discutent un moment à deux, Harry lui fait la liste de ce qu'il a pu visiter depuis le début de ses vacances. Mon père semble passionné. On reste un moment à parler tous les trois au salon, installés dans les fauteuils. Harry et moi mangeons la tarte.
Ma mère se lève pour finalement aller ranger quelques affaires et commencer à préparer le repas. Avant de quitter le salon, elle se tourne vers Harry et lui offre l'un de ses plus chaleureux sourires.
- Tu peux rester dîner ce soir si tu veux Harry.
- Oh, je ne veux pas déranger.
- Pas du tout, ajoute mon père en souriant, ce serait avec plaisir. Jeanne fait toujours à manger pour un régiment.
- Je ne te reconduirais pas tard.
Après ma phrase, il pose ses yeux d'un vert intense sur moi. Je lui souris, il réfléchit quelques secondes et hoche la tête et nous remercie plusieurs fois. Ma mère semble ravie, elle s'éclipse en cuisine, mon père semble tout aussi content, derrière sa barbe et ses lunettes. Harry plonge sa main dans la poche de son jean et se lève.
- Il faut juste que je prévienne mes parents avant.
Pour pouvoir passer son coup de téléphone, il s'éloigne dans le jardin. Je l'observe partir, depuis la terrasse et amener son portable à son oreille une fois dehors. Je m'enfonce dans le canapé et laisse échapper un long soupir de bien-être, de bonheur, je ne sais pas vraiment. Ce dont je suis certain, c'est que je me sens heureux actuellement.
- Alors, commence mon père, c'est lui n'est-ce pas ?
- Pardon ?
Je tourne la tête vers mon père et fronce les sourcils, il me regarde avec un sourire qui laisse penser qu'il sait tout du monde et de ce que je pense ou ressent. Des fois j'ai cette impression, qu'il peut lire en moi comme dans un livre ouvert. C'est étrange, mais je n'ai pas besoin de lui dire certaines choses. Il le sait. Il sait le deviner en moi. J'en ai parlé une fois à Zayn et il m'a répondu que c'était sans aucun doute dû aux liens de famille.
Quoi qu'il en soit, il me regarde avec ce sourire. Mes joues chauffent et je remercie la légère pénombre de cacher un minimum mes rougissements. Moi aussi je sais, je fais l'ignorant, mais je sais exactement de quoi il parle. Notre conversation d'hier. Ce qui me rend heureux depuis quelques jours. La réponse se balade sous ses yeux et elle ne lui a pas échappé, comme à peu près tout je dois avouer.
- Je ne sais pas si c'est lui, je souffle tout bas, mais il y est pour beaucoup.
- En tout cas, il est vraiment charmant et intelligent comme garçon. Je peux te le dire, c'est quelqu'un de bien, ça se voit.
- Oui, je marque une pause en fixant le sol, oui il l'est.
- Mais... ?
Les sourcils de mon père se fronce, je croise les bras sur mon torse et regarde Harry depuis le jardin. Il fait des allers-retours et parle au téléphone, ses lèvres bougent mais nous n'entendons rien d'ici.
Je pince la peau de mon coude entre mes doigts, me mords la lèvre inférieure et souffle. Rien n'est jamais entièrement facile. La vie donne mais prend aussi. Elle ne pouvait pas simplement mettre Harry sur mon chemin et que nous entretenions une relation si belle sans me mettre des obstacles. Le mien c'est le temps. Et il passe. Il passe trop vite. Il me file entre les doigts. Et Harry sera parti avant que je ne puisse le saisir.
- Mais Dimanche il ne sera plus là.
- Il reviendra peut-être l'été prochain.
- Et peut-être pas, peut-être jamais. Puis un an... un an c'est extrêmement long.
A mon tour, mon père pousse un léger soupire et se lève de son fauteuil pour venir à côté de moi dans le canapé. Il passe un bras autour de mon épaule et je le regarde. J'ai la gorge nouée et le cœur lourd, mais je l'écoute. Parce qu'il a toujours su quoi me dire.
