Un livre et des chocolats.

Maintenant deux jours que ces murs blancs constituent mon environnement et ce, pour encore une semaine. Cette chambre d'hôpital me donne la nausée, non à cause de cette atmosphère terriblement déprimante, mais bien parce que je suis en train de déprimer ! Dans deux jours, c'est Noel, et je suis coincée ici.

Pourquoi ? Peu importe. Je suis coincée ici et ma famille ne peut venir me rendre visite ni le 24, ni le 25, ni le 26... Non seulement je vais passer Noel seule mais je vais aussi le rester les jours suivants. Le petit village dans lequel je vis est si loin de tout que je ne reverrai mes proches qu'une heure après être sortie de l'établissement. Seul le train me ramènera chez moi et mes parents ne peuvent se permettre de quitter la ferme en période de fêtes sans que leur commerce ne s'effondre.

J'ai déjà fait deux fois le tour de l'hôpital et les seules occupations sont une garderie et un lieu de rassemblement pour ados. Or les adultes restent dans leur chambre pour la plupart et je n'aime pas les gens de mon âge.

Mes vingt précieux euros en main je me prend un chocolat chaud au distributeur. J'aimerais pouvoir m'acheter un livre et des chocolats mais j'attends le soir du réveillon pour cela.

- Dis ? Tu sais si elle rend la monnaie cette machine, me surprend un garçon.

Je regarde l'étiquette en face de moi intitulée « rend la monnaie » et le dévisage. Je sais bien qu'il cherchait un moyen de parler mais la discussion n'ira jamais loin ainsi. Définitivement, je n'aime pas les gens de mon âge : pas assez réfléchis. Je me tourne et rejoint ma chambre.

* *  * Réveillon *  * *

J'y étais bien jusqu'à ce qu'une infirmière me demande d'en sortir, parce que oui, pour le réveillon, les enfants seuls sont rassemblés afin de passer un bon moment.

Je ne suis pas une enfant et je préfèrerais rester dans ma chambre mais je décide de la suivre afin qu'elle ne fasse pas attention à moi. Le repas fini, je demande à aller acheter un livre dans la boutique de l'établissement. Une fois celui-ci en main, je m'infiltre doucement dans le couloir et vais chercher mes chocolats. Car oui, je compte retourner dans ma chambre ensuite.

Les distributeurs font du bruit en se vidant et je passe de l'un à l'autre, ne gardant que 2 euros pour le reste de mon séjour.

- Dis ? Tu penses que celle-là aussi rend la monnaie ou tu passes d'une machine à l'autre pour vérifier ?

Le garçon de l'autre fois, je reconnais sa voix. Mais sa phrase n'a aucun sens ! Je me retourne.

- Et toi, tu me suis ?

- Non, je passais juste par là.

- Très bien alors bonne continuation, je souris.

Moi qui pensais qu'il allait partir, il me fixe. Non mais ! Je veux rester seule !  Il réfléchit. Serait-ce possible ? Je ne suis pas d'humeur patiente et je dois remonter dans ma chambre avant que l'on me voie dans les couloirs et une infirmière se ballade justement déjà non loin de nous. Ça m'inquiète.

Le jeune homme se retourne brièvement vers celle-ci.

- Ne serais-tu pas mineure ? il demande, ayant tout compris.

- Plus qu'il n'en faut, je réponds.

Je commence à partir, ne voulant pas qu'il me dénonce.

Mais, quoi !? Il me suit !?

- Si elle remarque ton absence elle va aller voir dans ta chambre...

- Mon problème, retourne passer ton Noel avec ces gens si tu le souhaite, moi pas.

- Je suis majeure, on ne me demande pas de rester.

- Vraiment ? je le regarde dubitative.

- Oui.

Il sourit. Non mais vraiment il me nargue ou quoi !?

- Je suis sûre que tu as une chambre double avec un lit de libre à côté du tien, je tente.

- C'est que tu dois être devin ! D'ailleurs j'y vais justement, à plus tard.

- Attends !  J'ai bien besoin de me cacher là où on ne m'empêchera pas de lire.

Il sourit encore comme réponse. Nous arrivons dans sa chambre et je prends place au fond de celle-ci ferme le rideau et m'installe en ouvrant mon livre.

- Heu... Celui-là c'est mon lit, il dit en marchant.

Vraiment ?

- Mais rien ne traîne ! Il est libre ce lit.

Il ouvre le rideau.

- Non, j'aime juste ranger quand je n'ai rien d'autre à faire, tout est dans l'armoire, alors prend l'autre place.

Je le regarde et change de place mais le rideau du lit d'à côté est manquant et monsieur « j'aime ranger » ne semble pas vouloir remettre en place le sien. J'essaie de passer outre ce problème et commence à lire.

