Partie 2

Le lendemain matin...

Je me réveillais aux aurores grâce aux doux rayons du soleil qui vinrent caresser ma peau. Je m'assis dans mon lit en regardant autour de moi avant d'être légèrement déçue d'être seule. J'avais passé les derniers jours en compagnie de quelqu'un d'autre, et ce, en permanence et voilà que du jour au lendemain, je me retrouvai seule.

Je fis retentir la cloche du petit déjeuner et décidai de me préparer le temps que l'on m'apporte de quoi manger. Je n'avais pas du tout l'envie de croiser ce Min Yoongi. Je ne savais pas ce qu'il me cachait mais j'allais sans doute pas tarder à la découvrir.

Je me vêtis d'un collant pour protéger mes jambes des températures peu amicales du dehors. Avec cela, j'ajoutai une jupe crayon ainsi qu'une chemise blanche. Pour accessoiriser le tout, je choisi un chapeau et une paire de lunettes de soleil puisque l'astre du jour semblait être de sortie en ce jour.

Cela me fit un bien fou de ne pas avoir toutes ces couches de vêtements sur moi. Je me sentais bien plus légère et davantage comme tout le monde. Comme si le poids des responsabilités m'avait quittée.

La femme de chambre m'apporta enfin mon petit déjeuner que je lui fis signe de poser sur le bureau. Je ne regardais même pas ce qu'elle m'avait préparé mais je me doutais que les quantités étaient bien au-delà de ce que mon estomac pouvait accepter.

Quand elle allait quitter ma chambre, je la retins à temps pour lui faire une requête.

— Mademoiselle, attendez.

— Que se passe-t-il, ma reine ?

— J'aimerais que vous organisiez un bal masqué ce soir, s'il vous plaît.

— Ce soir ? Le créneau ne se fait-il pas trop court ? Ne voulez-vous pas davantage de leste ?

— Ne vous en faites pas, les gens n'attendent que cela depuis hier soir. Je suis sûre que chacun aura de quoi se mettre sur le dos. N'oubliez pas ou vous serez renvoyée.

— Oui, madame. Je vais le faire de ce pas.

Elle s'en alla, tête baissée. Shin Yuna. Je m'en souvenais comme si c'était hier. Je l'avais recueillie alors qu'elle se trouvait seule dans les rues. Elle n'avait que 16 ans à l'époque et j'en avais fait une de mes dames de compagnie les plus fidèles. Cela faisait trois ans qu'elle me servait comme une femme exemplaire, je n'avais rien à lui reprocher alors en échange je lui offrais le couvert et le gîte.

Cette menace voilée n'était là que pour marquer mon autorité, mais elle savait au fond d'elle que jamais je ne me séparerais d'elle. Au-delà d'être ma dame de compagnie, elle était avant tout mon amie, ma petite sœur que je protégerais contre vents et marrées.

— Bien le bonjour, mademoiselle Monobal. Vous allez bien ? Madame vous attend dans ses appartements pour le premier repas de la journée.

Seule elle avait le droit de s'adresser ainsi aux personnes que je prenais sous mon aile. Je savais tout d'elle comme elle connaissait tout de moi. Et elle avait visiblement compris que Lisa avait eu un impact sur ma personne et tout comme Woorim, elle l'avait fait avant moi.

Parfois la vérité est si absurde que tout le monde doit l'accepter avant qu'on ne daigne l'envisager.

— Lisa, bonjour. Comment vous sentez-vous ? Venez donc vous joindre à moi pour le petit déjeuner.

— Oui, bien sûr. Cela tombe à pic, je meurs de faim, dit-elle d'une voix théâtrale, marquée d'une ironie palpable. Comme pour se moquer gentiment de moi.

Nous nous assîmes l'une à côté de l'autre juste devant le bureau et partageâmes ce premier repas. Rapidement, nous finîmes et alors que j'allais annoncer notre départ, Lisa m'interrompit avant que je ne puisse ouvrir la bouche.

— Madame, vous ne pouvez pas sortir ainsi. Vous êtes bien trop reconnaissable. Il vous faut quelque chose qui vous fasse passer incognito. Tout d'abord, vous allez devoir vous débarrasser de vos accessoires.

Elle alla dans ma garde-robe se servir comme si elle l'avait toujours fait. Elle revint quelques minutes plus tard avec un masque en tissu, un bob ainsi qu'un pull et un jean, le tout en noir. Avec cela, elle avait choisi une paire de grosses bottes, noires elles-aussi.

— Enfilez cela, je vous attends ici.

Elle-même s'était vêtue de façon discrète. Un jean bleu classique avec un léger pull blanc accompagnés d'une veste qui m'avait l'air épaisse. Avec cela, elle avait une casquette sur la tête et une paire de lunettes de soleil. Et pour conclure le tout, elle avait une paire de bottines noires qui luisaient à la lumière artificielle.

J'allais m'habiller avec ce qu'elle m'avait choisi. Je n'avais aucune idée de la manière dont les gens de l'extérieur s'habillaient, s'ils préféraient les pantalons, les jupes ou les robes. Je ne m'étais jamais posée la question. Je n'avais jamais fait de shopping et l'idée ne m'avait jamais traversé l'esprit.

Et aujourd'hui je suis en train de bouleverser ma vie entière pour contenter une seule personne.

Cela y était, j'étais fin prête. Pour ce qui étaient des chaussures, elles étaient neuves. J'avais toujours eu l'habitude de me percher sur des escarpins de quelques centimètres pour davantage dominer la salle du haut de mon mètre soixante-sept.

Lisa, elle n'en avait pas besoin. Nous faisions plus ou moins la même taille à chaque fois que nous nous trouvions à côté mais elle se contentait toujours de chaussures plates. Je me doutais que ce devait être plus confortable.

Quand je retournais à la chambre, je la vis devant le tableau que j'avais peint hier soir. J'avais omis de le ranger et elle avait devant elle la manière dont mon âme la voyait. Je me souvenais des coups de pinceaux que j'avais fait, de la façon dont je les avais donné la faculté de s'exprimer et de crier au monde les sentiments que j'éprouvais pour elle.

Mon cœur s'arrêta pour repartir de plus belle. Il ne me prévint pas, il battait tellement vite que je crus qu'il s'échapperait de ma cage thoracique. Elle me voyait telle que j'étais, sans aucun filtre. Elle voyait mon âme mise à nue. Et j'espérais pouvoir communiquer avec la sienne.

— C'est toi qui l'as peint ?

Entendre sa voix perça la bulle entre le réel et l'imaginaire. Elle rendait la chose vraie et pas seulement existante dans ma tête. Pour la première fois je ressentais des doutes. J'avais besoin de son approbation. Mais juste de la sienne.

— Oui... Qu'en penses-tu ?

— Ce que j'en pense ? J'en pense que davantage de monde devrait voir ce talent artistique inné.

Elle marqua une pause et replongea ses pupilles vertes sur la peinture. Elle la fixait avec une insistance que je ne lui connaissais pas. J'aurais tant donné pour être celle qu'elle regardait comme ça mais j'en aurais offert davantage pour savoir ce à quoi elle pensait.

— C'est moi que tu as peint ?

Il était évident qu'elle était celle représentée sur la toile. La teinte de ses yeux, de ses cheveux était unique. J'avais fait attention à n'omettre aucun détail, de sa mâchoire à son grain de beauté j'avais tout reproduit avec une précision chirurgicale. Même la texture de la peau était visible. Il s'agissait de ma plus belle œuvre.

— La réponse n'est-elle pas évidente, poupée ?

D'où me venait cette soudaine assurance ? Je ne la regrettais pas, surtout lorsque je vis ses pommettes se colorer de rouge, son regard m'éviter inéluctablement et ses mains bouger sans savoir où se mettre.

— Ne vas-tu pas me répondre ? Ne s'agit-il pas d'irrespect envers ta reine ?

Lorsque je revêtais mon habit royal, j'adoptais un comportement à la hauteur de celui-ci. Je ne laissais personne me marcher sur les pieds et ce n'était pas en ouvrant mon cœur à la première personne qui me faisait me sentir comme quelqu'un de normal.

— M'aimez-vous, ma reine ?

L'entendre m'appeler ainsi ne me plaisait pas. Elle n'avait pas à le faire puisque je ne la considérais pas comme une femme du peuple. Je la considérais comme ma femme.

— Que vois-tu dans ce tableau, poupée ? Qu'en comprends-tu ?

Elle prit le temps de réexaminer le tableau dans le cas où elle aurait omis ou mal interprété un détail. Ses pupilles vertes se baladaient sur la toile.

— Lisa, la peinture est un art, l'art est le reflet de l'âme et l'âme ne saurait point mentir. Dans ce tableau, j'ai exprimé tout ce que tu me fais ressentir alors j'attends ta réponse. Mes sentiments sont-ils réciproques ? M'aimes-tu ?

— Je- je ne saurais dire que je vous aime alors que cela ne fait que quelques jours que nous nous connaissons. Mais je sais que vous me faites sentir comme personne d'autre n'a pu le faire auparavant. Je ne peux vous promettre mon éternité mais je vous donne mon présent en guise de promesse.

— Et c'est bien plus que ce que je te demande, poupée. Et si nous allions faire ce shopping avant que je ne décide de te garder toute la journée au lit avec moi ?

— Euh, oui oui. Bien sûr.

Au moins avait-elle eu le bon sens de m'écouter sans chercher à me défier. Nous allâmes toutes les deux en direction du portail. Mais je croisais Min Yoongi qui me regardait d'un air mauvais. Je voyais bien qu'il ne comptait pas venir me parler, ses yeux parlaient pour lui. Cependant je ne voulais pas le laisser croire qu'il allait pouvoir s'en tirer à bon compte alors que par deux fois il était venu me menacer dans ma propre chambre.

Je tirai Lisa par le bras pour la mener au plus près de lui et lorsque je fus à quelques centimètres seulement de son oreille, je chuchotais un rapide :

— Je ne suis pas la seule homosexuelle de la pièce apparemment. Nous commettons le même péché alors vous ferez mieux de vous tenir à carreaux, Monsieur Min.

J'avais prononcé ces mots d'une voix assez basse pour qu'il soit le seul à les entendre. Je ne m'attardais cependant pas suffisamment pour voir sa réaction et continuer mon chemin, Lisa à mes trousses.

Je croisais Yuna sur ma route, affairée aux tables qui seraient destinées au buffet ce soir. Elle nettoyait le bois foncé accompagnée de plusieurs de ses amies et semblait heureuse de partager ce moment avec elles. Quand elle m'aperçut, elle m'adressa un sourire que moi seule savait interpréter et l'instant d'après retourna à sa tâche.

Quand nous quittâmes enfin l'enceinte du château, nous mîmes nos masques pour rester dans l'anonymat le plus total.