- Écoute-moi Louis, sa voix est très sérieuse, des gens dans ta vie tu en rencontreras des tas. Certains vont rester des années, peut-être jusqu'à la fin, d'autres ne seront là que provisoirement, un mois, un an, deux semaines, qui sait ? Il y a des personnes que tu ne peux qu'effleurer, mais crois moi... Si Harry tient à votre relation autant que toi tu y tiens, il fera tout pour garder contact. En plus, avec toutes ces nouvelles technologies maintenant, vous pouvez toujours vous parler tous les jours même à des kilomètres.
Au fond, je sais qu'il a raison. Que nous avons échangé nos numéros et que je ne serais peut-être pas abandonné après ces deux semaines de vacances. Je n'espère juste pas devenir un inconnu, qu'on finisse par ne plus se parler ou prendre des nouvelles l'un de l'autre. Je veux qu'il continue à me parler des nouveaux livres qu'il a aimé, de son peintre préféré, je veux continuer à lui raconter les vagues, mon admiration pour Marguerite Duras, mes ballades en vélo et le reste de ma journée.
Je ne sais pas ce qu'il ressent, parce que je ne lui ai pas demandé, parce que je n'ai pas envie d'être déçu si nous ne sommes pas sur la même longueur d'onde, mais... dès le deuxième jour où nous nous sommes revus, au lac, j'ai senti quelque chose passé entre nous. Un lien qui s'est formé et dont les liens se nouent et se resserrent encore aujourd'hui. Ce sentiment quand on tombe sur une personne qui nous correspond, avec qui le courant passe tout de suite, comme si nous étions destinés à nous rencontrer.
Je soupire et passe une main dans mes cheveux. Je ne sais pas ce que je raconte. Je dois avoir lu trop de roman d'amour. Ce n'est pas une fiction, c'est la vie réelle. Et j'aimerais déjà en connaître la fin pour pouvoir éviter des erreurs et des cœurs brisés.
- Ne te tracasses pas avec ça, profite de tes moments avec lui. Ça ira, tu verras. Et si jamais il n'habite pas très loin, vous pourrez toujours vous voir entre deux.
Je n'avais pas pensé à ça, je ne sais même pas où il habite. Parfois, je me dis que j'angoisse trop pour rien. Peut-être qu'il vit à cent, deux-cent kilomètres d'ici. Un endroit où on peut se rejoindre en train en seulement quelques heures de trajet.
J'en ai assez de mon cerveau qui cherche toujours à tout compliquer. Mon père embrasse mon crâne, me caresse l'épaule affectivement. Je le remercie, la voix un peu tremblante. Harry revient, je passe mes mains contre mes paupières et me redresse dans le canapé. Ses yeux tombent sur moi, il fronce les sourcils et me demande si je vais bien, je force un sourire et hoche la tête. Il nous confirme qu'il peut rester ce soir, je regarde mon père qui nous sourit et me fait un clin d'oeil. Ensuite, il se lève pour rejoindre ma mère et nous laisser ensemble au salon.
Harry prend place à côté de moi dans le canapé, là où mon père était quelques secondes avant. Il cherche à capter mon regard, je tourne la tête vers la télévision et lui propose de regarder quelque chose avant le repas. Il accepte, je change les chaînes jusqu'à tomber sur une émission qui semble intéressante. On ne dit rien pendant tout ce temps, mais je sens qu'il a envie de parler ou de me toucher, mes doigts comme un peu plus tôt au piano. Parce que tout son corps se tend vers moi.
Ma mère nous appelle à table, on dîne dehors, à la lumière du jour et du soleil qui décline. Les discussions tourne autour du métier de mes parents, du village et Harry a l'air un peu plus a l'aise à chaque nouvelle seconde qui passe. Il complimente la cuisine de ma mère, son délicieux dessert aux fruits frais, elle est comblée.