Page cinq commencée, j'ai l'impression d'être épiée depuis maintenant deux chapitres. J'ai essayé de ne pas réagir et de continuer à lire mais je suis presque sûr qu'il me regarde et je n'arrive plus à me concentrer. Je tourne la tête.

- Bon Michel tu as fini ?

Il sourit, le con.

- Fini quoi ?

- De me scruter.

Il regarde la table de chevet à côté de moi et attrape au moins trois de mes chocolats!

- Rends les moi ! je bondi.

- Ne crie pas trop fort on va t'entendre et tu vas devoir descendre, rit-il.

- Rends moi mes chocolats ! dis-je moins fort.

- Hum... pourquoi le ferai-je ?

- Je les ai payés et pas toi.

J'essaye de les attraper mais son bras est trop haut.

- Je t'en rends un si tu laisses tomber ton livre.

- Un? Il s'agit de mes chocolats ! Tu me les rends tous et c'est tout.

- Et tu lâches ton livre ?

- Non !

- Alors non, il affirme en commençant à ouvrir un emballage.

Je panique, je regarde la table de chevet, il n'en a laissé qu'un seul sur tout ceux que j'ai acheté, il ne peut pas manger tous mes chocolats! Cette fois je monte sur son lit, debout pour essayer de les attraper, pardi!

Il sort rapidement loin de son lit, à l'autre bout de la chambre et reste debout. Il commence à manger celui qu'il a déballé en riant. Non mais je n'y crois pas !

Je lui cours dessus mais en plus d'être grand il arrive à me tenir éloignée. Il a fini de manger mon premier chocolat ! Mon-cho-co-lat !

Dans un élan de désespoir je regarde mon livre, il est fermé et je n'ai pas marqué la page exacte. J'abandonne.

- D'accord, je lance le regarde mauvais.

- D'accord ? il demande tout sourire.

- Je lâche mon livre et tu me rends ce qui m'appartient.

- Ah, j'ai dit un seul !

- Tous ! je me retiens de crier.

- Bon...

Il commence à ouvrir un deuxième chocolat en me regardant.

- Arrêtes ! je l'interromps, c'est mon Noël ce livre et ces chocolats ! Laisse-moi mon Noël... rends les moi !

Une vague de tristesse m'envahie, depuis que mon frère est parti vivre à l'autre bout du monde, seuls les chocolats qu'il m'apporte à Noel avec une carte me tiennent proche de lui lorsqu'il rentre le lendemain et cette année je ne vais même pas pouvoir le voir. On était si proche avant qu'il ne déménage et je n'ai pas l'argent d'aller le voir ni lui de se payer un billet d'avion plus souvent.

Le garçon s'est arrêté de déballer la seconde sucrerie et me regarde bizarrement.

- Ton Noël est juste défini par ces chocolats ? il demande.

- Oui, je souffle.

Moi aussi j'aimerai partir quand je le pourrais, mais en même temps que d'être mineure, je sais que mes parents ne pourraient pas, même s'ils le voulaient venir vivre avec nous et je ne peux me résoudre à choisir entre mon frère et eux.

Le garçon me tend le chocolat maintenant déballé.

- Alors on va en acheter pleins des chocolats, et on va inventer notre propre type de Noel, cette fête n'est pas faite pour lire en mangeant, pensant que l'on est seul coincé dans ce foutu bâtiment. Je reviens, il dit. Reste ici.

Il prend un objet que je ne vois pas et sort de la pièce avec le reste de mes précieux. Je vais m'allonger dans mon lit provisoire et pose le livre plus loin. Je pense à ma famille maintenant... je lui reproche intérieurement.

***

-Aïe !

Un second projectile arrive dans ma tête.

- Arrêtes !

- J'ai cru que tu ne te réveillerais jamais, il rit.

Je me redresse rapidement, je ne voulais pas m'endormir ! Mais quand je bouge, je remarque des chocolats éparpillés un peu partout sur ma couette, il y en a beaucoup plus que ceux que j'ai acheté si bien que je me retiens de trop bouger.

Le garçon se penche vers moi et en attrape un.

- Au fait, il dit en m'envoyant l'emballage sur la figue. Je ne m'appelle pas Michel, remarque tu n'étais pas très loin... Mon nom c'est Miguel.

- Enchantée, Lola, je réponds en lui renvoyant son emballage, par contre tu as beau être un distributeur de chocolats, je ne suis pas ta poubelle.

Il rit et moi aussi. Finalement, je ne déteste pas tous les gens de mon âge et ce Noël ne s'annonce pas si mal. Grace à Miguel.


***

Ce conte a été écrit par yazaelle et illustré par Philipineensucre! Tout le mérite de ce travail leurs revient. N'hésitez pas à leurs donner votre avis en commentaire. A demain pour un nouveau conte!

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