Les trois jours suivant furent pauvres en évènement. Je l'ai croisé une fois devant l'immeuble en allant travailler, et lui revenait de son service de nuit. J'ai appris que mon petit mot lui a fait très plaisir et qu'il fallait que je reste dans le coin parce que "j'ai peut-être quelque chose à te proposer ce week-end, je suis sûr que ça te ferait super plaisir Emma !". Comme j'aurais aimé rester plus longtemps avec lui ce matin là, malheureusement j'étais déjà bien en retard pour le travail.

On accélère donc jusqu'au soir où Julie est passé chez moi à l'improviste. Son fiancé étant à une soirée entre mecs, elle a décidé de sauter directement du travail jusqu'à chez moi. Ça n'est pas pour me déplaire, ça me fait même extrêmement plaisir de la voir, surtout que j'ai beaucoup de choses à lui raconter ! Elle est vraiment magnifique ce soir : sa petite blouse camel et sa jupe mi-longue agrémentée d'une ceinture soulignent agréablement ses formes généreuses. Ses sandales ouvertes compensées me rappellent qu'elle a vraiment des jambes de déesse. Mince, j'ai un look "sac-à-patate" à côté d'elle ! Comment Jean peut-il m'inviter boire un café quand je ressemble à ça ? Il va falloir que je songe sérieusement à me faire une garde de robe de choc. L'opération séduction serait-t-elle en cours ? Je le pense bien !

Forcément, c'est à ce moment-là que quelqu'un frappe à la porte. On se redresse toutes les deux, mais pas avec la même expression. Si j'ai pour ma part une boule énorme dans le ventre, Julie a l'air ravie. Elle se lève d'un bond et court jusqu'à l'entrée, ses chaussures résonnant sur le sol. Elle ouvre la porte d'un coup sec pour voir apparaitre...

- "Jean ! Justement, on parlait de toi, enchantée, moi c'est Julie !

- Euh... enchanté également. Emma est là ?

- Bien sûr qu'elle est là, allez viens, entre !

- Non, non non, je veux pas vous embêter, j'avais juste un petit quelque chose à lui demander.

- Mais si, fais pas ton timide, rentre t'assoir !"

Mon dieu Julie, qu'est-ce que tu es en train de faire ? Il n'est jamais entrer chez moi, et il faut que la première fois se fasse quand je suis dans un état lamentable ? Bizarrement Jean a l'air plutôt gêné aussi. Il s'approche de moi et me fait la bise sous le regard coquin de Julie, et pendant qu'il contourne la table pour s'assoir, Julie mime un "il est trop beau !" avec ses lèvres, ce à quoi je réponds un "je te l'avais dit !" sans faire le moindre son non plus.

- "A côté de moi, Jean !"

Je fusille Julie du regard, qui elle-même me tire la langue. Elle pose sa main sur son bras sous mon regard halluciné.

- "Alors comme ça il parait que tu es infirmier ? Tu étais de garde aujourd'hui c'est ça ? Pas trop crevé ?

- Je vois que les nouvelles vont vite ! Oui c'est ça, j'en reviens juste à l'instant. C'est surtout fatiguant parce que c'est un nouvel hôpital et j'ai pas encore complètement l'habitude. Mais ça va venir !

- On en doute pas.

- Du coup Emma, tu ne me présentes pas ton amie ?

- C'est... Julie.

- Juste Julie ? Mais je suis LA Julie, sa meilleure amie même !

- Eh bien, enchanté Julie."

Mais j'hallucine, qu'est-ce qu'elle a à se tortiller comme ça sur sa chaise ? Et je rêve ou elle fait tout pour lui montrer son décolleté plongeant ? Elle nous fait le cliché de la bimbo blonde qui rigole pour un rien, ça ne lui ressemble vraiment pas. Un fiancé ne lui suffit plus ?

Est-ce que je serais... jalouse ?

- "Tu voulais me parler de quelque chose ?

- Oui, je... est-ce que ça te plairait de venir voir Charlie Winston avec moi samedi soir ? J'ai deux billets et j'aimerais beaucoup que tu m'accompagnes."

Il me tend un billet que j'attrape du bout des doigts. Comment a-t-il fait pour les avoir ? Le concert est complet depuis deux mois déjà !

- "Mais bien sûr que oui, j'adorerais !

- Génial, garde le précieusement alors."

Je lève les yeux du billet, il est en train de me regarder dans les yeux avec son sourire en coin. J'essaye de maintenir son regard mais... il est si beau ! Je coupe le contact en balbutiant un "merci beaucoup" quand Julie se redresse de sa chaise et brise notre moment.

- "Dis donc les deux tourtereaux, il fait chaud ici ou c'est à cause des joues d'Emma qui virent au rouge écarlate ? On dirait un radiateur !

- Pardon, je vais pas vous embêter plus longtemps, j'ai un chat à nourrir maintenant !

- Oooooh, déjà ? On vient à peine de faire connaissance !

- J'imagine qu'on se verra une prochaine fois Julie."

Il se dirige vers la porte d'entrée et se retourne une dernière fois vers nous.

- "Bonne soirée les filles !

- A Samedi, Jean !"

Il ferme la porte doucement. On l'entend se diriger vers celle d'en face et se faire accueillir en fanfare par son chaton qui meurt de faim. Je me tourne violemment vers Julie.

- "J'peux savoir à quoi tu joues ?

- Oh mais à rien de particulier, Emma.

- A rien ? T'essaye de mettre le grappin sur lui ou quoi ?"

Elle me sourit, mais avec douceur cette fois. Je retrouve à nouveau la Julie que je connais. Elle se lève et s'assoit à côté de moi.

- "Ton voisin a tressaillit quand je lui ai touché le bras, et mes seins ne l'ont absolument pas intéressés. Il n'a d'yeux que pour toi, tu sais ? Il a l'air raide dingue de ton petit minois, et tu sais c'est quoi le mieux dans tout ça ?

- Non ?"

Elle pose son doigt sous mon menton et me regarde dans les yeux.

- "Je pense que c'est quelqu'un de bien."

Mon visage s'illumine. C'est tellement anodin, mais cette supposition me rend folle de joie. Je l'enlace et la serre fort dans mes bras.

- "Merci Julie.

- Ne le lâche surtout pas. Si jamais tu doutes de toi, rappelle-toi de ce que je viens de te dire. Je pense sincèrement qu'il est fait pour toi."

Je regarde par-dessus son épaule l'agenda qui est posé sur la table. Plus que 2 jours avant samedi.

Ça va être tellement long !

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