Amy avait cessé de promener son regard sur la pièce, et fixait à présent Sherlock. Son visage traduisait un mélange de joie un peu hystérique et d'excitation. La jeune fille claqua des doigts devant son visage pour le faire revenir à la réalité, et il plongea son regard bleu dans le sien. Il semblait se retenir à grand peine de crier quelque chose, et cette lueur surexcitée brillait toujours au fond de ses yeux. 

- Lestrade ! appela-t-il. Il n'y a plus rien a trouvé ici, on peut y aller.

- Que...Ce n'est pas vous qui décidez de la démarche à suivre, Holmes ! s'indigna l'inspecteur, mais l'intéressé ne l'écoutait pas et avait déjà franchit la porte pour sortir.

Amy lui emboita le pas, suivie des trois hommes. Sherlock lui devait quelques explications.

Lorsqu'ils sortirent dehors, le détective s'agenouilla et sembla soudain absorbé par la contemplation de la route. Amy y jeta un oeil, et leva un sourcil. Un sourire intéressé étira ses lèvres.

- Direction la prison, maintenant, Sherly. Il me semble que c'est là où vous alliez, non ? Tu as des menottes.

Le détective se releva, et s'approcha de la jeune fille. Celle-ci eut un mouvement de recul, mais elle sentit qu'il glissait quelque chose dans sa poche, et elle lui jeta un bref coup d'oeil. Mais il ne le vit pas, ayant déjà reculé. Alors qu'il échangeai quelques mots avec Lestrade, Amy glissa la main dans sa poche et toucha ce qui lui sembla être un bout de papier. Elle le prit, le lu, et le rangea.

- Bon, et bien, c'était un plaisir de mener cette petite enquête en votre compagnie, messieurs, mais je vais devoir vous laisser ! lança-t-elle en enfonçant ses mains dans les poches de son manteau.

- Vous êtes une femme bien particulière, Mademoiselle... dit Lestrade en ôtant son chapeau et en s'inclinant légèrement devant elle, au plaisir de vous revoir.

- À bientôt, Amy ! répondit Sherlock en montant dans le fiacre, espérons que ce moment ne tardera pas trop...

Amy ne répondit rien, et tourna les talons. Elle s'enfonça dans l'obscurité, et bientôt entendit les bruit des sabots et le grincement des roues sur la route de terre. Elle descendit la rue, tourna à droite, à gauche, dans cette ville qu'elle connaissait comme sa poche, et arriva au bord de la Tamise. Elle se rendit sous un pont, s'adossa contre la paroi de pierre, sortit un papier et un crayon et commença à dessiner.

Quelques minutes plus tard, des bruits de pas se firent entendre et elle se détacha du mur, pour faire face à Sherlock qui descendait tranquillement les marches.

- Bon...Tout Scotland Yard est à mes trousses pour meurtre, maintenant. Dis-moi, Amy, tu veux bien m'aider, c'est sûr ? dit-il en levant la main en guise de salut.

- Disons que tu m'as embarquée dans ton histoire, alors je n'ai pas vraiment le choix, je suppose...

- C'est pas faux ! répondit joyeusement le détective, bon, j'ai déjà une nette idée du profil du meurtrier...

- J'ai fait un dessin, le coupa Amy en lui tendant son papier. Il le prit, et l'observa de haut en bas, de long en large. Puis, il hocha la tête.

- Oui, je pense que ce n'est pas loin de la véritable personne. Tu dessines bien, ça peut être utile...

- Merci. Bon alors, comment tu veux l'attirer ici ?

- Avec ça ! répliqua-t-il en sortant de sa poche une simple alliance en or.

- Aaaaah, c'est ça que tu as ramassé tout à l'heure...

- Oui, on va passer une annonce dans le journal. Si le meurtrier a, comme le pense, perdu cette bague quand il a accompli son affaire, il reviendra la chercher. On aura plus qu'a le cueillir tout mûr !

- C'est une bonne idée. Je peux me charger de passer l'annoncer, si tu veux, j'ai des relations auprès du Daily Standard, proposa Amy. Donne moi juste l'adresse de lieu de récupération.

* * *

Deux jours plus tard, Amy avait emménagé au 221B, Baker Street. Elle avait estimé plus simple d'y habiter pour avancer sur l'enquête et Miss Hudson, ravie d'avoir un peu de compagnie féminine, avait immédiatement sympathisé avec la jeune femme, et lui avait administré la dernière chambre libre, en face de celle de John Watson, le second colocataire. Ils étaient désormais quatre dans la grande maison, même si Sherlock n'y était pas rentré depuis qu'il était recherché par Scotland Yard.

Ce matin-là donc, John était sorti acheter le journal, et revint en annonçant que l'annonce d'Amy était passée. Puis, Amy et lui ressortirent et marchèrent dix minutes avant d'atteindre une petite ruelle embranchante d'une grande rue, dans laquelle ils retrouvèrent Sherlock ainsi qu'une bande d'enfants des rues. La jeune fille n'en reconnut aucun parmi eux, et regarda Sherlock d'un air interrogatif.

- Vous vous demandez qui sont ces gamins ? (Hochements de tête.) Ils sont mes bras et mes jambes.

Celui qui semblait être le chef de la bande lui lança un regard assassin et lui pinça apparement très fort le bras.

- Aïe ! rentre tes griffes, au moins ! gémit le détective en se massant le bras.

- Où tu as vu des bras et des jambes ? Nous sommes là par contrat ! c'est un vrai travail !!

Il se tourna vers Amy et Watson, qui observait la scène, l'un un peu étonné et l'autre intéressée.

- Je suis Wiggins, chef des Irregulars de Baker Street ! Et derrière moi voici mes hommes : Butler, Juli, Green, Sky et Lead. Ravis de vous connaitre, Dr. Watson, Mlle Amy !

- Tout le plaisir est pour moi, jeune gens, répondit John.

- Je sens qu'on va bien s'entendre, vous et moi ! affirma Amy en hochant la tête, et vous pouvez m'appeler Amy tout court, ça suffira.

Wiggins lui sourit, et Sherlock s'avança en lui tendant une liste.

- Voici ce dont j'ai besoin cette fois...dit-il, et vous avez même droit à une image, pour une fois.

- Hein ? Ah...oui ! se rappela Amy. Elle leur tendit son dessin, et Lead s'en saisit et s'émerveilla :

- Ouah ! Vous dessinez vraiment bien ! Ça va nous faciliter la tâche, Wiggins !

- Fais voir ! Ah oui, c'est vrai... Bon, ça fait une sacrée commande, tout ça...

- Je vous offre un shilling par cours, dit Sherlock, pas plus.

- Ça marche ! cria Wiggins en tournant les talons, à plus tard, suspect !

- Oui, bon, ça va... marmonna Sherlock. Puis, il attendit que les enfants se furent éloignés pour ajouter : sales mioches.

Le poing d'Amy s'abattit sur son crâne, et il frotta sa bosse naissante en se plaignant :

- Non, mais ça va pas ! Tu ne vas pas t'y mettre aussi, quand même !

- Ne parle pas comme ça de ces enfants ! Sans eux, on n'aurait plus aucun moyen de retrouver le coupable !

- Tss...

Sur ces mots, enfin ce bruit, Sherlock tourna les talons et s'éloigna. John l'imita, s'apprêtant à partir dans la direction opposée, mais Amy resta là. Elle réfléchissait. Ce crime avait été orchestré d'une étrange manière... et Sherlock semblait l'avoir compris. Mais elle ne comprenait pas. Elle se promit de lui poser la question, et suivit John pour rentrer au 221B. Elle finira bien par avoir la réponse, de toute façon.