Chapitre 14
PDV Isi
Sans me douter que Marinette et Adrien roucoulaient dans la chambre de la bleutée, je sautai de toit en toit, ne décolérant pas depuis plusieurs heures. Les akumas étaient bien ma dernière des préoccupations en ce moment-même.
"Je me demande vraiment à quoi je sers...", grognai-je en atterrissant sur le toit du Louvre.
Lasse de parcourir Paris de long en large, peu importe ma forme, je m'assis sur le toit et me passai la main sur le visage, lasse.
"C'est vraiment pas normal. Je suis la Gardienne de Tenrô, je devrais être au courant de ce genre de choses, ou en tout cas ne pas être la seule à ne rien savoir... qu'est-ce-que j'ai fait pour mériter ça ? J'ai toujours pris au sérieux ma mission, même si je ne voulais pas l'accomplir, j'ai renoncé à mes désirs pour protéger ma cité. Je l'ai accepté, bon gré mal gré. Alors pourquoi, au moment où je décide de laisser une partie du travail aux autres pour me concentrer un peu sur moi, un truc pareil me tombe dessus ?!"
Je grognai et relevai la tête face au ciel nuageux, bien sombre malgré la nuit. Il allait pleuvoir, mais hors de question de rentrer.
"J'AVAIS RIEN DEMANDÉ MOI !!", hurlai-je.
Mon cri s'évanouit dans la nuit, les environs étant déserts en raison de l'heure tardive.
"J'ai rien demandé... ni devenir Gardienne à dix ans, ni la mort de Maman, ni même mon rôle de Gardienne... je n'ai rien demandé...", soufflai-je, les larmes commençant à couler sur mes joues, des larmes mêlant rage et désespoir.
Pourquoi ? Pourquoi j'étais toujours obligée de renoncer à être un minimum heureuse juste pour le bien de Tenrô ? Je n'ai jamais eu les épaules pour une telle responsabilité. Pourquoi l'Arbre des Fées m'a choisi ? Lucy aurait fait l'affaire, ou Erza, ou Jubia, ou Reby. Mais pas moi. Moi, j'étais juste une enfant dans un corps d'adolescente, une enfant perdue depuis cinq ans qui se cherche et qui n'arrive pas à porter un fardeau trop lourd pour ses jeunes épaules.
J'aimerais tellement me débarrasser de ce fardeau de Gardienne de Tenrô. Mais Calhoun comptait sur moi, sauf que je ne me sentais pas capable de vivre comme ça pendant encore douze ans. Et pour ne rien arranger, c'était bientôt l'anniversaire de mort de Maman, autant dire que plus ce jour arrivait et plus je me sentais au bord du gouffre.
C'était trop demandé de vouloir être normale ? Juste quelques jours, histoire de respirer.
Evidemment, à force, j'avais développé un certain goût pour le combat, j'aimais bien montrer aux gens que j'étais plus forte que j'en avais l'air. Alors oui, mon moi-Gardienne faisait partie de celle que j'étais, j'étais obligée de me l'avouer, mais ce n'était pas entièrement moi, ce n'était qu'une toute petite partie de celle que j'étais.
Mais qui j'étais... je n'en avais aucune idée. Comment pouvais-je seulement songer à chercher qui j'étais quand autant de choses me tombaient sur la tête ?
Comment pouvais-je y songer quand tout Fairy Tail, même Wendy, savait qu'Alios travaillait depuis presque quatre mille ans pour Arbaless, une cité criminelle à quelques heures de Tenrô dirigée par ce Acnologia ? Comment pouvais-je alors que l'organisation qui m'aide à protéger Tenrô me cache des choses ?! Comment pouvais-je endosser correctement ce rôle qui me dégoûte si on me cache des informations aussi capitales ?!
Je donnai un coup sur le toit en lâchant une injure. A chaque fois que je quittais Tenrô, Arbaless lançait une attaque sur Tenrô, attaque toujours brillamment repoussée par Fairy Tail. Pourquoi je n'étais pas au courant ?! Pourquoi ?! Pourtant, rien d'étranger ne peut ni entrer ni sortir sans que je ne sois au courant ! Mais là, d'après ce que j'avais compris, les soldats d'Arbaless avaient réussi à franchir plusieurs fois le dôme, à grand renfort de patience et de persévérance.