­— Tu connais un bon endroit pour faire du shopping ?

Sans un mot, elle attrapa ma main. Ce contact créa toute une réaction dans mon corps et elle courut au travers de la foule, ma personne à sa suite pour nous mener à l'endroit auquel elle pensait. Je la suivais, je me sentais en sécurité à ses côtés. Courant ainsi, laissant mes cheveux se faire balayer par le vent, éloignée de tous les maux, de toutes les responsabilités.

Et là, je compris. Je compris que ma place n'était pas dans un château à me faire servir par quiconque le voulait et à défiler devant tout ce monde comme si je n'étais qu'une poupée Barbie. Tout le monde m'enviait pour mes belles robes, mon palace et ma vie de rêve. Mais savaient-ils seulement à quel point tout cela était oppressant ? Savaient-ils seulement à quel point je me sentais seule ? Savaient-ils à quel point j'avais l'impression de vivre pour eux plutôt que pour moi ?

Au bout de trente ans, je m'en rendais enfin compte. La vie de reine n'était pas pour moi, j'avais besoin de ressentir l'adrénaline, de quitter le confort de mon nid douillet et de parcourir ce monde dans lequel j'étais née et duquel je ne connaissais qu'une infime partie.

Je voulais quitter cette vie-là, lui tourner le dos avec un unique sac à dos et faire le tour du monde avec cette femme à mes côtés. Sentir le sable sous mes pieds, le vent dans mes cheveux, la neige me fouetter le visage.

Mais le veut-elle aussi ?

Elle n'était pas du genre à rester à la maison à attendre qu'on la serve. Elle semblait préférer être active et se servir pour obtenir ce qu'elle voulait. Au fond, nous savions toutes les deux que nous nous ressemblions sur beaucoup de points, plus que ce nous acceptions de voir du moins.

La vie de bourgeois ne nous convenait pas. Mener une vie de bohème semblait être une évidence pour moi. Vivre au jour le jour sans jamais nous préoccuper de la suite était ce qui m'attirait le plus.

— Nous y sommes, me prévint-elle de sa douce voix.

— Bien, achète-toi ce qu'il te faut. Et je ne t'ai pas dit, mais j'ai fait organiser un bal ce soir alors prends de quoi te vêtir pour cet événement aussi.

— Un bal ? D'accord. Quel genre de vêtements dois-je prendre ?

— Je pensais à une combinaison fluide avec une veste de costume et un chapeau haut de forme, je suis sûre que cela t'irait à ravir. Pour ce qui est des chaussures tu choisis ce qu'il te convient le mieux. Je te propose que nous nous rejoignons ici même dans deux heures pour que nous ayons le temps de nous préparer.

— Bien.

Nous partîmes chacune de notre côté. Je savais exactement ce que je devais prendre et quel genre de masque je voyais le mieux sur elle. Après tout, j'étais une professionnelle en ce qui concernait les apparences.

Deux heures plus tard...

Nous nous étions retrouvées à l'heure prévue et rentrâmes directement au château sans prendre la peine de déballer nos affaires. Nous n'avions pas le temps pour cela. Je n'avais pas donné d'horaire à Yuna mais elle savait que les événements comme celui-ci commençaient aux alentours de vingt-et-une heure. Il était déjà presque quinze heures ce qui nous laissait le temps de nous préparer, mais il fallait une marge pour les invités qui arriveraient en avance.

Nous montâmes à l'étage et la direction de ma chambre nous semblait la plus naturelle. Je l'accompagnais jusqu'à la porte et avant de partir, je lui dis :

— Lisa, j'ai quelque chose à faire rapidement. Douche-toi, je reviens et je la prendrais après toi.

— Oh, d'accord.

Elle ne posa pas que questions et je lui en fus reconnaissante. Je ne savais moi-même pas si je tenais à ce qu'elle sache ce que j'avais à faire. Je tournais juste les talons et retournai sur mes pas. Je me déplaçais jusqu'à la chambre de Yoongi, je savais qu'il était là, le filet de lumière sous la porte parlait pour lui. J'entrais sans frapper cette fois, décidée à le coincer dans un cul-de-sac.

Je n'avais pas prévu qu'il soit seul et pas en compagnie d'un autre.

— Avez-vous été mis au courant pour le bal de ce soir ?

— Oui, vous n'avez donc pas perdu de temps pour l'organisation. Après votre menace voilée, je n'en attendais pas moins de vous madame. Je dois avouer que vous faites une souveraine remarquable.

Cette remarque m'atteignit bien plus que ça le devrait. Il croyait lui-aussi que vivre enfermée m'allait bien. Comme tout le monde. Evidemment puisque c'était l'image que j'avais toujours renvoyée.

Je ne lui répondis pas, cela lui aurait fait bien trop plaisir. Je voulais croire que je le méprisais, mais j'éprouvais aussi de la compassion pour cet homme. Il n'avait pas choisi de s'éprendre de son maître. Ses menaces n'étaient pas personnelles, il tentait juste de protéger le bourgeon passionnel qu'il entretenait à cause d'une attirance illégale, immorale, indomptable.

Je ne le portais pas dans mon cœur, mais il avait gagné mon respect. S'il aimait sa vie de bourgeois alors, je ne pouvais que lui tirer mon chapeau.

— On peut tromper son cerveau mais le cœur est bien plus intelligent.

Je lui avais répété les mots de Ko Woorim parce qu'ils étaient marqués d'une vérité pure. J'espérai qu'il ne reculerait pas face au pas que je faisais vers lui, mais qu'au contraire, il accepterait la main que je tendais vers lui.

— A ce soir.

— A ce soir.

Il ne m'avait jamais retourné mes politesses sans qu'il y ait la moindre trace de sarcasme, d'amertume ou d'ironie dans sa voix. Mais cette fois, ses mots étaient empreints d'une sincérité à tout épreuve.

Je m'en allais. Mais au lieu de retourner dans ma chambre, j'allais dans les appartements de mes dames de compagnie. Je me souvenais de chacune d'elles, elles étaient toutes arrivées à des moments différents et j'avais uniquement tissé un lien intime avec Yuna.

Elle avait si peur à son arrivée, elle restait sans cesse sur ses gardes, comme un animal farouche. Elle ne dormait plus la nuit, de peur de se confronter à nouveau des difficultés de la vie. Elle l'avait fait jusqu'à ce que je la prenne sous mon aile et lui assure qu'elle n'avait rien à craindre.

Et aujourd'hui, je suis prête à lui proposer quelque chose qui ne se représenterait probablement jamais. J'allais lui laisser décider de l'avenir de ce royaume.

Je parcourais toutes les portes du regard à la recherche de celle sur laquelle serait inscrite "Shin Yuna". Je ne venais pas souvent dans ces quartiers, ils n'étaient pas insalubres, loin de là. Mais ils se situaient assez loin de ma chambre.

Je soufflais un bon coup avant d'appuyer sur la poignée de la porte. Je n'avais jamais envisagé une telle chose avec elle et me voilà devant sa porte. Pas si tôt, elle n'avait que 19 ans. Pourtant, la proposition était emballée dans un paquet et j'étais prête à le lui offrir sans savoir si cela lui ferait plaisir.

Elle tourna la tête vers moi, comme si elle s'attendait à me voir pénétrer dans sa chambre à n'importe quel moment. Son sourire rayonnant illuminait son visage radieux.

— Madame, que puis-je faire pour vous ?

— Rien de plus ou de moins que m'écouter, Yuna.

Je remis mes pensées en ordre avant de me lancer, je devais choisir précautionnent mes mots. Mais elle me devança, elle prononça elle-même ces mots comme s'il s'agissait d'une évidence.

— Cela a un rapport avec mademoiselle Monobal, n'est-ce pas ?

— C-comment ?

— Madame, cela se voit comme le nez au milieu de la figure. Vous souriez d'une manière nouvelle à chaque fois qu'elle se trouve dans les parages. Et vous avez fait pour elle, ce que vous n'auriez fait pour personne d'autre. Si vous n'appelez pas ça de l'amour, qu'est-ce donc ?

— T- tu as raison. Appelle-moi Bora, je t'en prie. Nous avons dépassé ce stade de nous vouvoyer. Dis, ma p'tite Yuna, j'ai une question. Que vois-tu pour l'avenir de ce royaume ?

— Wow, c'est si soudain comme question. Je vous avoue avoir déjà maintes et maintes fois pensé à la suite. Mais je vous dirai que ce n'est pas une situation que je vous envie non plus. Le stress qui accompagne cela ne serait pas bon pour mon organisme, surtout en ce moment.

En ce moment ? Que voulait-elle dire par là ? Je ratissais son apparence de la tête aux pieds avant de voir qu'une légère bosse était visible au niveau de son ventre.

— Tu es enceinte ?

Ce furent les seuls mots qui acceptaient de dépasser la barrière de mes lèvres. J'avais un million de questions mais je ne les posais pas.

— Vous avez toujours dit que s'il vous arrivait quelque chose et que vous laissez ce royaume sans héritière, je serais la plus qualifiée pour prendre votre place. Je me répétais sans cesse que ce ne serait jamais le bon moment mais que je vous devais au moins cela.

— Tu ne me dois rien, tu le sais, j'espère.

— Je le sais, mais laissez-moi finir. Nous n'y avons jamais songé sérieusement mais j'ai toujours réceptionné vos mots avec une grande responsabilité. Vous connaissez l'étendue de la reconnaissance que je vous voue. Mais je ne pourrais pas répondre à cette exigence. Je l'ai compris lorsque j'ai rencontré mon amant il y a de cela deux ans. Et maintenant, nous attendons un enfant ensemble. Dans quelques mois, je serai maman.

— Je ne peux continuer à gouverner.

— Ça aussi, je le sais. J'avais pensé à ce que l'on fasse une sorte de conseil. Comme dans l'ancien temps. Je sais qu'avec notre mentalité, nous avons le pouvoir de faire changer les choses et de faire naître une équité entre les sexes.

— Bien, laisse-moi y réfléchir. Je te donnerai ma réponse sous peu. Prépare-toi, tu es conviée au bal. Passe chercher ce qu'il te manque dans ma penderie et fais passer le message aux autres dames de compagnie.

— D'accord, merci ma- Bora. Elles seront toutes très contente de cette nouvelle.

Et là, je pus enfin retourner dans ma chambre. Je trouvais Lisa assise sur mon lit, dos à moi. Toujours en train d'admirer mon tableau. Visiblement, elle l'aimait beaucoup. Elle ne m'avait pas entendu entrer dans la chambre ou bien elle cachait bien son jeu et ne laissait rien paraître.

— Lisa, que penses-tu de faire le tour du monde avec moi ?

— J'adorerais.