Après le repas, il n'est même pas vingt et une heures, alors ils se mettent à deux derrière le piano. Ils se partagent un morceau, à quatre mains parfois. Mon père bouge la tête en rythme, je reste assis dans le canapé et fixe Harry. Il sourit tellement que ses fossettes se creusent aux coins de ses joues. Il pose les yeux sur moi, je ne détourne même pas les miens. Il est juste si... beau. Naturellement. Il ne fait rien, il vit, il est là, il respire, il sourit, il rougit un peu aussi.
Mon père prend ma main et m'emmène danser avec lui au milieu du salon, devant le piano. Le morceau est beaucoup plus rythmé et joyeux, comme celui qu'on entendrait dans un bar. Je secoue la tête et ris, ils rient tous.
Une demi-heure plus tard, Harry salue mes parents. Ils leur font promettre de repasser avant de partir. J'ai une boule dans la gorge, je ne dis rien, j'attends sur mon vélo. Mon père m'adresse un sourire et un hochement de tête. Je baisse les yeux, Harry les remercie encore, grimpe à l'arrière de mon vélo. Il pose ses grandes mains sur mes hanches, ma peau frissonne et brûle en même temps, je ne sais pas si c'est logique, mais c'est ce que je ressens dès qu'il s'approche de moi ou me touche.
Nous roulons en silence. Au milieu du bruit de la nuit. Le jour ne s'est pas encore tout à fait couché. Il me dit de le déposer à la place, je m'arrête quand nous y sommes. Toutes les boutiques sont fermées, bien sûr, il n'y a que les lumières des maisons qui apportent des signes de vie.
Harry lâche mes hanches, descend du vélo. Il se met devant moi, me regarde intensément et demande :
- Tu es sûr que ça va ?
- Oui, pourquoi ?
- Je ne sais pas, il hausse les épaules et met les mains dans ses poches, tu es... étrange depuis tout à l'heure, avant le dîner. Tu ne parles presque pas et... Est-ce que j'ai dit ou fait quelque chose qu'il ne fallait pas ?
- Non Harry, ce n'est pas toi. Je... c'est...
Je souffle lourdement, lâche le guidon de mon vélo et passe une main sur mon visage. Il me regarde, sans rien dire, il attend que je continue ma phrase. Il ne cherche pas à m'interrompre pour me poser des questions ou savoir, il me laisse trouver mes mots.
Ils sont là. Sur le bout de ma langue. Ils ne demandent qu'à sortir. Ils stagnent à cet endroit depuis plusieurs jours déjà. Je savais, dès le premier jour, que le temps était compté, mais je me suis quand même attaché. Parce que je suis comme ça, parce que je n'y peux rien, parce qu'Harry rend toutes les choses plus belles, plus supportables, parce qu'il me donne envie d'y croire et de sourire au monde entier.
Je baisse la tête, ferme les paupières pour m'éviter de pleurer encore. Mais, c'est la voix chevrotante que je lui murmure :
- Je n'ai pas envie que tu partes.
Une poignée de secondes défile. Peut-être cinq, je ne compte pas. Le nœud dans ma gorge se resserre, je joue avec mes doigts, tirent un peu dessus. Parfois, j'ai encore l'impression que j'ai quinze ans, que je ne sais pas contrôler mes émotions. Mais c'est simplement que je n'ai plus l'habitude de les sentir aussi souvent. Harry fait tout ressortir, même celles que je pensais ne plus jamais connaître.
Je finis par relever la tête vers lui, les paupières ouvertes à nouveau. Son regard ne me quitte pas. Derrière lui, la couleur rosée du ciel qui sombre dans les bras de la nuit. Tout ce que je vois, encore, c'est le vert. Le vert de ses yeux. Un vert qui n'est jamais le même, qui change toujours, qui n'est jamais qu'un seul vert, qui invite à s'y baigner.
