La Petit Prince - 2


La huitième planète, si c'était le mot adéquat, était une décharge habitée par des fantômes renfrognés. Le Petit Prince refusait de penser que le venin l'avait conduit à un cimetière. Il se doutait que le serpent lui avait réservé une surprise : ce n'était qu'une étape avant de revoir les baobabs de sa planète. Il les détestait, mais ceux-ci symboliseraient son retour, et seraient vite mangés par son mouton.

Il ne vit pas sa fleur mais une chose étrange : une boîte à musique pleine de bijoux dont la maussade brillance se reflétait sur la peau grise d'un danseur. Il était minuscule, encore plus laid, aux membres noueux. Il riait.

« Ah, enfin un admirateur ! Que veux-tu que je danse, mon petit bonhomme ? »

Le prince était gêné qu'un homme dix fois plus petit que lui ose dire qu'il était petit.

« Monsieur, que ta tenue est drôle... D'un rose presque aussi beau que celui de ma rose... Mais je t'ai vu au lieu la voir, elle. As-tu vu une rose, sous une coupole, qui a besoin que je la protège ? »

L'homme hochait la tête de gauche à droite. Il soupirait.

« Il va falloir retrouver mon chemin et je n'ai plus de serpent pour me guider !

— De serpent ? Répétait le danseur, vérifiant que le mouton n'attaque pas sa boîte.

— Si tu ne cherches pas une rose, que cherches-tu ?

— Je ne cherche rien : comme j'étais bon à rien, on m'a jeté ici... J'ai voulu être un héros, mais je confondais alliés et ennemis. Je me suis improvisé vendeur de soupes en glace, finalement jetées. J'ai nettoyé la rue mais mon passage la laissait plus sale encore. J'ai voulu chasser des monstres mais j'étais bien le seul... Et comme j'étais trop laid pour monter sur scène, on m'a enfermé là-dedans ! Voilà pourquoi je suis résolu à me contenter de ma boîte. Mais je pense pouvoir me convertir en dessinateur...

— Oh ! Tu peux me dessiner ma rose alors !

— Non, je ne peux pas encore la dessiner, mais j'ai appris à faire du théâtre : je peux jouer le rôle de ta rose ! »

Le danseur fit une absurde représentation et, en somme, il n'était pas plus une rose qu'un dessinateur... C'était l'être incompris, un rêveur qui cherchait désespérément sa place. Et le prince ne pensait déjà plus à lui, mais à sa rose que rien ne pouvait égaler : elle était unique. Comme elle lui manquait !

« Ne te sens-tu pas seul ?

— Si... Mais il doit bien y avoir quelqu'un dans ce vaste univers qui, de temps à autre, pense à moi. »

« Les adultes ne sont peut-être pas si étranges, ils sont aussi perdus que moi, sans leur rose », se dit le prince en repartant.

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