Elle n'avait pas besoin d'en dire plus lorsque ses yeux parlaient pour elle. Son regard brillait de mille feux comme si je lui avais proposé la seule chose qui la faisait vibrer.

Elle n'était pas encore coiffée ou maquillée. Mais elle n'avait besoin de davantage d'artifices. Sa combinaison fluide au col en cœur suffisait à elle-seule à diviniser sa silhouette. De fines bretelles la maintenait sur ses épaules. J'avais la soudaine envie de céder à mes pulsions et de la vénérer comme personne ne l'avait fait avant.

J'avais pris une bonne heure pour faire ces choses que je devais régler avant le début du bal. Mais j'avais bien une demi-heure à consacrer à ma poupée. Elle qui m'avait attendue si patiemment, elle méritait une récompense.

— Tu l'aimes hein, ce tableau ?

— Il est magnifique.

— Je suis contente que mon art soit à la hauteur de ta beauté, ma poupée.

Je l'allongeais sur le matelas et je plaçais mes jambes de part et d'autre de son corps. Je saisis la fermeture éclair au dos de son ensemble et la dézippais complètement. Puis, j'attrapais les bretelles et les fis descendre le long de ses bras, sans oublier d'embrasser chaque millimètre de peau que je dévoilais à mes yeux gourmands.

Elle gémissait sous moi, son corps se cambrait alors que j'avais à peine commencé. Elle savourait le contact de ma peau contre la sienne, de ma langue qui la goutait et de mes doigts qui jouaient avec ses vêtements. Je lui faisais ressentir tellement de choses qu'elle en perdait la boule.

Je lui débarrassais entièrement de ses vêtements afin de ne pas les souiller avant le début de la soirée. Je me mis débout, face au lit. J'admirais son corps ciselé, sa peau pâle divinement mise en valeur par l'ensemble de lingerie rouge qu'elle portait.

Elle croisa les bras sous sa poitrine, une moue d'enfant sur le visage.

— Ça devait être une surprise pour ce soir.

Je riais de sa gaminerie. Savait-elle seulement l'effet qu'elle me faisait et les envies qu'elle faisait naître en moi depuis la première fois que je l'avais vue ? Pourquoi devions nous attendre alors que cela pouvait être fait de suite ? Et refait plus tard.

Je repris ma précédente place, au-dessus d'elle et je prenais possession de sa bouche. Je ne demandais pas, je me servais et j'assouvissais mes besoins primaires. Ce n'était pas un baiser plein de douceur, celui-ci était empreint de passion dévorante et avait pour unique but d'éteindre les flammes ardentes qu'elle avait allumé dans tout mon corps.

Je descendis progressivement, parsemais tout son corps de baisers et m'attardais sur son nombril. Celui-ci était de la taille parfaite pour accueillir mes lèvres gourmandes et ma langue quémandeuse. Sa poitrine était délaissée, emprisonnée dans son tissu à la connotation luxuriante.

Mes mains, quant à elles, s'occupèrent de sa petite culotte déjà trempée par son envie de moi. Mes doigts passèrent partout où elle avait besoin de moi, mon pouce caressait son clitoris gonflé et la sentais se cambrer davantage pour me sentir au maximum sur elle.

Je glissais deux de mes doigts au travers de ses fluides corporelles et amenais ma bouche à son bourgeon sensible. Elle était stimulée comme elle ne l'avait jamais été. Je levais les yeux vers les siens et vis qu'elle tentait d'étouffer ses gémissements dans ses poings.

Voyons à quel point tu arrives à rester silencieuse, poupée.

Je me remis à ma tâche avec davantage de rigueur, je ne pensais qu'à son plaisir à elle. Je jouais avec mes trois doigts en elle et la taquinais encore plus avec mon membre juste contre le clitoris. Je m'assurais d'atteindre le point G à chaque aller-retour sans jamais le rater. L'objectif étant de lui procurer un maximum de plaisir et de la mener au plus vite au septième ciel.

Alors elle se résolut à enlever sa main de sa bouche, cette dernière ne servant plus à masquer ses gémissements sonores. A la place, elle amena ses doigts à mes cheveux, planta ses doigts dans la peau de mon crâne. Je la contrariais ainsi, puisqu'elle ne pouvait plus faire taire ses sons, ils s'échappaient à leur guise de ses lèvres insolentes. Je le sentais dans l'acharnement qu'elle mettait pour griffer mon cuir chevelu. Et moi, je prenais mon pied rien qu'en sachant que je lui arrachais ces sons contre son gré.

Ses pieds formaient un étau autour de ma tête comme pour que je n'arrête pas ce processus en cours de route. Je ne comptais pas m'enfuir de toutes les manières.

Je voulais que cet instant ne s'arrête jamais, ma place en ce monde était entre ses jambes. Mais je savais que je ne pourrais pas y rester infiniment.

J'avais senti cette boule grossir, encore et encore jusqu'à atteindre l'explosion. Je n'oublierai jamais ce cri qui résonna dans ma tête encore plusieurs minutes après qu'il eut existé.

Je me relevai sur mes coudes, satisfaite. Je remontai sur le matelas pour être à la hauteur de son visage. Le bas du mien était inondé des traces de nos précédents ébats.

­— Goûte toi sur mes lèvres. Goûte-moi cet élixir que ton corps a produit juste pour moi, jolie poupée.

Elle comprit ce à quoi je faisais allusion et courba sa nuque pour enfin coller ses lèvres aux miennes. Elles recommencèrent à danser ensemble et dans ce processus, elle inversa nos rôles. Ses cheveux se dispersèrent çà et là de mon visage, créant de ce fait un rideau qui masquait l'endroit où nous nous étions connectées.

Elle alla effectuer la même action que moi en commençant à descendre. Mais je l'arrêtais en l'attrapant par les bras. Nous étions toutes les deux à bout de souffle, collées l'une contre l'autre dans une étreinte qui ne laissait qu'un fin filet d'air passer.

— Nous n'avons plus le temps. Tu te rattraperas à un autre moment, poupée. dis-je avec un sourire narquois.

Je savais qu'elle n'allait pas être d'accord avec ce que je lui disais mais elle savait qu'elle n'avait pas le choix. Elle se redressa à califourchon sur mes cuisses pour pouvoir de nouveau croiser ses bras sur sa poitrine avant de me regarder d'un air faussement mauvais.

— Tu ne paies rien pour attendre.

Elle n'inspirait aucune peur avec ses joues encore rouges de son précédent orgasme et ses cheveux ébouriffés par les draps. Sa taille svelte tenait entre mes deux mains et je la soulevais pour l'emmener à la douche. J'avais déjà hâte d'être au moment où elle pourrait faire de sa promesse une réalité.

— J'ai déjà pris ma douche.

— Est-ce que tu veux que tout le monde sache que tu viens de te faire baiser, Lisa ? Si c'est ce que tu veux, libre à toi de ne pas reprendre de douche.

— Ferme ta bouche. Allons-y.

— Je n'ai pas été assez douée si tu as encore assez d'énergie pour être insolente. Je suis déçue de moi.

Elle ne répondit rien face à mon sourire victorieux. Le rouge ne naquit cependant pas sur son visage. Je ne savais pas pourquoi, mais je savais qu'elle préparerait quelque chose pour se venger de moi. Elle le ferait toujours et c'était l'une des choses pour lesquelles j'étais tombée éperdument amoureuse d'elle. Et ce serait la chose chez elle qui me mènerait à ma mort.

Nous nous douchâmes chacune de notre côté, le temps nous manquant cruellement. Je devais laver mes cheveux qui recommençaient à décolorer. Ils laissaient au passage de l'eau leur empreinte violette avant de s'écouler dans le siphon. Elle était sortie la première étant donné que ses cheveux avaient été lavés quelques heures seulement auparavant.

Je terminais rapidement de récurer tout mon corps, de le gommer minutieusement et quand je jugeais tout en ordre, j'enroulais une serviette autour de mes cheveux sans oublier de les essorer au préalable et j'en pris une autre pour sécher mon corps.

Je visualisais avec exactitude la tenue que j'allais porter ce soir, et j'espérais franchement qu'elle la rendrait folle. Au moins autant qu'elle m'avait rendue folle lorsque j'avais la tête entre ses cuisses.

Etant donné le thème "chic", j'avais choisi une robe noire simple, fendu du haut de la cuisse jusqu'en bas et qui descendait jusqu'aux pieds. Pour habiller et casser la côté uni de la robe, je mis une multitude de bagues et de colliers ainsi qu'une paire de créoles, le tout en argenté.

La particularité de cette robe était son élasticité. Elle me collait tellement à la peau que chacune de mes courbes étaient mises en valeur. De plus, j'avais opté pour une paire de bottines avec des talons aiguilles pour élancer davantage ma silhouette.

Je la rejoignis devant la coiffeuse pour me maquiller légèrement et me coiffer. J'avais décidé de boucler mes cheveux et de les laisser retomber en cascade dans mon dos. Mais comme j'étais déjà chargée en bijoux, des traits au crayon dans la muqueuse de mon œil, du mascara ainsi qu'un trait de liner feraient l'affaire sans oublier le gloss qui permettrait à mes lèvres de briller d'un éclat que j'adorais tout particulièrement.

Elle aussi était splendide, sa combinaison bien que je l'avais déjà vue glissait sur son corps comme une seconde peau. Ses oreilles percées avaient aussi des créoles dorées, comme le reste de ses accessoires. Elle brillait de mille feux grâces au nombreux bijoux étincelants qu'elle portait. Bagues, collier, bracelets, tout ceci l'habillait comme s'ils faisaient partie intégrante de sa personne.

Je n'y avais pas fait attention, mais son maquillage était exactement le même que le mien. Nous étions accordées, comme la lune et le soleil. Une belle image vint à mon esprit. Celle qui disait que les éclipses existaient pour que nous autres, êtres humains, croyons à tous types d'amour. Tout comme ces phénomènes, il existait toujours un moyen pour que les êtres aimés puissent être ensemble.

J'aperçus la veste posée sur la chaise et entrepris d'aller la chercher pour la lui poser sur les épaules. Mes talons martelaient le sol mais j'avais toujours trouvé ce son agréable à l'oreille.

— Attends-moi quelques secondes, je reviens tout de suite. Et après nous pourrons partir.

Je devais juste récupérer ma pochette ainsi que nos masques. Le mien était simple, il y avait une immense fleur à droite tandis que les contours étaient sertis de diamants brutes. Mises à part ces quelques décorations, le tout était noir. Le sien cependant avait une forme semblable au mien mais de nombreuses arabesques dorées étaient visibles dessus. J'avais inconsciemment déjà choisi le code couleur de nos tenues.

— Mets ça, ensuite nous irons. Il est déjà presque 20 heure, nous ne devrions pas traîner.