Cela voulait dire que, même quand j'étais là, ils attaquaient le dôme et je ne l'avais jamais senti ! Ou alors, Fairy Tail allait à sa rencontre avant qu'ils ne franchissent le bouclier. J'espérais sincèrement que c'était cette option. Déjà que je faisais une bien piètre Gardienne de Tenrô...
L'esprit de Mio m'apparut mais resta silencieux, à court de paroles de réconfort pour une fois.
"Mio, qu'est-ce-que j'ai fait pour mériter ça ?
- Je ne sais pas Kachina, je ne sais pas... tu aurais dû être au courant et... je pensais que tu l'étais. Makarof aurait dû te le dire. Ce que je sais, c'est que tu es une excellente Gardienne pour ton âge, tenta de me rassurer Mio.
- Laisse tomber Mio, je ne suis pas d'humeur. J'ai toujours été une mauvaise Gardienne, je ne sais même pas dix pour cent de ce que je suis censée connaître, je manque d'expérience, de maturité, de savoir. Je manque de force aussi, je suis très loin d'être forte, avec ou sans Miraculous. Je suis plus forte qu'un humain normal, mais clairement pas de taille à affronter Erza au corps-à-corps seulement, sans arme. Tout ce qu'il faut pour pouvoir être une bonne Gardienne, je ne l'ai pas.
- Tu ne t'es jamais demandée pourquoi l'Arbre des Fées t'avait choisie ?
- Si, je me le demande tout le temps. Il a sûrement choisi des Gardiennes bien meilleures que moi...
- Chaque Gardienne est différente.
- C'est bien ce que je pensais... soupirai-je amèrement.
- Kachina, tu es différente, c'est vrai. Tu es différente parce que tu es surprenante, imprévisible et attachante quand on prend la peine de percer ta carapace. Et tu es extrêmement douée, tu apprends vite. Malgré le manque de formation qui se fait cruellement ressentir, tu es l'une des meilleures Gardiennes de l'histoire de Tenrô, crois-moi sur parole. Et tu n'as pas fini d'apprendre. Je sais que tu te passerais bien de ce genre de cachotteries, mais ce n'est pas comme si Fairy Tail avait échoué à les repousser. Makarof ne t'a pas prévenu parce que tu n'avais pas besoin de le savoir. Alios est le seul qui s'attaque à toi, jamais aucun membre d'Arbaless n'a cherché à s'en prendre à toi, sauf lui.
- Evidemment ! Je suis la Gardienne ! Si je tombe, toute la cité tombe ! Mais moi, j'en ai assez de ces responsabilités !! Je veux une vie normale ! Etre la Gardienne de Tenrô... ce n'est pas seulement la protéger, c'est aussi veiller à son bon fonctionnement, à sa paisibilité, à son bien-être... et je ne suis pas capable d'assumer toutes ses responsabilités. A peine je délègue aux autres que j'apprend que Fairy Tail me cache des choses importantes. Cela prouve bien que je ne peux pas déléguer mes responsabilités à Fairy Tail, vraiment pas. Maintenant, laisse-moi s'il te plaît."
Bien que loin d'être d'accord, Mio disparut. Des éclair déchirèrent le ciel et une pluie torrentielle s'abattit sur Paris. Mes cheveux turquoises s'imbibèrent très rapidement d'eau, au point de se foncer. Je fus assez vite trempée jusqu'aux os, mon costume me collant à la peau, mais je ne me résolvais pas à rentrer. A quoi bon ? J'adorais Tenrô, mais j'avais envie d'être n'importe où ailleurs que là-bas à cet instant-là.
Je ne sais pas combien de temps je suis restée là, sous la pluie, oscillant entre colère et désespoir.
"Enfin, je te trouve p'tite soeur."
Je n'avais pas besoin de lever la tête pour savoir que c'était Kanna, et qu'elle avait sûrement utilisé sa magie des cartes offerte par l'Arbre pour se téléporter à ma position. Ma soeur posa une main sur mon épaule, m'abritant de la pluie avec le parapluie qu'elle avait emmené avec elle.
"Allez viens, rentrons.
- 'on.", marmonnai-je, la voix enrouée.