Et il faut que ça sorte, alors je laisse les barrières céder et j'enchaîne tout, je m'emmêle un peu mais je me persuade qu'il va comprendre :
- C'est... C'est tellement égoïste, mais... je n'ai pas envie que tu me laisses. Et je sais, je sais tu pars et je ne peux rien y faire et que je n'ai pas le droit de... d'être en colère, mais je me sens si bien avec toi, ça ne m'était pas... je n'avais pas rencontré quelqu'un qui me fait sentir vivant comme ça depuis... depuis mon meilleur ami, depuis des années... tu te rends compte ? Je ne sais pas si toi... si toi tu ressens pareil, j'en sais rien je suis désolé si je dois te sembler étrange ou idiot ou... Je n'ai pas envie que tout ça disparaisse, que tu m'oublies, que ce soit du passé... Je ne veux plus me retrouver aussi... aussi seul et triste...
- Louis....
J'entends sa voix, mais je ne l'écoute pas. Je ne peux pas m'arrêter, toutes les émotions, toutes les phrases se bousculent sur ma langue. J'ai les doigts qui tremblent, je crois que je dois être en train de pleurer.
Je le regarde et je vois ses lèvres bouger, appeler mon prénom, mais je ne l'entends pas. Parce que j'ai besoin que ce poids s'ôte de mon cœur.
- Je... je voudrais que tous les soirs tu sois là, que tu joues du piano dans mon salon, que... que tu m'apprennes des morceaux que je ne saurai jamais reproduire, que... que tu continues de me parler même si c'est pour rien dire, qu'on nage ensemble dans le lac et je... je pourrais t'emmener souvent à la mer et... Harry... je soupire. Harry, tu.. tu m'as rendu plus heureux que je ne l'ai jamais, jamais été depuis... depuis une éternité. C'est stupide, je sais, je... ça ne veut probablement rien dire pour toi tout ce que je te raconte, mais je...
- Louis ! Il m'appelle d'abord un peu plus fort. Louis regarde moi... s'il te plaît...
Ses doigts glissent contre les miens, il m'empêchent de tirer encore dessus. Nos regards se trouvent tandis je reviens petit à petit à moi. Je m'arrête de parler, j'entends sa voix, je l'écoute. Je sens sa main qui me tient le poignet et les larmes qui coulent de mes paupières.
Ma respiration se calme subitement quand il monte son autre main contre ma joue humide, passe son pouce contre ma peau. Je ferme brièvement les yeux, mon corps est traversé d'un frisson que je ne parviens pas à réprimer. Il essaie de me calmer. Ça me prend deux ou trois minutes, à arrêter de pleurer, de respirer comme si je venais de courir un marathon.
Son pouce caresse toujours délicatement ma joue, son regard ne lâche pas le mien. Et je devrais le détourner. Parce que nous nous sommes étrangement rapprochés, mais je n'ai pas la force ou l'envie de reculer. Je peux sentir son souffle sur ma peau et ça me fait sentir vivant.
Au bout de quelques minutes, sa voix finit par résonner dans un murmure, rien que pour moi.
- Ce n'est pas...
Il s'interrompt, secoue la tête, passe sa langue entre ses lèvres en fermant les yeux une ou deux secondes. Cette fois, c'est moi qui l'attend. C'est moi qui l'écoute, le regarde. Ses sourcils se froncent, je le vois reprendre son souffle.
Je crois voir ses joues se colorer de rose, la même teinte que le ciel derrière lui. Sa main, elle, est toujours contre ma joue. Elle est chaude, réconfortante.
- Tu... Je ne trouve pas ça très poli de le faire sans te le demander et si tu n'en as pas envie, alors je... est-ce que tu veux bien que je t'embrasse ?
Mon souffle se coupe, je le fixe avec de grands yeux. La manière dont il me demande, si timidement, l'autorisation de m'embrasser me fait presque pleurer à nouveau. Il semble plus réservé, mais l'intensité de son regard n'a pas diminué. Je le sens toujours, brûler ma peau, me percer à jour.