— Bien, allons-y.

Il fallait que je vérifie les préparatifs, chose que je faisais à chaque fois. Pour m'assurer que tout soit en ordre et que tout se passe comme prévu. Ce n'était pas du tout un manque de confiance auprès de mon personnel mais j'avais ce besoin viscéral de faire les choses par moi-même. Même les choses les plus insignifiantes devaient passer par moi avant d'être montrées au monde.

Nous allâmes dans la salle où se déroulerait le bal, bras dessus bras dessous. Les tables avaient été dressées tout autour de la pièce et étaient habillées de toutes sortes de mets divers et variés. Une table entière était réservée aux boissons alcoolisées. C'était toujours près de celle-là où j'étais le plus souvent.

Des dizaines de sortes de cocktails étaient entreposés sur la table en attendant que les invités arrivent. Je les observais un à un en me demandant s'il serait judicieux d'en prendre un tout de suite.

Lisa vint passer un bras autour de ma taille et me ramena contre elle, mon dos se retrouva coller à sa poitrine et sa prise ferme m'empêcha de partir.

— En quel honneur ai-je le droit à tant de proximité, poupée ?

— Tout le monde te dévore du regard, grogna-t-elle dans mon oreille.

J'aimais ce qu'elle me disait.

— Jalouse ?

— Pas le moins du monde. Ils sauront qu'à la fin de la soirée tu ne partiras qu'avec moi.

— N'en sois pas si sûre, poupée. Je repars avec qui je veux.

— Fais attention, je t'ai promis que tu me le paierais.

— Alors j'espère que tu sauras tenir tes promesses, poupée.

Je m'en allais alors dans la direction opposée parce que j'aperçus Yuna en compagnie d'un homme que je ne connaissais pas. Je la savais enceinte donc je pouvais supposer qu'il n'était autre que son amant. Je me dirigeais vers elle quand elle me vit, elle me fit un signe de la main.

Elle avait choisi une robe cocktail bleu nuit avec un décolleté mignon. Elle avait accompagné celle-ci d'une paire de couettes et avait sans doute sauté l'étape du maquillage par manque de technique. Mais elle n'avait pas besoin d'artifice pour briller, son sourire rayonnant suffisait à faire véhiculer sa joie de vivre. Elle saluait les invités qu'elle croisait et je me voyais en elle. Elle avait vraiment l'étoffe d'une reine. Et elle serait bien maman.

J'essuyais une de mes larmes avant qu'elle ne vienne gâcher mon maquillage et la pris dans mes bras.

— Bora ! Oh, ça me ferait toujours bizarre de vous appeler comme ça. Je dois vous présenter quelqu'un.

Elle me parlait de cet air excité que je lui connaissais bien. Une vraie pile électrique qui ne tenait pas en place.

— Voici Jeon Jungkook, l'homme que je fréquente depuis un moment. Il vient d'une famille honorable qui fournit le blé au château. Je l'ai rencontré lors de l'une de ses nombreuses livraisons.

— Enchantée Monsieur Jeon. Kim Bora. Je vous remercie vous et votre famille pour toutes ces années de service. Grâce à vous, nous avons pu manger le meilleur blé de la région.

— C'est un honneur pour nous de servir une famille aux mœurs si nobles. Je vous remercie de la manière dont vous avez changé le monde, me répondit-il en se baissant plus bas que terre.

— Ne vous donnez pas la peine de vous incliner, Jungkook. Vous rendez ma sœur si heureuse alors je ne peux que vous être reconnaissante d'être la raison de ses sourires quotidiens. Puis-je vous l'emprunter ? J'ai à lui parler.

— Mais bien sûr votre majesté.

J'attrapais Yuna par le bras et l'entraînais plus loin par le bras. Elle riait légèrement de ma discussion avec son amant. Il m'avait l'air d'être un bon garçon. J'étais soulagée qu'elle ait trouvé quelqu'un pour s'occuper d'elle, quand bien même elle était parfaitement indépendante.

— Votre sœur ? Bora ! Vous êtes sérieuse ?

— Bien sûr que je le suis. Je t'ai toujours considérée comme telle.

— Oh, je vous aime tellement., si vous saviez.

— Je t'aime aussi, Yuna. As-tu réfléchi à la suite ? Je trépigne d'impatience à l'idée de partir avec Lisa.

— Je reste sur mon idée de conseil. Vous pourriez l'élire avant votre départ et ainsi dès que quelqu'un se sentira trop oppressé ici, il pourra partir tout en sachant que le reste du royaume est entre de bonnes mains. Mais vous pourriez aussi ne choisir que la moitié du conseil et laisser le peuple le choix de l'autre moitié.

— Tu sais aussi bien que moi que cela risque d'être très compliqué. Cela a déjà été fait et le monde s'était heurté à un mur. Je ne veux pas que ça se reproduise.

— Ma chérie, tu es encore naïve. Le monde n'est pas tout beau tout rose. Je ne pense pas que tu réussiras cette fois.

— Faites-moi confiance, je vous en supplie.

Une trompette sonna vingt-et-une heure, les invités arrivaient. Je me disais bien que l'heure passait trop vite. Comme à chaque fois, je devais ouvrir la cérémonie en dansant avec un cavalier ou une cavalière au choix. Cette année, le choix était bien vite fait. Je danserais avec Lisa et ce n'était pas négociable.

Elle n'avait d'ailleurs pas ôté son masque depuis que nous étions sortis de la chambre, alors elle préservait son anonymat. Une foule de personnes entra, formant deux files. Une des personnes seules qui souhaitaient avoir la chance de danser avec moi et une autre avec celles qui étaient en couple.

— Bonsoir tout le monde. Je vous remercie à tous de votre venue malgré l'invitation tardive. Je suis navrée de vous décevoir mais je suis accompagnée ce soir. Et ne partez pas trop tôt, j'aurais une annonce de la plus haute importance à faire pour clôturer ce bal. Merci de votre écoute et bonne soirée, amusez-vous bien.

Une vague de déception s'entendit dans la pièce, je savais que j'en décevrais plus d'un mais je savais aussi que bon nombre d'entre eux étaient heureux pour moi. Je vivais pour la première fois en trois décennies pour moi, et ça le peuple le voyait.

— Comme l'exige la tradition, la reine ouvrira la soirée avec sa mystérieuse compagne. Or, ce soir ce sera différent. Nous invités d'honneur Monsieur Kim Taehyung ainsi que son second Min Yoongi l'accompagneront. Il nous faut donc deux autres danseuses ou danseurs. Que ces messieurs fassent leur choix parmi la foule de gens ici présent.

Le page fit son annonce habituelle. Je pensais que Yoongi allait être le cavalier de Taehyung. Il n'y avait aucune honte à cela, j'avais moi-même déjà dansé à plusieurs reprises avec une femme pour ouvrir le bal, et j'allais le refaire aujourd'hui.

La musique se lança dans les haut-parleurs. Je plaçais ma main dans le dos de Lisa et lui indiquait de poser la sienne sur mon épaule.

— Je ne sais pas danser. chuchota-t-elle pour que je sois seule à l'entendre.

— Ne t'en fais pas poupée, c'est comme au lit. Je donne le rythme et tu suis. Aussi simple que ça, lui répondis-je sur le même ton.

Nous ne parlâmes plus pendant le reste de la danse, ma remarque avait fait naître une teinte rosée sur ses joues. Elle voulait cacher son visage dans ma nuque à cause de la gêne mais ne put le faire que lorsque les invités se joignirent à nous sur les premières notes de la seconde chanson.

Nos corps s'apprivoisèrent ainsi au rythme de la musique pendant l'heure qui suivit avant que mes chaussures ne commencent à me faire mal aux pieds. Je fis signe à Lisa que je devais aller me réhydrater et me reposer un peu. Elle comprit tout de suite le message et m'emmena vers la table d'alcool et m'apporta une chaise sans oublier d'en prendre une pour elle.

Elle s'assit devant moi visiblement aussi essoufflée que moi. Elle avait une légère touche de rose sur les joues comme si elle s'était éclipsée aux toilettes pour se repoudrer le visage. Elle me regardait dans les yeux et je me perdis un instant dans son regard vert.

— Fiou, c'est sportif la danse quand même. Je n'en reviens pas d'avoir dépensé tant d'énergie pour montrer au monde que je sais danser et pour me pavaner à ton bras. Quand vas-tu faire ton annonce ?

— Probablement après que tout le monde se sera fatigué et qu'ils iront se désaltérer à leur tour. Soit dans une petite demi-heure. En attendant, j'aimerais repérer Kim Taehyung et lui parler seul à seule.

— Il est juste là-bas. Avec son masque blanc, celui qui ressemble à de la porcelaine brisée.

— Bien, merci. Je reviens. Reste ici, tu veux bien ?

— Bon, très bien.

Je m'en allais donc l'esprit tranquille à la recherche de ce Kim Taehyung. Par chance, je connaissais plutôt bien sa cavalière. Une dénommée Myoui Mina, fille de la meilleure amie de ma défunte mère, j'avais passé des heures à jouer avec cette fille au château. Elle était bien trop superficielle à mon goût mais l'heure était à l'hypocrisie alors je me devais de la complimenter pour avoir ce que je voulais.

Je détestais cette facette de ma vie.

Je soufflais un bon coup et me préparais mentalement à aller accoster Mina.

— Heeyyy Mina, comment tu vas ? Ça fait longtemps qu'on s'est pas vues. Tu es ravissante ce soir. Ça te dérange pas que je pique ton mec quelques minutes ?

— Salut Bora, c'est vrai que ça fait longtemps. Tu es magnifique aussi. Wow, tu as un si beau corps, j'aimerais tant te ressembler ! Ta partenaire en a de la chance.

Calme, zeeen ça va aller. Dans quelques temps tu n'auras plus affaire à cette femme.

Je n'avais jamais aimé cette femme. Elle incarnait tout ce que je détestais le plus. Elle adorait s'auto-critiquer pour récolter des compliments.

— Ne t'en fais pas, tu as tout pour toi aussi, ma belle. Taehyung, suis-moi s'il te plaît.

J'espérai qu'il ne pose pas de questions pour m'éloigner au plus vite de cette femme. Elle agissait ainsi depuis sa puberté à cause de son idiote de mère et je me demandais pourquoi parmi toutes ces femmes géniales, Taehyung l'avait choisie, elle.

J'avançais vers les vestiaires, mes talons claquaient sur le sol mais le bruit était étouffé par la brouhaha environnant. J'entrai la première dans la cabine mais je savais qu'il me suivait. Ils le faisaient toujours.