J'éternuai et me recroquevillai sur moi-même, autant pour ne pas voir Kanna que pour me réchauffer. J'avais sûrement attrapé froid, mais je m'en fichais aussi bien que des akumas pour le moment. Je ne voulais pas rentrer.
"Kachina, allez. Tout Tenrô te cherche, et tu vas finir pas attraper froid si tu ne rentres pas te mettre au chaud.
- 'aisse 'oi."
Je toussai mais gardai ostensiblement la tête appuyée contre mes genoux, eux-mêmes appuyés contre ma poitrine. Je ne rentrerai pas à Tenrô. Je ne voulais pas être sa Gardienne. Je voulais juste qu'on me laisse broyer du noir en paix. Juste quelques heures. Je voulais juste être seule, ce n'était pas pour rien que j'étais restée transformée. Même Deer, je ne voulais pas la voir alors qu'elle était adorable.
"Ne me force pas à utiliser la magie pour te ramener.
- 'u peux pas u'i'iser si 'e veux pas.
- Je n'aurais pas beaucoup de puissance, c'est vrai, mais assez pour nous ramener à Tenrô. Alors ne fais pas ta tête de mule Kachina, Papa est inquiet."
Je me relevai à contrecoeur, en tremblant. Jugeant que j'étais assez stable pour courir, je me dégageai violemment de la main de ma soeur et sautai du toit où j'avais élu domicile pour atterrir sur un qui était plus loin. Je faillis glisser en retombant sur mes pieds mais je réussis à garder l'équilibre. Kanna cria mon prénom mais je l'ignorai, entreprenant alors de mettre le plus de distance entre elle et moi malgré mes éternuements, mes toussements et mes tremblements qui me valurent de me casser le cou plus d'une fois. Mais je tins bon et continuai à sauter de toit en toit.
Si Fairy Tail me cachait des choses importantes, très bien. Dans ce cas, ils n'auraient plus de Gardienne. Je ne reviendrai que pour former Calhoun et je repartirai à chaque fin de ses cours. Je ne serai pas la Gardienne qui restait enfermée à Tenrô, en ignorant des détails capitaux. Je ne les protégerai plus, mais je ferai en sorte que Calhoun n'ait pas à vivre la même chose que moi, à devenir Gardien très jeune en ne sachant quasiment rien.
"Kachina, c'est toi ?"
Je baissai la tête pour voir qui m'interpellait. Le parapluie noir qui cachait la personne se releva, dévoilant son visage. Une chevelure mi-longue blonde, des yeux verts... la seule chose qui la différenciait de la Gardienne m'ayant précédé était sa couleur de cheveux, plus claire que ma prédécesseure.
Mes épaules s'affaissèrent et mes yeux argents se remplirent de larmes. Evidemment qu'elle était là, elle venait toujours à Tenrô à cette période de l'année, pour me soutenir.
Je sautai du toit pour me retrouver devant elle.
"Dé'ansfo'mation.", murmurai-je.
Je me détransformai et Deer alla se réfugier dans mon collier pour se protéger de la pluie. Je me jetai dans les bras de la nouvelle venue, laissant couler mes larmes. Elle referma ses bras sur mon corps trempé par la pluie, maintenant toujours le parapluie pour nous protéger.
"Tu m'as manqué, murmura la blonde en me caressant tendrement les cheveux.
- 'oi aussi Amé'ie.", soufflai-je en ignorant mon mal de gorge.
On resta quelques minutes comme ça, quelques minutes qui me permirent de calmer ma rage et ma tristesse. Face à Amélie, qui était comme une deuxième mère pour moi, j'étais l'enfant qui n'avait pas eu le temps de grandir, qui se cachait derrière le masque de Gardienne face aux autres. Avec elle, je n'avais pas besoin de me cacher, parce qu'elle avait été témoin de ma douleur et de ma détresse quand le Maître m'avait appris que la Gardienne avait abandonné ses fonctions et que c'était à moi de les prendre. Elle les avait ressenti avec la même puissance que je les avais ressenti.
En m'entendant éternuer, Amélie se détacha et me sourit tendrement.
"Et si on allait se mettre au chaud ? J'ai pris une chambre d'hôtel pour quelques temps."
Je hochai la tête et la laissai me conduire doucement vers sa voiture. A peine eut-elle démarré que la fatigue prit le pas sur mon esprit, me faisant sombrer dans un sommeil sans rêve.