J'ai la bouche sèche, le cœur qui bat fort contre ma poitrine, et les doigts qui tremblent un peu aussi. Je ne me pose pas de question, je ne cherche pas à écouter la petite voix dans ma tête. J'acquiesce plusieurs fois, pose une main sur sa nuque et l'attire à moi.
Quand nos lèvres se rencontrent, je m'autorise enfin à respirer. Et ce n'est pas vide, ce n'est pas plat. Je ferme les yeux tandis que la main d'Harry glisse dans mes cheveux. C'est le premier baiser qui ne me laisse pas indifférent. C'est le premier baiser qui me fait sentir vivant. Il y a tout mon corps qui remue vraiment à l'intérieur.
Surtout, je n'ai jamais été embrassé d'une telle manière. Avec autant de douceur et de fougue à la fois. Harry me donne son souffle pour me le reprendre quelques secondes après.
Le baiser dure à peine quelques secondes. Mais c'est suffisant. Suffisant pour savoir que je ne veux pas que ce soit le dernier. Suffisant pour savoir que, quand il partira dans cinq jours, mon cœur sera brisé. Mais je ne pense pas à ça. Pas maintenant. Je ne m'attarde que la sensation de la délicatesse de ses lèvres contre les miennes, de ses doigts dans mes cheveux, d'un goût lointain de fruit sur sa langue quand il m'embrasse une deuxième fois, un peu plus longtemps.
Nos yeux se sont croisés pendant cinq secondes, entre ces deux baisers, mais j'y ai lu tout ce que je voulais, tout ce que je ressentais moi aussi, tout ce que j'avais besoin pour être rassuré. Par la manière dont il me tient contre lui, dont il embrasse mes lèvres comme s'il ne souhaitait pas me blesser, Harry me fait sentir que je ne suis pas seul.
Lorsqu'on se détache, je garde les paupières fermés encore plusieurs secondes. Sa main passe contre ma joue, j'ouvre les yeux et il me regarde. Nous avons tous les deux le souffle court et si je tends la main, je crois que je pourrais sentir son cœur battre la chamade sous sa poitrine, à lui aussi.
- Tu crois vraiment que je t'abandonnerai après avoir fait ça, Louis ?
Je secoue la tête, sans même avoir besoin de réfléchir. Il penche la sienne et pose simplement son front contre le mien. J'inspire une grande bouffée d'air, la cage thoracique tremblante. Je le lis dans son regard. Je lis qu'il est sincère, je lis tout ce qu'il ne me dit pas encore à voix haute.
Harry respire très lentement, passe son pouce contre ma joue, sous mon menton pour que je lève la tête et le regarde. Il me sourit, j'entrouvre les lèvres et il pose à peine les siennes contre, une fraction de seconde, mais ça me rend déjà fébrile.
- Ne sois pas triste, d'accord ? Je suis encore là.
Il est encore là. Pour cinq jours. Peut-être après. Peut-être toute ma vie. Je ne peux pas savoir, personne ne peut. C'est ça qui est le plus effrayant, au fond. Donner des parts de soi-même à quelqu'un et ne pas être certain qu'il restera jusqu'à la fin.
Ses doigts lâchent mon menton et il passe ses bras autour de moi. Il m'enlace et je ne veux plus jamais quitter le creux de ses bras. Je m'accroche à lui, à son tee-shirt. Il y a le vélo entre nous, ce n'est pas très confortable, mais ça ne m'empêche pas d'apprécier chaque petite seconde passée avec lui. Ces moments à deux qui me réparent et me donnent envie d'avancer, de regarder le monde en couleurs.
C'est au bout d'une longue minute que nos corps se détachent. Il embrasse mon front et me remercie, je ne sais pas vraiment si c'est pour le repas chez moi ou le baiser ou deux les deux. Mais je le fais aussi, je le remercie de me faire exister. Il me sourit, presse affectueusement mes doigts entre les siens et s'éloigne pour retourner chez lui. Avant d'être avalé par l'ombre de la nuit tombée, il me dit :
- A demain, Louis.
Et j'aimerais que demain soit tout le reste de ma vie.
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