— Bon, vous devez vous demander pourquoi est-ce que je vous ai interrompu lors de votre slow avec ta princesse. Je ne vais pas passer par quatre chemins. J'ai besoin de vous et vous de moi. Je sais pour vous et Yoongi et vous savez sûrement pour Lisa et moi. Mais je sais aussi que tu ne peux pas te permettre de l'aimer chez toi. Alors j'ai un marché à te proposer. Lisa et moi partons à la découverte du monde. Shin Yuna, la fille que je considère comme ma petite sœur, veut que nous retournions un peu en arrière et adoptons un conseil pour remplacer la royauté. Mais elle n'a pas d'expérience et je sais que tu en as, alors, si tu devenais un membre de ce conseil, tu pourrais vivre tranquillement avec Yoongi sans te soucier de quoi que ce soit. C'est un deal et je pense que nous serons gagnants des deux côtés.

— Je- il faut que j'en parle avec Yoongi. Il te donnera la réponse demain.

— Kim Taehyung. Tu es le prince. Tu ne dois pas te laisser marcher dessus par ton second enfin. Peu importe qu'il soit au-dessus quand vous êtes au lit, ça ne me regarde pas mais il n'a pas à décider de tout dans ton couple. Il n'y a pas de "celui qui porte la culotte" tu es encore libre de vivre ta vie comme tu l'entends merde.

Oui, je m'emportais. Mais j'en avais assez de voir Kim Taehyung, celui donc on vantait les mérites dans les quatre coins du monde se comporter comme un homme soumis. J'avais développé un sens de l'observation accru au fil des ans et je voyais en lui l'âme d'un leader qu'il réprimait pour répondre aux attentes d'un autre. Depuis le début je le voyais comme l'homme qui se cachait derrière un autre. J'avais beau ne pas spécialement apprécier la gente masculine, je savais que la valeur d'une personne ne se définissait pas par ce qu'elle possède ou non entre les jambes.

— J'en ai plus qu'assez de savoir que tu lui obéis au doigt et à l'œil comme ça. Est-ce comme ça que tu as été éduqué par ton père ? T'a-t-il appris à te cacher derrière quelqu'un d'autre plutôt que de montrer au monde ta valeur réelle. Tu sais ce que je déteste encore plus que la société patriarcale ? Les lâches comme ceux de ton type.

Je marquais une pause symbolique pour qu'il ait le temps de répliquer. Mais il ne trouva apparemment pas quoi dire alors je continuais ce que j'avais commencé.

— Je vais reprendre une de vos expressions fétiches. "Je suis une femme et je porte bien mieux les couilles qu'un homme comme toi". Maintenant, je m'en vais. Je vais profiter de cette soirée et je te laisse méditer sur ce que je viens de te dire.

Je sortis de la pièce, droite et fière. Je le laissais planter là, bouche bée. Il pouvait réfléchir toute la soirée à mes mots, je n'en avais que faire. Je n'allais certainement pas le laisser me gâcher ma soirée.

Je retournais dans la salle principale et je trouvais Lisa exactement là où je l'avais laissée. Elle semblait perdue sans moi. Je ne devrais pas ainsi me réjouir, mais ça faisait plaisir de savoir que l'on était attendu quelque part. Que quelqu'un nous aimait pour ce qu'on était et non pas pour ce qu'on avait.

— Je suis là, pourquoi n'as-tu pas profité de mon absence pour t'amuser un peu ?

— Je ne voulais pas que tu me cherches.

Son ton était sec, tranchant. Je savais qu'il y avait autre chose derrière ça mais je savais aussi à quel point elle était têtue. Elle ne dirait rien. Je n'allais pas la forcer à quoi que ce soit alors je changeais complètement de sujet :

— Je vais aller faire l'annonce, et puis après nous danserons et ferons la fête jusqu'à ce que la fatigue nous oblige à aller au lit.

— D'accord.

Encore ce ton sec et tranchant. Elle me fit tout de même un sourire, faux et creux, lui aussi. Je ne savais pas ce qu'il s'était passé durant mon absence. Mais il y avait eu de l'huile sur le feu durant mon absence et j'allais devoir la cuisiner pour trouver la raison de son tracas.

Je me levais et marchais en direction de la scène improvisée. Je montais les marches de manière un peu bancale à cause de mes échasses. Oui, j'avais pris une paire haute pour ne pas paraître riquiqui à cause de Lisa.

Tout le monde a des complexes merde.

Mais maintenant, je ne marchais plus droit et j'avais terriblement mal aux pieds. Manquait plus que de savoir si cela valait le coup.

— Bonsoir mesdames et messieurs. Ce soir, je vous annonce ma retraite. Je sais que nombre d'entre vous vous attendiez à ce que je passe ma vie ici. Mais la vérité est telle que je ne me sens pas à ma place ici. Et je sais que ce ne sera jamais le cas. Pas maintenant que j'ai rencontré l'amour de ma vie, la raison qui me pousse et me poussera à donner le meilleur de moi-même.

Je leur laissais le temps de digérer cette nouvelle un peu inattendue avant de reprendre d'un ton sûr de moi. Je ne souhaitais pas me dégonfler, alors je continuais avant de fuir à toutes jambes. Ils comptaient tous sur moi alors si j'abandonnais il fallait qu'ils sachent que je ne les laissais pas complètement tomber.

— Nous avons décidé de redonner une nouvelle chance à la démocratie. Demain auront lieu les élections pour sélectionner parmi vous quelques représentants. Voilà c'est tout pour moi. Profitez-bien de cette soirée, et je vais en faire de même.

Je tendis la main vers Lisa avant de me diriger vers la piste de danse. Je voulais encore sentir son petit corps se trémousser contre le mien avant de partir au lit. Elle me dépassait de quelques centimètres malgré la hauteur de mes talons. Pourtant, elle, ne portait qu'un pauvre talon de quelques centimètres à peine.

Nous bougeâmes sur la piste de danse comme deux adolescentes qui se trouvaient dans leur bulle et ne vîmes pas le temps avancer. Il me narguait mais je savais qu'il ne pouvait contrôler le temps que je passerais ici même.

Mais quand les deux heures du matin sonnèrent, Lisa me tira par la main voulant absolument me ramener dans la chambre. Je ne tenais pas très bien debout alors elle m'aida en me soulevant par le dessous des genoux et elle nous conduisit dans sa chambre.

A peine la porte claquée, elle me plaqua contre le bois de celle-ci et me dit d'une voix remplie de désir.

— J'espère que tu n'as pas oublié la promesse, princesse. Parce que je compte te faire crier toute la nuit.

La fièvre de la luxure m'avait enveloppée, je ne répondais plus de rien. Je ne disais plus rien qui n'avait de sens. J'avais chaud, ma peau était brûlante de désir. J'avais besoin qu'elle me touche, son contact me brûlait mais mon épiderme me faisait davantage souffrir lorsqu'il n'était pas en contact avec le sien.

— Toute la nuit ?

— Oui, princesse. Laisse-moi me rattraper en chérissant ton corps de la plus divine des manières. Mais surtout laisse-moi me venger en te vidant de ton énergie et être aux petits soins pour toi au lever du soleil.

Sa passion délirante se sentait dans ses gestes, dans ses mots, dans ses intonations. Elle me voulait, ce soir et pour toujours. Mais elle n'avait pas le choix, elle était à moi depuis que j'avais posé mes yeux sur elle.

J'étais toujours contre la porte avec sa bouche qui dévorait la mienne. Je répondais à son baiser avec une joie si peu contenue. Elle savait atteindre les bons endroits cachés que personne avant elle n'avait su trouver.

Cette femme est parfaite.

Elle me décolla de la porte pour se diriger vers le lit. Ses mains étaient stratégiquement posées sur mes fesses qu'elle massait entre ses dix doigts. J'adorais n'avoir rien à faire si ce n'était de profiter des plaisirs qu'elle pourrait m'offrir.

Toutes mes inquiétudes se sont envolées à l'instant même où elle a posé ses lèvres sur moi.

Délicatement elle me posa dans son lit, au milieu et m'admirait de ses iris perçants comme si elle voulait imprimer l'image de moi, allongée dans ma chambre, soumise à ses moindres désirs. Même les plus pervers.

Ma tête enfoncée dans les draps, je n'attendais que son contact avec impatience. Je souhaitais qu'elle cueille quelques baisers farouches sur le bout de mes lèvres mais j'attendais aussi d'elle qu'elle me fasse tout oublier jusqu'à mon propre prénom.

Des soupirs de frustration sortaient de ma bouche, la voir ainsi se dandiner toute la soirée avait fait office de préliminaires.

— Du calme, princesse. Je sens ton excitation jusque dans mon œsophage.

Elle ne savait pas que mon excitation allait bien au-delà de l'œsophage. Elle vibrait dans tout mon être à la recherche de l'issue de secours. Mais il n'y en avait pas puisque Lisa avait bouché tous les accès, juste avec sa présence à elle.

De mes mains, je lui ôtais la veste de ses épaules. Comment faisait-elle pour ne pas avoir chaud ainsi couverte ? Je n'en avais pas la moindre idée. Tout mon corps était en ébullition prêt se frotter contre chaque corps frais.

Je lui caressais les bras, la cou, chaque centimètre carré de peau accessible était un coin de paradis.

— J'ai chaud. Retire-moi cette robe, s'il te plaît.

Je ne voulais pas qu'elle me la retire, je voulais qu'elle me l'arrache avec ses dents. J'avais besoin qu'elle me fasse ressentir quelque chose, j'étais à elle et personne d'autre et il fallait qu'elle ait les cordes vocales nécessaires pour le crier au monde entier.

L'instant d'après elle partit. Elle me laissa seule au milieu de ce lit immense et s'occupa de m'enlever mes escarpins. Mes pieds hurlaient de joie à leur libération. Mais je n'eus le temps de me réjouir davantage lorsque je sentis une trainée de baisers sur le long de ma jambe. Elle remontait lentement, m'embrassant par-dessus mon collant.

Qu'est ce que j'aurais aimé ne pas porter ce putain de collant.

Elle attrapa l'extrémité de celui-ci avant de le descendre complètement de ma jambe. Ma robe cachait encore la majorité de mes membres inférieurs et elle n'avait pas encore eu le plaisir de rencontrer de ses yeux, la lingerie que j'avais mise spécialement pour l'occasion.

Je trépignais d'impatience et elle semblait le sentir puisqu'elle me jeta ce regard mauvais derrière lequel tout son désir se cachait. Elle posa simplement son index sur les lèvres pour m'intimer le silence. Un simple geste. Quelle insolence.

Mais ce soir, elle était la reine et je n'étais personne pour lui ordonner quoi que ce soir.

Elle revenait à la hauteur de mon visage, sa bouche auprès de mon oreille. Je sentais son sourire joueur sans même avoir à le voir. Je l'avais tant imaginée comme ça que je connaissais ses expressions du visage par cœur.