"... juste un gros rhume... passera vite.
- Merci... diné."
Voilà ce que je saisis lorsque je commençai à m'éveiller. Je gardai malgré tout les yeux fermés. J'avais mal à la tête, froid et chaud en même temps, je me sentais pleine de sueur aussi. Bref, ce n'était pas vraiment la grande forme.
Cependant, je fus forcée d'ouvrir les yeux lorsque quelqu'un me caressa tendrement les cheveux Je rencontrai le regard émeraude d'Amélie, qui me sourit, visiblement rassurée.
"Bonjour marmotte. Comment tu te sens ?"
J'ouvris la bouche pour parler mais aucun son ne sortit. Je songeai à utiliser ma télépathie mais je n'avais même pas la force de me relever, donc bon...
"Cela ne m'étonne pas. Tu n'aurais pas dû rester aussi longtemps sous la pluie ma chérie. Grandiné m'a dit que tout le monde te cherchait, et que tu avais envoyé bouler Kanna. Enfin bon, Grandiné a dit que tu te remettrais vite sur pied, mais tu dois te reposer. Je vais te commander de la soupe."
Elle m'aida à me relever et passa commande au roomservice de l'hôtel. Elle vint ensuite me rejoindre sur ce qui semblait être le lit de sa chambre. Elle tourna ma tête vers elle.
"Kachina, ma chérie, je sais que tu te sens mal à cause de ton rôle de Gardienne, mais Kanna est ta soeur. Elle est là pour toi, pour te soutenir, pour t'aider."
Elle ne comprendrait pas. Après tout, même elle, elle savait pour Arbaless et elle ne m'a jamais rien dit.
"Tu sais, on ne pensait pas à mal en te cachant la vérité sur Arbaless. C'était une menace que Fairy Tail pouvait gérer seule, en dehors d'Alios et d'Acnologia. Mais Acnologia ne s'est jamais pointé, il préfère envoyer ses soldats au front, à sa place. Tu étais déjà débordée avec tes responsabilités de Gardienne, le Maître pensait que c'était préférable de ne rien te dire et que Fairy Tail s'en charge."
J'aurais aimé savoir quand même. Et pourquoi Acnologia voulait que je rejoigne Arbaless ? Bordel ! Je suis la Gardienne de Tenrô, que je le veuille ou non ! Je suis censée connaître ces détails importants !
Quelqu'un toqua à la porte et Amélie se leva, avant de revenir quelques secondes plus tard avec un bol de soupe et de l'eau. Elle me força à boire plusieurs verres, m'aidant à maintenir le gobelet vu que mes mains tremblaient, et me fit manger la soupe à la manière des enfants, en amenant la cuillère à ma bouche. Je me forçai à avaler, malgré ma gorge nouée.
Elle me donna aussi des médicaments laissés par Grandiné. Elle m'intima ensuite de me recoucher et s'éloigna vers le canapé, dos à moi.
Je pris un instant pour constater que je n'avais pas ma tenue habituelle, signe qu'Amélie avait dû me doucher et me changer. Je pris mon portable, que j'avais repéré sur la table de nuit, et ignorai ma migraine pour regarder mes notifications. Sans surprise, j'avais des centaines de messages de Kanna, et au moins tout autant de la part de plusieurs membres de Fairy Tail : Wendy, Lucy, Mira, Jubia, Erza, certains de Luxus, de Jellal, de Grey et de Natsu, et même de Carla et Happy. Sans oublier Papa, entre autres. J'avais aussi beaucoup de messages de Marinette, Adrien, Alya et Nino, qui s'inquiétaient de ne pas me voir en classe.
Je jetai un coup d'oeil à l'heure qu'affichait mon portable. Les cours étaient quasiment terminés, signe que j'avais dormi au moins deux jours complets. Pas étonnant que mes quatre amis s'inquiètent, je mettais toujours un point d'honneur à répondre rapidement, surtout à Marinette et Adrien.
Cependant, je décidai malgré tout d'éteindre mon téléphone pour me recoucher. Je me sentais nauséeuse et l'écran de mon portable n'arrangeait rien du tout. Je le reposai donc sur la table de nuit et me remis sous les couvertures, me recroquevillant sur moi-même tant j'avais froid, avant de sombrer bien vite dans l'inconscience.
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