— Ne te presse pas, princesse. Tu le regretteras quand tu ne pourras plus tenir sur tes jambes. Tu le sais aussi bien que moi.

Je sentais son souffle se percuter dans mes conduits internes plusieurs fois. Presqu'entre chaque mot, un courant d'air chaud me traversait toute entière. Je voulus répliquer, juste pour avoir le plaisir de contrarier ses propos mais elle ne me laissa pas faire. Elle ne me laissa pas faire puisqu'elle déposa avec force et conviction un vibromasseur tout droit sur mon clitoris.

Un cri voulut s'échapper de mes lèvres mais elle le récupéra entre les siennes. Le gardant pour elle. Un acte égoïste et purement possessif.

Je la sentais sourire de gourmandise contre mes lèvres. Elle se délectait de ces bruits que je faisais tout juste pour elle. Elle s'amusait à augmenter et diminuer la puissance du vibro et semblait aimer m'entendre déverser ma frustration.

Je sentais l'orgasme monter tout doucement, je savais que si elle le voyait elle m'en priverait. Je connaissais son vil esprit. Je tentais de masquer au mieux l'expression sur mon visage mais quand cette boule que j'aimais tant ressentir allait se dénouer, elle me priva de tout contact, de toute simulation.

— Putain, tu abuses.

Je ne pus m'empêcher de me plaindre, mon corps était encore en alerte après cette privation.

— J'ai promis que tu prendrais ton pied. Pas que tu allais jouir, princesse. Assieds-toi.

Son ordre ne laissait pas de place à la désobéissance, durant le processus, elle se recula et s'assit dans le fauteuil juste à côté de mon lit. Elle se mit à l'aise, une jambe posée par-dessus l'autre. Du bout de ses doigts, elle attrapa un verre de scotch que j'avais toujours dans ma chambre. J'entendis le métal de ses bagues se cogner contre son verre, je n'avais jamais autant désiré le contact d'une autre personne. J'étais prête à la supplier pour en avoir davantage.

— Déshabille-toi.

Deux mots. Simple. Je ne pensais qu'à l'ensemble rouge que je portais sur moi. Je connaissais l'effet que cette couleur avait sur les autres. Et même si ma poupée était spéciale, elle ne dérogerait pas à cette règle. J'eus raison et cela se confirma lorsque je vis cette lueur mesquine dans son regard. Lorsque je fis mine de vouloir me débarrasser de mon soutien-gorge, elle réagit enfin.

— Garde ce que tu portes. Adosse-toi à la tête du lit et écarte tes jambes au maximum.

Je souris, victorieuse. Mais j'arrêtais bien vite, je savais exactement ce qu'elle allait me demander. Mais je ne voulais qu'elle entre mes jambes. Je n'avais aucun mal à m'accepter comme je l'étais, je me considérais comme une femme accomplie après tout.

— Touche-toi avec deux doigts.

L'instant fatidique arriva. J'écartais le tissu de mon string afin qu'il ne me gêne pas et jouais de mon index et de mon majeur sur mon clitoris. J'essayai de ressentir quelque chose mais c'était dur après le passage du vibro. Je grimaçais face à mon incompétence. J'étais allongée là, les jambes écartées à la recherche de mon plaisir qu'elle semblait tenir entre ses mains.

— Qu'est ce qu'il y a ? Ce n'est pas assez ?

Je lui lançais un regard noir. Je détestais son assurance au lit autant qu'elle me rendait folle. Il y avait ce contraste chez elle entre l'intime et le public. Dans le secret de la chambre, elle devenait une autre personne.

Elle posa son verre après avoir pris une dernière gorgée, puis elle vint sur le lit d'une démarche féline. Elle tira sur mes pieds pour que ma tête se trouve sur mon oreiller puis elle plaça son visage au-dessus de mon nombril pour y laisser ce qu'elle avait en bouche.

— Il suffit qu'une seule goutte déborde pour que tu sois privée de ton orgasme. Tu m'as comprise ?

Je hochais vivement de la tête mais visiblement cela ne suffit pas à lui montrer que tout était okay pour moi.

— Réponds-moi, avec des mots, princesse.

— O-oui, j'ai compris.

Cette fois, elle semblait satisfaite. Elle me dénuda complètement le bas du corps et dirigea son visage vers mon orifice désormais exposé. Elle souffla sur mon bourgeon sensible et cela suffit à me faire perdre la tête. Je gémissais pour son souffle. Je ne pouvais pas m'empêcher de bouger à cause de cette overdose de plaisir. Elle leva sa tête vers moi et ancra son regard directement dans le mien, comme si elle essayait de sonder mon âme.

— Fais attention. Ne bouge pas princesse. Je ne voudrais pas faillir ma mission en si bon chemin.

J'entendais à sa voix qu'elle savait que je ne réussirais pas à garder tout ce liquide au même endroit. Mais il fallait que je lui prouve ses torts. Je ne répondis rien, elle ne m'avait pas demandé de le faire.

Quand elle vit que je m'étais calmée, elle retourna à sa tête. Elle sortit directement sa langue et s'attaqua directement à l'endroit exact où je l'attendais. Elle me mena ainsi jusqu'à l'orgasme. Je faisais au mieux pour ne pas bouger, mais il était si difficile de rester de marbre alors qu'elle me bouffait si bien la chatte.

Mes mains empoignèrent les barreaux du lit et mes jambes s'enroulèrent autour de ses épaules pour retrouver une certaine stabilité. Elle prenait sa tâche au sérieux et tint sa promesse. Elle me fit venir de la plus plaisante des manières. Juste avant qu'elle ne sente mon orgasme arriver, elle se décolla de moi et me tortura à nouveau par le biais du vibromasseur. Elle l'avait programmé directement à la puissance maximale et me fit exploser ainsi.

— Je suppose que tu as relevé le défi avec brio. Jouis pour moi princesse !

Je criais son prénom, mes orteils se recroquevillèrent sur eux-mêmes. Tout se fit trouble dans ma tête, je ne pensais plus à rien, j'avais juste une forte envie de dormir dans les bras de de rester emmitouflée dans la couette pour toujours.

— Ne bouge pas, on a foutu un sacré bordel ici, je vais te porter jusqu'à ta chambre.

J'entendis à moitié ce qu'elle me dit. Elle prit une serviette pour me couvrir et m'emmena avec elle dans les couloirs. Elle fit du mieux qu'elle put pour me porter sans se cogner. Cela devait être un défi pour elle aussi étant donné la quantité d'alcool qu'elle avait ingurgité.

C'était elle qui était ivre mais je sentais que de nous deux j'étais la moins sobre. Elle avait fait faire les montagnes russes à mes hormones. Elle avait joué avec moi comme si ce n'était pas la seulement la fois que nous couchions ensemble, comme si elle avait déjà des années d'expertise sur la connaissance de mon corps.

Elle examina mon entrejambe et jugea qu'il n'était pas responsable que j'aille dormir dans cet état. Je sentais que mes replis étaient encore humides après son passage. Elle alla chercher une serviette humide dans la salle de bain. Elle me nettoya sans passer plus de temps que nécessaire puis se changea dans mon dressing.

Quant à moi je n'avais plus l'énergie de rien faire, elle m'avait pompée dans tous les sens du terme. Je n'étais plus en état de faire quoi que ce soit. Je me mis juste rapidement sous la couette, les températures fraîches frappaient mon épiderme brûlant. J'avais retiré mon soutien-gorge aussi, je ne supportais pas de dormir avec une entrave autour de ma poitrine. Ensuite j'attendis, les yeux ouverts, qu'elle revienne.

Elle revint une minute après. Une touche rosée s'était ajoutée sur ses joues. Elle avait dû se remémorer la soirée. Elle était vraiment mignonne comme cela.

— Lisa, tu deviens timide maintenant ? Dois-je te rappeler ce que tu m'as dit il y a tout juste dix minutes ?

— Dormons. N'en parlons plus. Jamais.

— J'adore cette facette que je t'ai découverte.

Elle s'allongea sous la couette sans répondre à ma pique. Puis elle me tourna le dos, visiblement contrariée par mon comportement. Je ne pus m'empêcher de me coller à son dos et de passer ma jambe gauche par-dessus la sienne. Je savais que la couleur de ses joues s'était foncée à la sensation de mes tétons pointés contre son dos.

Je n'étais pas avide d'érotisme mais elle faisait naître en moi des envies que je ne me connaissais pas. Nous dormîmes donc dans cette position. Morphée ayant très vite accepté notre demande de plan à 3.

Le lendemain matin...

Je fus réveillée par les premiers rayons du soleil qui traversaient le rideau que j'avais oublié de fermer. Lisa dormait encore profondément et nous étions dans la même position dans laquelle nous nous étions endormies. Je fis attention à ne pas déranger son sommeil et me levais pour installer le chevalet dans le coin de la pièce pour ne pas perturber la luminosité qui frappait le lit, créant un halo lumineux autour de son corps. Elle était paisible lorsqu'elle dormait, ses traits étaient détendus et elle ne semblait pas le moins du monde dérangée par un quelconque problème.

Je la peignis donc allongée dans mon lit, ses mains agrippées autour de la couette comme si elle avait un doudou, sa jambe au-dessus de la couverture et la lumière englobant la totalité de son corps comme une aura protectrice.

Je pris du temps à composer ma palette pour faire ressortir au mieux la beauté éthérée de cette femme. Mais une fois cela fait, le rythme changea du tout au tout. Ma main traçait le croquis à une vitesse que je ne me connaissais pas et même l'encrage et la pose de la couleur me prirent moins de temps que d'habitude.

— Dois-je être flattée de savoir que tu me dessines ou dois-je prendre peur en sachant que tu m'observes dormir ?

— Ma Muse, tu es levée. Sois fière, tu es l'inspiration de mes plus beaux tableaux. Tu m'interromps au meilleur moment, regarde. Ajoute une touche de couleur à cet endroit-là, tu verras, ça change tout.

Je lui donnais le pinceau et guidais sa main pour poser le blanc aux bons endroits. Elle voyait le changement s'opérer sous ses yeux. Ce tableau était 100% fidèle à la réalité. Mais c'était bien plus qu'une photographie, la peinture est un outil d'artiste capable de capturer les émotions de l'instant T et de les faire véhiculer à l'infini, face à chaque paire d'yeux qui se poserait sur lui.

— Poupée, que ressens-tu en regardant ce tableau ?

— C'est... troublant. Je me vois, moi, quelques minutes auparavant en train de dormir...

— Non, je veux dire. Lis le tableau, ne fais qu'un avec lui et ressens ce qu'il essaie de véhiculer. La lecture d'un tableau est différente pour tous, selon ce qu'il évoque chez la personne. Au-delà de ton trouble, que vois-tu ?

— Je ressens un immense sentiment d'amour, de paix et une liaison indéniable. Une chaleur est propagée par ce tableau et vient réchauffer mon cœur. C'est un don que tu as vraiment. Je pensais que le portrait de moi serait indétrônable mais celui-ci est largement au-dessus. Mais pourquoi m'as-tu peinte avec une cape ?

— Je vais être honnête avec toi, Lisa. L'autre nuit, tu as perdu la mémoire mais juste avant je t'ai vue accomplir un rite que j'ai interrompu. Je ne sais pas exactement ce qu'il s'est passé et c'est un mystère que je m'efforce de ne pas résoudre. Tu avais un tatouage, une fleur de lotus et un croissant de lune, sur le haut de la cuisse. Et il a disparu.

— Un tatouage ? Je n'ai jamais eu le souvenir d'avoir un tatouage. Une fleur de lotus et un croissant de lune tu me dis ? Il y a une légende chez moi qui dit que l'enfant qui porterait ce tatouage tenterait de renverser la monarchie absolue par le biais d'un rite en se rapprochant de sa reine. Mais je te promets que je ne te veux aucun mal, je t'aime plus fort que tout.

— T-tu m'aimes ?

Avait-elle réellement prononcé ces mots ? Les pensait-elle ?

— Tu le penses vraiment ?

— Oui, Kim Bora, je t'aime bien plus fort que tout. Je ne me souviens peut-être de la manière dont on s'est rencontrées mais tout ce que j'ai fait depuis que j'ai recouvré la mémoire est sincère. Je t'aime du plus profond de mon cœur. Jusqu'à ma mort, et même après, je brillerai pour te protéger des vents et des marées. Juste pour toi.

— Mais donc, tu es l'enfant de cette prophétie. Le fait que nous nous rencontrons et que nous tombons amoureuses était écrit dans les étoiles depuis des millénaires. Je t'aime plus fort que je n'ai jamais aimé personne d'autre, mon étoile filante, tu es l'exaucement de tous les vœux que j'ai pu faire durant ma maigre existence.

Nous avions parlé plus longtemps mais nous savions qu'il fallait que nous nous dépêchions. Je ne m'empêchais pas de lui dire que je l'aimais parce que ce n'était que la vérité et que nous ne pouvons savoir de quoi demain serait fait.

Nous ne pouvions partir ainsi. J'étais toujours la reine et il ne fallait pas que je les laisse si vulnérable. Il faudrait que nous restions quelques jours de plus pour aider Yuna avec les préparatifs et pour le bébé et pour la mise en place de cette semi-démocratie.

Lisa se brossait les cheveux devant le miroir. Elle s'était assise sur la chaise de ma coiffeuse et avait mis tous ces cheveux sur le même côté, ce qui fit que la moitié de sa nuque était dégagée. Je déposais mes lèvres dessus ce qui la fit frémir. Je devais avouer que lui faire ce genre d'effet me rendit fière.

­— Je vais régler certaines choses avec Yuna. Tu n'as pas t'en faire, tu peux rester à la bibliothèque si tu veux. Ah et, je te devance. Même si tu le voulais de toutes tes forces, et je n'en doute pas, tu ne pourrais rien faire pour m'aider.

Je m'en allais après cette étreinte réconfortante qui me donna du courage pour la suite. Je traversais les couloirs à la recherche de Yuna, elle n'était habituellement jamais très loin, mais cette fois, elle s'avérait introuvable. Je demandais à ses amies mais aucune ne savait précisément où elle se trouvait.

En derniers recours je frappai à nouveau à la porte de sa chambre.

— Yuna ! Tu es là ? Ouvre-moi si tu es là.

— Je ne veux voir personne. Qui que tu sois, pars !

— Yuna, laisse-moi entrer. Je t'en prie.

— Bora, s'il te plaît. Laisse-moi. N'entre pas, je t'en conjure.

J'entendais la détresse dans sa voix, une peur immense. Je n'avais plus entendu cette intonation dans sa voix depuis si longtemps. Même si je n'entrais jamais dans sa chambre sans son autorisation explicite, je préférais aller à l'encontre de son souhait que de la laisser souffrir dans son coin.

J'actionnais la poignée contre mon gré et une scène horrifique s'offrit à moi. Jungkook était lui aussi présent et tenait sa compagne dans ses bras. Ils pleuraient tous les deux tandis qu'une mare de sang gisait sous les pieds de Yuna. Elle avait fait une fausse couche et je n'avais pas été là pour la soutenir. Heureusement que Jungkook, lui, avait su l'épauler.

Je la pris tout de même dans mes bras. Je ressentais une peine immense alors que ce n'était pas moi qui avais perdu l'enfant.

Que s'est-il passé, Yuna ?

— Je... je sais pas. Hier soir après le bal, j'étais complètement bourrée. Quelqu'un m'a servi de l'alcool à plusieurs reprises, suffisamment pour me déclencher une fausse couche. C-ce matin, je m'étais levée et voilà.

— Je ne sais pas quoi dire. Yuna, je suis tellement désolée, tu es la dernière personne sur cette Terre a mérité cette injustice. Et vous, Jungkook, je suis contente de vous savoir auprès d'elle pour la soutenir durant cette mésaventure. Je sais qu'il est délicat de te poser cette question, mais, veux-tu que je reste plus longtemps avec Lisa pour que tu puisses te remettre sur pieds ?

— Non ! Surtout pas. Je ne veux pas que tu retardes ton voyage pour ça. Jungkook est là et je sais qu'il va m'aider. Comme toujours.

— Bien, tu es sûre ? Je reviendrai t'aider de temps à autres pour t'aider de toutes façons. Je vais continuer les préparatifs, d'accord ? Appelle-moi si besoin.

— Okay, je t'aime Bora. N'oublie pas que tu es la seule grande sœur que je n'ai jamais eue.

— Moi aussi je t'aime, petite sœur.

Je m'en allais le cœur serré. Je passais par la salle de bal, je vis que toutes les traces de la précédente fête avaient disparu. Seuls quelques morceaux de papier trainaient par terre mais dans quelques heures ce serait comme s'il ne s'était rien passé.

Je passais ma journée à discuter avec les différents diplomates et conseillers que j'avais sous la main et ils m'aidèrent à organiser de sorte à ce que tout aille bien par la suite. Je savais qu'il me fallait des personnes de confiance à la tête, Yuna était jeune et naïve. Mais elle était surtout endeuillée. Non pas que je croie qu'elle n'était pas assez forte pour surmonter cette épreuve, mais c'était surtout parce que j'avais peur que cela n'impacte sa façon de gouverner.

Lorsque la Lune pointa le bout de son nez, j'étais exténuée. Je n'avais qu'une seule envie, retourner dans ma chambre pour dormir. Me doucher et me coucher étaient les deux seules choses pour lesquelles j'avais suffisamment de force.

Je pris une douche rapidement, purifiais mes idées sous le jet d'eau chaude. Comme d'habitude, elle emmenait avec elle toutes les crasses accumulées. J'avais mal aux épaules, mes muscles étaient particulièrement tendus ce soir. Mais j'en fis fi et allais me démaquiller.

Lisa rentra à ce moment-là. Ses cheveux étaient humides. Elle était sortie.

— Où étais-tu ? la questionnai-je sans passer par quatre chemins.

— Qu'est-ce qu'il se passe ? Pourquoi es-tu si tendue Bora ?

Je détestais qu'on puisse lire en moi comme dans un livre ouvert. Qu'elle puisse le faire. Je ne me voyais pas lui mentir, pas à elle.

Notre relation venait à peine de commencer et n'allait pas partir sur de bonnes bases si les mensonges prenaient une place trop importante dans ma vie.

— Yuna a perdu son enfant. Un énergumène a osé lui faire boire de l'alcool contre son gré.

— De l'AS-47.

— Euh... oui ça devait être un truc comme ça. Attends deux secondes. Comment le sais-tu ?

— C'est moi qui le lui ai servi.

— Tu as quoi ?! Tu as tué son enfant. Tu te rends compte de ce que tu as fait ? C'est pour ça que tu semblais étrange hier soir.

— Je- J'ai fait ce que j'avais à faire Bora. Je ne m'excuserai pas d'avoir fait quelque chose dans l'intérêt de tout le monde.

— Tu as putain de détruit une famille entière. Tu t'en rends compte ?! Si ça avait été ton enfant, tu aurais réagi comment ? Une mère ferait tout, absolument tout pour son enfant. N'as-tu jamais eu de parents ? Et si ça avait été ton enfant, tout simplement ?

— Bora, tu ne sais strictement rien de ma famille. Je ne t'ai jamais donné le droit de parler d'eux. Jamais.

— Il faut que tu comprennes que tu n'étais pas en droit de priver cette famille de cet enfant. Qu'importe les raisons que tu pourrais me donner, aucune ne justifiera un tel acte.

Je ne voulais pas croire qu'elle ait fait ça. Pas alors que tout allait bien entre nous. Si j'avais su qu'elle commettrait délibérément le meurtre de mon neveu ou de ma nièce, je ne savais pas si j'aurais accepté mes sentiments. Elle m'avait en quelque sorte trahie.

— Bora, même si tu ne peux le voir aujourd'hui, sache que je l'ai fait pour une bonne raison.

— Une bonne raison tu me dis ? Quelle bonne raison pourrait justifier un meurtre ?

— Ce bébé était malade. J'ai découvert qu'il était atteint de la maladie de Morquio. Un trouble osseux. Sa vie aurait été terriblement compliquée, elle n'aurait pas été belle. Si tu ne me crois pas, demande au docteur Ko Woorim de faire des tests. Il saura trouver la réponse. S'il s'avère que j'avais tort, j'accepterais de renoncer à toi, Bora. Mais si ce n'est pas le cas, Bora, j'attendrais des excuses de ta part ou nous n'avancerons jamais.

— Bien, tu vas devoir me laisser un moment seule, Lisa. J'ai un tas de choses à régler et je ne veux pas que tu sois dans les parages, tu pourrais me gêner.

Elle sortit de la chambre sans m'accorder un regard. Cela me fit mal, un pincement au cœur, comme si quelque part, j'avais espéré qu'elle me retiendrait. Mais elle n'était pas comme tout le monde, sa singularité et son honnêteté étaient ses plus grandes qualités. Sa franchise et son amour propre la mèneraient à sa perte.

Je devais réfléchir à la suite, qu'aillais-je faire ? Il fallait que j'aille trouver monsieur Ko pour confirmer les dires de Lisa.

J'arpentais les couloirs à une vitesse que je ne me connaissais pas, je ne savais même pas s'il était resté ici. Je questionnai chaque personne qui croisait mon chemin, mais personne ne me répondit par la positive, personne ne saurait prédire sa position. Je perdis presque espoir mais j'aperçus alors au loin, une carrure masculine. C'était lui.

— Monsieur Ko, ravie de vous savoir encore ici. Je suis encore une fois navrée de la tournure des événements de l'autre fois mais, puis-je vous demander un service ?

— Vous avez de la chance, majesté. Si vous m'aviez raté à une minute je ne serais plus dans le château. Que voulez-vous donc ?

— Savoir la cause de la mort du bébé de Yuna.

— Elle m'avait appelé au déclenchement de sa fausse couche. J'ai rapidement vu que son bébé ne serait pas en parfaite santé à la naissance. Et apparemment votre femme aurait prédit cela. Objectivement, je ne sais pas si elle a eu raison de le faire. Mais subjectivement, elle avait une petite sœur, porteuse de ce même syndrome, qui était partie à l'âge de huit ans après avoir enduré tout plein de douleurs inimaginables. Je pense sincèrement qu'elle a voulu bien faire en causant un mal avant que cela ne prenne trop d'ampleur. Ne lui en voulez pas.

— Bien, merci beaucoup monsieur Ko. Je vous présente encore une fois toutes mes excuses pour l'autre fois. Je ne vous retiens pas davantage, vous avez fort à faire et moi aussi. Faites bon voyage, au plaisir de vous revoir.

— Merci bien ma reine.

— Je ne suis plus reine, appelez-moi simplement Bora.

— Si vous m'appelez Woorim.

— Bien à la prochaine, Woorim !

Je le regardais s'éloigner progressivement jusqu'à disparaître au-delà des portes du château. Je pris pour mission de retrouver Yuna et finaliser tout cela. Lisa attendrait, mais pas éternellement, je le savais.

Cette fois, j'entrais sans prévenir. Ils étaient dans la position dans laquelle je les avais laissés tout à l'heure. Cependant le ménage avait été fait et l'aération de la chambre aussi.

Ces deux-là jouissaient d'un amour véritable. J'avais appris au fil des ans que la reine ne pouvait assouvir chacun de ses caprices. J'avais le pouvoir mais je voulais l'amour. Maintenant que j'avais l'amour, je me rendais compte qu'il ne correspondait pas à mon statut de reine. De plus, je voulais ma liberté, vivre une vie de bohème.

— Yuna, je suis contente de voir que tu vas mieux. Ton enfant n'est peut-être plus là, mais dis-toi que ce sera l'étoile la plus brillante qui veillera sur vous tous les soirs. Tu n'as rien à craindre, il est en sécurité.

— Merci Bora. Woorim m'a tout dit. Je suis reconnaissante envers Lisa d'avoir ainsi agi pour m'épargner des douleurs même si elle aurait pu m'en parler avant. Je ne lui en veux pas, jamais, surtout si elle est capable de te rendre ainsi heureuse.

— Yuna, c'est moi qui te remercie. Pour ta maturité, ton intelligence et ta beauté d'âme. Aujourd'hui tu as tout ce que je pensais ne jamais mériter et tu peux avoir tout ce à quoi rêve n'importe quel humain. Mais ton humilité et ta sagesse t'empêche de t'approprier ce pouvoir à toi seule. Tu as prouvé qu'à toi seule, tu vaudrais mille fois mieux que moi, même si j'ai fait de mon mieux.

— A ce propos, Bora, je n'ai pas trouvé d'autres gens avec qui partager le tronc du pouvoir. Alors ce ne sera que Jungkook et moi. Il ne vient certes pas d'une noble famille, mais il s'agit de mon cas aussi. Pour ce qui est du reste, le peuple désignera par un vote démocratique huit autres membres du conseil et ainsi nous serons dix voix au travers desquelles le peuple pourra s'exprimer. Lisa et toi pouvez avoir le cœur tranquille et partir dès demain si l'idée vous tente.

— Demain ? Si tôt ? Je pensais à rester au moins quelques jours pour que tu sois correctement installée au pouvoir. J'ai parlé avec Taehyung, il t'aidera. Je sais que c'est un bon diplomate et il a mérité sa place à tes côtés.

— Egoïstement, je voudrais te garder auprès de moi pour toujours, Bora. Mais je sais que ce n'est pas possible. Alors je ferai sans. Nos soirées vont me manquer, certes. Mais te savoir heureuse, même à l'autre du monde me conforte dans l'idée que c'est la meilleure décision. Je n'ai jamais été si excitée à l'idée de changer de vie. Bora, je te dois ma vie. Je ne vais pas te cacher que Taehyung n'est pas quelqu'un que je porte particulièrement dans mon cœur mais s'il te convient, je croirais en ton jugement.

— Je ne pourrais jamais te dire adieu, tu es ma petite sœur. Nous reviendrons ici de temps à autres pour te voir, tu n'as pas à t'en faire. Et s'il ne se tient pas à carreaux, je lui donnerai moi-même la fessée.

— Alors tout est parfait. Tu as promis que tu reviendrais me voir de temps à autre, alors tout est bon.

Je la pris longuement dans mes bras. Je me souvenais encore du jour où j'avais posé les yeux sur elle, j'avais ressenti l'obligation de la prendre sous mon aile. Et depuis, elle était ma petite sœur. Je n'avais pas savouré chacun des instants que j'avais passé avec elle parce que je ne connaissais pas encore la valeur des choses, aussi simples soient-elles. Maintenant qu'elle se trouvait contre ma poitrine, je sentais qu'elle avait grandi. Qu'elle n'était plus l'adolescente perdue mais qu'elle avait mûri et était devenue adulte. Une femme belle et forte.

Je partais sur un coup de tête mais il le fallait, je devais partir en quête de mon identité et qui savait, peut être que quand ce soir arrivera, je rentrerais à la maison, où qu'elle se trouve.

Je laissais des gens derrière moi, certes, mais je savais que ce n'était qu'un simple "au revoir". Plus vite je partirais, plus vite je reviendrais.

— Bon, mon p'tit sucre d'orge, il faut que je règle un malentendu avec Lisa et si tout se passe bien, nous partirons demain dès l'aube.

— Eh bien je suppose qu'on ne se reverra qu'à ton retour. Prends soin de toi Bora. Et si tu reviens seule sans Lisa, je te préviens je vous botterais le cul toutes les deux. Et je ne rigole pas.

— Je sais, allez amuse toi bien à la tête de ce royaume. N'oublie jamais que la vie est un plateau de jeu géant sur lequel celui qui contrôle maîtrise les règles et sait comment les détourner à son avantage.

Après quelques échanges, nous nous quittâmes enfin. J'avais senti qu'elle avait besoin d'un peu de temps avec son amant et moi, je devais rejoindre la mienne. Je rejoignis ma chambre d'un pas pressé et une déception s'installa en moi lorsque je ne la vis pas. Je fis un tour dans la salle de bain mais elle attendait définitivement que je fasse le premier pas. Elle savait que si je lui présentais mes excuses de mon plein gré, ce serait sincère.

Je me dirigeais alors vers sa chambre en trainant légèrement des pieds. Je n'avais jamais autant pris sur moi, ça devait faire partie de mon caractère capricieux. Mais je savais qu'en faisant ce geste pour elle, cela prendrait de la valeur à ses yeux et elle ne pourrait dénier ma sincérité dans celui-ci.

J'hésitais entre entrer en trombes et frapper pour qu'elle m'ouvre d'elle-même. Mais faire un pas vers elle et attendre le sien me semblait être la solution la plus judicieuse. Je levais alors le poing et l'abatis trois fois sur le bois dur de la porte.

— Lisa, c'est Bora. Ouvre-moi s'il te plaît.

— Entre, je t'attendais.

Sa chambre était parfaitement rangée, des sacs attendaient sur le côté puisqu'elle savait dans les deux cas qu'elle partirait. Avec ou sans moi. Elle était assise en plein milieu de son lit, les jambes croisées avec un livre qu'elle avait bientôt fini de lire. Ses magnifiques cheveux étaient relevés en un chignon et son corps vêtu d'un pyjama vert émeraude.

Elle me fixait dans le blanc des yeux tandis que je faisais la même chose en retour. Le silence pesait mais son regard me signifiait que je devais démarrer cette conversation. Je me préparais mentalement à le faire parce que je savais que de nous deux, j'étais celle qui était en tort.

— Lisa, j-je suis désolée pour tout ce que je t'ai dit cet après-midi. Pour ta famille et p-pour Yuna.

— Je sais que tu l'es, bien sûr que tu l'es.

— Je m'en veux de ne pas t'avoir crue dès le début. Mais sache que je t'en veux tout de même de ne pas m'en avoir parlé avant. Il s'agissait de la vie d'un enfant et pas le tien. Tu n'es plus seule maintenant, Lisa, et je veux que tu le comprennes. Je ne passerai pas l'éponge sur cette affaire mais je sais qu'il faut des erreurs pour apprendre, ce qui nous laisse un tas d'erreurs à faire pour parfaire cet apprentissage.

Je ressentais ce lien quasi indéfectible entre nous. Comme un élastique nous nous forçait à nous rapprochait à chaque fois que nous nous séparions, je lui revenais comme je lui reviendrais à chaque fois.

Maintenant que j'étais soulagée, je pus m'en aller prendre ma douche enfin. Il s'agissait toujours d'un petit rituel à chaque fois, l'étape de la purification avant celle du renouvellement. J'étais ainsi prête à démarrer une nouvelle journée chaque fois que je sortais de la salle de bain.

Nous tombâmes comme des masses, la journée nous ayant arraché l'intégralité de notre énergie. Alors nous profitions de cette dernière nuit dans un lit confortable avant de devoir improviser pour trouver de quoi dormir chaque nuit. Mais c'était ce que nous voulions. Ne pas nous contenter de nos acquis, et profiter à 100% de la vie.

A l'aube, nous partîmes. Vêtues de nos sacs à dos et de nos tenues confortables. Quelques sous en poche, nous nous en allâmes.

Une fois que le portail fut traversé, je jetai un regard derrière moi pour voir une dernière fois ce que j'y laissais.

L'ancienne page se fermait tandis que j'en entamais déjà une nouvelle. Elle serait plus mouvementée mais aussi bien moins monotone. Je savais que même si les lignes n'étaient pas droites, qu'elles connaissaient quelques hauts et bas, ce n'était pas grave puisque je l'aurais choisi.

Ce fut la première phrase que j'inscrivis sur mon carnet, ce carnet qui marquait le début d'une nouvelle ère dans mon histoire. Dans celle que nous commencions à deux et que nous finirions de la même manière.

"Une reine n'a pas besoin d'une couronne pour régner tout comme la couronne n'a pas besoin d'une seule reine pour gouverner son propre royaume."

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